CLASSROOM Y2 V9.5 Épilogue


Les relations
qui changent

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Traduction : Raitei
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Plus que deux jours avant la fin des vacances. Ma relation avec Kei était établie et même bien plus pour cette dernière. Sudou et Yôsuke trainaient maintenant ensemble et j’avais également parlé avec bon nombre d’élèves d’autres classe. Entre les rencontres imprévues avec Sakayanagi et ses camarades, les préparatifs de Ryuuen et Katsuragi et la nouvelle forme mentale d’Ichinose qui était un bon signe pour sa classe, ces vacances ont été intéressantes. Mais j’avais un certain goût d’inachevé. Il fallait maintenant remercier Hiyori pour son livre. Après quelques jours de réflexion, j’ai enfin eu une idée, mais pour cela, il fallait effectuer quelques arrangements. J’avais déjà causé beaucoup de stress à Kei à cause d’Ichinose alors il valait mieux ne pas recréer de malentendus. Comment allais-je la remercier me diriez-vous ? Un indice se trouve dans ce que j’ai ressenti peu après mon entrée dans ce lycée.

Karuizawa — Kiyotaka ! Ça va ? Seulement aujourd’hui, ok ?

En pyjama, elle me serra dans les bras, alors que je m’apprêtais à partir.

Moi — Oui. Je t’ai déjà bien expliqué la situation.

Karuizawa — Oui, mais même si je suis au courant, je reste stressée.

Je me retournai et cette fois, elle me serra dans les bras de face.

Karuizawa — Tu reviens ce soir, ok ?

Moi — Si tu es aussi anxieuse, pourquoi ne pas avoir lu un peu ?

Karuizawa — Pas possible. J’ai déjà dû mal avec les bouquins de cours alors flemme de lire quoi que ce soit. C’est pas pareil qu’à l’oral.

Elle n’avait pas tort. Cela ne servait à rien de la forcer à quoi que ce soit.

Karuizawa — Alors embrasse-moi !

Moi — Je ne comprends pas le lien logique.

Même si j’avais tenté une réfutation, elle avait déjà fermé les yeux en orientant ses lèvres vers moi. Après avoir cédé, elle finit par sourire avec malice et agita la main pour me saluer. C’était une scène assez mignonne je dois dire.

Karuizawa — À ce soir alors !

Elle passa de l’anxiété au sourire très vite. Elle m’accompagna à la porte.

1

Je pris ainsi l’ascenseur aussitôt et sortis du dortoir. J’ouvris rapidement mon téléphone, car Hiyori n’allait pas tarder à me contacter. J’aurais pu le faire chez moi, mais je voulais éviter tout stress inutile pour Kei. Bien évidemment, j’avais eu un appel en absence et un message. On dirait bien qu’elle était sortie plus tôt que prévu, faisant honneur à sa ponctualité habituelle. Je partis aussitôt à sa recherche et la trouvai errante sans but, près de l’entrée principale.

Moi — Tu cherchais quelque chose ?

Hiyori — Bonjour. Rien de spécial. Il fait beau, n’est-ce pas ?

Même s’il faisait encore un peu froid, le gros de la neige avait fondu et le ciel était dégagé.

Hiyori — Merci pour l’invitation.

Moi — C’est du gâchis de rester à la bibliothèque toutes les vacances.

La bibliothécaire m’avait dit que Hiyori sortait rarement avec ses amis pour passer le plus clair de son temps à la bibliothèque jusqu’à la fermeture. Pensant qu’elle se sentirait seule pour ce troisième trimestre, je l’ai invitée à sortir. Je savais que cette routine satisfaisait amplement Hiyori alors je prenais le risque de me faire un peu remonter les bretelles. Mon invitation pouvait en effet être perçue comme du forcing.

Hiyori — Pourquoi m’as-tu appelé ?

Voilà pourquoi je devais être honnête.

Moi — J’avais juste envie de t’inviter à sortir.

Elle avait le droit de refuser si ce n’était pas une raison valable pour elle.

Moi — Je voulais te remercier pour le livre, voilà. Mais offrir un cadeau ou te remercier avec des mots ne suffisait pas. Je voulais passer la journée avec toi histoire qu’on s’amuse un peu.

Même si ça pouvait être vieux jeu de ma part, j’espérais sa compréhension.

Hiyori — Je vois. Ça me fait plaisir.

Je pouvais sentir la gratitude derrière ses mots. Hiyori était intelligente et avait bien compris que ce n’était pas de la pitié de ma part. Il est vrai que j’ai pensais qu’elle pouvait le prendre mal, mais elle avait quand même accepté l’invitation. Maintenant, je n’avais plus qu’à montrer ma sincérité en action bien que lorsque nous étions ensemble, personne ne prenait d’initiative. En effet, nous étions plutôt du genre à suivre les autres. Mais l’invitation venait de moi alors je devais prendre mes responsabilités malgré les activités limitées du campus.

Hiyori — Hum, Karuizawa-san est au courant de ce tête à tête ?

Cette question était tout à fait naturelle compte tenu de nos sexes opposés.

Hiyori — Tu serais d’accord pour que Kei sorte seule avec un garçon ?

C’était une question qui m’avait déjà traversé l’esprit, mais qui n’était important que pour ceux qui craignaient l’influence qu’autrui pouvait avoir. J’avais déjà cerné Hiyori à ce sujet.

Moi — Elle voulait venir, mais si ce n’était que pour me surveiller ce n’était pas drôle et ça aurait été impoli pour toi.

Hiyori — Comment as-tu fait pour la convaincre ?

Moi — Je lui ai dit de lire un peu le livre afin d’avoir de quoi discuter vu que c’est notre sujet commun.

Les yeux de Hiyori s’écarquillèrent, laissant place ensuite à un sourire.

Moi — Voilà le résultat.

Hiyori — Ah… Je vois. C’était prévisible.

Hier, elle a abandonné dès la première page avant de tomber sur le lit.

Moi — Mais bon, même si j’ai eu sa permission, elle a quand même essayé de me mettre des bâtons dans les roues jusqu’à la dernière minute.

Hiyori fut soulagée d’entendre que je ne cachais rien à Kei.

2

Kamuro — Tu te montres beaucoup ces derniers temps.

Alors que nous étions sur le point d’arriver au Keyaki, une élève nous surprit dans notre discussion livresque. C’était Kamuro Masumi avec qui nous ne parlions que très peu. Pour je ne sais quelle raison, elle avait une expression de dégoût. Lorsque Kamuro s’approcha, Hiyori inclina un peu la tête en guise de salut, mais fut ignorée. Kamuro commença

Kamuro — Je vois que tu as une autre fille pour la nouvelle année.

Ce regard envers ma personne était bien du mépris ce qui peut se comprendre.

Moi — Tu te fais des idées.

Hiyori — Hum, bonjour, Kamuro-san.

Kamuro — Shiina, c’est ça ? Je ne te pensais pas si proche de lui.

Il fallait retirer ce malentendu au risque de le laisser durer.

Hiyori — Il m’a invitée à sortir en tant qu’ami tout simplement.

Moi — J’ai obtenu la permission de Kei.

Son expression resta grave malgré mon explication.

Kamuro — Cela ne change rien à la situation avec un œil externe.

Il est vrai que notre duo pouvait clairement créer des malentendus.

Moi — Du coup on ne peut pas sortir avec des amis du sexe opposé ?

Kamuro — Il y a une ambiance. On voit que ce n’est pas normal.

Ce n’était pas faux en soi. Hiyori m’appréciait bien même si elle ne le montrait pas trop. On a les mêmes lectures, elle est cultivée et n’est pas gênée par le silence. Ainsi je pouvais aisément communiquer avec elle et c’était sûrement le cas pour elle. Il était logique de supposer que notre relation dépasse l’amitié.

Moi — Je ferai attention à l’avenir.

Kamuro — Tant mieux alors.

Moi — Tu as fait tout ce chemin juste pour nous dire ça ?

Kamuro — Je suis venue pour autre chose et je vais être directe.

Sans même nous souhaiter la bonne année, Kamuro s’approcha.

Kamuro — C’est un peu personnel en fait.

Sous-entendant si la présence de Hiyori n’était pas un problème. Hiyori n’avait pas l’air gênée plus que ça alors je n’y voyais aucun inconvénient.

Moi — Dis ce que tu as à dire.

Kamuro — Quelle était ton intention derrière tes dernières actions ?

Moi — De quoi tu parles ?

Kamuro — Ne fais pas l’innocent. Tu joues à quoi avec notre classe ?

Moi — Moi ? Je ne comprends pas très bien.

J’étais perplexe face à sa question. La seule chose qui me venait à l’esprit à ce moment-là concernant la classe A c’était cette interaction.

Moi — Ce serait par rapport à Morishita ?

Kamuro — Oh, tu t’en souviens ? Quelqu’un t’a vu avec elle.

Il n’était pas étonnant qu’on soit témoin de la chose.

Hiyori — Morishita-san ?

Hiyori marmonna cela avec curiosité, ne sachant pas qui c’était. Si ça se trouve, elle n’avait même pas réalisé qu’elle faisait partie de notre promo.

Moi — Morishita Ai de la classe A. Tu ne la connais pas ?

Hiyori — Ça me dit quelque chose, mais je ne lui ai jamais parlé.

Kamuro — Elle ne parle pas aux gens d’autres classes. C’est suspect.

Hiyori — Ah bon ? Je ne sais pas…

Elle avait tout de même parlé à Sudou et Kôenji et n’utilisait pas de titre honorifique ce qui était un peu déroutant. Mais elle semblait à l’aise avec ça.

Kamuro — Tu essayais d’avoir des infos sur notre classe ?

Moi — Pas du tout mais tu es libre de me croire ou non.

Elle déclara ensuite qu’elle ne me croirait pas aussi facilement sans hésiter.

Moi — Je ne pensais pas te voir agir pour le bien de ta classe, Kamuro.

Kamuro — Si ce n’était pas toi, j’aurais passé outre.

Moi — Ah oui ?

Kamuro — Tu es le seul à pouvoir influencer Sakayanagi.

Je ne l’aurais jamais imaginé dire ça lors de notre première rencontre, car elle détestait Sakayanagi. Cette dernière avait découvert sa cleptomanie alors elle se servait de Kamuro comme d’un pantin. C’était une situation bizarre.

Moi — Le temps fait bien les choses. Tu es devenue docile.

Kamuro — Ne te fais pas d’idées. Je n’aime toujours pas Sakayanagi, mais je dois au moins penser à la classe. Si ton existence avait un effet positif, j’ignorerais la situation, mais ce n’est pas le cas.

Elle était donc devenue solidaire de sa classe depuis le temps.

Kamuro — Tu as l’air d’en savoir des choses, Shiina.

Hiyori — Comment ça ?

Kamuro — Tu as écouté notre conversation sans sourciller.

Hiyori — Désolée, je n’écoutais pas vraiment.

Kamuro — …Hein ?

Hiyori — Vu que c’était entre toi et Ayanokôji-kun, je regardais surtout le paysage. J’ai raté quelque chose d’important ?

Hiyori pencha la tête avec curiosité ce qui fit soupirer Kamuro.

Kamuro — Pas vraiment. Ce n’est rien.

Peut-être voulait-elle sonder Shiina. Le côté naturel de Hiyori laissait penser qu’elle était attentive or ce n’était pas le cas. Ce fut donc vain.

Kamuro — Je sais que tu n’es pas normal.

Moi — Tu n’y vas pas de main morte.

Kamuro — C’est la vérité. Sinon, tu n’aurais pas fait exclure Sakura.

Elle possédait des informations assez sensibles, car ça concernait notre classe.

Kamuro — Je vais te demander une chose alors…

Avant de terminer sa phrase, le regard de Kamuro changea aussitôt.

— Oh, quel regroupement inhabituel !

Hashimoto apparut avec son air insouciant avec Kitô. Le regard de Kamuro traduisait un sentiment de malaise, mais elle aurait dû se douter qu’elle pouvait tomber sur lui. Ou alors c’était autre chose. En tout cas, la tenue flashy de Kitô m’avait absorbé. Il voulait devenir styliste et il avait un style bien à lui. Je ne pouvais pas juger si c’était mauvais ou non, car je n’y connaissais rien.

Hashimoto — En voyant ce petit harem, la jalousie m’a consumé.

Kamuro — Tu te moques de moi ?

Kamuro, visiblement irritée, s’avança pour lui faire face.

Hashimoto — Shiina-chan et Kamuro-chan, hmm… Ayanokôji a l’œil. Pas vrai, Kitô ?

Ce dernier ne montra aucune réaction.

Hashimoto — On peut se joindre à vous ? On est en mode chill.

Kamuro — Hein ? Je rentre.

Furieuse, elle tenta de partir, mais fut arrêtée par Hashimoto. Il lui attrapa le bras, lui chuchotant une chose à l’oreille. Elle le repoussa, mais ne bougea pas.

Hashimoto — Ayanokôji a une petite amie. On n’interrompt rien en soi.

Je hochai la tête. De toute manière, Kamuro avait déjà bien mâché le travail.

Hashimoto — On peut rester tous les cinq du coup ?

Moi — Je n’ai pas de raison de m’y opposer si Hiyori est d’accord.

Hiyori — Pourquoi pas. Je n’ai parlé que très peu avec eux.

Hiyori ne montra aucun rejet. Je n’étais pas du genre à animer des discussions, mais ce n’était pas plus mal d’être autant. On peut créer des liens comme ça.

Hiyori — On laisse Hashimoto décider de la marche à suivre ?

Hashimoto — Si vous êtes d’accord, je n’y vois aucun inconvénient.

Hashimoto accepta volontiers. Peut-être avait-il l’habitude de prendre le lead.

3

Ces derniers temps, je parlais souvent avec des élèves d’autres classes comme Ryuuen, Katsuragi, Ichinose et Shiranami. Aujourd’hui, c’était des élèves de la classe A et pas des moindres puisqu’ils s’agissaient de cadres de Sakayanagi.

— Bonjour, Hashimoto-senpai, Kamuro-senpai, Kitô-senpai.

— Bonjour !

Hashimoto — Salut, salut !

Alors que nous approchions du Keyaki, de nombreux seconde nous saluaient.

Moi — Vous êtes populaires.

Hashimoto — C’est normal pour nous. C’est l’effet classe A.

Ils se connaissaient donc de nom et de visage entre les classes A.

Moi — Ce n’est pas l’impression que me donne Sakayanagi.

Hashimoto — Avec la princesse c’est un peu spécial. On ne la salue pas comme ça, comme une fleur inatteignable en haut d’un sommet.

Ça expliquait les regards envieux de la part des kôhais.

Moi — On va où au juste ?

Hashimoto — Hmm… Un endroit visible déjà ou pas ?

Moi — Je préfère ne pas me faire remarquer pour rien.

Hashimoto — Alors une salle au karaoké…

Alors que Hashimoto me regardait, Kamuro lui lança un regard aiguisé.

Hashimoto — c’est mort.

Kamuro — Clairement.

Hashimoto commença aussitôt à réfléchir à d’autres options.

Hiyori — Kamuro-san, tu n’aimes pas le karaoké ?

Kamuro — Peu importe, ne me demande pas pourquoi.

Hiyori marchait à côté d’elle tandis que j’étais à l’arrière avec Kitô.

Kitô — Sourde…

Kamuro — Kitô !

Kitô avait marmonné un petit mot, mais Kamuro se tourna vers lui, furieuse.

Hashimoto — Quoi, tu ne sais pas chanter, hein ?

En effet, les personnes conscientes de leur surdité ont tendance à détester les karaokés, car elles n’arrivent pas à chanter en synchro avec la musique.

Kamuro — Silence !

Kitô — Kamuro a pourtant une audition démoniaque…

Fait exprès ou non, Kitô ajouta encore une autre provocation à voix basse.

Kamuro — J’ai entendu ! Stop dire des choses inutiles devant Ayanokôji.

Kitô — Je suis à la limite, mais ça reste encore bon enfant.

Je ne sais pas s’ils s’entendaient bien, mais ils étaient proches.

Hashimoto — Du calme Kamuro-chan, on oublie le karaoké.

Kitô posa la main sur mon épaule, me faisant signe de ralentir un peu. Il s’exprima ensuite lorsqu’il se trouva à bonne distance de Kamuro.

Kitô — Hashimoto et Kamuro sont gênants pas vrai ?

Moi — Personnellement je suis ok avec ça.

Shiina se mit à rire gaiment alors tout allait bien.

Kitô — Tant mieux alors.

Alors que Kitô était en général effrayant, il avait montré une autre facette durant le voyage scolaire. C’était quelqu’un de très posé en fait.

Moi — Tu ne gères pas les choses comme Ryuuen. Est-ce parce que tu ne me reconnais toujours pas comme un ennemi ?

Kitô — Tant que l’ennemi reste courtois, je le suis aussi un minimum.

Il n’était donc pas dans le conflit.

Hashimoto — Hé, Shiina-chan, il faut que je te demande un truc.

Hiyori — Oui ?

Hashimoto — C’est quoi ta relation avec Ayanokôji ?

Hiyori — Comme je l’ai dit à Kamuro-san, nous sommes de bons amis.

Hashimoto — Tu es donc libre, du coup ?

Hiyori — Libre ?

Hashimoto — Tu n’as pas de petit ami quoi.

Kamuro — Tu vas vraiment la draguer là ?

Hashimoto — Pourquoi pas ? On est tous les deux célibataires. Ou tu veux être ma petite amie, Kamuro-chan ?

Comme il était dans la provoc’, elle s’approcha de lui pour donner un coup de pied dans le derrière.

Hashimoto — Aïe !

Il sursauta et serra les fesses en s’excusant avec les mains jointes.

Kitô — Désolé de te montrer une scène aussi stupide.

Observant leur échange depuis l’arrière, Kitô s’excusa même s’il n’avait rien à avoir là-dedans.

Moi — Honnêtement, Je pensais que les élèves de la classe A étaient plus coincés que ça. Mais ce n’est pas le cas.

Kitô — Hashimoto met l’ambiance, pour le meilleur et pour le pire.

Avec son visage intimidant habituel et l’ambiguïté de ses mots, je ne savais pas si c’était un compliment.

4

En laissant Hashimoto guider le groupe, j’avais appris quelque chose. Quelle que soit la proposition, il fallait que tous les participants soient d’accord pour qu’elle se concrétise. Kamuro rejeta même les autres options de Hashimoto pour finir par se résigner pour une discussion dans un café.

Hashimoto — Kamuro-chan, ce n’est pas souvent qu’on est avec eux.

Kamuro — Je te l’ai déjà dit, allez-y sans moi.

 Kamuro avait déclaré à plusieurs reprises qu’on pouvait y aller sans elle.

Hashimoto — Hors de question que tu ne sois pas là.

Hiyori — Je trouve l’idée bonne en tout cas. C’est tranquille.

Hashimoto — Wow, Shiina-chan, mignonne et gentille en plus.

Il semblait apprécier Shiina et se mit à côté d’elle. Moi, de Kitô.

Hashimoto — Ayanokôji, tu es vraiment pas commun. En général, les gens stressent en se mettant à côté de Kitô.

Moi — Je le connais un peu et je sais qu’il est cool.

Est-ce l’expérience du voyage scolaire ? Je le trouvais même chaleureux.

Hiyori — Ouaip. Kitô-kun ne semble pas être quelqu’un de mauvais.

Kamuro — Tu es sûr que tu as une bonne vue ?

Hashimoto — Ces deux-là sont des spécimens rares.

Kitô — Vraiment ?

Hiyori regarda attentivement Kitô pour le confirmer. Kitô fixa à son tour Hiyori, et elle ne fut pas nerveuse. Il finit par détourner le regard, nerveux.

Hashimoto — C’est vraiment un brave gars.

Kitô — C’est un malentendu. Je ne suis rien de tout ça.

Ses yeux se portèrent sur moi comme s’il voulait que j’évite d’avoir des fausses idées.

Kitô — T’imagine pas des choses.

Hashimoto — Eh bien, Ayanokôji, il est temps que tu parles.

Hashimoto qui jusqu’à présent s’amusait, posa son coude sur la table, inclinant son bras et tenant sa tasse comme un micro. Kamuro se redressa à ces mots. Je savais qu’ils voulaient quelque chose, mais quoi ?

Hashimoto — …Alors, tu comptes lâcher Karuizawa pour Shiina ? J’imagine que votre sortie à tous les deux n’est pas rien.

Tel un journaliste, il approcha agressivement sa tasse. Kamuro arrêta son bras.

Kamuro — Hashimoto.

Hashimoto — Quoi, Kamuro-chan ? Je vais lui faire avouer là !

Kamuro — Je vais aller droit au but.

Elle laissait entendre qu’elle ne voulait pas perdre plus de temps.

Hashimoto — Tu fais si peur Kamuro-chan, mais c’est ce qui fait… Aïe !

Hashimoto poussa un petit gémissement, son visage se crispant sous la douleur. Il se tint la jambe accroupit. Il avait reçu un coup de pied sous la table.

Hashimoto — T’es vraiment sans pitié… !

Kamuro — C’était involontaire.

Kamuro détourna le regard. Après s’être calmé, Hashimoto revint au sujet.

Hashimoto — La classe A est vraiment curieux à ton sujet.

Moi — Comment ça ?

Hashimoto — Tu es doué en cours et en sport. Ichinose t’apprécie et tu arrives même à parler à Ryuuen comme si de rien n’était. En plus de tout ça, tu as de bonnes relations avec la princesse. Tout ça est anormal.

Pendant ces vacances d’hiver, un grand nombre de personnes furent témoins de mes relations. Leur interrogation était plutôt logique.

Hashimoto — C’est grâce à toi que vous êtes en classe B. Tu es le chef.

Kamuro et Kitô s’arrêtèrent net, leurs regards se tournant vers moi. Vu les actions de Kamuro, cette situation n’était pas une coïncidence. Hashimoto avait bien calculé son coup. Des rumeurs avaient ainsi bien circulées.

Peu importe leurs contenus, je m’attendais à devoir répondre à des questions au vu des indices laissées par ma personne, mais pas aussi tôt. Il fallait maintenant que je fasse mûrir les graines que j’avais semées.

Moi — Le chef, hein ? Et si c’était le cas ?

Hashimoto siffla avant de s’exprimer.

Hashimoto — Moi qui pensais que tu nierais ou que tu jouerais au con. Tu l’admets alors ?

Moi — Je n’admets rien du tout. Mais ça changerait quoi ?

Hashimoto — On verra bien, mais il faut une confirmation.

Moi — Je vais jouer à ton jeu alors. Je suis le véritable chef.

Le sourire de Hashimoto devint quelque peu amer.

Hashimoto — C’est une réponse assez complexe.

Il pensait soit me troubler, soit me voir nier ou l’admettre. Pour ne pas rentrer dans son jeu et me révéler, il fallait adopter une posture ambiguë. Je n’avais rien révélé et j’étais même dans une position confortable au point de pouvoir affirmer mon leadership s’il le fallait. Mais il fallait tout de même rester sur ses gardes. Je m’éloignais de l’influence de Horikita, mais si je décidais seul que j’étais le véritable chef cela allait jouer contre moi à l’avenir.

Hashimoto — Tu en penses quoi, Kamuro-chan ?

Kamuro — Presque certaine, mais pas à 100%

Hashimoto — Et toi, Kitô ?

Contrairement à Kamuro qui n’avait pas hésité, Kitô se tut, me fixant toujours.

Hashimoto — J’ai peut-être exagéré en te déclarant vrai chef, mais tu as forcément été moteur de la montée de ta classe en B.

Moi — C’est à toi et à ta classe d’en juger, Hashimoto.

Hashimoto — Shiina-chan, que penses-tu d’Ayanokôji ?

Hiyori — Ce que je pense de lui ?

Hashimoto — Oui, je veux ton avis.

Hiyori — Hashimoto-kun, qu’attends-tu de cette conversation au juste ?

Hashimoto — Hein ? Comment ça ?

Hiyori — Tu veux voir ce que vaut Ayanokôji-kun pour ta classe.

Hashimoto — Dans le mille.

Hashimoto, voyait maintenant en Shiina bien plus loin que sa beauté.

Kamuro — Explique-toi Hashimoto.

Il resta silencieux tandis que Kamuro ne comprenait pas la question de Shiina.

Hashimoto — Récemment, Kamuro et moi avons discuté de la façon d’être diplômé en classe A. Accumuler 20M de points c’est le plus sûr, mais c’est dur. Et les tickets de transfert ont un délai court d’utilisation.

Hiyori — Effectivement

Hashimoto — Il faut analyser les classes gagnantes. Si on rend quelques services à une classe par exemple, crois-tu qu’elle paiera 20 millions ?

Hiyori — Bien sûr que non, à moins d’avoir un contrat très strict.

Hashimoto — Oui. Mais comment augmenter nos chances d’obtenir un diplôme en classe A ? Coopérer ? Faire tomber nos rivaux ? Non !

Hiyori — Voler des adversaires forts aux autres classes, c’est ça ?

Hiyori répondit avant que Hashimoto ne puisse répondre.

Hashimoto — Wow, c’est exact !

Les regards de Kamuro et de Kitô se croisèrent. Leur comportement montrait qu’ils avaient réalisé la vivacité d’esprit de Shina Hiyori. L’OAA comptait beaucoup d’élèves aux capacités académiques élevées. Mais pour le reste, il fallait parler avec eux pour voir les autres domaines où ils excellent.

Hashimoto — Accumuler 20M de points en groupe c’est faisable. Comme Ryuuen-kun a attiré Katsuragi-kun, si la classe A recrute également d’excellents éléments ailleurs, elle sera renforcée et les rivaux, affaiblis.

Hashimoto, qui avait pas mal applaudi, s’était expliqué.

Hashimoto — Allez Ayanokôji. Si tu nous montres ta force, nous utiliserons nos points de classe pour te recruter. Tu seras ainsi au top.

Son offre tentante pouvait être un mensonge, et ce, pour plusieurs raisons.

Kamuro — Jouer au recruteur, hein. Tu crois que Sakayanagi sera ok ?

Kamuro confirma que Sakayanagi pouvait être un obstacle.

Hashimoto — Certes, c’est la princesse, mais ça se tente.

Kamuro — En quoi ?

Hashimoto — Je te dirai. Voyons d’abord ce qu’en pense Ayanokôji.

Moi — Si elle veut m’attirer dans la classe A, c’est très tentant.

Hashimoto — Hypothèse, si la classe A t’invitait, tu accepterais ?

Moi — J’y réfléchirais forcément avec une grande attention.

Alors que je me montrais positif à l’invitation, Hashimoto passa à autre chose.

Hashimoto — Ok pour ça. Passons à l’étape suivante.

Il riait plus que n’importe qui ici. Mais Kamuro se leva et tira la chaise.

Kamuro — Si tu veux te déchaîner, c’est sans moi.

Hashimoto — Hey, Kamuro-chan, tu t’en vas déjà ?

Kamuro — Pas comme si tu allais m’écouter.

Hashimoto — Si tu parles de la promesse de l’autre jour, je suis désolé.

Même s’il essaya de l’arrêter, Kamuro quitta rapidement le café.

Hashimoto — Aah… Je suis parti trop loin ?

Regardant Kitô qui l’observait tranquillement, il acquiesça en silence.

Hashimoto — Je vais la rappeler, attendez un peu.

Se grattant la tête, Hashimoto partit à la poursuite de Kamuro.

Hiyori — Vous êtes vraiment intéressants. C’est amusant.

Hiyori, qui observait la scène, plissa les yeux et sourit.

Kitô — …Vraiment ?

Kitô fut surpris du comportement jovial de Hiyori. Hashimoto ramena ensuite une Kamuro amère et nous changeâmes de sujet de conversation. Hiyori avait bien participé à la discussion avec toujours Hashimoto comme moteur.

5

À en juger par leur empressement, Sakayanagi les avait peut-être appelés. C’est ainsi que nous nous séparâmes d’eux pour finir le reste de la journée à la bibliothèque. Sur le retour, le soir, nous fîmes part de nos impressions.

Hiyori — C’était super amusant aujourd’hui.

Elle marchait devant moi tout en souriant en se remémorant tout ça.

Hiyori — Je ne m’attendais pas à ce que Kitô-kun soit si bavard.

Moi — Tu trouves ?

Il avait surtout marmonné quelques mots cinq ou six fois…

Hiyori — J’ai aussi beaucoup appris sur Kamuro-san et Hashimoto-kun.

Moi — Tant mieux alors. Je n’ai pas pu faire grand-chose.

Hiyori — Nous étions à la bibliothèque. Rien que ça, c’était super.

Moi — Si tu es satisfaite alors tu m’en vois ravi.

J’avais peu progressé dans l’organisation des choses et la prise en compte des sentiments d’un pair. On apprenait tout cela avec l’expérience. Sans même le réaliser, le silence arriva. Les pas de Hiyori furent plus lents, me faisant demander si elle était pensive. Nous étions à mi-chemin du dortoir.

Hiyori — Hum… Ayanokôji-kun. Peux-tu m’écouter sans t’énerver ?

Elle passa du sourire à de la nervosité tout d’un coup.

Moi — Je ne vois pas pourquoi je le serais, mais je t’écoute.

Hiyori — Le livre que je t’ai offert l’autre jour… Il a été écrit par mon père.

Moi — Par ton p… ? Je vois. Son nom d’auteur est donc une anagramme.

Hiyori — C’est incroyable. Tu as compris.

Moi — C’était un nom inhabituel. Ça m’avait mis la puce à l’oreille.

Hiyori — Shina Katsumi. C’est le nom de mon père.

Moi — Ta passion pour les livres vient donc de ton père.

J’avais donc un aperçu de son background familial.

Hiyori — Jusqu’à présent, je n’ai dit à personne que mon père était écrivain. Je n’avais pas personne avec qui partager ça. Je voulais que tu le saches.

Même si ce n’était pas quelque chose à cacher, ce n’était pas non plus quelque chose qu’elle allait crier sur tous les toits. Pourquoi avait-elle abordé ce sujet maintenant ?

Hiyori — Que penses-tu qu’il va se passer dans la lutte interclasses à l’avenir ? Bien entendu, je sais que c’est dur à prédire, mais j’aimerais avoir ton avis.

Moi — Le combat entre Ryuuen et Sakayanagi aura clairement un impact important sur leur avenir. En supposant que les points de classe restent similaires jusqu’à la fin de l’année, si Sakayanagi gagne, la classe A aura un avantage énorme. Si Ryuuen gagne, cet avantage risque de disparaître. Ce combat sera encore plus impactant que le match entre la classe de Horikita et la classe d’Ichinose.

N’importe qui pouvait livrer une telle analyse superficielle. Pour aller plus loin, il fallait pouvoir anticiper des évènements futurs.

Moi — La plupart doivent penser que Sakayanagi a l’avantage.

Hiyori — C’est exact. La classe A maintient son leadership depuis presque deux ans et ils n’ont jamais tant de points de classe que ça. Il y a même quelques personnes dans notre classe qui sont déjà effrayées par les examens finaux.

Si la classe de Ryuuen perd, l’obtention du diplôme en classe A sera quasiment compromise. Ce sera très dur de remonter.

Moi — Sans connaître le contenu de l’examen spécial, nous ne pouvons juger que sur la force des leaders et de leurs camarades. Mais je pense que Ryuuen a de bonnes chances de gagner.

En fait, c’était ce que je considérais comme le scénario idéal. Peu importe le résultat de la bataille entre Horikita et Ichinose, si Ryuuen perd, la classe de Hiyori perdra ses chances de succès et sera éliminée de la course.

Hiyori — C’est vrai.

En tant que membre de la classe, Hiyori devait le savoir également. La classe de Sakayanagi était forte. C’est pourquoi l’échec serait fatal.

Hiyori — Je suis désolée de t’importuner avec ça.

Moi — Ne t’inquiète pas. Ça me fait plaisir de voir que tu te soucies de ta classe.

Elle fut gênée lorsque je lui répondis ça.

Hiyori — Nos classes sont peut-être différentes et nous sommes peut-être en compétition, mais nous obtiendrons le diplôme ensemble, n’est-ce pas ?

Contrairement à son habitude, Hiyori courut devant et se mit face à moi.  C’était toujours avec cet embarras sur le visage qu’elle s’était exprimée.

Nous ne pouvions pas savoir qui allait gagner. Mais cela ne voulait pas dire qu’il fallait se détester et se voir toujours comme des rivaux. Il fallait recevoir son diplôme à la fin avec le sourire quelque soit la classe en compagnie de ses camarades, ses bons amis et partenaires amoureux.

Moi — Oui, c’est bien vrai.

Après avoir répondu par l’affirmative, Hiyori eut un léger sourire, mais qui illustrait une grande jovialité.

Les vacances d’hiver touchaient à leur fin.

Un vent froid soufflait.

À partir de maintenant, il allait faire de plus en plus froid à l’approche de la fin du mois…

Et c’est ainsi que le troisième trimestre était sur le point de commencer.


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