CLASSROOM V10 : CHAPITRE 5


Le bien et le mal

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Traduction : Akai
Correction : Nova

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Alors que ’entrai dans la salle de classe, de nombreux élèves me regardèrent pendant quelques instants avant d’immédiatement tourner leur tête ailleurs.  Puis de façon très aléatoire, ils me regardèrent de nouveau et ce, à de nombreuses reprises. Il était clair qu’ils avaient déjà commencé à prendre les mesures nécessaires pour me virer.

Ça expliquait mon malaise de la veille, comme si je ne me sentais pas à ma place.

Les membres du groupe Ayanokôji, comme Akito et Keisei, n’avaient pas l’air d’avoir remarqué quoi que ce soit.  De toute évidence, aucun d’entre eux n’était suffisamment compétent pour agir et trouver le groupe qui me ciblait.  Qui plus est, nos ennemis avaient énormément bossé pour minutieusement construire ce groupe, il était donc impossible que des informations s’en échappent. Premièrement, je ne voulais pas les inquiéter davantage non plus en leur expliquant la réalité de la situation. De plus, plus j’en parlais, plus le fait que Kei me communiquait des informations en privé pouvait se révéler au grand jour.

Je n’avais donc pas d’autre choix que de m’occuper de ce problème seul.

Horikita — Salut, Ayanokôji-kun. 

Moi — Ah. Salut.

Horikita, qui venait de débarquer en classe, n’avait pas l’air d’être au fait de la situation non plus.

Sudou — Yo. 

Sudou semblait l’avoir accompagnée, vu comment ils me parlaient en même temps.

Horikita — Je le précise au cas où mais notre timing est une coïncidence.

Moi — Ça ne m’intéresse pas. 

Pour une raison quelconque, Sudou me regarda avec beaucoup de fierté avant de retourner à sa place.

Il n’était sûrement pas impliqué dans ce complot de la classe C. Même s’il était possible qu’il souhaite me virer, s’il suivait le plan de Yamauchi il risquait de baisser dans l’estime de Horikita. Qui plus est, ce n’était pas un acteur très doué, il ne pouvait même pas garder une poker face.

Horikita — … D’ailleurs.

Horikita me chuchota une fois que Sudou s’était éloigné.

Moi — Quoi ? 

Horikita — Qu’est-ce que tu as fait ? 

Moi — Tu ne me donnes pas trop de détails là… Tu peux être plus précise ?

Horikita — Me concernant, qu’est-ce que tu as fait ? 

Pour être franc, sa question me paraissait toujours aussi abstraite.

Moi — Je ne vois pas ce que t’essaies de me dire mais je n’ai rien fait. Je n’ai pas le temps de m’occuper de toi. 

Horikita — Tu n’as pas le temps ? Ou veux-tu en venir ? 

Moi — C’est un problème personnel. N’y prête pas attention. 

La classe allait bientôt commencer. Vu l’attitude de Horikita, elle n’avait toujours pas repris contact avec son grand frère.

Elle allait sûrement le faire cet après-midi.

1(Horikita)

C’était durant la pause déjeuner de vendredi et l’examen spécial du lendemain approchait à grands pas.  

Moi, Horikita Suzune, réfléchissait aux différents évènements qui avaient eu lieu la nuit d’avant.

Alors que je m’apprêtais à aller dormir, je reçus un message. Je me souvins sentir mon cœur s’arrêter l’espace d’un instant quand je vis le nom de la personne. J’avais reçu un message de mon grand frère. Une simple phrase.

Manabu — As-tu des regrets ?

Cette simple phrase qui était une question pour moi.

Après l’avoir lue plusieurs fois, je réfléchissais à ce que je pouvais faire même après être légèrement perdue.

Cette opportunité était unique.  Si je ne la saisissais pas… je n’allais plus entendre la voix de mon grand frère jusqu’à la cérémonie des diplômes.

Moi — Tu accepterais de me parler ?

M’étant décidée, j’envoyai cette question en guise de réponse. Même si tout ce que j’avais à faire était de cliquer sur « envoyer », mes doigts étaient lourds et ce n’était pas une chose facile à faire.

Moi — Haa…

Je stabilisai ma respiration et j’appuyai sur le bouton. Tout ce qu’il me restait à faire était d’attendre. Je me demandais avec anxiété s’il allait me répondre ou pas, alors que mon stress finissait par s’apaiser au fil du temps, il me répondit de nouveau, sous la forme d’un coup de fil.

Je ne me sentais plus anxieuse mais rassurée.

Heureusement qu’il avait répondu avec un coup de fil sinon j’allais difficilement pouvoir lui répondre avec ces mains tremblantes.

Manabu — … C’est moi. Suzune. Tu disais que tu voulais me parler ? 

Moi — Oui… 

Manabu — À quel sujet ? 

Moi — …Uh, ton message … Pourquoi tu l’as écrit … ?

Manabu — Est-ce vraiment important là ? C’était à ce sujet que tu voulais me parler ? 

Moi — N-non, ce n’est pas ça. 

Sentant qu’il allait finir par raccrocher, j’avais rapidement nié pour l’en empêcher.

Moi — Si ça te va … est-ce que tu voudrais me voir en personne ?

Manabu — Hmm. Une discussion en face à face.

Moi —  O-oui.

Manabu — Quand tu t’étais inscrite ici, je t’avais dit qu’il était mieux que tu abandonnes ce lycée. Dès l’instant où tu avais refusé mon offre, notre relation était terminée. Tu le comprends ça, non ?

Sans le moindre scrupule, il posa les faits sur la table. Pour moi, il m’avait juste dit ça sur un coup de tête.

La relation qu’on avait entre frère et sœur était distante à ce point.

Pour être honnête, je voulais parler à mon grand frère d’un tas de choses. De ce qui s’était passé jusqu’à maintenant. De ce qui allait se passer dans le futur.  Mais … il n’allait jamais me demander quoi que ce soit sur ces sujets.

Moi — C’est à propos d’une chose que je peux te demander qu’en face à face. 

Il était silencieux. Je continuai de parler tout doucement.

Moi — Ça sera la dernière fois. Après je ne te t’embêterai plus jamais.

C’était tout ce que je pouvais promettre.

Manabu — D’accord, je comprends. 

Telle était notre conversation de la veille. Je m’apprêtais donc aujourd’hui à rencontrer mon frère.

Pour éviter que les autres ne nous voient, on avait arrangé notre rendez-vous dans le bâtiment spécial, un endroit qui était généralement vide.

Au moment où j’arrivai, il était déjà sur place.

2

Suzune — Désolée pour l’attente…

Manabu se tenait là silencieusement. Du point de vue de Suzune, il était toujours le même que durant leur enfance. C’était toujours la même personne qu’elle avait fuie pendant tout ce temps.

Manabu — Ça fait combien de temps qu’on a pas parlé ensemble de la sorte ? 

Suzune — Si on ne compte pas ce qu’il s’était passé à la rentrée, je dirais trois ans. 

Suzune — Je vois, alors ça remonte autant…

Manabu pensait à sa jeune sœur durant sa première ou deuxième année de collège. Quand il avait décidé de rejoindre le lycée Kôdô Ikusei, il la repoussa. 

À l’époque, il n’avait jamais envisagé que sa jeune sœur le suive sur ses pas. Mais Suzune était bien là aujourd’hui, juste en face de lui.

Manabu — Tu as dit que tu voulais me parler, je t’écoute.

La conversation allait se terminer sur-le-champ si elle disait qu’elle voulait se réconcilier avec lui. La vieille Suzune aurait sûrement dit quelque chose de la sorte, et Manabu serait sûrement parti sans la moindre hésitation et sans lui dire le moindre mot.

Suzune — Ça concerne l’examen complémentaire. T’es au courant de ce que traversent les 2nde, pas vrai ?  

Manabu — Mhm. Chaque classe est forcée d’exclure un élève. 

Suzune — Oui. 

Manabu — Et donc ?

Il poussait Suzune à aller droit au but.

Elle qui, jusqu’à maintenant s’exprimait sans problème, hésitait à continuer.

Manabu — Si c’est pour me demander des points privés alors tu perds ton temps, les caisses sont quasiment vides depuis le camp d’entraînement.

Suzune — Ce n’est pas ça. Je n’avais jamais pensé à te demander ce genre de soutien.

Suzune renforça sa volonté, déterminée à se débarrasser de la moindre incertitude qu’il pouvait y avoir en elle.

Suzune — Ce que je voulais te dire c’est… Prête-moi du courage !

Les mots avaient fini par sortir, après une petite pause, elle poursuivit.

Suzune — Je veux affronter cet examen comme il est. D’autres gens forment des groupes, essayant de prendre contrôle des votes afin d’assurer leur protection. Mais c’est quelque chose qu’ils vont définitivement regretter plus tard. C’est pourquoi … je veux les arrêter. 

Manabu la regardait sans dire un mot, reconnaissant la détermination qui se trouvait dans son regard.

En même temps, il réfléchit à ce qu’Ayanokôji lui avait dit la journée d’avant. Ce qu’elle essayait d’accomplir était loin d’être simple. De ses deux mains, elle essayait de faire quelque chose qu’aucun autre ne pouvait.

Pour se décider une bonne fois pour toutes, elle avait décidé de rencontrer son frère.

Suzune — Combien de temps il te reste ? 

Manabu — Je n’ai rien de prévu après cette rencontre. 

Suzune — Vraiment ? 

Suzune était quelque peu surprise de la question inattendue de Manabu.

Manabu — Dans ce cas j’aimerais te poser quelques questions avant d’écouter ce que tu as à me dire. Que penses-tu de cette école ? 

Suzune — Hein ?

Manabu — Tu t’y plais ?

Suzune — A-ah d’accord…

La question inattendue de son frère l’avait prise au dépourvu.

Suzune — Je suis désolée. C’est, uh … 

Manabu ne la réprimanda pas, même si elle bafouillait.

Suzune — Si je m’y plais ou non… Honnêtement je ne sais pas. Ce que je peux dire, c’est qu’on ne s’y ennuie pas. 

Manabu — Tiens donc ?

Suzune ne comprenait pas le but de sa question. Après tout, cela faisait un long moment qu’elle avait parlé à son frère.

Manabu — Il semblerait que tu aies réussi à surmonter l’une de tes faiblesses. 

Suzune — Mes faiblesses ? 

Manabu — Oui. Tu étais si centrée sur toi-même que tu ne faisais pas attention à ce qu’il se tramait autour de toi. En ouvrant ton esprit, tu as pu briser la spirale d’ennui dans laquelle tu t’étais installée. 

Suzune — Tu as l’air … différent aujourd’hui.

Aux yeux de Suzune, son frère était quelqu’un de sérieux et de déterminé. Quelqu’un qui ne souriait jamais. Quelqu’un qui n’allait jamais rater une opportunité pour devenir meilleur.  Elle avait l’impression que c’était impossible pour quelqu’un comme lui d’aller à l’école pour s’amuser.

Manabu — C’est parce que tu ne prêtais attention qu’à mes réussites scolaires, toujours obsédée par les notes.

Suzune — C’est parce que … tu m’as toujours inspiré. 

C’était quelque chose que Suzune avait déjà dit de nombreuses fois et le visage de Manabu se crispait à chaque fois qu’il l’entendait

Manabu — Je t’ai inspirée, huh. 

Suzune — … Je comprends. Je comprends que c’est impossible d’atteindre ton niveau. Mais quand même, chercher à réduire l’écart du mieux que je peux n’est pas une mauvaise chose.

Même si elle était consciente de son impudence, elle voulait quand même qu’il remarque à quel point elle se donnait du mal.

Sans prendre la peine de donner réponse à ses sentiments, Manabu ferma les yeux l’espace d’un instant.

Manabu —Qu’est-ce que tu penses d’Ayanokôji ? 

Suzune — …Ce que j’en pense de lui ? 

Manabu — Dis-moi honnêtement ton ressenti. 

Suzune — C’est un camarade de classe bien irritant. Même s’il a des capacités dont l’étendue a même attiré ton attention, je n’aime pas sa façon de ne jamais s’en servir. Mais, je pense qu’un jour, je réussirai à atteindre son niveau et peut-être le surpasser. 

Manabu —Malheureusement tu ne pourras jamais surpasser Ayanokôji.

Suzune — … 

Manabu — Cela étant dit, tu n’as pas besoin de le rattraper. Il n’y a rien de mal à faire les choses à ton propre rythme.

Suzune — Mon propre rythme…

Manabu se rapprocha un peu de sa sœur. Si Suzune se rapprochait à son tour, ils auraient été suffisamment proches pour se prendre la main.

Toutefois, Suzune n’avait pas réussi à faire le pas.

Manabu — Tu as peur ?

Suzune —  Oui … 

Cette distance en était une que Suzune n’avait jamais réussi à fermer, même quand elle était plus jeune.

Elle était si petite et pourtant si grande.

Manabu — Pour te rapprocher, tu dois faire l’effort de faire un pas.

Suzune —  Qu’est-ce que je peux faire ? Comment je peux faire pour me débarrasser de cette distance ? 

Manabu — Laisse-moi t’aider. Commence par me dire ce que tu

aimerais améliorer au sein de ta classe. 

Acquiesçant de la tête, Suzune expliqua doucement la situation à son grand frère.

3

Après l’école, un jour avant les votes.

Demain les classes allaient se décider sur quel élève exclure.

Il y avait un certain malaise qui pesait sur tout le monde, mais au bout du compte, ils avaient tous le sentiment que tout allait bien se passer.

C’était parce qu’ils avaient déjà décidé du sacrifice. Ayanokôji Kiyotaka allait être exclu de l’école.  Plus de la moitié de la classe était d’accord avec cette décision. Même si plusieurs d’entre eux ressentaient une certaine culpabilité.

Cette culpabilité n’était hélas qu’un petit prix à payer pour sauver leur peau. Au bout d’un certain temps, ce sentiment allait disparaître. D’ici un an, ma présence dans cette classe n’aurait plus qu’été qu’un vague souvenir.

Cela étant dit, je ne leur en voulais pas. Dans le but de ne pas être exclu, tout le monde avait cherché du mieux qu’il pouvait des contre-mesures pour réussir l’examen. Au bout du compte, n’importe qui aurait pu être la cible, c’était simplement tombé sur moi. 

Après avoir gagné la pitié de la classe, Yamauchi avait élégamment convaincu Kushida et avait suggéré une cible en lui expliquant avec sympathie et compréhension sa logique des choses.  Ensuite, Kushida avait rassemblé autant de camarades de classe qu’elle pouvait. Puisque l’invitation venait d’un ami de confiance, un ami à qui on confiait ses propres secrets, il n’y avait pas moyen de refuser.

La stratégie de Yamauchi n’était pas mauvaise. Il avait pris un risque et s’en était bien sorti en tant que cerveau du groupe. C’était juste dommage de m’avoir pris pour cible. Moi.

Si son but était vraiment d’éviter l’exclusion, il aurait dû cibler Ike ou Sudou à la place. Après tout, eux deux n’auraient pas pu se sauver d’une situation pareille.  Mais puisque Sakayanagi était celle aux commandes depuis le début, il était impossible que la cible soit quelqu’un d’autre.

Dans tous les cas, vu la situation, j’étais obligé de prendre les mesures nécessaires pour virer quelqu’un d’autre. Mais cette fois-ci, ce n’était pas moi qui allais me charger de les exécuter.  Après tout je n’étais qu’un élève discret qui avait été la cible de Yamauchi. Je n’étais pas quelqu’un qui pouvait changer la situation.

Mais celle assise à côté de moi, elle, le pouvait peut-être. Son visage avait changé bien plus que je ne le pensais. Tout son corps rayonnait, elle brillait comme si elle avait été ensorcelée.

Mlle. Chabashira —  Bien, c’est tout pour la leçon d’aujourd’hui. Demain on est samedi, mais je vous rappelle qu’il y a le vote donc ne dormez pas trop.

Les mots de Chabashira marquèrent la fin de cette journée scolaire.

Tout le monde se préparait à ranger ses affaires et rentrer à la maison. Il y avait eu un petit moment de silence absolu.

Vas-y Horikita. Je sais que tu peux le faire.

Elle poussa sa chaise et se leva.

Horikita — Excusez-moi. Tout le monde. J’aimerais avoir votre attention juste un instant. 

Horikita, sa voix remplie de confiance en elle, appela tous les élèves de la classe.

Cela attira naturellement l’attention de tout le monde qui se demandait ce qu’il se passait.

Horikita — Je suis désolée mais j’aimerais demander à tout le monde de ne pas rentrer tout de suite.

Même Chabashira avait l’air curieuse de ce que voulait faire Horikita.

Hirata — Qu’est-ce qu’il y a, Horikita-san ? 

Demanda Hirata, qui réagit un peu plus tôt que le reste de la classe. Il était après tout le plus sensible aux changements d’atmosphère.

Horikita — J’ai quelque chose à vous dire à propos de l’examen spécial de demain.

Hirata — À propos de l’examen spécial ? 

Yamauchi — O-oh, regardez l’heure … Eh bien, j’avais comme plan de sortir avec Kanji donc … 

Ike — C’est… C’est vrai.

Yamauchi et Ike répondirent tous les deux, appuyant le fait qu’ils n’avaient pas le temps.

Horikita — Tous les deux, vous m’avez l’air relativement calmes. Organiser des sorties après les cours alors que vous pouvez très bien être exclus demain. 

Quand ses yeux croisèrent ceux de Yamauchi, celui-ci tourna rapidement la tête.

Yamauchi — C’est parce que … ça ne sert à rien, même si on fait de notre mieux. On s’est déjà préparé au pire. 

Horikita — Vraiment ? Ça mérite des applaudissements. Bravo ! Mais désolée, tout le monde ne partage pas cet état d’esprit. Ce que je m’apprête à dire ne servira à rien si toute la classe n’est pas là pour l’entendre. Alors, s’il vous plaît, vous pouvez rester juste un petit peu ? 

Yamauchi — Bon, qu’est-ce que tu veux nous dire là ? 

Horikita — Il y a quelque chose d’important que je dois vous dire à propos de l’examen de demain et de la personne qui sera exclue. 

Horikita marcha sur le devant de la classe et se tint en face de l’estrade. Elle voulait sûrement se retrouver dans une position qui lui permettrait de voir les visages de tout le monde.

Yamauchi — À propos de qui sera exclu ? Ou veux-tu en venir ? 

Yamauchi commença à parler plus vite que d’habitude. Il ne le faisait probablement pas exprès, c’était sûrement un mélange de culpabilité associée à l’ambiance extraordinaire qui pesait sur la classe.

Horikita — Je me suis posée de nombreuses questions ces derniers temps. Qui doit être exclu ? Qui doit rester ? Comment parvenir à une décision ? Plus tôt, j’ai réussi à trouver une réponse à toutes ces questions. Donc laissez-moi vous dire ce que j’en pense.

Hirata — Attends une minute Horikita-san.

C’était Hirata et non Yamauchi qui lui répondit.

Hirata — Personne dans la classe ne mérite d’être exclu.

Horikita — Ah bon ? Tu ne penses pas que quelqu’un le mérite bel et bien ? 

Hirata —  C-C’est que …

Horikita — J’ai eu de nombreuses inquiétudes depuis l’annonce de cet examen. C’est très important pour notre classe de mener proprement une discussion sur la situation et de pouvoir décider sur la personne à exclure. Pourtant, l’école nous a à peine donné le temps de le faire. Par conséquent, c’est devenu une bataille dans laquelle on forme des groupes afin de contrôler les votes. On court le risque de voir un excellent élève partir alors qu’il ne le mériterait pas du tout. Peut-on vraiment appeler ça un examen ? 

Chabashira était la première personne qui montra publiquement son étonnement, Kôenji était le second.

Kôenji —  Je n’ai aucune idée de ce qui t’est arrivée mais tu m’as l’air d’une personne clairement différente. Tu as vraiment réussi à faire preuve de clairvoyance, toi ?

Disait Kôenji en applaudissant, il continua de parler.

Kôenji —  On t’écoute dans ce cas. Qu’est-ce que tu proposes ?

Horikita — À la base, je pensais qu’on devait se réunir entre nous pour décider tous ensemble de la décision à prendre. Mais je comprends maintenant que d’un point de vue réaliste, ça serait très difficile à mettre en place. Par conséquent laissez-moi vous proposer quelqu’un à exclure.

Hirata s’interposa.

Hirata — A-attends, Horikita-san !

Horikita — Désolée mais je parle là. Je donnerais une explication après avoir donné un nom.

Étant consciente du temps qu’elle prenait à la classe, Horikita poursuivit la discussion.

Hirata — Jamais. Je ne te laisserai pas mettre la classe dans un chaos pareil. 

Hirata refusa quand même.

C’était dans sa nature après tout.

Sudou — Elle a au moins le droit de parler. On écoutera tes objections une fois qu’elle aura fini. 

Sudou s’interposa à son tour pour empêcher Hirata d’interférer.

Kôenji —  C’est comme l’a dit le rouquin. Je gaspille déjà pas mal de mon temps précieux en restant ici, j’apprécierais donc ne pas en gaspiller davantage à cause des coupures intempestives.

Kôenji, à son tour soutint Horikita, visiblement intéressé par la tournure que prenait la discussion.

Hirata —  M-mais…

Profitant de l’hésitation de Hirata, Horikita reprit.

Horikita — Pour cet examen spécial… J’ai décidé qu’on devait exclure Yamauchi Haruki-kun. 

Devant les regards curieux de toute la classe, Horikita avait donné le nom complet de sa cible.

Jusqu’à maintenant, plein d’élèves étaient nommés comme cible en cachette mais c’était la première fois que quelqu’un donnait un nom publiquement. Horikita était la seule à le faire. Pourquoi personne d’autre ne l’avait fait avant ? Parce qu’ils allaient immédiatement être haï par la personne concernée, qui plus est s’ils n’arrivaient pas à convaincre la classe comme il fallait il y avait de fortes chances qu’ils deviennent eux-mêmes la cible.

Yamauchi — P-pourquoi moi, Horikita ?!

Bien évidemment, Yamauchi était le premier à réagir face à ces propos.

Après tout, si la nomination risquée de Horikita gagnait en poids, il devenait la cible principale des votes de censure. C’était comme une peine de mort.

Horikita — Il y a une raison claire concernant ma décision. Pour commencer, ta contribution au sein de la classe cette année était particulièrement faible. 

Yamauchi — C-c ’n’est pas vrai ! Mes résultats ont été meilleurs que ceux de Ken pendant tout ce temps ! 

Horikita — Il t’a surpassé la dernière fois, cela dit.

Yamauchi — C’est … Mais c’était arrivé qu’une fois !!! 

Horikita — Admettons, disons que tes résultats sont meilleurs que ceux de Sudou-kun. Ça ne change rien au fait que tu es quand même plusieurs niveaux plus bas en termes de capacités physiques.

Yamauchi — Dans ce cas Kanji est dans le même bateau que moi non ?! Il est à coup sûr pire que moi physiquement ! 

Naturellement, Yamauchi se défendit comme il pouvait. Chacun finirait par devenir désespéré en étant ciblé de la sorte devant tout le monde.

Horikita — Il est vrai que vous n’êtes pas mal d’élèves à être dans le même bateau sur ce cas de figure, je te l’accorde. 

Yamauchi — C-C’est ça. Me nominer non mais sérieusement… t’peux arrêter et me laisser tranquille là… ?

Horikita — Tu restes quand même un pas derrière, même en te comparant aux autres. Quand j’ai classé les gens par priorité en prenant en compte leur comportement durant les cours, leurs retards et leur historique d’absence, en prenant aussi en compte leurs faiblesses et leurs qualités, tu avais fini dernier. Juste devant toi y’avait Ike-kun suivi de Sudou-kun. C’était la conclusion que j’avais fait hier.

Sudou — J-je suis un candidat moi aussi ?! 

Demandait Sudou en paniquant un peu.

Horikita — Tu t’es beaucoup amélioré dans tes résultats scolaires et tes capacités de raisonnement depuis quelques mois, mais ça ne supprime pas pour autant toutes les fois où tu as posé problème à la classe, pas vrai ?

Sudou — Non … t’as raison.

Exposant les faits de la sorte juste devant ses yeux, Sudou les accepta pour ce qu’ils étaient. Ike semblait tendu aussi, il avait sûrement accepté les faits le concernant lui aussi.

Yamauchi — T’es sérieuse là avec tes conneries ? Ça me fout les nerfs ! Pas vrai ?! Kanji ?! Ken ?! 

Yamauchi tenta d’appeler les deux autres candidats dans son camp mais aucun d’entre eux n’avait les mots pour réfuter ce que leur disait Horikita.

Yamauchi — Qui plus est, je suis plutôt apprécié non ? Au moins bien plus que quelqu’un comme Kôenji ! Ce mec-là avait abandonné la classe durant plusieurs examens ! 

Horikita — Il est vrai que Kôenji-kun a beaucoup à faire pour améliorer son comportement. Toutefois lui, au moins, avait compris l’importance de cette discussion de classe. Si je devais comparer vos capacités, la différence serait si grande que tu ne pourrais même pas les comparer. Je peux affirmer qu’au moins durant cet examen, ce n’est clairement pas la personne à virer. 

Kôenji montra son sourire intrépide avec complaisante, ses bras croisés sur son torse. 

Yamauchi — J’arrive plus à supporter ça ! J’en peux plus !

Horikita — Dans ce cas et si je te disais la raison finale pour laquelle je t’ai choisi ?

Horikita bouscula Yamauchi, entravant calmement sa crise de nerfs. 

Yamauchi — La raison f-finale ?

 L’aura unique que dégageait Horikita poussa Yamauchi à se faire tout petit.

Horikita — Il y a quelque chose pour lequel tu culpabilises depuis quelque temps et dont tu n’as parlé à personne. N’est-ce pas ?

Yamauchi —  Je… ne vois pas de quoi tu parles.

Horikita — Puisque tu n’as pas envie de le dire, je vais le faire pour toi. Afin de te protéger de cet examen, tu t’es servi de Kushida-san comme intermédiaire pour gagner le soutien de nos camarades, tout ça pour exclure Ayanokôji-kun. N’est-ce pas ?

Yamauchi était surpassé par les mots bourrés de certitude de Horikita.

Yamauchi —  Hah ?!

Un brouhaha s’installa dans la classe.

Même si plus de la moitié de la classe était au courant de la manipulation des votes, aucun d’entre eux ne savait que Yamauchi était derrière tout ça.

Hirata — T’avais prévu de faire exclure Ayanokôji-kun… ? 

En dehors des membres du groupe Ayanokôji, Hirata était l’un de ceux qui étaient vraiment choqués d’apprendre que j’étais la cible. Hirata était du genre à toujours rester neutre et à penser à l’intérêt de la classe donc il était évident qu’il ne pouvait pas accepter ça.

Horikita — Oui. C’est un fait indéniable. Pas vrai, tout le monde ? 

Kushida avait assemblé beaucoup d’élèves autour du plan de Yamauchi. Même s’ils ne regardaient pas Kushida, ils avaient compris ce qu’il se tramait et se mirent à frissonner.  Cela suffisait à Hirata pour se rendre compte que plus de la moitié de la classe faisait partie du groupe de Yamauchi.

Hirata — Hmm… vous êtes plus calmes que je ne le pensais…

Horikita — Ton plan avait commencé avec un petit groupe de personnes et celui-ci s’est rapidement étendu. Si tu réunissais les votes de la majorité de la classe alors ta cible était garantie, pas vrai ? 

Yamauchi —  J-je n’ai rien à voir avec ça ! 

Même s’il prétendait être innocent, Yamauchi n’avait pas plus d’arguments pour se défendre.

Horikita — Qui l’a fait alors ? 

Yamauchi —  J-je ne sais pas, d’accord ?! Je… On m’a juste dit de mettre mon vote sur Ayanokôji ! 

Mentir de façon si désespérée n’apportait généralement pas les résultats qu’on espérait.

Horikita —  Si tu ne sais pas qui a commencé alors tu pourrais nous dire qui t’a demandé de mettre ton vote sur Ayanokôji-kun ?

Yamauchi —  Euh, c’est …

Horikita —  Tu l’as forcément entendu de quelqu’un pas vrai ? Tu ne vas pas me dire que tu ne sais pas, si ? 

Yamauchi semblait au bord du gouffre alors qu’il regardait avec désespoir autour de la classe.

Yamauchi —  …Kanji ! Je l’ai entendu de Kanji ! Pas vrai mec ?! 

Il essaya de rejeter la faute sur son meilleur ami.

Ike —  Quoi ? Non ! Ce n’était pas moi ! 

Bien sûr Ike nia en bloc.

Horikita —  Est-ce qu’il dit vrai, Ike-kun ?

Ike —   Non non non non non. Ce n’était pas moi du tout ! Moi je l’ai entendu de …

Ike était sans mots, ce qui se comprenait, après tout la personne qui lui avait suggéré de me cibler était Kushida. Il n’allait pas l’accuser comme ça. 

Horikita —  À en juger par ton silence, j’ai l’impression que tu es incapable de me donner un nom. Dans ce cas, peut-être que tu étais bien le cerveau derrière tout ça, comme le prétend Yamauchi-kun ?

Ike —   Non, non ! Du coup, err… Kikyô-chan était venue me voir pour me demander mon aide. … Elle avait dit qu’un de ses amis était dans de beaux draps et qu’elle avait besoin que je mette mon vote sur Ayanokôji. Cette fois-ci, Ike rejeta la faute sur Kushida.

Bien entendu, il était hors de question que Kushida reste sur place sans rien dire. Elle détestait l’idée d’être menacée plus que n’importe qui ici.

Horikita —  Ne me dis pas que tu es derrière tout ça, Kushida-san ?

Horikita était déterminée à interroger chaque personne jusqu’à ce qu’elle voit le bout du tunnel.

Dans une situation comme celle-ci, dans laquelle une personne spécifique était ciblée à chaque fois, ce n’était pas grave si elle n’avait pas de réponse du premier coup. En les interrogeant un par un, elle allait bien finir par apprendre la vérité.

Kushida —  Je … eh bien … un certain ami est venu me demander de l’aide alors je ne pouvais pas lui dire non … 

Horikita —  Qui était cet ami ? 

Au bout du compte, la faute que Yamauchi avait tenté de rejeter sur les autres allait lui revenir à la figure. Mais Yamauchi, qui était pris d’une anxiété très puissante, tenta aussitôt de la rejeter de nouveau.

Yamauchi —  C-c’est vrai ! C’est Kikyô-chan ! Elle m’a dit qu’elle avait besoin d’aide pour exclure Ayanokôji !

Avec de nouveau un mensonge dit impulsivement, on avait dû mal à voir si cette chaîne allait se terminer un jour.

Kushida —  M-moi ?!

Yamauchi —  Tout le monde ici l’a entendu de Kikyô-chan pas vrai ? J’ai raison ? J’ai raison ou pas ? 

Kushida était bien celle qui avait servi d’intermédiaire. Toutefois, il y avait quelque chose que la plupart des gens de la classe avaient admis. Et ce qu’ils avaient admis, c’était que Kushida Kikyô était une élève qui agissait toujours pour aider ses amis, qu’elle n’allait jamais rien faire pour les piéger ou virer.

La différence dans le taux de confiance que Kushida et Yamauchi avaient construit auprès des autres était plus que claire.

Kushida —  T’es si cruel Yamauchi-kun … Je … Même si je ne voulais pas abandonner Ayanokôji-kun, tu es venu demander mon aide … et même quand j’ai fait de mon mieux…

Kushida parla, le visage avachit sur le bureau, sa voix remplie d’angoisse.

C’était tout ce que la classe avait besoin d’entendre pour comprendre qui disait la vérité. La scène dans laquelle Yamauchi suppliait Kushida de l’aider se jouait sûrement dans leurs têtes.

En bref, Yamauchi ne faisait qu’aggraver son cas. Bien sûr Kushida était concernée, mais elle voulait éviter l’exclusion. La situation était bien particulière.

Horikita — …Kushida-san.

Horikita appela Kushida qui se cachait encore le visage.  Tout le monde pensait sûrement qu’elle allait la réconforter.

Horikita —  Ce que tu as fait était aussi une grosse erreur. 

Horikita la disputa d’un ton sévère.

Horikita —  Dans cette classe tu as autant d’influence que Hirata-kun ou Karuizawa-san… Non, ton influence est même plus forte. Par conséquent, si tu nomines quelqu’un en tant que cible, beaucoup de tes camarades de classe vont te suivre dans ta décision. 

Kushida —  C-ce n’est pas ce que je voulais. Je voulais juste aider Yamauchi-kun…

Horikita —  Arrête un peu, tu n’es pas aussi bête. Tu aurais dû savoir que ça allait finir comme ça.

Faisant face aux réprimandes de Horikita, Kushida leva la tête et s’essuya les larmes.

Kushida —  Je n’ai pas réfléchi aussi loin ! C’est juste que je ne pouvais pas ignorer le problème de Yamauchi-kun … Sa souffrance … je devais l’aider d’une manière ou d’une autre ! 

Horikita —  Non, tu savais. Tu as délibérément ignoré le problème, alors même que les conséquences étaient évidentes.

Étant la cible des paroles excessives de Horikita, Kushida tressaillit, hésitant dans sa réponse. Le pire étant que, dans cette situation, elle ne pouvait pas se défendre agressivement même si elle le voulait.  Il n’y avait pas moyen pour elle d’abandonner son personnage et de faire tomber son masque.

Et Horikita-san le savait.

Horikita —  Ce désordre a été causé par ton manque de jugement. Tu aurais dû agir dès le début.

Kushida —  C’est que … je ne sais pas comment faire… 

Horikita —  Tu dois réfléchir à tout ce qui vient de se passer et prendre des décisions qui profitent à la classe désormais.

Horikita termina sur ces mots, ignorant les excuses de Kushida.

Horikita —  Enfin, le fait est que, pour le coup, la personne responsable ici est bel et bien Yamauchi-kun. 

Yamauchi —  A-attends Horikita. Ce n’était pas moi… 

Kôenji —  Eh bien eh bien, cette discussion était plutôt intéressante. Même si, au final c’est normal que le petit essaye de virer quelqu’un d’autre du lycée non ? Au-delà de toutes les formalités inutiles, cet examen n’est ni plus ni moins qu’une survie ou chacun doit penser à sa peau. Ou bien y’aurait-il une autre raison pour laquelle il devrait être sanctionné, hmm 

Kôenji fit une déclaration qui ne s’alignait pas vraiment avec ce que pensaient les autres, mais au final ça avantageait Horikita.

Horikita —  C’est vrai. Même si rassembler un groupe de personnes pour se débarrasser d’une autre n’est pas la chose la plus honorable à faire, ce n’est clairement pas quelque chose qui devrait lui être reproché dans un contexte de survie. Du moins, s’il n’y avait que ça. 

Kôenji —  Oh ?

Horikita —  Yamauchi-kun. Tu n’as pas cherché à faire exclure Ayanokôji-kun juste pour te protéger toi, j’ai raison ? 

Yamauchi — A-attends ! Je te l’ai déjà dit ! Ce n’est pas moi ! 

Kôenji —  Que c’est moche. Tout le monde ici présent a compris. Donc on t’écoute. Pourquoi a-t-il ciblé le petit Ayanokôji ?

Horikita acquiesça de la tête et poursuivit.

Horikita —  Lui, Yamauchi-kun, est entré en contact avec Sakayanagi-san dans les coulisses, prenant en compte ses ordres et les exécutant. 

La vérité était exposée au grand jour.

Kôenji —  C’est une information bien inquiétante ça, dis donc. Collusion avec une élève de la classe A … C’est très embarrassant. 

C’était sûrement la raison pour laquelle Kôenji participait à cette discussion depuis le début, pour commencer.

Kôenji était toujours une cible potentielle donc il cherchait sûrement à se servir de Horikita pour éviter le danger. En mettant en avant un élève pas du tout important, la classe allait se concentrer dessus.

Même si Yamauchi n’avait pas pactisé avec Sakayanagi ou n’avait pas ciblé quelqu’un d’autre, le fait qu’il était l’élève le moins important de la classe restait inchangé. Ça aurait sûrement fini comme ça de toute façon, en fait. Alors en plus il avait comploté avec Sakayanagi. Le cibler était devenu encore plus facile. Non seulement son rôle en tant que cerveau avait été révélé mais sa connexion avec la classe A aussi.

Ike —  Oi, Haruki, t’es entré en contact avec Sakayanagi-chan… ? 

Même son meilleur ami ne pouvait accepter la situation.

Yamauchi — C-c’est des conneries ! Y’a aucune preuve ! 

Horikita —  Dans ce cas je te demande de me prêter ton portable. Tu devrais avoir Sakayanagi-san d’enregistrée dans tes contacts pas vrai ? 

Yamauchi — C’est … parce qu’on est amis ! Y’a rien de suspect là-dedans ! 

Il était vrai que ça n’aurait pas été suspect du tout s’ils avaient une relation amicale. Toutefois, le fait que Sakayanagi avait ouvertement contacté Yamauchi était frais dans les souvenirs de tout le monde ici.  Horikita lui avait sûrement demandé son portable pour que tout le monde se souvienne de cette rencontre.

Ike —  T-t’es vraiment lié à Sakayanagi-chan ? 

Venant de son meilleur ami, cette question semblait méprisante.

Yamauchi — J-je t’ai dit … pourquoi je rejoindrais la classe A ?! Je ne trahirais jamais mes amis ! C’est la première fois que j’en entends parler ! Bordel, laissez-moi tranquille maintenant ! 

Yamauchi joua la victime jusqu’au bout.

Horikita —  Faux. Obéissant à ses ordres, tu es allé convaincre nos camarades de cibler Ayanokôji-kun. Après tout, elle est bien plus intelligente que toi. Elle t’a simplement donné les instructions nécessaires pour virer Ayanokôji-kun d’ici et tu l’as fait. 

Yamauchi — Non non non non !

Horikita — De plus, elle t’avait sûrement proposé quelque chose pour réussir à te convaincre de coopérer. Quelque chose comme une invitation à sortir avec elle peut-être ?

Yamauchi — Agh !

En plein dans le mille !  Horikita exposa la vérité qu’il tenait à cacher à tout prix et celui-ci devint de nouveau agité. C’était quelque chose qu’elle avait sûrement déduit toute seule et, vu la réaction, elle avait mis les pieds dans le plat.

Horikita — Il n’y a pas de raison d’exclure quelqu’un qui t’est supérieur comme Ayanokôji-kun à cause de tes raisons débiles et inutiles. C’est la raison principale pour laquelle j’ai décidé de te nommer pour l’expulsion. 

Horikita ne parla pas seulement à Yamauchi mais à la classe entière.

Horikita — Aucun d’entre nous ne veut voir un camarade partir. Toutefois, tu as trahi ta propre classe et tu as fait un marché avec l’ennemi. Tu as même ciblé un de tes propres amis … Tu es, sans l’ombre d’un doute, l’élève qui a la valeur la plus basse ici.  

Yamauchi — C-c’est …

On pouvait sentir d’ici le cerveau de Yamauchi bouillir pour trouver une solution.

Yamauchi — Même… Disons que t’aies raison … Pourquoi on me blâme ?  Essayer de me protéger en travaillant avec une autre classe c’est une forme légitime de protection, pas vrai ?! Je ne veux pas être exclu moi !

Horikita — Je vois. Du coup, là, tu me demandes où est le mal dans le fait de se défendre n’est-ce pas ? 

Il était têtu et son excuse était pitoyable mais il ne voulait clairement pas abandonner.

Horikita — Se préserver était certes important. Par contre, je ne vois pas trop la valeur de quelqu’un qui sacrifie un de ses camarades pour sa protection. Et surtout je la vois encore moins dans quelqu’un qui vend son âme à l’ennemi pour le faire. 

Horikita n’allait pas abandonner, peu importe les tentatives de Yamauchi.

Yamauchi — T-tu défends juste Ayanokôji parce que vous vous entendez bien ! 

Horikita — Pas du tout. C’était simplement une réponse objective et réfléchie. Vous pouvez être similaires en apparence d’ailleurs, pourtant si l’on vous compare aujourd’hui la différence est on ne peut plus claire. Qui plus est, vu tes connexions avec la classe A, on n’a simplement plus rien à se dire.

Kôenji — Pas d’objection ici. Je pense que la petite Horikita a fait une proposition bien tentante. On ne va certainement pas garder quelqu’un qui serait prêt à trahir la classe. Je ne pourrais pas vivre avec un élève qui est prêt à trahir sa classe. Elle a mon soutien. 

Avec ça, Kôenji était le premier à montrer son soutien à Horikita.

Yamauchi — Attendez ! Je n’ai trahi personne, je vous jure sur ma vie !

Comme un dernier semblant d’effort, Yamauchi jura sur sa vie pour prouver qu’il ne mentait pas. Mais difficile de savoir si ça avait eu l’effet escompté.

Yamauchi — Oh ! Et pourquoi ça serait Ayanokôji, huh ?!

Horikita — Qu’est-ce que tu veux dire ? 

Yamauchi — Admettons que d’une manière ou d’une autre je recevais des ordres de Sakayanagi-chan, au lieu d’exclure quelqu’un comme Ayanokôji, ça n’aurait pas eu plus de sens de virer quelqu’un de plus dangereux ? 

C’était sûrement quelque chose qu’il n’avait pas compris même quand elle l’avait approché. Au lieu de m’exclure, pourquoi ne pas se concentrer sur Hirata ou Karuizawa ? 

Horikita — J’imagine que c’est parce qu’il est plutôt discret, pour le meilleur ou pour le pire. Si elle voulait exclure quelqu’un de plus dangereux, tu n’aurais pas réussi aussi facilement ton coup. Elle avait donc choisi quelqu’un qui ne gênerait pas. De son point de vue, elle s’en fichait sûrement de qui allait être exclu, ce qu’elle voulait surtout c’était avoir un espion dans la classe D, un pion qu’elle pouvait déplacer à sa guise.

Il n’y avait pas moyen pour quelqu’un comme Yamauchi de résister à une telle argumentation.

Horikita — J’imagine que certains d’entre vous sont insatisfaits de ma nomination. Si c’est le cas, s’il vous plaît, ne vous gênez pas pour placer votre vote négatif sur moi. Que vous votiez Yamauchi-kun, Ayanokôji-kun ou peu importe qui d’autre, allez-y et faites-le. J’avais juste besoin de partager mon avis avec vous tous. C’est la raison pour laquelle j’ai décidé de tenir ce meeting dans la salle de classe. Veuillez s’il vous plaît en prendre compte durant votre décision.

Horikita parla avec conviction, prête à tout risquer pour ce qui était juste à ses yeux et ça allait certainement finir par payer.

Cependant, Sudou n’était pas tout à fait d’accord.

Sudou — Attend une seconde Suzune… Je comprends où tu veux en venir. Et je comprends que Haruki a tort ici mais … 

Il n’avait pas bonne mine. C’était la lutte désespérée de quelqu’un qui, de base, écoutait toujours Horikita.

Sudou — Mais je suis contre l’expulsion de Haruki.

Horikita — Eh bien c’est ton ami, je sais à quel point il est important à tes yeux. 

Horikita avait déjà anticipé que Sudou finirait par choisir Haruki. Pour autant Sudou n’allait pas abandonner comme ça.

Sudou — C’est mon ami donc je vais le protéger. C’est logique, hein ? Je sais que c’est très mauvais ce qu’il a fait concernant la classe A et tout mais… On a pas à le virer pour ça. Tant qu’il se remet en question et décide désormais de contribuer à la classe, c’est le plus important non ? 

Horikita — Dans ce cas, il n’y a pas besoin d’exclure Ayanokôji-kun non plus, puisque lui aussi n’a rien fait de grave. 

Sudou — C-c’est—

Horikita — Ta perspective est biaisée dans son ensemble Sudou-kun. 

Horikita respira pendant un petit moment. Elle s’apprêta à poursuivre en rassemblant tout le courage qu’elle pouvait.

Elle se tenait debout, prête à être détestée par ses pairs.

Horikita — En protégeant une personne, tu en abandonnes une autre. Ça signifie que cet examen n’est pas à propos des sentiments mais à propos de théorie.

Sudou ouvrit sa bouche de nouveau mais aucun son ne sortit. Son désir d’aider son ami était évident. Mais pour y parvenir, il devait sacrifier quelqu’un d’autre.  Former un groupe et contrôler les votes était une erreur.

Jusqu’aujourd’hui, la classe avait fait comme elle l’entendait, en se mettant d’accord. Mais personne n’avait l’esprit tranquille pour autant. Tout le monde était tendu, sous pression… Parce que tout le monde avait compris qu’ils ne le faisaient pas pour la classe mais pour eux même. Si Horikita avait fait tout ça le jour de l’annonce de l’examen, ça n’aurait pas eu le même effet. Plus important encore, si Horikita avait essayé de raisonner la classe avant l’annonce de cet examen spécial, ses paroles ne les auraient pas atteints de la même façon non plus.  Aujourd’hui tout le monde comprenait à quel point c’était dur et effrayant de prendre l’initiative de nominer un de ses pairs.

Sudou — Désolé, Haruki … Je ne peux rien faire pour toi… 

Honnêtement, la nouvelle maturité de Sudou me surprenait. Il avait toujours tendance à rapidement perdre son calme après quelques petites provocations donc il lui restait encore beaucoup à faire. Mais il progressait, petit à petit.  Même s’il devait faire un choix entre moi et son meilleur ami, il s’était beaucoup rapproché de Horikita aussi et arrivait par conséquent à prendre une décision raisonnable.

Kôenji — C’est donc décidé, ma chère Horikita. 

Kôenji et les autres spectateurs étaient prêts à rendre leur verdict.

Yamauchi — Attendez ! Attendez ! Stop !!!

Yamauchi commença à crier, les suppliant d’arrêter.

Yamauchi — Ça serait stupide de mettre votre vote sur moi !!!

Kushida — Je me suis déjà décidée. Personne ici ne mérite d’être exclu plus que tu l’es. 

Yamauchi — Oui, mais j’ai déjà fait un marché avec tout le monde pour voter Ayanokôji…

Kushida — Je… Retire tout.

Yamauchi — Huh ?

Kushida dit cela, tête baissée.

Kushida — J’ai fait une erreur… Je voulais aider Yamauchi-kun… mais je n’avais pas compris la gravité de la situation. Je retire la faveur que je vous ai demandé à tous. 

Vu la situation, afin d’éviter de ruiner sa propre réputation, Kushida n’avait pas d’autre choix que de se mettre du côté de Horikita.

Yamauchi — Attendsn attends. Qu’est-ce que tu dis ?! Tu brises ta propre promesse !!! C’est cruel !

Horikita — C’est toi qui es cruel ici, Yamauchi-kun… aller jusqu’à trahir tes propres camarades… 

Et maintenant, Yamauchi était complètement seul. C’était l’arroseur arrosé.

Horikita — Tu es le maillon faible de la classe et tu es un traître. 

Horikita continua dans le plus grand des calmes, indifférente aux sentiments de Yamauchi.

Horikita —  C’est tout ce que j’avais à vous dire. 

Sur ces paroles, elle tenta de terminer la discussion. Il ne semblait pas y avoir quelqu’un de prêt à s’opposer à ce stade.

Horikita —  En conclusion, j’aimerais demander l’avis de chacun sur la situation. Qu’est-ce que vous en pensez ? 

Presque personne…

Hirata —  Attends une minute, Horikita-san. 

Horikita — … Quelque chose ne va pas ? 

Un élève leva la main et se mit debout. Un facteur n’avait pas été pris en compte dans le plan de Horikita, c’était l’existence de Hirata Yosuke.

Hirata —  Je suis bien resté silencieux et je t’ai laissé dire tout ce que tu avais à dire, je dois cependant m’opposer à ta façon d’induire le reste de la classe à voter pour celui que tu penses être le bon choix. Voir des camarades de classe se réunir pour en virer un autre … c’est juste mal. 

Les mots de Hirata n’étaient pas le résultat de sentiments comme pour Sudou, ce n’était pas un raisonnement logique non plus comme Horikita. Ses paroles à lui étaient issues d’une souffrance et d’une résistance, de son incapacité à trouver une réponse à cet examen.

Hirata —  Comment je pourrais l’accepter ? Je… Je ne veux pas perdre qui que ce soit. Si quelqu’un avait voulu partir de son plein gré ça aurait été une autre histoire mais ni Yamauchi-kun ni Ayanokôji-kun ne le veulent. 

Horikita — Aucun d’entre eux ne le veut, tu sais. Déjà tu serais chanceux de trouver ne serait-ce qu’une seule personne qui le souhaite dans cette classe. Je vais quand même poser cette question inutile à la classe : y a-t-il quelqu’un qui souhaite quitter ce lycée ? Si oui, manifestez-vous, on aura plus besoin de continuer. On se mettra d’accord pour tous placer notre votre sur toi et on se sera débarrassé de cet examen. 

Aucune personne ne leva la main. S’il existait un tel élève, il se serait déjà manifesté depuis longtemps.

Horikita — Tu saisis maintenant ?

Hirata —  Non. Il n’y a pas moyen, je refuse d’accepter quelque chose d’aussi horrible. 

L’étudiant d’honneur parfait, très doué en sport comme en cours. Un gars vraiment vertueux. Malgré tout, la faiblesse de Hirata Yosuke s’exposait aux yeux de tous. Quand il s’agissait de prendre une décision importante, il était dépassé, incapable de faire quoi que ce soit.

Horikita — J’ai confiance en ma décision ici. Que ça te plaise ou non, on décidera ça au vote. Ici et maintenant. 

Hirata —  Il n’y a pas de raison de le faire. On ne sait pas pour qui vont voter les gens demain. 

Horikita — C’est faux. C’est important de suivre la tendance au niveau des votes au sein de la classe. 

Hirata —  Ça ne sert à rien. Tout le monde… tout le monde ici essaye de virer quelqu’un ! Je ne peux pas …! 

Hirata avait peur de voir les actions de Horikita créer un feu incontrôlable, exposant des informations comme « qui déteste qui » publiquement.

Horikita — Bien, tout le monde, poursuivons.

Horikita ignora Hirata et tenta de nouveau de mettre en place un vote. Personne ne pouvait l’arrêter à ce stade. C’était le moment de vérité.

Hirata — Horikita-san !!!!

Un bruit puissant et surnaturel se fit entendre à travers la classe.

Il se passa quelque chose qu’aucun d’entre eux ne croyait possible.  Hirata avait donné un coup de pied à son bureau, l’envoyant valser vers l’avant.

— Qu…Uhm, H-hirata-kun ?

Je pouvais entendre la voix d’une fille qui avait du mal à croire ce qui était en train de se passer. Pour être franc, j’étais moi aussi très surpris. Je me demandais s’il avait juste eu un petit excès de colère et avait frappé la table par impulsion.  Chabashira se demandait la même chose.

Son comportement incroyable était à ce point inattendu.

Hirata — Tu peux juste arrêter, Horikita-san ? 

Il avait baissé le ton de sa voix, comme pour lui faire peur et la pousser à renoncer.

Horikita — Que j’arrête quoi, au juste ?

Horikita lui répondit avec une question, coiffant ses cheveux au passage pour cacher son étonnement.

Hirata — Je te dis d’arrêter ce vote. 

Horikita — Tu n’en a pas le droit. 

La voix intimidante de Hirata avait fait vaciller légèrement celle de Horikita. Elle était intense à ce point.

Hirata — Cette assemblée était une erreur.

Horikita — Qu’est-ce que tu proposes alors ? Ce n’est pas comme si tu en avais la moindre idée. Tu n’as rien fait pendant tout ce temps.

Hirata — …Et donc ?

Horikita— … Et donc ? Je dis que c’est un problème. Tu ne sais pas du tout gérer la situation. 

Hirata — Ferme-la.

Horikita — Non, je ne me la fermerai pas. Je-

Hirata — TA GUEULE HORIKITA !

Les mots de Hirata étaient aiguisés, il l’interrompait sans scrupule. Ses mots pesaient plus que tout ce qu’il avait dit jusqu’à maintenant.

C’était comme si l’ambiance au sein de la classe avait gelé.

Hirata — Écoutez-moi tout le monde. 

Hirata s’adressa à la classe avec un ton bien différent, on aurait dit une autre personne.

Hirata — Tout ce qui a été dit jusqu’à maintenant n’est pas important. 

Yamauchi — … Ça ne l’était pas ! Elle mentait à coup sûr Hirata ! Je suis juste une victime ici !

Yamauchi se mit du côté de Hirata, lui qui se retrouvait dans une terrible situation.

Hirata —  « Victime ? »

Yamauchi —  Er… 

Le regard froid et profond de Hirata perça l’esprit de Yamauchi.

Hirata —  Après tout ce qui a été dit, tu n’es clairement pas innocent ici. 

Yamauchi —  C’est que … Je …

Hirata —  Le fait de vous voir prêt à trahir l’un des vôtres me donne envie de vomir. 

Sa colère n’était pas destinée qu’à Yamauchi mais à la classe dans son ensemble.

—  C’est un examen. On n’a pas d’autres choix !

Hirata —  Même, c’est une erreur de manipuler les votes de la sorte. 

Horikita — L’examen c’est demain. Est-ce que t’insinues qu’on devrait s’asseoir et ne rien faire pour nous préparer ? Si on avait fait ainsi on aurait juste laissé Yamauchi mener à succès sa trahison. 

Hirata —  Pourquoi ça serait un problème de ne pas avoir de plan ? On n’a pas le droit de juger nos camarades de classe ?

Horikita — Qu’est-ce que tu racontes au juste … ? Ce n’est pas ce que nous demande l’examen précisément ? Ne crois pas qu’on fait ça de gaité de cœur.

Horikita, sur l’estrade, regardait le visage de chaque camarade et le savait mieux que quiconque. Toutefois, Hirata ne voulait pas du tout accepter cette vérité. 

Hirata — … Au final ça ne serait pas toi le problème ici ? 

Sa voix grave et pesante résonna dans toute la classe. À ce moment-là mon cerveau refusait toujours le fait que cette voix appartenait à Hirata.

Hirata —  Il est vrai que cet examen, par essence, est sans cœur et cruel. Je ne l’accepterai jamais. Mais … En le tolérant, ce n’est ni plus ni moins qu’un sondage de classe. Ce n’est pas là pour nous pousser à nous battre entre nous. 

Horikita —  C’est irréaliste. Dans les coulisses, nos camarades de classe ont formé un groupe, ont formé des discussions pour manipuler le résultat des votes. Ayanokôji-kun allait se prendre tout dans la figure.

Hirata —  Oui. C’est tout aussi déplorable. Malgré tout, ton appel en public est quelque chose de complètement différent. 

Horikita — C’est absolument la même chose. Il n’y a aucune différence. Tu aurais dû arrêter leur plan toi-même au lieu de faire l’autruche, puisque tu tiens tant à rester fidèle à ta mentalité d’hypocrite !

Personne ne pouvait intervenir dans la discussion à ce stade. Hirata était au bout du rouleau et la seule personne capable de lui faire face dans cette situation était Horikita.

Horikita — De toute façon j’ai déjà tout dit. Tu te rends compte ce que tu dis n’est plus une option depuis un moment ? 

Hirata —  C’est vrai … les choses ont été dites. On ne peut plus revenir en arrière. 

Hirata respira un grand coup avant de poursuivre.  Il redevint un peu plus calme mais son attitude resta toujours aussi froide.

Horikita — C’est la raison pour laquelle je placerai mon vote sur toi demain, Horikita-san. Je ne te laisserai plus causer de problèmes à cette classe dans l’avenir, jamais. 

Hirata était conscient de ses contradictions. Néanmoins, il s’entendait avec tout le monde dans la classe et valorisait la paix ainsi que la camaraderie plus que n’importe qui. C’était la raison pour laquelle il en souffrait le plus.

Horikita — Vas-y, je t’en prie.

Horikita n’était pas insatisfaite. Elle encourageait tout le monde à faire de même.

Chabashira, qui jusqu’à maintenant ne faisait que regarder tout ce désordre, monta de nouveau sur l’estrade.

Mlle Chabashira — C’est tout, Horikita ?

Horikita — Oui.

Horikita descendit et retourna à sa place. Les cours étaient déjà terminés pour la journée et un professeur n’avait plus à interférer. Mais Chabashira tenait tout de même à dire quelque chose à ses élèves.

Mlle. Chabashira — Vous vous dîtes tous sans doute que cet examen est déraisonnable, qu’on vous force à endurer des choses terribles. Toutefois, une fois que vous entrerez dans la société active, vous allez définitivement rencontrer des situations de ce genre, dans lesquelles quelqu’un sera mis à l’écart. Les supérieurs au sein d’une entreprise doivent savoir rendre un jugement lorsque cela est nécessaire. Les élèves de cette école sont formés pour devenir des acteurs cruciaux pour le succès du pays dans le futur. Vous ne grandirez pas si vous ne voyez cet examen comme rien de plus que du harcèlement. 

Dans la société, les perturbateurs sont virés pour sauver le groupe. Suivant cette logique, il existe dans la vie active aussi des accords tacites et des trucs malsains de ce genre comme on en a vu ces derniers jours. Cet examen possédait définitivement des facteurs qui nous permettaient de mûrir et de faire face à la vie active. Ça ne changeait rien au fait que ce n’était tout de même pas une bonne chose de forcer des élèves encore immatures à faire ce genre de choix. Cet examen pouvait négativement influencer l’avenir des élèves ici.

Chabashira — Je ne vais pas vous partager mon point de vue sur la situation. Je pense que vous avez chacun contribué efficacement à la discussion. Tout ce que j’ai à vous dire c’est de bien réfléchir à qui vous votez demain.

Sur ces mots, Chabashira quitta la salle de classe, mettant un terme à la discussion dans son ensemble.

Moi ? Yamauchi ? Horikita ? Peut-être Hirata ? Ou peut être quelqu’un d’autre ?

C’était encore flou et on ne savait pas qui allait voter pour qui demain. En d’autres termes, on avait aucune garantie de qui allait être exclu demain, on ne savait pas qui allait porter le blâme.

C’était comme ça qu’était cet examen.  

4

Haruka et le reste du groupe Ayanokôji m’approchèrent immédiatement après le départ de la prof.

Horikita et Yamauchi quittèrent la salle de classe juste après.

Hasebe — T’es libre maintenant ?

Moi — Hm? Ah oui.

Je voulais parler un peu à Hirata mais…Sans montrer une quelconque émotion, Hirata quitta la salle de classe en silence.

Depuis que ma situation était rendue publique, ignorer le groupe Ayanokôji n’était pas une très bonne idée.

Hasebe — Allons-nous chercher un café !

Nous acceptions l’offre de Haruka et quittâmes la salle de classe.  

Nous étions tous entrés dans le hall ensemble, aucun membre du groupe n’avait pour idée d’aller chercher les cafés seuls.

Moi — Ça vous va ? Dans le pire des cas, vous pourrez devenir les cibles du groupe Yamauchi. 

Hasebe — S’ils veulent s’en prendre à nous alors qu’ils s’amènent ! Je ne laisserai personne de notre groupe être exclu. 

Contrairement à son comportement habituel, Haruka avait l’air plus énervée aujourd’hui.

Yukimura — Je suis d’accord. Il n’y a aucune raison pour exclure Kiyotaka. 

Keisei acquiesça à son tour, Akito et Airi montraient aussi qu’ils étaient d’accord.

Yukimura — Je me disais que c’était étrange que durant toute la semaine aucune information ne circule. Tout colle maintenant quand on comprend que c’est parce qu’on était membres du groupe. 

Peu importe les enquêtes qu’ils auraient menées, ils n’auraient pas réussi à trouver la cible du groupe de toute façon. Keisei le comprenait lui aussi.

Nous arrivâmes au café. Après que tout le monde ait commandé sa boisson, Haruka brisa la glace.

Hasebe — Je trouve que Yamauchi est un bon choix pour nos votes de censure. Ou plutôt, c’est le seul choix qui me paraît crédible. 

Miyake — Je suis d’accord, mais qu’est-ce qu’on fait de nos autres votes ?

Hasebe — Au pire on vote pour ceux qui l’ont soutenu, c’est justifié aussi. 

Miyake — Il va y avoir une baisse de soutien massif maintenant que les gens sont au courant de ses connexions avec Sakayanagi non ? Même des gens comme Ike et Sudou n’osaient pas trop le défendre. 

Hasebe — Ouais mais puisqu’ils sont amis je pense qu’ils le soutiendront quand même.

Haruka avait sûrement raison. Même si c’était un traître, ce n’était que sa façon de se protéger dans cette situation. Après tout, d’un autre côté, on pouvait aussi dire qu’il avait été utilisé par Sakayanagi. Il y avait de quoi lui trouver des circonstances atténuantes.

Horikita était celle qui avait incité à la haine envers Yamauchi…Enfin… C’était moi. Yamauchi était le cerveau et Sakayanagi était celle qui tirait les ficelles. J’avais informé son grand frère de toute la situation et celui-ci avait transmis l’information à sa sœur. Si elle n’avait pas pris ces initiatives, je l’aurais fait de mon plein gré.

Miyake — Je me demande combien de votes négatifs va recevoir Kiyotaka ? Parmi les garçons, il y a Yamauchi avec Ike et Sudou, ensuite viennent Hondô, Ijuin, Miyamoto et Sotomura qui avaient tous l’air de s’entendre avec lui également.

Yukimura — Donc tout au plus 7 votes négatifs parmi les garçons de la classe. 

Miyake — Et parmi les filles ? 

Hasebe — Je n’ai aucun doute que Horikita-san va lui donner un vote positif.  Et, sans aucun doute, son vote négatif sera pour Yamauchi-kun. Je ne sais pas ce que feront les autres filles cela dit … et toi Airi ?

Sakura — …Je pense que Karuizawa-san et Satô-san ne voteront pas contre lui … 

Yukimura — Pourquoi ?

Sakura — Je ne sais pas, juste une intuition…

Airi dérapa en pleine explication alors Haruka s’immisça.

Yukimura — On ne peut pas compter sur ça. 

Keisei n’allait clairement pas être satisfait d’une telle explication.

Hasebe — Bien sûr que si. C’est bizarre mais je pense qu’elle a raison. On parle d’Airi quand même. 

Yukimura — Ça veut dire quoi ça ? En dehors de Satô, qu’est-ce qu’elle en sait pour Karuizawa ? 

Incapable de comprendre, Keisei confus pencha sa tête sur le côté.

Hasebe — Ne t’en fais pas. Disons juste qu’on peut compter ces deux-là dans le camp allié. 

Miyake — C’est suspect…

Yukimura — Enfin, admettons. Mais en dehors de ces trois-là, on ne sait pas ce que feront les autres filles. 

Hasebe — Oui, y’a plein de filles qui n’aiment pas Yamauchi-kun cela dit. Après, même si elles acceptent d’aider Kiyopon, elles lui mettront sûrement un vote négatif aussi.

Yukimura — D’un point de vue psychologique, tu as raison. Si leur but c’est juste de passer cet examen alors elles mettront un vote sur toute personne qui aura de fortes chances d’y passer. Elles voient sûrement cette bataille comme un duel entre Kiyotaka et Yamauchi puis le reste des votes s’éparpilleront de façon un peu hasardeuse.

Keisei partagea les faits qu’il avait en main après avoir écouté tout le monde.

À l’origine Kôenji était la cible phare pour cet examen mais, au fur et à mesure, cette idée perdait en intérêt. Voter Kôenji c’était ignorer ses qualités et vu le nombre d’élèves qui ralentissaient la classe, il était plus ou moins tiré d’affaire.

Sakura — Je suis sûr que ça ira pour toi, Kiyotaka-kun. 

Moi — Ouais, merci. 

Au fond d’elle, Airi était sûrement inquiète car des votes de censure pouvaient tomber sur elle également. Mais elle ne le montra pas.

Hasebe — Je te trouve bien calme Kiyopon.

Moi — C’est juste que je ne peux plus rien faire. Ma tête est remplie d’incertitudes. 

Hasebe — Ne t’en fais pas. Grâce à Horikita, les choses s’annoncent meilleures pour toi. Elle t’a comme sauvé en quelque sorte.

Si Horikita n’avait pas été là, la plupart des élèves auraient passé l’examen sans comprendre ce qui se tramait. Sans y réfléchir une seconde, ils auraient mis leur vote sur moi afin de sauver leur peau. Un tel scenario était très prévisible.

Sakura — Mais … Je me demande comment est-ce que Horikita-san a découvert la trahison de Yamauchi. 

Airi posa la question la plus importante.

Sakura — Notre groupe est affilié à Kiyotaka-kun donc c’est normal que nous ne fussions au courant de rien. Je pensais donc qu’il en avait été de même pour Horikita-san. 

Miyake — C’est vrai … Elle n’avait pas l’air d’avoir formé son propre groupe non plus. 

Yamauchi était probablement frustré par la situation lui aussi. Il se disait sûrement qu’un membre de son groupe l’avait trahi. Il n’avait pas remarqué que l’information avait fuité, il ne pouvait rien y faire de toute façon.

Hasebe — Je ne sais pas qui c’est mais ça devait être quelqu’un qui ne voulait pas voir Kiyopon partir non ? 

Miyake — Sûrement. Heureusement qu’il y’avait un œuf dans ce panier qui n’était pas pourri.

Aucun d’entre eux ne se rendait compte que cet « œuf » c’était Kei et moi. 

5

En retournant à notre dortoir, on avait croisé Hirata assis sur un banc, la même expression vide sur le visage.

Si quelqu’un le voyait faire une tête pareille, il éviterait sûrement d’aller le voir. Après tout, personne ne l’avait jamais vu ainsi.

Hasebe — Il a l’air comme mort de l’intérieur. 

Miyake — Ouais… Il est clairement différent de d’habitude là.

Haruka et Akito comprenaient tout de suite à quel point la situation paraissait surréaliste.

Moi — Je vais essayer d’aller lui parler un peu. 

Miyake — Abandonne Kiyotaka. Ça serait mieux de le laisser seul pour le moment non ? 

Moi — Peut-être, mais quelque chose me dérange depuis quelque temps.

Hasebe — Quelque chose te dérange ? 

Moi — Désolé mais vous pouvez rentrer sans moi. Je ne pense pas qu’il nous dira grand-chose si on allait lui parler en groupe. S’il devait s’énerver sur quelqu’un, je préfère qu’il le fasse avec moi qu’avec nous tous. 

Miyake — …D’accord. Mais le vote a lieu demain alors ne fais rien qui pourrait empirer les choses. À ce stade on n’a aucune idée de son vote.

J’acquiesçai de la tête après avoir entendu le conseil d’Akito et me séparai du groupe. Je leur étais reconnaissant de partir sans poser de question.

Avant de faire quoi que ce soit, je pris une photo de la tête qu’il tirait et l’envoyai à Kei.

Moi — Hirata.

Sans perdre de temps, j’appelai Hirata juste après avoir appuyé sur « Envoyer ».

Hirata — …Ayanokôji-kun.

Moi — T’as une minute ?

Hirata — Oui bien sûr. Je, euh, voulais aussi te parler. 

Il n’était pas impossible qu’il m’attendait, en réalité.  Je ne voyais pas d’autres raisons qui l’auraient poussé à rester dans le froid. Qui plus est, il était assis sur un coin du banc, s’attendant sûrement à ce que quelqu’un vienne occuper l’autre coin.

Je m’assis donc sur la place vacante.

Hirata — Un printemps doux approche. 

Moi — Oui. 

Hirata — Je… nous voyais déjà l’accueillir tous ensemble. Même aujourd’hui, au fond de moi, j’y crois toujours. 

Hirata me parlait avec passion même si toute la classe avait fait face à une crise il y avait peu.  Même si tout le monde avait été témoin de son comportement terrible et de ses idées puériles en classe, cette partie centrale de sa personnalité n’avait pas changé.

Hirata — Devoir abandonner quelqu’un … je déteste ça.

Moi — On ne peut rien y faire. Que ce soit moi, Yamauchi ou quelqu’un d’autre, quelqu’un doit y passer.

Le visage de Hirata était vide, sans la moindre émotion.

Hirata — Je peux te confier quelque chose ? 

Moi —  Oui ?

Hirata — La classe C. Je veux que tu la diriges à ma place à partir de maintenant. 

Moi — Ne sois pas ridicule. Je ne pourrai pas faire quelque chose de cette ampleur. Hirata, si tu veux protéger la classe, tu dois le faire toi-même.

Hirata — C’est impossible. Je … Je n’en peux plus. 

Il était sûrement frustré de ne pas pouvoir trouver une réponse à cet examen. Ces pensées négatives occupaient pleinement sa pensée.

Mais ce n’était pas tout. 

Hirata — J’ai encore fait la même erreur que la dernière fois. J’avais déjà pris conscience de mes erreurs à l’époque et pourtant … 

Plongé dans l’amertume, des larmes naissaient autour de ses yeux.

J’étais amené à me demander à quel point est-ce que cet examen avait fait souffrir Hirata.

Hirata — Je me sentirais rassuré de confier la classe à quelqu’un comme toi. 

Il soupira, sa respiration visible dans l’air froid, se dissipant petit à petit dans l’ambiance glaciale qui nous enveloppait. Il n’y avait rien à envier au visage de notre leader à ce moment-là.

Moi — Mets un vote sur moi et un autre sur Yamauchi. Puis ce n’est pas grave si tu mets ton dernier sur Horikita. 

Hirata — Donc tu me demandes de laisser la classe décider demain ? 

Il n’y avait pas besoin pour Hirata de faire un choix. Il pouvait laisser cette décision aux 39 autres élèves de la classe.

Hirata — T’es vraiment quelqu’un d’incroyable Ayanokôji-kun. 

Moi — Je me trouve normal.

Hirata — Yamauchi-kun et Horikita-san étaient venus me voir aussi. Yamauchi-kun voulait que je vote pour toi alors que Horikita-san tenait à ce que je vote pour lui. Ils avaient tous les deux leur propre point de vue. Mais toi, tu ne cherches pas à sacrifier quelqu’un d’autre. C’est une qualité rare.

C’était juste parce que, d’un point de vue stratégique, il valait mieux ne rien dire. Vu la situation, pousser Hirata à prendre parti était une grave erreur. J’avais réfléchi à mes réponses avant même de venir à sa rencontre.

Hirata — Je suis content d’avoir parlé avec toi. Je… Je sens que je vais pouvoir trouver ma propre réponse maintenant. 

Moi — Tiens donc ?

Hirata se leva.  Il semblait avoir trouvé sa propre voie pour faire face à cet examen. Mais ce n’était pas une voie avec laquelle j’étais d’accord.

Hirata — On rentre ? 

Après qu’il m’avait posé la question, nous rentrâmes tous les deux aux dortoirs sans nous échanger un mot de plus.

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