CLASSROOM Y2 V7 : CHAPITRE 3

Lettre d’amour

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Traduction : Thony
Correction : Kenshiro & Raitei
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Nous étions le mardi 9 novembre. Ce matin-là, je rencontrai Horikita dans l’ascenseur en allant en cours. Après avoir échangé un rapide bonjour, nous quittâmes le hall et sortîmes ensemble du dortoir.

Horikita — Tu es au courant ? À la veille du festival culturel, les élèves de terminale vont effectuer une répétition.

Moi — Oui, j’ai entendu dire qu’ils allaient faire participer des seconde et des première.

C’était l’information qui fut affichée sur le panneau central de l’établissement la veille au soir pour informer toutes les classes. Cela venait du président du Conseil des élèves, Miyabi Nagumo. C’était probablement ce qu’il voulait dire la semaine dernière, lorsqu’il avait déclaré que le Conseil allait faire une proposition intéressante. Nous étions libres de faire répéter ce que nous voulions car en effet c’était surtout pour faire des ajustements pour le jour J.

Horikita — Le Conseil des élèves a déjà reçu des lettres de participation de nombreuses classes. Je suis persuadée qu’elles cherchent à être évaluées par un œil extérieur.

Moi — Il y a donc beaucoup d’intéressés. Je n’aurais pas cru.

Horikita — Je pense que l’évènement ouvert de la terminale A a beaucoup joué pour les influencer.

La terminale A avait montré toute leur performance, leur permettant d’apporter des modifications. Un certain nombre d’élèves voulaient probablement faire de même et également oublier le côté compétitif du festival.

Horikita — Je suis sûre que la décision du conseil des élèves de prendre en charge les consommables et autres dépenses a également constitué une incitation supplémentaire.

Même s’il ne s’agissait que d’une préouverture, cela coûtait quand même de l’argent. Un budget distinct devrait être établi pour le festival, alors le financement devait probablement provenir de fonds privés. Il n’aurait pas été surprenant que certaines classes renoncent à l’événement si elles devaient payer de leur poche une préouverture mais c’était exactement pour cela que le Conseil des élèves était là. Si ce dernier couvrait les frais, ils n’auraient aucune raison de refuser. Il n’y avait qu’à apporter le reçu pour se faire rembourser dans une limite de plusieurs dizaines de milliers de points pour chaque classe.

Horikita — Nous allons participer, n’est-ce pas ?

Moi — Bien sûr. Tout le monde est au courant pour notre Maid Café. Ça ne pourra pas faire de mal.

Horikita — Et puis il y a Ryuuen-kun dans la compétition.  

Horikita me fixa du regard. Je répondis en hochant légèrement la tête.

Horikita — Voyons ce qu’il nous réserve.

Une très bonne occasion de voir comment Ryuuen allait développer le concept.

Moi — Tu ne penses pas que l’on va perdre, n’est-ce pas ?

Horikita — Je ne sais pas.

Moi — D’habitude tu es confiante.

Horikita — J’essaye juste de mon mieux.

Moi — Pourtant tu as l’habitude d’agir dans un contexte menaçant.

Horikita avait peur de perdre, même si elle était parfaitement préparée.

Horikita — Peut-être que la défaite me fait peur.

La défaite ne signifiait pas forcément la perte de points de classe. Vouloir éviter de stagner était naturel dans un élan pour atteindre la classe A.

Moi — L’année dernière, tu n’aurais pas été aussi anxieuse.

Horikita — C’était seulement parce que j’agissais sans analyser mon environnement.

Horikita avait élargi un peu son horizon. C’est pourquoi elle ne pouvait s’empêcher de penser à perdre.

Horikita — En tant que leader de la classe, ça ne fait pas de mal d’être préparé à la défaite et à la victoire. Mais je suis également un pion parmi d’autres, faisant des déclarations irresponsables.

Eh bien, c’était le défaut qui freinait la force de Horikita de ne pas pouvoir rejeter facilement cette affirmation. Sakayanagi ou Ryuuen n’auraient même pas eu l’idée d’accepter la chose tandis qu’Ichinose se serait focalisée sur ce qui était important.

Moi — Je sais, mais… Parfois.

Je tapotai le dos de Horikita avec la paume de la main.

Horikita — Qu’est-ce que tu fais ?

Moi — Il est trop tôt pour s’habituer à gagner.

Horikita — Ce n’est-ce pas ce que…

Elle avait l’air un peu en colère mais elle se rendit aussi compte que j’avais mis le doigt sur le problème

Horikita — Je n’ai pas été l’artisan de toutes nos victoires.

L’île déserte, le consensus, il est vrai que ses propres compétences n’avaient pas été suffisantes pour venir à bout de ces examens.

Horikita — Qu’est-ce qu’il y a ?

Moi — Comment ça ?

Horikita — J’essaie de ne pas prendre tout ce que tu dis au sérieux mais tu as été très coopératif ces derniers temps, ce qui est encore plus agaçant. Je ne sais pas comment interpréter la chose.

Moi — Alors je ne coopérerai plus à l’avenir, sache-le.

J’essayai de m’éloigner rapidement, mais elle m’attrapa par les épaules.

Horikita — C’est impossible.

Elle m’attrapa immédiatement et me tira en arrière.

Horikita — Je voudrais m’arrêter à l’épicerie avant d’aller en classe. Veux-tu m’accompagner ?

Moi — À l’épicerie ?

Horikita — Je veux utiliser cette pause déjeuner à bon escient pour préparer cette veille de festival.

Moi — Je veux bien me joindre à toi.

Passer quelques minutes dans une épicerie n’était pas un problème. Je suivis Horikita et nous entrâmes à l’intérieur. Là, je rencontrai Kôenji, qui était sur le point de payer ses articles. Il n’y avait que deux choses : une bouteille de lait de soja et une salade avec des morceaux de poulet.

C’était un déjeuner très léger alors je me demandais si ça allait lui suffire. Comme on voyait rarement Kôenji manger, sa vie privée restait un mystère.

Horikita — Bonjour Kôenji-kun.

Malgré l’appel de Horikita, Kôenji se contenta d’esquisser un simple sourire.

Moi — J’ai entendu dire que Kôenji était le seul qui n’avait aucune tâche.

Horikita — Il m’a dit qu’il ne ferait rien. Autant le laisser tranquille.

Horikita ne sembla pas particulièrement inquiète non plus et se dirigea vers la caisse pour payer son petit repas. Refusant le sac en plastique proposé par le vendeur, elle mit son déjeuner dans le sac.

Horikita — Tu n’as rien à acheter ?

Moi — Ils n’ont rien dont j’ai besoin, et je n’ai pas beaucoup de points.

Le mois de novembre avait un peu vidé mon portefeuille mais la situation allait se stabiliser bientôt.

Horikita — Tu ne payes plus de points à Kushida-san, n’est-ce pas ?

Moi — Pas vraiment, disons qu’elle ne m’a rien réclamé.

Horikita — Et si elle le fait, tu lui donneras quand même ?

Moi — Tu penses sincèrement qu’elle le fera ?

Horikita marmonna cela avec dégoût

Horikita — Non, je ne pense pas. Et puis je ne veux pas qu’elle te dérange à nouveau.

Aussi atteinte qu’elle soit, Kushida subissait un profond changement. Et il fallait que cela aille dans le sens de la croissance.

Je devais y croire.

1

Aujourd’hui après les cours, Ichihashi s’approcha de Horikita non sans une certaine hésitation. Son siège était situé en face du sien.

Ichihashi — Hum, Horikita-san… Je peux avoir une minute ?

Elle parlait rarement à Horikita alors on pouvait supposer qu’elle voulait lui parler du festival. Cependant, l’objet dans sa main impliquait quelque chose de différent.

Horikita — Qu’est-ce que c’est ?

Ichihashi — En fait, j’ai une faveur à te demander. Tu dois te rendre dans le bureau du Conseil plus tard dans la journée, n’est-ce pas ?

Horikita — Oui. Comme je l’ai stipulé à tout le monde, j’ai du travail qui m’attend alors je ne pourrai pas vous aider pour les préparatifs.

Ichihashi — Ouais, je sais mais….tu peux accepter ça ?

Avec ces mots, elle présenta une lettre. Un autocollant en forme de cœur scellait l’enveloppe.

Horikita — Qu’est-ce que c’est ?

Ichihashi — C’est une lettre d’amour…

Horikita — Hein ?

Pas étonnant qu’elle eut l’air perplexe, incapable de saisir la chose sur le coup. Même si nous vivions à une époque où la diversité était de mise, il était compréhensible qu’une lettre d’amour d’une fille à une autre soit perturbante.

Ichihashi — Ce n’est pas pour toi Horikita-san. En fait, une de mes amies m’a demandé de donner cette lettre à Miyabi Nagumo, le président du Conseil des élèves.

Horikita — Au président ? Mais n’est-ce pas à elle de le faire ?

Il était évident qu’il valait mieux se faire face pour ce genre de choses.

Ichihashi — Elle était trop nerveuse pour ça. Mais je n’ai pas non plus le courage de le donner au président du Conseil en personne.

Nagumo était une personne plus sociable que l’ancien président, Manabu Horikita, mais il restait un senpai et un représentant de cette école. Il était difficile de l’approcher. Voilà pourquoi Horikita était plus à même à le faire

Horikita — Je comprends la situation, mais…

Ichihashi — S’il te plaît. Elle s’est démenée pour ça jusqu’à maintenant et elle a enfin trouvé le courage de le faire.

La Horikita de l’an dernier aurait peut-être refusé cette demande mais nouer des relations avec ses pairs était important pour elle maintenant. Il fallait également réparer les dégâts de l’examen du consensus.

Horikita — Je vais faire ce que je peux alors. Ça te va ?

Ichihashi — Oui…

Ichihashi répondit cela mais il y semblait y avoir encore autre chose.

Ichihashi — Il y a encore un problème ?

Horikita — Hum, bien, il y a un petit problème avec cette lettre d’amour.

En recevant la lettre, Horikita remarqua qu’il n’y avait pas de nom écrit au recto ou au verso. Cela signifiait que l’expéditeur était inconnu jusqu’à ce qu’elle regarde le contenu.

Horikita — Puis-je supposer que le nom est à l’intérieur ?

Ichihashi — Je ne sais pas… En temps normal oui mais peut-être que cette fille était seulement heureuse de lui montrer ses sentiments.

Autrement dit, ni le donneur ni le receveur ne connaissaient l’auteur.

Horikita — C’est un peu difficile à accepter. J’expliquerai la chose quand je la lui donnerai mais si je ne fais pas attention, il pourrait penser que cela vienne de moi.

La probabilité que Nagumo pense que Horikita soit à l’origine de la lettre n’était pas nulle. Il pouvait penser qu’elle n’assumait pas.

Ichihashi — Sinon tu ne peux pas demander à un mec du Conseil par exemple ? J’aimerais que ça se fasse aujourd’hui si possible.

Horikita — Facile à dire.

Malgré son inquiétude, Horikita réfléchit un moment et hocha la tête.

Horikita — Je ferai ce que je peux, mais il n’y a aucune garantie que je puisse la lui donner, ok ?

Ichihashi — Merci beaucoup d’avoir accepté. Je suis sûre qu’elle sera très heureuse.

Bien qu’à contrecœur, Horikita accepta de remettre cette lettre d’amour à Nagumo.

Elle aurait pu demander l’identité de la personne lui ayant donné la lettre, mais Horikita n’était pas intéressée et ne chercha pas à en savoir plus.

2

(Horikita)

À cause de cette demande inattendue, mes pas étaient un peu… plus lourds, pour ne pas dire tout à fait lourds même.

Moi — Elle aurait pu lui donner elle-même…

C’était une erreur d’accepter. Comment pouvais-je, moi, une étrangère complète dans cette affaire, avoir une telle tâche ? Je devais revenir sur mes pas et dire à Ichihashi-san de la lui donner en personne.

Moi — C’est la meilleure chose à faire.

Lorsque cette idée me traversa l’esprit, je me rappelai soudain la fois où j’avais tenté de donner une lettre à mon frère alors qu’il avait décidé d’aller au lycée. J’avais été stupide dans le passé, ne réalisant pas qu’il avait été froid avec moi, voulant désespérément revenir au bon vieux temps où nous étions proches. Je m’étais dit que si je ne pouvais pas lui parler face à face alors je pouvais exprimer mes sentiments dans une lettre. Mais la transmission de mes pensées à l’écrit n’était pas aussi fluide que dans ma tête. Pendant des jours et des jours je réfléchissais et me posais des questions, écrivant et effaçant sans relâche. Comment pouvais-je transmettre mes sentiments ? Comment pouvais-je rendre mon frère heureux ? Je luttais avec le fait d’écrire. Et à la fin… je n’avais pas pu la lui donner. Mon frère avait maintenant quitté cet établissement et je n’avais plus aucun moyen de le contacter.

Moi — Je me demande ce qu’est devenue cette lettre.

En fouillant dans ma mémoire, je me souvins l’avoir mise dans le tiroir du bureau de mon frère.

Moi — Et si mon frère en rentrant tombait sur elle ?

Je m’arrêtai dans le couloir et sentis mon rythme cardiaque s’accélérer soudainement. S’il voyait une telle lettre maintenant, il se moquerait de moi.

Moi — Il faut que j’oublie.

Même si j’étais nerveuse, tout ce que je pouvais faire était espérer qu’il ne la trouve pas. Je décidai de joindre les mains après m’être souvenu de mon frère qui était dos à moi et face à la fenêtre.

Moi — C’est vrai.

Pas facile d’écrire une lettre à quelqu’un que l’on aime et encore moins la remettre directement. Même aujourd’hui, si on me demandait si j’étais capable de lui écrire une lettre, j’aurais du mal à répondre. Je ne sais pas de qui elle provenait ni d’où elle venait mais elle s’adressait au président du Conseil, Nagumo Miyabi. Je pouvais comprendre la timidité de la personne alors il fallait maintenant trouver un moyen de la lui donner sans qu’il se fasse de fausses idées. Quand j’ouvris la porte, tous les membres du Conseil des élèves étaient présents hormis le président. Il y avait trois garçons, Yagami-kun et Aga-kun de seconde et Kiriyama-senpai, le vice-président du Conseil en terminale.

Cependant la mission que j’avais à leur confier n’était pas simple car elle ne concernait pas le Conseil. J’étais tout de même relativement proche de Yagami-kun vu que je lui parlais régulièrement. Je savais que je profitais de ma position de senpai mais je ne pouvais plus fuir. Yagami-kun discutait sur sa chaise avec Ichinose-san tandis que je sortais la lettre d’amour de mon porte-documents, espérant me débarrasser rapidement de ce problème gênant. Mais juste à ce moment-là, le président du Conseil fit son apparition.

Nagumo — La réunion commence. Veuillez tous vous asseoir.

Il eut une voix pesante lorsqu’il apparut. Je sentis la tension dans l’air et remis la main dans mon sac. Ce n’était clairement pas le bon moment.

Nagumo — Ichinose, si tu as quelque chose à dire, dis-le !

Ichinose — Toutes les classes participeront à la répétition de la veille.

Kiriyama — Ça a été décidé en presque une demi-journée ?  Tu as vu juste mais j’aurais aimé que nous soyons informés plus tôt.

Kiriyama-senpai, le vice-président, fit un commentaire piquant.

Nagumo — C’était juste une idée comme ça. Je pensais que ça rendrait nos kohais heureux.

Le président Nagumo répondit sans présenter d’excuses particulières. Une telle scène lors des réunions du Conseil devenait régulière. En fait chaque chose commençait par une idée de ce dernier. Parfois cela venait en réunion et parfois derrière notre dos. Il y eut un silence soudain. Le président avait les bras croisés et les yeux fermés rendant évident qu’il retenait sa colère.

Ichinose — Qu’est-ce qu’il y a, Nagumo-senpai… ?

Nagumo — Écoutez, j’ai entendu une étrange rumeur.

Ichinose — Rumeur… ?

Nagumo — Ce n’est pas prouvé mais un certain Kishi a dit que je misais beaucoup d’argent pour faire expulser certains élèves.

Ichinose — Quoi ? Qu’est-ce que tu veux dire ?

Pas étonnant qu’Ichinose-san ait demandé à nouveau. Moi aussi, je n’avais pas pu saisir immédiatement le sens des propos du président Nagumo.

Kiriyama — Qui a dit ces bêtises ?

Nagumo — Quelqu’un de ta classe, Kiriyama.

Le président lança de tels mots au vice-président Kiriyama les yeux fermés.

Kiriyama — De ma classe ?

Nagumo — C’est juste une rumeur de mes amis, mais il ne serait pas étrange que tu sois au courant.

Kiriyama — Désolé mais je n’en savais rien. En plus je ne comprends pas l’intérêt de faire ça.

En général les élèves utilisaient de grosses sommes d’argent pour faire passer quelqu’un en particulier en classe A. Si c’était ce dont il parlait, ce n’était certainement pas difficile à comprendre, même pour moi. En particulier pour les élèves de terminale, les chances étaient très faibles, et s’ils étaient invités à rejoindre la classe du président Nagumo, ils devaient montrer patte blanche. Il était possible qu’il ait secrètement offert des points privés à ceux avec qui il entretenait une relation étroite, leur donnant le droit d’intégrer sa classe.

Nagumo — Ce n’est qu’une rumeur mais je ne laisserai rien passer.

En tant que président du Conseil, ces rumeurs pouvaient le nuire d’une manière ou d’une autre. Sa mauvaise humeur était logique.

Nagumo — Le Conseil sera suspendu pendant un certain temps.

Ichinose — Suspendu… ?

Ichinose-san fut surprise par cette proposition inattendue. Le Conseil avait l’habitude de se réunir comme ça une fois par semaine et de discuter.

Les seules exceptions étaient les périodes de test et de certains examens spéciaux. Il était donc inhabituel de suspendre nos activités sans raison.

Nagumo — Nous avons fait le tour du festival culturel de toute manière.

Kiriyama — Tu comptes chercher les coupables ?

Nagumo — Bien sûr, nous allons les débusquer minutieusement. La prochaine réunion aura lieu après le festival.

Nous continuâmes à parler de l’organisation de la veille du festival, et partîmes peu après. Je me levai de ma place et marchai vers Yagami-kun. Sentant peut-être mon approche, il leva les yeux de son carnet, arrêta sa main et la referma. C’était le secrétaire du Conseil, donc il tenait les registres. Les autres élèves avaient quitté la pièce avant moi, ce dont je leur étais reconnaissante. Quand nous étions seuls, je décidai de l’appeler.

Moi — Puis-je te parler ?

Yagami-kun se tourna vers moi et eut l’air un peu surpris.

Moi — Désolée, tu étais encore au milieu de tes notes ?

Yagami — Non, je viens de finir. Ne t’inquiète pas pour ça.

Il posa doucement la main sur son cahier fermé et me sourit.

Yagami — Quelque chose ne va pas, Horikita-senpai ?

Moi — Yagami-kun. Puis-je te demander une petite faveur ?

Yagami — De quoi s’agit-il ?

Moi — Je veux que tu donnes ça au président du Conseil. C’est une lettre d’amour.

Je sortis la lettre d’amour et la présentai à Yagami.

Yagami — C’est très rare de nos jours. La plupart du temps, cela semble se faire par le biais d’un chat ou d’un appel téléphonique….

Quand il la reçut avec un regard surpris, je m’empressai d’ajouter.

Moi — Sache-le tout de même, cela ne vient pas de moi.

Yagami — Je vois. Je pensais que ça venait de toi Horikita-senpai… Ou bien c’est le cas mais tu ne veux pas qu’il le sache ?

Moi — Non. Une fille de ma classe m’a demandé de la lui donner.

Yagami — Il n’y a pas de nom. De qui vient la lettre ? Je lui ferai savoir.

Moi — Je ne peux pas te le dire. Elle ne veut pas qu’on le sache.

Yagami — C’est une lettre d’amour anonyme… ?

Horikita — Elle m’a demandé de la lui transmettre car j’étais membre du Conseil mais le fait qu’elle soit anonyme me dérange car il aurait pu penser que cela venait de moi.

Yagami — En effet et pour être honnête je le pense toujours.

Yagami-kun eut un air amusé mais ce ne fut pas le cas pour moi.

Yagami — Je plaisante. Vu le dégoût sur ton visage, j’ai bien compris.

J’espérais bien que ce soit le cas.

Yagami — En fait, ça aurait été plus facile si tu me l’avais donné avant que le président Nagumo n’arrive.

Horikita — Même si je te l’avais donné, je ne pense pas que tu aurais été capable de la remettre dans cette situation tendue.

Yagami — Oui, c’était inévitable.

Dans ces circonstances, personne ne pouvait parler au président.

Moi — Je m’excuse de te demander ça, mais pourrais-tu la donner dès que possible ? Elle doit penser qu’il va la recevoir aujourd’hui.

Yagami — Dans ce cas, j’irai à son dortoir plus tard.

Yagami regarda attentivement la lettre d’amour en ayant l’air un peu perplexe.

Yagami — Est-ce vraiment une lettre d’amour ?

Moi — Probablement. Elle a dit qu’elle y avait mis tous ses sentiments, mais je ne suis pas trop sûre.

Je ne pouvais pas enlever le sceau pour voir ce qu’il y avait à l’intérieur.

Yagami — Si je lui donnais la chose comme une lettre d’amour et qu’il s’avère que ce n’est pas le cas, je pense que ce serait un manque de respect envers le président du Conseil des élèves.

Moi — C’est bien possible.

Yagami — Je vais être vague en disant que j’ai reçu la lettre de quelqu’un.

Moi — Oui, je pense que c’est une bonne idée. Merci.

Je le remerciai pour sa compréhension.

Moi — D’ailleurs même à notre époque, il est difficile pour un secrétaire d’écrire les notes à la main.

Il n’y avait rien de mal à utiliser un ordinateur pour le travail de nos jours.

Yagami — La tradition est également importante. Il semble que des notes soient conservées dans les dossiers depuis la création de l’établissement. Passer soudainement au numérique, créerait un sentiment d’inconfort.

Yagami-kun se retourna et regarda l’étagère. Certes, il existait de nombreux documents qui révélaient l’histoire du Conseil des élèves mais ce n’était pas forcément une mauvaise chose si les dossiers se numérisaient. Mais Yagami-kun souleva un bon point concernant la tradition.

Yagami — J’ai aussi entendu dire qu’il valait mieux avoir des difficultés quand on est élève. Si on s’habitue à la facilité dès le début, on risque de souffrir plus tard.

Yagami réagit de façon un peu plus mature. Il n’avait rien d’un seconde.

Yagami — En ce sens, cette lettre d’amour est similaire.

Il est vrai qu’il n’était pas rare aujourd’hui d’avouer ses sentiments à l’aide d’un téléphone portable. Mais je comprenais que transmettre ses sentiments à travers une lettre avait une autre utilité.

Horikita — Mais le président Nagumo a l’air bien occupé aujourd’hui.

Yagami — Oui. La rumeur sur les paris provenant d’un certain….

Comme s’il se souvenait de quelque chose, Yagami ouvrit son carnet et me le montra. La première page qui fut feuilletée datait du milieu de l’année dernière. Cela ressemblait à quelque chose qu’un élève de terminale aurait écrit lors de son année de première. Puis l’écriture changea pour des notes plus récentes. Je reconnus instantanément celle de Yagami-kun qui était parfaitement ordonnée ce qui démontrait à quel point il était méticuleux. L’écriture était si soignée qu’il était difficile de croire qu’elle était manuscrite.

Yagami — Voilà, Kishi-senpai. Sais-tu dans quelle classe il est ?

Il me demanda cela avec son expression habituelle en me montrant les comptes-rendus de la réunion. Mais mon cerveau fut entraîné dans un autre monde d’un seul coup. Cette écriture…Elle ressemblait beaucoup à cette lettre qui avait presque disparu de ma mémoire. Était-ce lui qui m’avait laissé cette note pendant l’examen de l’île ? Je retins mon regard, qui était sur le point de se brouiller à cause de l’agitation, et je pris les notes de la réunion de ce jour-là. Je regardai Yagami-kun d’un peu plus près et vis qu’il me regardait toujours avec le même sourire. Ce n’était pas possible… Mais… Non, ce n’était pas possible. Au milieu d’un tourbillon d’émotions, je réfléchis tout en faisant semblant de regarder les notes.

Yagami — Horikita-senpai ?

Moi — Désolée, je ne sais pas, mais tu devrais pouvoir le découvrir rapidement si tu regardes l’OAA.

Yagami — Je vais regarder tout de suite.

Moi — Je suis désolée, mais je viens de me souvenir que je devais faire quelque chose. Je te laisse

Yagami — Ah, oui ? Je comprends.

Je détournai le regard et me retournai rapidement comme si j’allais m’enfuir.

Moi — N’oublie pas pour la lettre ! Encore désolée.

Yagami — Oui, senpai. Merci encore pour tes efforts.

S’il m’avait fixé à ce moment-là, je lui aurais probablement demandé mais au fond je savais que je devais éviter. Je refermai lentement la porte du Conseil et juste avant de le faire complètement, je vis Yagami me sourire, comme s’il me testait ou provoquait. Auquel cas, Il n’aurait pas pris la peine d’ouvrir son carnet pour se révéler. La porte se referma ensuite et s’ensuivit un « clac ».

Cela pouvait aussi être une coïncidence et comme cela faisait un certain temps que je n’avais pas vu cette écriture, ma mémoire était floue. Mais j’étais quand même persuadée que c’était lui. Pourtant cette personne était à mes côtés depuis longtemps et se comportait de manière indifférente à mon égard.

Mais mon hypothèse était tout sauf délirante.

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