CLASSROOM Y2 V5 : CHAPITRE 1

Sur les traces du chaos

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Traduction : Raitei
Correction : Nova
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Les vacances étaient terminées, et le deuxième trimestre de notre année de première allait officiellement commencer aujourd’hui. En considérant nos trois années de lycée, c’était sans aucun doute une période de transition. Je nouai ma cravate et glissai mon bras dans la manche. Je me regardai ensuite dans le miroir, arrangeai mes cheveux et je m’assurai d’avoir une apparence correcte avant de partir. En sortant, je tombai sur Sudou, qui bâillait fortement, et je le saluai alors que nous sortions ensemble du dortoir.

Sudou — Suzune m’a dit que les examens peuvent arriver plus tôt que prévu alors j’me suis tapé une nuit blanche.

Moi — Tu as vraiment étudié alors que c’était ton dernier jour de vac ?

Sudou — Heureusement elle m’a fait un programme adapté. Du coup même un gars comme moi peut avoir un B ou plus dans l’OAA.

Il rêvait un peu mais ce n’était pas impossible de conserver une telle note en capacité académique dans la durée. S’il avait vraiment étudié dur pendant l’été alors c’était un objectif réalisable. Si ça continuait, il deviendrait l’incarnation parfaite de l’expression « un esprit sain dans un corps sain ». Qui plus est, il arrivait beaucoup moins en retard qu’avant et dormait moins en classe.  Même si parfois il était agressif, c’était juste un trait de sa personnalité.

Sudou — Je sais que c’est une question cheloue mais tu penses qu’Ike et Shinohara se sont déjà embrassés ?

Moi — Eh ?

Sudou — C’est cool qu’il ait une meuf mais ça me soule un peu qu’il ait de l’avance sur moi tu vois. En plus, j’ai l’impression qu’il y a une barrière entre nous depuis qu’il sort avec elle.

Moi — Tu ne peux pas lui demander toi-même ? Il te le dira je pense. C’est d’Ike dont on parle.

Sudou — Comment je peux lui demander un truc pareil ? Ok, s’ils se sont pris la main mais s’il me dit qu’ils sont à l’étape supérieure, ma main droite risque de partir toute seule.

Si ça le mettait dans un tel état, c’était effectivement un problème.

Moi — Si quelque chose le rend heureux il te le dira très vite. Comme il ne t’a rien dit, j’imagine qu’ils n’ont pas encore atteint ce stade.

Sudou — Ok mais faut se méfier des mecs amoureux. Je me méfie car j’ai pas d’expérience en amour. D’ailleurs, t’as déjà eu une meuf avant Ayanokôji ? Si c’est le cas, qu’est-ce que ça fait ?

La conversation prit une tournure inattendue. Le « qu’est-ce que ça fait » transparaissait dans son regard intense impossible à ignorer.

Moi — Je n’ai aucun intérêt à te mentir alors je vais être franc. J’ai une petite amie depuis un petit moment. Ma première relation.

Sudou — …T…t’es sérieux ?

Même si j’éludais la question ici, la nouvelle se répandrait bientôt du côté de Kei donc le cacher n’était pas la meilleure idée. Après avoir répondu honnêtement, Sudou se tint la tête et soupira. Puis, soudainement, il saisit mes épaules avec insistance.

Sudou— C’est, c’est c’est c’est c’est c’est elle !?

Moi — Calme-toi. Ce n’est pas celle que tu crois !

Sudou — Vraiment !? C’est vraiment pas Suzune, hein ?

Moi — Oui, ce n’est pas elle.

Sudou — Je, je vois. C’est bon alors. J’ai failli avoir une attaque mec.

Comme s’il transpirait, Sudou s’essuya grossièrement le front avec sa main gauche. Pour exprimer son anxiété, il me montra la sueur de sa paume.

Sudou — C’est qui du coup ?

Moi — C’est…

— Ah ! T’es là !

Sudou reprit son calme lorsque des bruits de pas se firent entendre derrière lui. Après s’être rapprochée, cette personne me lança un regard noir.

— Je voulais que tu m’accompagnes en classe, mais je ne savais pas que t’étais déjà parti !

Kei gonfla ses joues pour montrer son mécontentement.

Moi — On avait prévu d’y aller ensemble ?

Karuizawa — C’est… Eh bien, disons que ça me stresse un peu.

Sudou nous regarda avec surprise car la situation semblait surréaliste.

Sudou — Pourquoi tu t’incrustes, Karuizawa ? On discute entre mecs là alors va voir ailleurs.

Mais il n’avait rien remarqué d’anormal dans notre échange. Il semblait juste surpris par son apparition soudaine. En y réfléchissant, ces deux-là n’avaient pas beaucoup interagi dans le passé. Leur relation n’était ni bonne ni mauvaise… Enfin, disons plutôt qu’elle était mauvaise.

Moi — Kei, tu as bien l’intention de révéler notre relation aujourd’hui ?

Karuizawa — Eh ? Ouais, ouais mais je réfléchissais au timing… Ça me semble pas approprié de l’annoncer le jour de la rentrée. C’est pas simple en vrai de révéler une relation, surtout publiquement.

Moi — Tu l’as quand même dit rapidement à Yôsuke si je ne m’abuse.

Karuizawa — Ça n’a rien à voir.

Sudou — Hey, hey, qu’est-ce que vous… Hein ?!

Sudou était un peu lent, mais vu que je l’avais appelé par son prénom et qu’il suivait notre conversation, il eut un regard stupéfait, s’immobilisant net.

Sudou — Qu… Eh, hé, il se passe quoi là, Ayanokôji ?

Néanmoins, il n’avait pas encore totalement fait le lien. Finalement, c’était une bonne chose que Sudou soit la première personne à être au courant.

Moi — On sort ensemble.

Kei a souri et me donna quelques coups de coude. Elle était probablement heureuse que je le dise à haute voix.

Sudou — HA…AHHHHHHHHH !? Vous…vous foutez de moi là, non ?

Sudou eut une réaction encore plus exagérée que prévu. Il n’y avait pas de camarades dans les alentours mais d’autres élèves furent aussi surpris et tournèrent leur visage.

Moi — Tu es trop bruyant…

Sudou — D…désolé. Mais heu…pourquoi Karuizawa ?

Karuizawa — T’as un souci avec moi ?

Sudou — Non, c’est… ce n’est pas ça, mais… Eh… ?

Confus, il secoua la tête, comme s’il ne pouvait pas l’accepter.

Moi — Qu’est-ce qui ne va pas ? Tu préfères que je sorte avec Horikita ?

Sudou — Jamais !  … Non, ce n’est pas ça… Attends.

Sudou attrapa mon épaule et me chuchota quelque chose à l’oreille.

Sudou — Mec, c’est peut-être pas cool ce que je vais dire mais Karuizawa est sortie avec Hirata et elle a eu de l’expérience de fou au collège non ? Ça te met pas mal à l’aise pour ta première relation ?

C’était l’impression que mes camarades de classe avaient de Karuizawa Kei. En fait, je pensais moi aussi la même chose avant de découvrir son passé.

Karuizawa — Qu’est-ce que vous cachez là ?

Sudou — Non, rien.

Sudou s’éclipsa devant son regard furieux. Il avait dû se sentir coupable.

Sudou — Ayanokôji et Karuizawa ensemble… ? Nah, c’est chaud là. Ça m’a réveillé comme pas possible. Le début du trimestre est déjà ouf.

L’ai-je entendu dire en s’éloignant…

1

Nous arrivâmes dans le bâtiment scolaire, passant à côté d’élèves de TLe qui venaient eux aussi de leurs dortoirs. Mais Sudou ne sembla pas remarquer leur regard persistant, comme ce fut le cas sur le bateau. Bien que cela avait duré tout l’été à chacune de mes sorties, je ne m’y étais pas encore totalement habitué. C’était vraiment oppressant et ça risquait de continuer. Kei se lança rapidement dans une grande conversation avec les filles au sujet de l’été, et Sudou commença à bavarder avec Ike et Hondô, ses amis proches. De mon côté, je discutais un peu avec le groupe Ayanokôji pendant que nous attendions la sonnerie du début des cours. Chabashira arriva peu après et eut un discours semblable à celui du premier trimestre.

Mlle. Chabashira — Ce deuxième trimestre accueillera plusieurs événements de grande importance. Le premier d’entre eux sera le festival sportif. Cela fera office d’examen d’aptitude physique pour le mois d’octobre. Même si les règles seront différentes de celles de l’an passé, les compétences requises resteront les mêmes.

Cela allait ainsi être une source d’anxiété pour les moins sportifs d’entre nous. Des élèves comme Keisei et Airi affichèrent une mine inquiète car en  plus de devoir revivre ce festival, de nouvelles règles allaient être instaurées.

Mlle. Chabashira — En novembre, nous organiserons aussi notre tout premier festival culturel. Les détails seront annoncés une autre fois comme pour le festival sportif mais la planification du festival culturel commencera en septembre.

Le mois de septembre allait principalement être consacré à la préparation du festival sportif. Nous allions ainsi avoir plus d’heures d’E.P.S chaque semaine. Mais il y allait avoir également une heure par semaine pour discuter du festival culturel. La préparation officielle commencerait en octobre, après la fin du festival sportif vu que l’évènement allait se tenir en novembre.

Et, même si on ne savait pas encore si c’était un examen ou non, il y avait aussi notre voyage scolaire qui était prévu.

Mlle. Chabashira — Il y aura aussi les examens de mi-trimestre et les examens finaux entre ces événements.

 Autrement dit, c’était un trimestre chargé qui nous attendait.

Mlle. Chabashira — Je vais d’abord commencer par parler du festival culturel avant de me focaliser sur le festival sportif.

Elle garda ainsi l’évènement le plus important de ce mois pour la fin.

Mlle. Chabashira — Il y aura beaucoup d’invités pour ce festival culturel. Ainsi, vous serez en concurrence avec toutes les autres classes, toutes années confondues, pour le chiffre d’affaires total du festival. Vous pouvez organiser autant d’événements que vous le souhaitez, mais vous aurez un budget. Veuillez regarder l’écran

Festival culturel en bref

Le nombre de points privés que chaque classe de 1ère peut utiliser librement pour les préparatifs est de 5 000 pp/pers (5500 pp pour les 2nde et 4500 pp pour les TLe).

Des fonds supplémentaires seront disponibles en échange de contributions sociales (bénévolat au sein du Conseil, participation active aux clubs, etc). Les détails seront spécifiés plus tard pour chacune des classes.

Les fonds non utilisés seront retirés afin d’éviter que les charges initiales et les fonds supplémentaires n’impactent les ventes finales.

Concernant les gains en point de classe

De la 1e à la 4e place : +100 pc
De la 5e à la 8e place : +50 pc
De la 9e à la 12e place : +0 pc

Il n’y avait donc que du bonus vu qu’aucune pénalité n’était présente pour le bas du classement. Quant aux règles, elles semblaient simples et concises. Il était ainsi logique que l’évènement accueille du public. En dehors de ça, heureusement qu’on nous communiquait les règles à l’avance. Contrairement à un festival sportif où il suffisait seulement de s’entraîner, cet évènement allait demander beaucoup d’organisation.

— On dirait un festival culturel ordinaire

Shinohara semblait soulagée. Logique vu qu’il n’y avait pas de pénalité. Mais nous étions tellement habitués aux attaques sournoises de l’établissement que nous nous demandions inconsciemment s’il n’y avait pas autre chose.

Mlle. Chabashira — Il est important que vous occupiez une bonne zone lors de l’évènement mais cela a un coût. Par exemple, avoir un stand près de la porte principale est la garantie d’avoir beaucoup de passages mais il faudra payer l’établissement en conséquence.

Recevant de nouvelles informations, nous regardâmes tous l’écran qui afficha une carte et une liste d’endroits où installer les stands. Un code pour chaque endroit était constitué du nom de ce dernier et d’un numéro. Par exemple, l’endroit le plus proche de la porte principale mentionné par Chabashira, était indiqué par « PTEPCPLE 1 », et le prix affiché était de 10 000 points. Certains endroits éloignés quant à eux, avec peu de passages, semblaient gratuits. Le budget de notre classe était d’environ 200 000 points, sans tenir compte des fonds supplémentaires alors 10 000 points n’était pas donné quand on y réfléchissait bien. Il ne faisait aucun doute qu’il s’agissait d’un endroit clé.

Mlle. Chabashira — Si deux classes se disputent un même emplacement, il y aura une mise aux enchères. La classe ayant fait la meilleure offre obtiendra le droit d’exploiter l’espace.

Autrement dit, on pouvait dépenser beaucoup de points pour obtenir un bon emplacement mais en sacrifiant grandement le budget. Il restait environ deux mois pour réfléchir à la meilleure stratégie possible pour optimiser nos dépenses.

Mlle. Chabashira — Les événements organisés par chaque classe et les lieux des stands ne seront pas rendus publics avant le jour du festival culturel. Vous devrez tout de même faire attention aux fuites potentielles des élèves. Préparez-vous à être attaqués sans pitié si des informations sont divulguées.

Même si nous mettions en place un super évènement, il y avait une possibilité que les autres classes copient l’idée ou tentent de nous saboter.

Mlle. Chabashira — Pendant le processus de planification, si vous avez besoin de quelque chose qui n’est pas disponible sur le campus, vous pouvez demander l’autorisation de l’apporter depuis l’extérieur. Vous êtes libre d’utiliser le budget comme bon vous semble tant que cela reste dans le respect du règlement.

Certains aspects semblaient nécessiter une enquête plus approfondie, notamment celui-ci.

Mlle. Chabashira — Vous trouverez au-dessus la description et les règles du festival culturel. Les préparatifs et l’installation auront lieu après le festival sportif mais à partir d’aujourd’hui, veuillez utiliser votre temps libre pour négocier les événements que vous souhaitez organiser et la manière dont vous allez allouer votre budget. Plus le temps consacré à la planification du festival culturel est important, mieux vous serez préparés.

2

Après la fin des cours, la plupart des élèves restèrent en classe, les autres se rendant dans leurs clubs respectifs. Il s’agissait, bien sûr, des premières discussions pour le festival culturel de novembre. Certains de mes camarades de classe devraient avoir l’expérience des festivals culturels au collège. Je n’avais pas beaucoup d’informations à partager, alors je me contentai d’écouter, comme d’habitude.

— Tout d’abord, faisons une liste rapide des événements que nous pouvons organiser.

Yôsuke, qui avait obtenu la permission d’utiliser l’écran de la classe, commença à tapoter des choses.

Hirata — Dans les festivals culturels, il s’agit généralement de restauration, de maisons hantées, et ce genre de choses.

Restauration, maisons hantées, labyrinthes, cafés, spectacles vivants, pièces de théâtre, etc. Ces choix logiques furent énumérés les uns après les autres.

Hirata — L’événement aura lieu de 10h00 à 15h00. Si on propose de la nourriture, cela plaira aux invités qui sont des adultes. Mais la concurrence sera rude et les coûts ne seront pas fixes contrairement à des évènements de type maison hantée ou labyrinthe.

Apparemment, le matériel musical ou les choses du genre pouvaient être loués moyennant un certain montant mais c’était « premiers arrivés, premiers servis » au vu de la disponibilité limitée. Et puis il fallait aussi avoir des élèves compétents en la matière.

Hirata — Nous avons 39 élèves dans notre classe. Cela signifie que notre budget actuel est de 195 000 points ce qui n’est pas fou. Du coup, difficile de savoir si on peut se lancer dans la restauration.

 —  Puis-je faire une proposition ?

Hirata — Je suis bien entendu ouvert aux suggestions, Horikita-san.

Horikita — Comme l’a dit Hirata-kun, nous avons un budget assez limité pour ce festival. Mais la théorie ne nous avancera pas beaucoup. Supposons que nous ouvrions un stand de takoyaki, quels ingrédients, quelles compétences et quelles autres choses sont nécessaires ? Il faudrait décider de quelque chose et ensuite de jauger la faisabilité avec nos points privés en expérimentant la chose.

De nombreux élèves avaient accepté et compris cette proposition. En effet, il était important d’essayer ce que nous voulions faire, peu importe la thématique. Bien sûr, il y avait un risque pour nous de payer de notre poche, mais si nous pouvions regagner ces points plus tard à coup de points de classe, cela pouvait être rentable.

Matsushita — Je ne dis pas que c’est une mauvaise proposition, mais il y aura forcément des gens qui refuseront de contribuer s’ils doivent payer de leur poche.

Matsushita avait peur que certains élèves ne contribuent pas du tout à la préparation du festival culturel.

Horikita — Il faut les ignorer car le temps est précieux. Mais je comprends qu’il ne faut pas non plus ignorer les efforts de ceux qui auront donné des idées. Si votre thématique est adoptée et que vous participez activement à sa mise en œuvre alors vous serez récompensés.

Hirata — C’est une bonne idée.

Horikita — Nous pouvons discuter du détail des récompenses plus tard mais disons que si nous obtenons 100 points de classe grâce au festival culturel, nous gagnerons 390 000 pp supplémentaires chaque mois au total. Nous pourrons ainsi les redistribuer équitablement entre les participants actifs et les collaborateurs. J’imagine que vous n’y voyez aucun inconvénient ?

Supposons que nous organisions cinq événements. Cela représenterait 78 000 points par personne. Si le nombre de participants actifs et de collaborateurs était tel que les bénéfices étaient inexistants après répartition, nous pourrions les étaler sur deux ou trois mois. De cette façon, les élèves qui avaient participé activement au festival culturel auraient la priorité sur le retour sur investissement et les collaborateurs, moins actifs, pouvaient profiter un peu plus tard. Mais surtout, avec l’augmentation potentielle des points de classe, personne ne s’opposerait à ce plan.

Horikita — De plus, pour éviter que nos idées ne soient volées par d’autres classes, nous devons faire en sorte qu’aucune information ne fuite. N’oubliez pas de faire très attention à ce que vous dites sur le campus que ce soit dans les couloirs, les dortoirs ou au centre commercial Keyaki.

Garder tout cela complètement secret pendant ces deux mois de préparation était extrêmement important. Les discussions se poursuivirent en demandant à Horikita ou Yôsuke de récolter les propositions afin de vérifier leur faisabilité. La discussion allait ainsi continuer de plus belle.

3

Deux semaines ordinaires passèrent depuis le début du deuxième trimestre. Les préparatifs des deux festivals se déroulèrent simultanément en parallèle des cours et chaque jour passé était précieux. Étonnamment, notre relation ne s’était pas ébruitée plus que ça du côté de Sudou car personne ne semblait être au courant. Puis lors de la mi-septembre, après les cours, le mercredi de la troisième semaine exactement, j’aperçus une personne depuis le fond de la classe qui s’approcha de Horikita de manière inattendue. Elle venait du centre du premier rang.

 — Hé, Horikita-san. Je peux prendre un peu de ton temps après, si tu es dispo ?

Cette personne qui s’exprima avec un peu d’hésitation était Satô. Le genre de fille qui n’avait que peu d’interactions avec Horikita.

Horikita — Je dois me rendre dans le bureau du Conseil dans une heure mais sinon je reste disponible. Pourquoi veux-tu me voir ?

Même si Horikita n’avait pas l’air plus surprise que ça, je ne pensais pas que Satô avait beaucoup discuté avec elle. Après avoir reçu une réponse étonnamment positive, sa voix se calma un peu.

Satô — J’ai beaucoup réfléchi aux événements pour le festival culturel. Tu as dit qu’on pouvait te proposer des idées, n’est-ce pas ?

Horikita — Oui. Toutes les propositions sont les bienvenues.

Satô — Alors laisse-moi te dire que j’ai une idée sur une thématique qui nous permettra de gagner ce festival culturel.

Même si elle semblait confiante, Horikita ne se laissait pas facilement impressionnée. Logique vu que durant ces dix derniers jours, de nombreux élèves l’avaient approchée.

En effet, toute idée adoptée était synonyme de récompense alors beaucoup tentaient leur chance. Les suggestions allaient des plus classiques aux plus originales. Cependant, le dénominateur commun était que Horikita n’acceptait pas les suggestions d’événements en surface. Le moment où elle avait stipulé que les contributeurs d’une thématique adoptée étaient récompensés, Hondô avait immédiatement suggéré de vendre des poulets frits sous prétexte qu’ils étaient délicieux. Mais elle rejeta la proposition, prétextant qu’il fallait un plan d’action concret derrière. Hondô n’avait pas abandonné, et le lendemain, il avait soumis un plan pour faire du poulet frit, mais il s’agissait seulement d’une recette trouvée sur Internet avec des avis positifs de consommateurs.

Après avoir lu ce plan de piètre qualité, Horikita souligna une fois de plus l’importance d’un plan détaillé. Que s’il voulait ouvrir un stand de poulet frit, il devait prendre en compte l’emplacement, la main-d’œuvre nécessaire, les prix, le nombre de clients potentiels avec un argumentaire de persuasif. Elle avait déclaré qu’elle n’accepterait que les propositions abordant tous ces aspects.

Après cela, je pensais que le nombre de personnes lui faisant des propositions hâtives allait diminuer mais je me trompais. Ils étaient encore plus nombreux à venir avec des plans de plus en plus sophistiqués.  Quelques propositions avaient même été retenues par Horikita pour une discussion plus approfondie. Cependant, ces propositions manquaient toutes d’éléments concluants et n’étaient donc pas prêtes à être officiellement adoptées.

Horikita — Alors, as-tu préparé un plan détaillé ?

Satô — Bien sûr, je suis venue préparée. Mais c’est un peu gênant ici. Peux-tu me donner un peu de temps après, si c’est possible ?

Horikita — Vraiment ? Très bien. Où veux-tu que l’on se voie ?

Satô — Hum, alors rendez-vous dans la salle de classe déserte du bâtiment spécial dans 30 minutes. J’ai déjà obtenu la permission du professeur.

Horikita — La salle de classe déserte ?

Satô murmura un « merci, à bientôt » à Horikita, qui fut surprise, puis elle se retourna, rencontrant mes yeux attentifs. Elle s’approcha rapidement.

Satô — Hé, Ayanokôji-kun. Tu as aussi du temps après ?

Moi — Moi ? Je n’ai rien de spécial à faire.

Satô — Tu as entendu ce que je viens de dire, hein ? Tu peux venir avec Horikita-san dans 30 minutes aussi ?

Moi — Pourquoi au juste ?

Satô — C’est un secret. Tu le sauras en venant.

Satô était tout aussi confiante comme lorsqu’elle avait parlé avec Horikita.

Satô — Alors je vous attendrai tous les deux !

Elle sortit son téléphone pour vérifier l’heure et se précipita hors de la classe.

Horikita — Qu’est-ce qui lui arrive ? Elle avait l’air bien sûre d’elle.

Moi — Peut-être qu’elle a trouvé une idée de génie.

Horikita — Quand bien même, avait-elle besoin de nous interpeller comme ça ?

Je ne savais pas quelles étaient ses véritables intentions, mais nous allions être fixés dans trente minutes. Horikita et moi passâmes un peu de temps dans la classe, puis nous nous partîmes en direction du bâtiment spécial.

4

Comme nous allions au même endroit, je fis le chemin avec Horikita jusqu’au bâtiment spécial. Quand nous arrivâmes à la porte, nous vîmes Maezono qui se tenait là pour une raison qui m’échappait.

Maezono — Oh, je suis chargée de garder l’endroit. C’est vraiment par pure précaution.

Horikita — Je vois que vous ne faites rien à moitié.

Même si Horikita avait stipulé qu’il fallait faire attention à la moindre fuite d’info, elle fut tout de même surprise de la voir jouer le jeu à fond. Je dois dire que j’étais moi aussi étonné. Elles avaient non seulement demandé à un professeur d’utiliser une salle de classe dans le bâtiment spécial, mais elles avaient également fait en sorte que quelqu’un monte la garde pour empêcher toute intervention extérieure. Même les fentes des fenêtres étaient recouvertes.

Horikita — Alors, on peut regarder à l’intérieur ?

Maezono — Ah, un truc avant. On fait une simulation à partir de maintenant. Alors Horikita-san, Ayanokôji-kun, jouez les clients.

Horikita — Très bien. Contrairement à un plan médiocre à l’écrit, cette façon de faire est certainement plus stimulante.

En voyant tout ce process, les attentes de Horikita devaient être élevées. Même si leur idée n’était pas retenue, il était clair qu’elles faisaient des efforts pour gagner ce qui devait réjouir Horikita au fond. C’est ainsi que nous finîmes par ouvrir lentement la porte après nous être assurés qu’il n’y avait personne dans les alentours. La première chose que nous vîmes dans cette salle de classe d’ordinaire monotone, était toute la décoration flashy.

Moi — C’est…

 —  Bienvenue au Maimai maid café !

Elles nous accueillirent à l’unisson, chacune avec une tenue différente. Satô, qui nous avait fait venir ici, et Matsushita, qui était à ses côtés, portaient toutes les deux des tenues de maid. Mii-chan, qui semblait embarrassée, ses yeux papillonnant dans tous les sens, portait une robe au style chinois. Bien que les salles de classe eussent habituellement des moniteurs, il semblait que le bâtiment spécial, moins utilisé, n’avait que des salles avec de simples tableaux noirs. Quoi qu’il en soit, le nom du café était écrit sur le tableau et, après avoir été accompagné vers un siège, on me remit la carte du menu écrite à la main.

Satô — Que voulez-vous ? Maître.

Moi — Je peux poser une question avant de passer commande ?

Satô — Hmm ? Laquelle ?

Moi — Il a fallu beaucoup de temps et d’argent pour préparer ça, non ?

En effet, j’avais du mal à croire que tous les préparatifs n’avaient duré qu’un jour entre les décorations et les tenues.

Horikita — Matsushita-san, combien de temps as-tu passé là-dessus ?

Matsushita — Environ 4 jours. Le coût a été plutôt raisonnable, je dirais. On a utilisé un total de 13 200 points. Toutes les trois ici et Maezono-san, avons partagé le coût ce qui fait 3 300 points par personne. On a loué trois tenues, acheté du papier origami et des stylos divers pour les décorations. On a aussi utilisé notre propre vaisselle voilà pourquoi ce n’est pas assorti. Mais ça ne nous a rien couté du coup.

Il est vrai que la vaisselle n’était pas uniforme mais comme nous n’étions encore qu’au stade de la proposition, ce n’était pas un problème pour elles. En fait, c’était impressionnant de voir la quantité d’efforts déployés pour la préparation, tout en maintenant les coûts au plus bas.

Horikita — En termes d’impact, c’est parfait. C’est mieux que toutes les propositions d’événement que j’ai vues jusqu’à présent. Mais…

Horikita fit l’éloge du projet en le considérant attrayant mais il lui en fallait plus pour le valider.

Horikita — L’élément le plus important est le budget. L’avez-vous considéré ? J’aimerais avoir les détails.

En réponse, Satô tourna les yeux en direction de Mii-chan, sans paniquer.

Wang — J’ai fait ce que j’ai pu pour proposer trois budgétisations.

Mii-chan sortit un dossier transparent avec trois feuilles de son sac et le donna à Horikita. Elle l’avait écrit à la main au vu de la belle écriture. Bien que les tenues eussent été louées, elles avaient élaboré trois budgets différents en faisant varier les prix et la qualité des ressources à utiliser. Le nombre minimum de gens pour faire fonctionner le maid café, ainsi que le nombre de visiteurs que cela amènerait potentiellement, tout avait été pris en compte.

Horikita — C’est bien au-dessus de tout ce que j’ai vu jusqu’à présent.

Alors que Horikita les couvrait d’éloges, Satô et Matsushita donnèrent une tape de chaque côté de Mii-chan comme pour lui dire qu’elle avait été complimentée. Mais Mii-chan, timide comme toujours, baissa la tête semblant la hocher doucement. Pour le moment, c’était à 100% une réussite, mais…

Horikita — C’est un événement intéressant. Il n’est peut-être pas original mais je peux évaluer son potentiel si nous faisons bien les choses. Mais il y a quelques problèmes. Les frais de location sont de 4 000 points par tenue. Si nous en louons dix, cela fera 40 000 points. S’ajoute à cela le coût de la préparation de la nourriture et des boissons d’environ 50 000 points pour un total de 90 000 points. Les décorations coûteront 5 000 points sans compter les frais pour la location du stand. Il va falloir y mettre le prix.

Même si nous ne version pas de salaire, près de la moitié du budget allait être sollicité pour ce seul événement.

Satô — Eh bien, c’est vrai… Mais du coup on pourra se permettre d’augmenter les prix pour rentabiliser !

Sur le menu que Satô et les filles avaient créé, une tasse de thé noir coûtait 800 points. Ce prix était plus élevé que celui du café du centre commercial Keyaki. Bien sûr, ce prix pouvait être ajusté en fonction de la situation mais elles semblaient sûres de le vendre à ce prix. Horikita avait un air sérieux, tandis qu’elle feuilletait d’avant en arrière les trois feuilles. Mais leurs tenues semblaient tout droit sortir d’un conte de fées ce qui rendait l’atmosphère certes surréaliste et décalée mais non sans une once de merveille. Horikita semblait être arrivée à une conclusion, et leva la tête.

Horikita — Laissez-moi confirmer une fois de plus. Ce projet… Personne n’est au courant n’est-ce pas ?

Matsushita — Oui, nous sommes sûres et certaines.

Elle répondit avec confiance. Satô et Mii-chan firent aussi écho à ses paroles.

Horikita — Très bien. Je vous promets de réfléchir à cette proposition de maid café très sérieusement. Pourriez-vous s’il vous plaît affiner le plan en y incluant une section de réduction des coûts ?

Matsushita — Vraiment ? Génial !

Toutes les trois se tapèrent dans les mains avec enthousiasme.

Horikita — C’est un peu tôt pour fêter ça. N’oubliez pas que cela est seulement passé à l’étape supérieure. Ce sera débattu par la suite.

Malgré tout, ce n’était pas rien d’obtenir une telle réponse de la part de Horikita. Lorsque nous sortîmes dans le couloir, Maezono, chargée de garder l’endroit, nous fit un signe joyeux. Elle avait probablement tout entendu.

Moi — Je ne m’attendais pas à ce que tu approuves l’idée.

Horikita — Si je trouvais ce plan ridicule, je ne l’aurais tout simplement pas accepté. La plupart des propositions qui me sont faites sont rejetées sur-le-champ après tout. Au mieux, j’en avais mis une ou deux de côté mais elles sont vraiment sorties du lot. Ça peut valoir le coup.

Un projet de maid café n’était pas inhabituel mais Horikita avait trouvé que c’était un bon projet pour exploiter les points forts de notre classe afin d’attirer des clients potentiels.

Moi — Tu veux dire que nous avons un avantage même si les autres classes font un maid café ?

Horikita — Oui, tu ne crois pas ?

Moi — Ah si, bien sûr.

Même en ouvrant un stand de nourriture classique, nous serions en concurrence avec les stands de restauration. Mais même si d’autres classes optaient pour des maid café, nous pourrions avoir le dessus grâce à nos forces. Ces trois filles habillées en maid étaient loin d’être nos seuls talents.

Horikita — Pour s’assurer que leur plan soit bien exécuté, tu devras donner un coup de main.

Moi — Ne me dis pas que tu veux que je fasse du cosplay ?

Horikita — De quoi tu parles ? C’est juste que nous devons tout donner. Il faut exploiter toutes nos forces de manière optimale, tu ne crois pas ? En tant qu’homme, tu es bien placé pour trouver des serveuses.

Moi — Je comprends mais il y a des candidats plus appropriés.

Horikita — Il est vrai qu’Ike-kun et Hondô-kun pourraient faire l’affaire mais ils ne savent pas tenir leur langue. Ils sont trop maladroits.

Moi — Je ne peux pas te donner tort.

Ils pouvaient révéler des informations sans le faire exprès.

Horikita — Maintenant que tu es au courant, tu ne peux fuir.

Moi — C’est comme ça alors.

Satô m’avait fait venir malgré moi et maintenant je devais assumer.

Horikita — Je vais te laisser recruter les bonnes personnes. Tu pourras leur révéler l’évènement mais à la moindre fuite, j’annule tout.

C’est dire à quel point il était important de protéger nos secrets.

Horikita — Évite donc d’en parler à trop de gens. Es-tu confiant pour la tâche ? Nous déterminerons le budget officiel plus tard, mais je compte sur toi pour tout gérer que ce soit la gestion et les dépenses du projet.

Moi — Attends, attends, attends. Tu me balances vraiment tout ça d’un coup là ? Tu vas sérieusement me laisser tout gérer ?

Horikita — Nous n’allons pas faire un seul événement pour ce festival. Nous allons ouvrir plusieurs stands et équilibrer les styles pour exploiter aux mieux nos talents. Augmenter les ventes avec un budget réduit est aussi assez complexe, donc je vais me focaliser là-dessus.

Autant je comprenais qu’elle s’occupe seulement de l’optimisation des coûts autant je me demandais pourquoi elle m’avait confié le projet.

Horikita — Je suppose que tu es d’accord ?

Je n’avais montré aucun signe d’accord pourtant…

Moi — Je n’arrive pas à croire que tu aies réussi à me faire accepter ça.

Me confier la gestion du maid café…en étais-je vraiment capable ? Je n’étais clairement pas confiant. Satô, Matsushita et Mii-chan étaient déjà dans le coup mais combien de serveuses devais-je engager au juste ? Même si nous avions encore le temps, il fallait tout de même se décider rapidement.

Horikita — Je pars pour le bureau du Conseil. On se voit plus tard.

Moi — Ah, ok…

Je vis Chabashira sur le chemin du retour dans le bâtiment spécial, après avoir accepté cette responsabilité dont je me serais bien passé. Il ne semblait pas que ce soit une coïncidence.

Mlle. Chabashira — Tu es allé voir Satô et les autres ? Je suis au courant pour la proposition d’événement. J’imagine que tu as vu ce que c’était. Ça semble être une bonne idée en tout cas.

Moi — Ce n’est pas faux mais les filles devront confirmer que l’événement réponde bien aux attentes budgétaires avant de commencer quoi que ce soit. Il serait dommage qu’elles n’obtiennent pas le feu vert après tous ces efforts.

Mlle. Chabashira — Je suis également curieuse à ce sujet, alors je vais vérifier en personne. Quelle est la situation ?

Moi — Horikita trouve l’idée plaisante et pense que ça peut être prometteur. Elles sont en train de regarder tous les petits détails.

Mlle. Chabashira — Si c’est le cas alors ma venue n’est pas nécessaire.

Moi — D’ailleurs je suis fortement impliqué malgré moi.

Mlle. Chabashira — Comment ça ?

Moi — Horikita m’a demandé d’être le responsable de l’événement.

Mlle. Chabashira — Toi ? Vraiment ? C’est…

Chabashira, qui me regardait avec des yeux à la fois compatissants et surpris, se mit à rire.

Mlle. Chabashira — C’est une bonne chose. Horikita a fait une démarche très intéressante.

Moi — Mais quelqu’un comme Ike ou le docteur aurait été plus approprié pour le rôle.

Je n’avais aucune connaissance dans cet univers.

Mlle. Chabashira — C’est peut-être vrai en termes de compréhension de la culture otaku. Mais faire du chiffre est ce qu’il y a de plus important. Même si ces deux-là peuvent améliorer la qualité de l’événement en lui-même, ils ne seraient pas en mesure de faire des calculs approfondis pour gérer des bénéfices. Il est donc logique qu’elle t’ait confié cette tâche. Si c’est nécessaire, demande l’avis aux filles, ça t’aidera sûrement dans ton processus de réflexion.

Facile à dire. Pour pouvoir tirer des enseignements des conseils d’autrui, je devais avoir moi-même un minimum de connaissances. Si je ne savais rien, je ne pouvais pas garantir que j’arriverais à la bonne réponse, avec des conseils ou non car il était difficile pour moi de lister les points faibles.

Mlle. Chabashira — Pars du principe que c’est l’occasion d’apprendre beaucoup de choses extra-scolairement parlant, M. le gérant de Maid café.

Moi — Bien entendu.

J’étais sur le point de continuer mon chemin, mais Chabashira m’interpela de derrière.

Mlle. Chabashira — Ayanokôji… Puis-je avoir un peu de ton temps plus tard ?

Moi — Plus tard ? Quand exactement ?

Mlle. Chabashira — Je t’enverrai un message bientôt, d’accord ?

Moi — Je vois. Je vais faire en sorte de n’avoir rien de prévu après alors.

 J’aurais pu refuser, mais après avoir remarqué le sérieux dans ses yeux, il était plus judicieux d’accepter.

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