CLASSROOM Y2 V1 : CHAPITRE 5


Classe D et Classe D

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Traduction : Nova
Correction : Raitei, Ayanokôji is the best
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Nous étions jeudi et le week-end allait bientôt arriver. J’emmenais Horikita avec moi à la bibliothèque après la fin des cours. En effet, nous avions prévu d’organiser une discussion avec les élèves de la 2ndeD que Nanase devait amener avec elle aujourd’hui.

Sur le chemin de la bibliothèque, Horikita et moi avions déjà commencé à parler un peu de l’examen spécial.

Moi — As-tu jeté un coup d’œil à l’OAA aujourd’hui ?

Horikita — 17 paires supplémentaires ont été finalisées, ce qui porte le total à 73.

Si le nombre de nouvelles paires n’était pas si inattendu, il y avait une chose qui rendait cette mise à jour nettement différente des deux précédentes : deux élèves de la 2ndeD avaient choisi un partenaire. De légères traces d’activités au sein de la classe qui était jusqu’ici endormie.

Horikita — Je suis un peu embêtée, sans te le cacher. Je pensais que Hôsen-kun allait rester en observation un peu plus longtemps. J’ai essayé d’avoir de petites conversations avec plusieurs élèves de la 2ndeD pendant le déjeuner aujourd’hui, mais ils m’ont tous balayée d’un revers de main en prétextant ne rien savoir sur les deux élèves concernés.

Moi — Ho tu sais, il y a une petite différence entre ne rien savoir et ne rien pouvoir dire.

Il n’aurait pas été surprenant qu’ils aient reçu l’ordre de ne pas divulguer d’informations ni de s’associer à quelqu’un à moins de recevoir un nombre important de points.

Horikita — C’est vrai. Quoi qu’il en soit, ça tombe bien de voir Nanase- san aujourd’hui. Avec elle, nous pourrons peut-être obtenir quelques renseignements.

Horikita n’était entrée en contact avec Nanase qu’une seule fois, et elles

n’avaient jamais vraiment eu de véritable conversation. Néanmoins, cette fille qui accompagnait Hôsen semblait relativement accessible. Du moins, je l’avais trouvée assez authentique en lui parlant. D’une certaine façon, elle avait une personnalité franche et directe qui me rappelait Ichinose.

Nous arrivâmes à la bibliothèque et décidâmes d’y entrer.

Hiyori — Oh là là. On dirait qu’il y a du monde aujourd’hui !

La première personne à nous accueillir ne fut pas Nanase, mais Shiina Hiyori de la 1èreC. Comme on pouvait s’y attendre d’un rat de bibliothèque, il sem- blait qu’elle soit directement venue dès la fin des cours.

Moi — Il se peut que ce soit un peu bruyant aujourd’hui. Nous sommes ici pour discuter avec des élèves de 2nde au sujet de l’examen spécial.

Hiyori — Je vois. Eh bien, je pense que les sièges au fond de la salle devraient convenir. De cette façon, tu ne gêneras pas trop les autres usagers de la bibliothèque en ayant une certaine marge pour parler. Puis si quelqu’un essaie de t’approcher, tu pourras le remarquer tout de suite !

Nous avions choisi de suivre le conseil que Hiyori nous avait précieusement offert.

Moi — Tout se passe bien en classe C ?

Hiyori — Oui. Il se passe beaucoup de choses en ce moment !

Comme nos classes étaient des concurrentes directes, il était difficile pour elle de nous faire part des affaires internes de sa classe.

Nous nous séparions après avoir échangé quelques banalités pour aller nous asseoir, puisque nous étions arrivés avant Nanase. Bien que j’étais très curieux de la situation de Hiyori, j’accompagnai Horikita jusqu’aux sièges situés au fond de la salle.

Horikita — Nanase-san mise à part, maintenant que nous nous impliquons dans la 2ndeD, la question est de savoir si Hôsen-kun sera de la partie ou non.

Moi — C’est vrai. Le fait qu’il vienne ou non avec elle fera toute la différence.

Comme il n’y avait pas de restrictions préalables sur les personnes pouvant venir, il était fort possible qu’Hôsen vienne. Les négociations promettaient d’être animées !

Horikita — Je peux te demander quelque chose avant de rentrer dans le vif du sujet… As-tu révisé ?

Moi — Eh bien, un peu. Il y a un problème ?

Horikita — Comme j’ai l’avantage de choisir le sujet dans lequel nous allons concourir, je me demandais simplement si tu prenais suffisamment de temps pour étudier.

Moi — Pourquoi ? Tu essaies de montrer de la pitié à un ennemi ou quoi?

Horikita — Pas du tout. Je ne suis pas aimable au point de renoncer à mon propre avantage. C’est un duel que je dois gagner.

Bien qu’elle dise cela, elle semblait quand même se soucier de savoir si j’étudiais correctement ou non. En d’autres termes, elle craignait que je finisse par trouver des excuses si je perdais notre pari, en disant que j’avais été trop occupé par l’organisation de l’examen spécial.

Moi — Je pourrais te demander la même chose étant donné que tu passes le plus clair de ton temps à régler la situation concernant l’examen spécial.

Horikita — Je suis tout aussi assidue dans mes révisions que d’habitude,

donc il n’y a aucun problème de mon côté.

Il semblait qu’elle était plutôt confiante dans sa routine. Horikita — Ne t’inquiète pas. Je ne vais pas perdre. Moi — Si tu le dis, mais…

Elle ne me faisait pas vraiment confiance alors elle ne pensait pas que je prenais notre pari très au sérieux.

Il y avait encore une chose que je voulais lui demander en fait. Horikita avait beaucoup de choses à gérer. En plus de travailler pour organiser la classe, elle devait à la fois étudier pour elle-même et donner des cours particuliers aux autres. Je n’étais pas sûre qu’elle puisse maintenir ce rythme jusqu’au jour de l’examen. Cependant, juste au moment où j’allais lui poser la question, Nanase arriva, seule, à la bibliothèque. Elle nous remarqua immédiatement et inclina la tête avant de s’approcher. Il semblait que Hôsen n’était pas dans les parages.

Nanase — Désolée de t’avoir fait attendre, Senpai. Moi — Nous venons tout juste d’arriver nous aussi.

On se saluait pendant que Horikita fit signe à Nanase de prendre le siège de l’autre côté de la table. La discussion pouvait commencer.

Horikita — Je vais me présenter à nouveau… Je suis Horikita Suzune. Merci d’avoir pris le temps d’organiser cette discussion avec nous aujourd’hui.

Nanase — Hmm… Je me nomme Nanase Tsubasa. Je n’ai rien fait qui mérite d’être remerciée. C’est plutôt moi qui devrais vous exprimer toute ma gratitude.1

1 Le premier « je » que Nanase utilise ici est Boku, tandis que le deuxième et tous les pronoms futurs qu’elle utilise pour elle-même dans cette partie sont Watashi. Je n’ai aucune idée de comment le traduire, alors je le fais juste pour l’expliquer car c’est un détail important pour la suite.

Après tout, elles étaient toutes deux en classe D, en bas de l’échelle.

Dès qu’elle entendit la présentation et la réponse polie de Nanase, Horikita entra tout de suite dans le vif du sujet.

Horikita — Cela peut sembler assez indiscret, mais puis-je te demander quelque chose ?

Nanase — Bien sûr.

Horikita — Tout d’abord, comme prémisse de base, j’aimerais connaître la politique de la 2ndeD pour l’avenir. Ce n’est qu’aujourd’hui que deux élèves de ta classe ont finalement choisi leur partenaire. Cependant, l’orientation des 38  élèves  restants est toujours inconnue. Tu sais quelque chose, n’est-ce pas Nanase-san ?

Même si l’on ne savait pas si c’était Hôsen ou un autre élève de la 2ndeD, il était clair que quelqu’un donnait des instructions à la classe.

Nanase — Tu as raison. Je savais que tu te renseignerais à ce sujet. Tu as posé cette même question à Kajiwara-kun plus tôt dans la journée, n’est-ce pas ?

Kajiwara était le nom de l’un des nombreux élèves de la 2ndeD. Apparemment, Nanase avait déjà découvert que Horikita avait essayé de contacter plusieurs élèves de la 2ndeD pendant le déjeuner aujourd’hui. Dans ce cas, il semblait raisonnable de supposer que Nanase savait également que nous avions contacté Shiratori et ses amis le premier jour de l’examen.

Horikita — Je suis surprise. Il semble que vous fassiez un excellent travail pour rapporter, communiquer et discuter des choses.

Nanase — De nombreux élèves ont déjà commencé à prendre des mesures conformément aux ordres de Hôsen-kun.

Au lieu de rester ambiguë, Nanase confirma volontiers que Hôsen tirait les

ficelles de la classe.

Horikita — Est-ce à cause de son attitude agressive ? Non… Je pense qu’il y a plus que ça. Mais qu’est-ce qu’il a bien pu faire ?

Nanase réfléchit un moment avant de finalement ouvrir la bouche pour parler.

Nanase — J’en suis infiniment désolée, mais j’ai bien peur de ne pas pouvoir te fournir de détails précis. C’est une stratégie que Hôsen-kun a mise au point afin d’unifier la classe. Bien que j’ignore si sa straté- gie soit bonne ou pas, divulguer les informations à une personne exté- rieure serait un acte de trahison.

Horikita — Eh bien, c’est une sage décision.

En réponse aux paroles d’Horikita, Nanase inclina légèrement la tête. Ce n’est pas parce que nous étions des ainés qu’elle devait tout nous dire. Tout comme elle l’avait exprimé dans sa conversation avec moi hier, Nanase possédait la résolution attendue d’une élève dévouée à sa classe.

Horikita — Alors, passons aux choses sérieuses. J’aimerais savoir si notre classe peut collaborer avec la 2ndeD, tout comme les deux personnes qui ont finalisé leurs binômes hier.

Nanase — Je crois que tu l’as déjà entendu de la bouche de Shiratori- kun, mais nos portes te sont toujours ouvertes. Tant que tu nous présentes au moins un nombre fixe de points privés, nous accepterons le partenariat sans la moindre hésitation.

Bien sûr, notre conversation avec Shiratori et ses amis était parvenue aux oreilles de Hôsen. D’après cela, je pouvais émettre une hypothèse : les deux élèves de 2ndeD en question avaient été achetés pour un grand nombre de points privés.

Horikita — Mais ce que je demande aujourd’hui est complètement différent du règlement d’un accord avec des points.

Nanase — Je comprends cela. J’en ai un peu entendu parler par Ayanokôji-senpai auparavant, mais tu cherches à établir une relation de coopération où nos classes aident à couvrir les élèves les moins bons sur le plan scolaire, exact ?

Horikita — C’est exact. Le fait que tu sois ici bien en le sachant me pousse déjà à croire que nous avons une marge de manœuvre pour négocier, n’est-ce pas ?

Nanase — En effet. Du moins, c’est ce que j’aurais aimé te dire. Sur ce, l’expression de Nanase s’assombrit avant qu’elle ne poursuive.

Nanase — La façon de penser de Hôsen-kun est profondément ancrée dans l’état d’esprit de l’individualisme, et il l’impose à ceux qui l’entourent. À ce rythme, les élèves ayant des notes d’aptitudes académiques faibles ne pourront pas trouver de partenaires et finiront par être laissés pour compte. Même si ce n’est pas un très gros problème qu’ils perdent trois mois de points privés, je crains qu’ils soient catalogués comme des perdants qui n’ont pas réussi à se trouver un partenaire. Eh bien, non, ce n’est peut-être pas un si gros problème non plus… Ce qui m’énerve vraiment, c’est la pensée que cet état d’esprit individualiste pourrait ne jamais disparaître, nous empêchant de pouvoir nous unir en tant que classe à l’avenir.

Après avoir entendu ce que Nanase avait à dire, Horikita fit part de ses prédictions sur ce qui pouvait arriver à la 2ndeD à l’avenir.

Horikita — Oui. Si personne ne veut jamais aider la classe dans son ensemble, l’individualisme s’installe et les élèves les plus faibles sont livrés à eux-mêmes. Si telle est la routine de votre classe, celle-ci serait en grande difficulté si elle était confrontée à un examen exigeant de la cohésion.

C’est pourquoi, afin d’éviter cela, Nanase était prête à participer seule aux négociations avec Horikita.

Horikita — Tu n’as pas peur de Hôsen-kun, Nanase-san ? Nanase — En effet.

Une réponse immédiate et imperturbable. Et puis, Nanase se retourna et jeta son dévolu sur moi pour la première fois depuis que nous avions commencé la discussion. Elle avait ce même regard dans les yeux que je n’avais vu que deux fois auparavant. Cela m’avait rappelé ce que j’avais entendu hier, quand elle m’avait dit : « Je ne céderai jamais à la violence ». Même si je me méfiais d’elle, Nanase pouvait très bien être notre seul pont avec la 2ndeD. Si nous nous étions vraiment rencontrés par hasard, alors je lui en étais sincèrement reconnaissant.

Horikita — Alors, laisse-moi te poser une question plus approfondie. Combien d’élèves ont du mal à trouver des partenaires en ce moment dans la 2ndeD ? À la louche, cotes d’aptitudes académiques mises à part.

Si l’application OAA indiquait quels élèves n’avaient pas encore trouvé de partenaire, elle ne disait rien sur la probabilité qu’un élève donné en trouve un. Le seul moyen était donc de demander à un de ses camarades de classe.

Nanase — Pour l’instant, je pense qu’environ quinze élèves sont dans ce cas-là.

Horikita — Quinze… C’est plus que ce que je pensais.

Cependant, de nombreux élèves de 1èreD n’avaient pas encore de partenaire non plus. En se coordonnant correctement, il devait y avoir assez de place pour que nos classes travaillent ensemble.

Horikita — Nanase-san. Si tu le permets, j’aimerais passer un accord avec toi et ta classe.

Nanase — Un accord, dis-tu ?

Horikita — J’espère que toi et moi pourrons finaliser un accord global

et créer quinze binômes d’un seul coup. La note d’Aptitude Acadé- mique qu’ils pourraient avoir n’aurait aucune importance. Et, naturelle- ment, il n’y aurait pas non plus de points en jeu. Il s’agirait d’une rela- tion égalitaire et collaborative, par et pour ceux qui ont besoin d’être aidés.

En d’autres termes, une relation basée sur des concessions et des compromis mutuels. Comme chacun y trouvait théoriquement son compte, les points et les sentiments privés n’avaient nullement besoin d’être impliqués. Les chances que quelqu’un soit expulsé pouvaient beaucoup diminuer rien qu’avec l’établissement de cet accord.

Cependant, les choses n’étaient pas aussi simples. Horikita et Nanase en étaient également conscientes.

Nanase — Cela part du principe que nous pouvons établir cet accord, en premier lieu. Mais il n’y a aucune garantie que nous pourrons sauver ceux de la classe de Horikita-senpai dont les capacités académiques avoisinent la note E. La majorité des élèves de ma classe qui ont du mal à trouver des partenaires ont des notes d’Aptitude Académique de C ou D.

Si, par exemple, l’indice le plus élevé d’Aptitude Académique qu’ils étaient prêts à proposer était un C+, il y avait d’énormes risques associés au fait de les mettre avec quelqu’un de notre classe qui est à E. Nous risquions d’être perdants dans tous les cas.

Horikita — C’est pourquoi j’aurai besoin que tu fasses de ton mieux pour que ça ne se passe pas comme ça.

Nanase — En effet. Toutefois, je ne pense toujours pas que nous parviendrons à un accord si facilement.

Nanase alla droit au but et exprima ses pensées sans le moindre détour.

Nanase — Hôsen-kun ne nous permettrait jamais de t’aider gratuite-

ment. Surtout pas maintenant.

La 1èreA avait réussi à maintenir un nombre élevé de points de classe depuis son inscription et avait ainsi accumulé une grande quantité de fonds. La 1èreC, bien qu’elle ait dépensé un grand nombre de points pour sauver Ryuuen à la fin de l’année dernière, avait le luxe d’un approvisionnement régulier grâce à son contrat avec Katsuragi et la classe A. Les élèves de la 1èreC avaient probablement une certaine quantité de points économisés également.

Étant donné que les deux classes se disputaient les élèves avec un tel nombre de points sur la table, il était tout naturel que les 2nde  se permettent d’être exigeants. On pouvait dire que le plan de Hôsen, la politique qu’il avait mise en place, était une façon intelligente de gérer cet examen.

Cependant, si le « marché » fluctuait pas mal, il ne faisait aucun doute que la 2ndeD exigeait des sommes assez excessives. Le faible nombre d’élèves de la 2ndeD qui avaient déjà finalisé leurs partenariats en était la preuve.

Horikita — Même si cela profite à tous les élèves de sa classe ? Il ne devrait pas y avoir d’inconvénients pour lui.

L’inconvénient était que les élèves les moins vendeurs étaient naturellement exclus de cette stratégie.

Nanase — Je comprends ce que tu essaies de dire, Horikita-senpai. Je ne peux qu’approuver la grande majorité de ce que tu as exposé jusqu’à présent.

Il semblait que, à titre personnel, Nanase était impressionnée par la proposition d’Horikita.

Cependant.

Nanase — C’est juste que… je ne pense toujours pas que Hôsen-kun le permettra.

Il y eut un court silence. Je pouvais vaguement deviner à quoi elle était en train

de penser, alors je pris la parole.

Moi — La seule chose dont je suis sûr, c’est que Hôsen ne collecte pas seulement des points pour lui-même.

Nanase — Qu’est-ce que tu veux dire ?

Moi — Au départ, je pensais que Hôsen demandait un nombre énorme de points pour les partenariats afin de tout rafler pour lui. Mais il se peut qu’il se serve des points dans l’autre sens, à savoir pour aider ses camarades ayant un indice d’aptitude académique plutôt faible. Quitte à collecter les points des autres.

Horikita — C’est effectivement vrai… Trois mois de points privés ne sont pas à dédaigner. Je préfèrerais donner la moitié des points à Hôsen-kun et me sauver plutôt que d’échouer à l’examen et de n’obtenir aucun point.

À en juger par ses actions jusqu’à présent et ce que j’ai pu comprendre des conversations avec Nanase, ce n’était néanmoins pas ce qu’il faisait.

Nanase — C’est exactement comme Ayanokôji-senpai l’a affirmé. Hôsen-kun n’a pas collecté de points des autres.

Il contrôlait la classe, imposant des règles. Et puis, quand quelqu’un enfreignait ces règles, il était complètement ostracisé par Hôsen et les élèves qui le suivaient. Ainsi donc personne n’allait oser trouver de partenaire sans la permission de Hôsen.

Les élèves de la 2ndeD ne s’étaient pas présentés à la rencontre car ils savaient dès le début qu’y assister était inutile.

Horikita — Ne pourrais-tu pas utiliser ton influence pour convaincre ne serait-ce que deux des élèves de ta classe capables d’étudier ?

Horikita demandait cela dans le cadre d’un acte de coopération mutuelle entre

les classes.

Comparés aux élèves de 1ère, les élèves de 2nde n’avaient pas autant d’attachement émotionnel à leur classe et à leurs amis. Il était tout simplement trop déraisonnable de s’attendre à ce qu’ils se soient liés dès la première ou les deux premières semaines après leur inscription.

Nanase — J’ai essayé de demander à plusieurs d’entre eux, mais aucun n’a déclaré être prêt à l’envisager.

Horikita — Donc la compensation en points est toujours une exigence absolue ?

Moi — Si nous n’avons besoin que de quelques personnes, ne pourrions- nous pas simplement passer un accord en utilisant des points ?

Je posai la question à Horikita. Si notre objectif était de prendre la première place au classement général comme les classes 2-A et 2-C, nous aurions eu besoin d’une énorme somme de points pour recruter un si grand nombre d’élèves compétents. Cependant, puisque notre objectif est juste d’empêcher les expulsions, nous n’avions besoin de recruter que quelques élèves, réduisant donc le budget nécessaire.

Horikita — Oui… Si nous n’avons vraiment pas d’autres options, c’est ce que nous devrons faire. Mais une relation construite sur des points privés ne peut être entretenue qu’avec plus de points privés. Je veux une relation qui va plus loin.

Après m’avoir répondu, Horikita se retourna et regarda Nanase droit dans les yeux.

Nanase — Que veux-tu dire par là, Horikita-senpai ?

Horikita — En ce moment, les 2nde et les 1ère sont sur des terrains de jeu différents. Les 2nde comme toi sont avantagés car tu n’as pas à supporter les  risques  d’expulsion.  Cependant,  cette  dynamique  ne  durera

sûrement pas éternellement. Tôt ou tard, le jour viendra où tu devras toi

aussi faire face au risque d’expulsion. Si tu n’as jamais rien fait de plus que d’établir des relations qui tournent autour de points, que feras-tu quand le moment sera venu et que la 2ndeD n’en aura pas assez ?

À ce moment-là, certains allaient être sauvés et d’autres laissés en cours de route.

Horikita — C’est pourquoi je veux travailler avec vous sur un pied d’égalité, et non pas dans une relation agressive basée sur les points. Je veux créer une relation de confiance. Une relation de confiance spé- ciale qui vient du fait d’être dans des années scolaires différentes.

Avec cela, Horikita préconisait que, lorsqu’un élève de la 2ndeD avait des problèmes, il pourrait nous consulter quand il le souhaitait. En bref, c’était similaire à la stratégie axée sur la confiance que mettait en place Ichinose. La principale différence étant qu’elle ne nécessitait pas la coopération de tout le monde, mais seulement celle d’une seule classe. Horikita ne cherchait pas à plaire à tous, mais uniquement à la 2ndeD.

Nous avions déjà entamé le quatrième jour de l’examen spécial et le temps nous était comptés. Nous ne pouvions pas nous permettre de perdre trop de temps. Cela avait probablement permis à Nanase de bien comprendre les intentions de Horikita. Mais, malgré cela, son expression tendue ne s’éclaircit pas.

Nanase — Je comprends parfaitement ce que tu dis, mais je ne pense pas que mes camarades puissent encore le comprendre. La plupart des élèves de 2nde sont désireux d’économiser autant de points privés que possible. Étant donné cela, s’associer à quelqu’un sans aucune forme de compensation serait considéré comme rien de plus qu’un gaspillage.

À cet égard, la seule option était de leur donner du temps pour comprendre le fonctionnement de l’école.

Horikita — Donc, pour résumer, tu dis qu’il y a deux obstacles à la collaboration avec la 2ndeD pour le moment : persuader Hôsen-kun, et

persuader les bons élèves qui ne jurent que par les points. Ce dernier

point reste le même quelle que soit la classe à laquelle tu as affaire, mais…

Il était vrai que, du moins en apparence, les avantages découlant d’une collaboration avec la 2ndeD semblaient faibles en raison des nombreux obstacles, Hôsen en particulier. Cependant, la réalité était différente.

Horikita en était-elle également consciente ?

Horikita — S’il te plaît, laisse-moi discuter des choses avec Hôsen-kun.

Horikita exprima sa demande, ayant décidé qu’il était impossible de faire avancer les discussions plus loin sans Hôsen.

Nanase — Tu as raison… Si nous voulons pousser cette relation plus loin, je suppose qu’il n’y a pas d’autre solution.

Horikita — Je serais prête à le rencontrer dès maintenant, si tu es d’accord.

Nanase — Très bien. Je vais l’appeler.

Nanase sortit son téléphone portable et se dirigea vers l’entrée de la bibliothèque.

Horikita — Il semble que l’influence de Hôsen-kun soit plus étendue que je ne l’imaginais.

Moi — Oui.

Horikita — Essayer de collaborer avec la 2ndeD comme ça… Je ne fais pas d’erreur, hein ?

Moi — Établir une relation de long terme n’est pas une mauvaise idée. On pourrait même dire que c’est la base. Sakayanagi et Ryuuen l’ont également compris en établissant des relations de confiance avec les

étudiants talentueux de 2nde en utilisant leur réputation et leurs points. Ichinose n’a pas le moindre point, mais elle essaie de construire ses propres relations de confiance en sauvant les faibles. Et ta stratégie est similaire à celle d’Ichinose, mais tu essaies d’établir des relations de confiance avec une seule classe, n’est-ce pas ? Les stratégies prennent toutes des formes et des tailles différentes, mais au final, elles sont toutes les mêmes. Tu es déjà en train de devenir un leader capable de rivaliser avec eux trois.

Horikita hocha la tête en entendant mes paroles. Avec cela, c’était à elle de s’assurer que les négociations allaient se dérouler sans problème.

Après avoir attendu un moment, nous remarquions que Nanase repassait la tête par l’entrée et nous faisait signe de venir vers elle.

Horikita — Je me demande si quelque chose est arrivé. Moi — Allons-y.

Nous avons tous les deux quitté la bibliothèque pour rejoindre Nanase dehors.

Nanase — Mille excuses, mes senpai. Uhm… Hôsen-kun est en ligne.

Nanase tendit son téléphone, le présentant à Horikita.

Horikita  prit  le  téléphone,  le  mit  en  mode  haut-parleur  et  entreprit  de confronter Hôsen.

Horikita — Désolée de t’avoir fait attendre.

Hôsen — Yo. J’ai entendu l’essentiel de l’histoire par Nanase.

Horikita — J’aimerais te rencontrer en personne et t’expliquer moi- même, si possible.

Hôsen — Pas besoin. Se rencontrer servira à rien !

Après un rire audible en arrière-plan, Hôsen prit la parole.

Horikita — Tu veux dire que tu n’es même pas prêt à négocier ?

Hôsen — Exactement. Je voulais même pas te parler par téléphone, mais Nanase a insisté.

Nanase — Mais Hôsen-kun, je pense que nous devrions considérer ce que Horikita-senpai a à dire.

Hôsen — Mais ta gueule, bordel ! Pour qui tu te prends ? Hein ? Je vais te buter !

Nanase — Je n’ai aucun intérêt à être tuée, mais s’il te plaît, rencontre Horikita-senpai au moins cette fois.

Hôsen — Ne me recontacte pas à moins que tu ne sois prête à parler points.

Nanase essaya de dire autre chose, mais Hôsen raccrocha.

Elle essaya immédiatement de le rappeler. Mais, peu importe le nombre de tentatives, celles-ci demeuraient infructueuses.

Nanase — …Je suis sincèrement navrée.

Nanase baissa la tête autant qu’elle le pouvait, en s’excusant auprès de nous deux. Mais Nanase n’avait rien fait de mal.

Horikita — Relève la tête. Mon plan est complètement différent de celui de Hôsen-kun, alors il ne sera pas facile de faire les choses correctement. Je te suis très reconnaissante d’avoir accepté de nous donner un coup de main comme ça.

Nanase — Que…

Horikita — Restons-en là pour aujourd’hui. Nous devrons trouver autre

chose si nous voulons discuter avec Hôsen-kun. Dans tous les cas, j’aimerais que tout soit bouclé d’ici la fin de la semaine.

Plus longtemps que ça et Horikita allait probablement devoir se concentrer sur une autre classe. Cela dit, j’espérais vraiment que ça ne se passerait pas comme ça. Combattre les trois autres classes pour des élèves après que la plupart d’entre elles étaient déjà prise d’assaut relevait du fantasme.

Nanase — Je suis très heureuse que tu n’aies pas encore abandonné, Horikita-senpai, mais…

Nanase retint les mots qui étaient sur le point de quitter sa bouche. Elle avait probablement voulu dire qu’il était impossible de former une relation collaborative avec Hôsen, mais ne voulait pas officiellement le formuler.

Horikita — Au moins, il a pu se faire une petite idée de ce que je veux faire. Cela devrait être suffisant pour l’instant.

Bien que le temps soit compté et que nous étions sous pression, Horikita rassura Nanase en mettant fin à notre entrevue.

Horikita proposa que nous rentrions tous ensemble, mais il semblait que Nanase avait quelque part où aller. Après nous avoir dit qu’elle espérait nous retrouver demain à la bibliothèque, elle partit.

Elle partit peut-être pour aller retrouver Hôsen, d’ailleurs.

Horikita — Allons-y. Il me reste encore beaucoup de choses à faire aujourd’hui.

Il semblait que Horikita avait prévu d’organiser une séance d’étude avec Sudou et quelques autres après être retournée dans sa chambre.

Horikita — Ah, et il est grand temps que tu clarifies ton plan pour trouver ton propre partenaire aussi. Vas-tu te débrouiller tout seul ou prévois-

tu de me le déléguer également ? Cela pourrait avoir une incidence sur

la façon dont les choses se déroulent plus tard.

Après tout, si nous parvenions à entamer des négociations avec Hôsen, il allait nous falloir déclarer le nombre exact de personnes impliquées dans l’accord.

Moi — Il y a peut-être déjà quelqu’un que j’ai en tête pour ça.

Horikita — Donc au lieu de chercher quelqu’un avec une certaine note d’aptitude académique, tu cherches quelqu’un de spécifique ? Qui ?

Moi — C’est un secret.

Horikita — Un secret… ? Tu as vraiment besoin de me le cacher ?

Moi — Je ne suis encore sûr de rien pour l’instant. Je n’ai réussi à me faire une idée de vraiment personne pour l’instant.

Horikita — Est-ce important ? Tout le monde fait avec. Et ce n’est pas grave de demander de l’aide.

Moi — Tu n’as pas tort. Je pensais avoir une meilleure idée aujourd’hui, mais… Eh bien, je prendrai ma décision à la fin de la semaine au plus tard.

Horikita — Si tu le dis, mais… Je ne peux rien promettre si tu viens me voir la queue entre les jambes à la dernière minute, d’accord ?

Moi — Je garderai ça à l’esprit. Bref, je voulais te demander plus tôt… Comment te sens-tu ?

Horikita —…Es-tu inquiet pour moi ?

Moi — Même s’il n’y a pas besoin de s’inquiéter pour toi niveau forme pour le moment, il reste encore pas mal de temps avant l’examen spécial tu sais.

Si elle devait manquer d’énergie juste avant la fin, cela pouvait affecter ses

performances le jour J. Elle organisait des séances d’étude jour après jour, sans compter tout le temps qu’elle avait passé à gérer le défi culinaire d’Amasawa hier. Il était tout à fait naturel que la fatigue continue progressivement à s’accumuler.

Horikita — C’est vrai que je suis peut-être en train de m’épuiser, mais je n’ai pas le temps de me reposer pour le moment. Je ne vais pas m’effondrer avant la fin de l’examen spécial.

Plutôt qu’une simple démonstration de courage, c’était plutôt comme si elle avait adopté une mentalité convenant à quelqu’un qui cherche à mener la classe au combat.

Yôsuke et Kushida offrant leur aide était une chose, mais les élèves ayant d’excellentes notes d’aptitudes académiques comme Keisei et Mii-chan avaient également proposé d’aider Horikita depuis le tout début de l’examen. Ainsi Horikita avait donc décidé d’aller de l’avant avec son plan de collaboration pour l’avenir avec la 2ndeD.

Et un leader ne peut pas vaciller, sous peine que cela influe négativement l’entièreté de la classe.

Dans une course contre la montre, la partie la plus cruciale de tout cela était de trouver comment solidifier le plan d’action de notre classe pendant cette période préliminaire de l’examen.

1

Il faisait assez frais ce soir-là.

J’étais aux fourneaux, utilisant la grande quantité d’ingrédients me restant de la virée shopping de la veille. Bien sûr, cette fois, je m’aidais de recettes et des vidéos.

En fait, j’avais décidé de me faire le plat que j’avais déjà préparé pour Amasawa la veille. Le nom du plat, tom yum goong, était une combinaison de trois mots thaïlandais différents, signifiant respectivement « bouilli », « mélangé » et « crevettes ».

Moi — C’est spécial mais ce n’est pas mauvais.

La façon dont sa saveur épicée mais aigre s’empara de ma bouche ainsi que son arôme distinct atteint mon nez me donnait l’impression que c’était le genre de plat à pouvoir rendre accro certains.

Après avoir nettoyé, j’allumai le ventilateur au-dessus de ma cuisinière, cherchant à faire sortir l’odeur qui avait rempli la pièce. Je finis par remarquer que mon téléphone vibrait sur mon lit, le son étant noyé par le bruit du ventilateur. J’avais pensé à simplement rappeler plus tard, mais ça insistait tellement que je finis par rappeler.

Karuizawa — T’en as mis du temps !

C’était la première fois que Kei prenait l’initiative de m’appeler depuis quelques jours. La dernière fois, c’était au moment où l’examen spécial venait de commencer. La première chose qui sortit de sa bouche était une plainte.

Karuizawa — C’est toi qui m’as demandé de t’appeler à cette heure-ci en plus ! Aller !!

Moi — Oui, désolé. Alors, en as-tu appris davantage sur cette chose que

je t’avais demandé de creuser ce matin ?

Karuizawa — J’appelle justement parce que j’ai bien fait mes recherches. Un peu de reconnaissance veux-tu ?

Moi — Bien sûr que je suis reconnaissant. Alors… ?

Karuizawa — Bah on ne dirait pas ! Enfin, peu importe. Selon la personne du magasin, un seul d’entre eux a été vendu depuis avril. Ils m’ont dit qu’ils ne vendaient pratiquement jamais ce modèle en général, en vendre un ou deux par an est déjà une performance d’après eux. Mais le truc, c’est qu’apparemment un des nouveaux élèves a essayé d’en acheter un aussi.

Il n’était pas nécessaire de me parler de l’identité de la personne qui en a acheté un récemment. J’étais bien plus intéressé par le nouvel élève.

Moi — Essayé… Donc il n’a pas pu ?

Il n’y avait aucun moyen physique pour que ce nouvel élève de 2nde ne puisse pas l’acheter, à moins qu’il ait fait quelque chose d’absurde comme dépenser tous ses points immédiatement après son arrivée à l’école. Et, étant donné le lot de nouveaux élèves de cette année, je n’avais pas l’impression que c’était leur genre.

Karuizawa — Apparemment, au moment où le 2nde était sur le point de payer à la caisse, quelqu’un d’autre est arrivé et l’a empêché de conclure la vente. Quoi qu’il en soit, le vendeur m’a dit que l’élève qui a essayé d’en acheter un avait l’air….

Alors que Kei décrivait l’apparence de l’élève, je commençais à faire le tri dans ma tête. C’était un peu… non, considérablement différent de ce que j’avais en tête au départ. Je n’aurais jamais pensé à « cette personne », en tout cas.

Moi — Le greffier a-t-il dit quelque chose sur la personne qui a empêché le 2nde de l’acheter ?

Karuizawa — Non, il n’en savait pas grand-chose. Il a juste dit qu’il était presque sûr que c’était une fille.

Les élèves doivent présenter leur carte d’étudiant pour faire des achats, donc même si le commis connaissait le nom de la personne ayant essayé d’acheter l’article, il ne savait rien de la personne qui avait empêché la vente.

Karuizawa — Mes informations ont-elles été utiles ?

Moi — Oui. Encore plus que je m’y attendais !

Karuizawa — Hehe, je suis super douée, après tout. Assure-toi de me remercier correctement, ok ? Mais genre, pourquoi tu m’as demandé de chercher quelque chose comme ça ? Je ne comprends vraiment pas.

Moi — Moi non plus.

Karuizawa — Quo… ?

J’avais espéré que le fait qu’elle se renseigne aiderait à expliquer ce que je voulais, mais au final ça dépassait tout ce que j’imaginais. En fait, ça collait plus ou moins avec ce que je m’étais fait dans ma tête comme scénario, tellement que moi-même trouvais ça assez flippant.

Moi — En y réfléchissant, j’ai entendu dire que tu avais déjà trouvé un partenaire pour l’examen spécial.

Karuizawa — Ah, oui. Shimazaki-san de la 2ndeB ouais. J’ai l’impression d’avoir été sauvée grâce à Kushida-san.

Maintenant que notre affaire principale était réglée, je changeai légèrement de sujet.

Moi — Je ne pense pas que tu aies un mauvais partenaire. Mais, Kei, tu t’en sors pour les révisions ?

Karuizawa — Eh bien, euh, comment dire… ? Je vais m’y mettre plus

tard !

Je le savais. Je n’avais pas encore entendu dire qu’elle avait assisté à l’une des séances d’étude.

Moi — Cet examen n’est pas quelque chose que tu peux prendre à la légère. Tu as un indice D+ scolairement. Si tu ne fais pas attention à tes notes, tu risques de souffrir plus tard.

Karuizawa — Je sais, je sais. Juste j’arrive pas à me motiver. Et, genre, même si j’allais dans un groupe d’étude, ce n’est pas comme si tu serais là tu vois…

Moi — Alors tu étudierais assidûment si j’y étais ?

Karuizawa —…Euh, oui… Je travaillerais dur devant mon petit ami !!

Je n’étais pas sûr que ce soit vrai ou non, mais puisqu’elle le disait, la solution était évidente.

Moi — Alors voyons… Que dirais-tu de venir dans ma chambre vers 6 heures demain ?

Étant donné que nous avions rendez-vous avec Nanase après les cours le lendemain, cela semblait être l’heure adéquate pour se voir.

Karuizawa — Alors je peux venir squatter chez toi !? Moi — Tu seras ici pour étudier, pas pour « squatter ». Karuizawa — Eh ?

Moi — Pas de « eh ». Je vais t’aider à étudier. Ça devrait au moins te motiver, non ?

Pour commencer, j’allais voir ce dont elle était capable. Et s’il s’avérait qu’elle

devait participer à des séances d’étude supplémentaires, alors j’allais sans doute l’inciter à le faire.

Karuizawa — Tu t’inquiètes parce que tu serais vraiment triste si ta petite amie se faisait expulser, hein~ ?

Elle demanda soudainement, des traces notables d’excitation dans sa voix, presque comme si elle pensait avoir le dessus maintenant. J’étais tenté de la taquiner un peu en réponse, mais je m’étais dit qu’elle allait sûrement être plus motivée si je la suivais un peu dans son délire.

Moi — Eh bien c’est normal, non ? Si la petite amie que je venais juste de commencer à fréquenter se faisait expulser, ce ne serait pas drôle.

Karuizawa — Je vois~ C’est vrai, n’est-ce pas ! Eh bien, je suppose que je n’ai pas d’autre choix. En fait, j’avais prévu toutes sortes de choses pour demain, mais je vais faire une apparition spéciale, juste pour toi.

Bien que ce n’était qu’un petit pas, c’était toujours ça pour qu’elle avance dans ses études.

Karuizawa — Qu’est-ce que je dois apporter avec moi ?

Moi — J’ai déjà tout ce dont tu as besoin dans ma chambre. Ne sois juste pas en retard et ça devrait aller.

Karuizawa — Ok~ !

Moi — Bien alors, je vais raccrocher maintenant.

Karuizawa — Quo !? Attends ! Attends ! On a fait que parler de l’examen spécial et des études…

Apparemment, elle voulait discuter de quelque chose qui n’avait rien à voir avec tout ça.

Moi — Tu marques un point.

Karuizawa — Hmm, tu es sérieux…

Bien que nous n’ayons plus parlé de quoi que ce soit en rapport avec l’examen ou les études après cela, elle continua quand même à s’en prendre à moi.

2

Le vendredi, cinquième jour de l’examen spécial, le nombre de paires finalisées était passé à 81, ce qui signifiait qu’un peu plus de la moitié de tous les élèves avaient pris leur décision. Le nombre d’élèves de la 1èreD ayant trouvé un partenaire avait également commencé à augmenter.

Il en était de même pour ceux dont j’étais proche. J’étais déjà au courant de la décision de Kei grâce à notre discussion d’hier, mais Airi et Haruka du groupe Ayanokôji avaient également pris la leur. La force motrice derrière tout cela n’était autre que Kushida. Elle était en grande partie responsable de la présentation de nos camarades aux élèves de la 2ndeB grâce à sa collaboration avec Yagami, un élève de 2nde provenant du même collège qu’elle.

Cependant, ce n’était pas du tout une  solution parfaite pour  tout. Pour commencer, même si Yagami gagnait progressivement une réputation positive au sein de sa propre classe, il ne semblait pas avoir l’intention de devenir un leader. Ainsi, il coopérait simplement avec nous à titre individuel. Il n’était pas raisonnable d’attendre de lui qu’il puisse fournir suffisamment d’élèves pour couvrir tous ceux qui avaient besoin d’un partenaire dans la 1èreD. Yagami avait proposé son aide à une seule condition : qu’il fasse équipe avec Kushida. Et, comme l’indiquent les informations fournies dans l’application OAA, c’était exactement ce qui s’était passé la veille.

Nous avions dû utiliser Kushida, l’une de nos meilleures élèves scolairement, mais Horikita ne semblait pas le moins du monde en être mécontente car les avantages avaient largement dépassé les frais encourus. De plus, il nous restait encore plusieurs élèves talentueux sur la table, comme Yōsuke, Keisei, Mii- chan, Matsushita, et même Horikita elle-même.

Mais ce n’était pas pour ça que l’on pouvait se reposer sur nos lauriers. En effet, le plus dur était à venir : étudier. L’examen ne débutait vraiment qu’une fois le partenaire choisi.

Même si je ne parlais pas beaucoup avec les autres, je pouvais ressentir un

sentiment d’unité dans notre classe car tout le monde commençait à s’entraider. Ce n’était probablement possible que parce que nous étions des camarades qui s’étaient serrés les coudes contre vents et marées au cours de l’année passée.

Mais malgré l’atmosphère unifiée… Un élève se leva de son siège, apparemment sur le point de rentrer chez lui pour la journée. Horikita entreprit de lui adresser la parole, comme si elle avait attendu qu’il tente de partir.

Horikita — Il semble que tu n’aies toujours pas trouvé de partenaire, Kôenji-kun.

Kôenji — Et qu’est-ce qu’il y a de mal à ça ?

Il s’agissait d’une intervention auprès de la seule personne de la classe qui ne faisait pas partie de ce sentiment d’unité.

Horikita — En tant que camarade de classe, j’ai juste pensé que je devais te demander quelle était ta situation actuelle.

Même les élèves qui faisaient habituellement les choses de leur côté essayaient toujours de tenir un minimum au courant. Mais Kôenji n’était pas du genre à dire quoi que ce soit à qui que ce soit, alors il était difficile de savoir ce qu’il préparait.

Horikita — Tu es intelligent. Tu n’as jamais envisagé l’idée que tu pourrais être expulsé, n’est-ce pas ?

Kôenji — Bien sûr.

Horikita — C’est juste. Te connaissant, même si tu devais te mettre avec un élève ayant des notes similaires à celles d’Ike-kun, tu obtiendrais facilement près de 400 points. Je pense que tu es plutôt en sécurité.

Kôenji aurait pu être un atout de taille en tant que l’un des élèves les plus

doués sur le plan scolaire de la classe. C’était probablement la raison pour laquelle Horikita l’avait abordé, mais…

Kôenji — Fufufu. Je n’ai pas l’intention de faire quoi que ce soit pour cet examen spécial. Tout ce qui compte, c’est que celui qui devient mon partenaire obtienne au moins 150 points. Tant qu’il fait le strict minimum, il ne devrait pas y avoir d’effort à faire pour que j’obtienne un score qui dépasse les critères de passage.

Selon Chabashira, tout le monde devait pouvoir obtenir un total de 150 points à l’examen, au minimum. À moins d’être dans mon cas et de me retrouver avec l’élève de la White Room qui était prêt à se saborder, bien sûr.

Cependant, la nécessité de compter sur son partenaire était inévitable. En effet, 150 points était ce que les gens étaient capables d’obtenir aisément, mais rien ne disait que la probité d’atteindre ce score était de 100%. Au mieux, pour motiver les élèves à le faire, l’école avait établi une règle stipulant que les élèves dont les résultats s’écartaient trop de ce que l’on attendait d’eux, compte tenu de leurs notes d’aptitudes académiques, seraient expulsés. Et c’était grâce à cela que Kôenji pouvait se permettre d’être confiant. Il n’avait pas besoin de se donner la peine d’assister à des discussions ou de nouer des relations avec les nouveaux élèves.

Horikita — En d’autres termes, tu dis que la personne avec laquelle tu finis par t’associer n’a pas d’importance, n’est-ce pas ? Si c’est le cas, tu me permets de te trouver quelqu’un ? Je sais que tu penses que tout ira bien, peu importe avec qui tu finiras, mais il serait plus sûr d’éviter d’encourir la pénalité de 5 % qu’entraînerait le fait de ne pas trouver de partenaire.

Elle proposait ça l’air de rien, une proposition qui n’avait aucun inconvénient visible.

Kôenji — Tu n’as certainement pas tort, mais permets-moi de refuser. Horikita —…Pourquoi ? Je peux te demander de me donner une raison ?

Kôenji — Parce que je le vaux bien. Tout simplement !

Pour faire simple, il ne voulait pas être utilisé à la convenance de Horikita.

Kôenji était Kôenji, quelle que soit la situation. Si je devais me retrouver dans une position où je devais me servir de lui pour sortir vainqueur, il serait sûrement plus intelligent de trouver une alternative.

Kôenji — Satisfaite ?

Après avoir reçu cette question, il n’y avait rien d’autre que Horikita pouvait dire. Après tout, Kôenji n’était pas un adversaire qu’elle pouvait forcer à agir, même si elle essayait. Au mieux elle y aurait perdu son temps.

Horikita — Oui. Pour l’instant. Mais, tu ne peux pas continuer comme ça pour toujours. Lorsque le moment viendra et que la classe devra vraiment travailler ensemble, tu devras aussi faire ta part.

Elle ne parlait pas de cet examen spécial en particulier. Elle avait plutôt les yeux rivés sur l’avenir. Horikita voulait qu’il garde cela à l’esprit.

Kôenji — Je comprends que tu veuilles compter sur quelqu’un d’aussi parfait que moi, mais je ne participerai probablement jamais à tout ce cirque !

Peu désireux de prêter davantage oreille à Horikita, Kôenji se retourna et quitta la classe, se dirigeant on ne savait trop où.

Moi — Kôenji est ingérable, n’est-ce pas ?

Je pris la parole, même si je l’avais fait sans trop m’en rendre compte.

Horikita — Je suis juste irritée parce que notre classe serait tellement plus forte s’il prenait les choses au sérieux.

Il n’y avait rien de plus frustrant que d’avoir une arme secrète inutilisable. Puis

Horikita détestait ne pas avoir le contrôle.

Moi — Si j’étais toi, je ne compterais pas trop sur lui.

Pour le bien de l’avenir, il était probablement plus facile pour elle de laisser Kôenji dans sa marginalité.

Horikita — Je n’abandonnerai pas.

Moi —…C’est vrai ?

Eh bien, même si tourner en rond en n’accomplissant rien n’était pas la meilleure utilisation de son temps, au moins elle était motivée.

3

Dès que nous avions mis le pied dans la bibliothèque, j’avais remarqué qu’elle était enveloppée d’une atmosphère complètement différente par rapport à l’autre jour. De nombreux élèves, aussi bien de 2nde que de 1ère, étaient rassemblés à l’intérieur, des cahiers et des tablettes étalés devant eux. Ils participaient à ce qui semblait être différents groupes d’étude.

Il semblait que la plupart des élèves avaient immédiatement mis les bouchées doubles après avoir trouvé un partenaire !

Pour une raison quelconque, cela m’avait rappelé l’époque où notre classe avait organisé une session d’étude ici, il y a un an.

Moi — Eh bien, c’est un peu troublant. C’est très fréquenté aujourd’hui, alors on risque de se faire remarquer un peu.

Horikita — Essayons de nous fondre dans la masse alors.

Heureusement, les sièges que nous avions utilisés hier au fond de la bibliothèque étaient encore disponibles. Comme il n’aurait pas été étrange que les sièges soient occupés, je me retournai et regardai une certaine personne ailleurs dans la bibliothèque. Il n’a pas fallu longtemps avant que Hiyori ne remarque mon regard et me fasse signe avec un doux sourire en s’approchant de nous.

Hiyori — Je me suis dit qu’Ayanokôji-kun et Horikita-san allaient sûrement venir aujourd’hui aussi, alors j’ai fait réserver ces sièges pour vous.

Moi — Tu es sûre que ça ira ?

Hiyori — Ça aurait été une autre histoire si la bibliothèque avait été remplie, mais là n’y a pas besoin de s’inquiéter !

Étant donné la taille de la bibliothèque, il y avait suffisamment de place pour tout le monde. Néanmoins, j’avais apprécié sa considération.

Hiyori — Allez-y, n’hésitez pas à prendre tout le temps dont vous avez besoin pour discuter !

Sur ce, Hiyori partit, ne souhaitant visiblement pas s’attarder davantage.

Horikita — Elle est vraiment sympa ! Tu crois qu’elle a entendu notre conversation d’hier ?

Moi — C’est difficile à dire. Je pense que ce serait compliqué étant donné la distance.

Ainsi donc nous nous installâmes aux mêmes sièges que la veille dans la mesure où on nous les avait exprès gardés. Nous avons sorti tout notre matériel d’étude de nos sacs et avions commencé à faire comme si nous étions là pour étudier.

Cependant, même après quelques temps, Nanase ne semblait pas apparaître.

Horikita — Nanase-san est en retard.

L’heure de rendez-vous était censée être après l’école à 16h30, mais il était déjà 17h00 passé. Je lui avais envoyé plusieurs messages, mais aucun n’avait été ouvert. Peut-être lui était-il arrivé quelque chose ? Enfin, même si nous voulions aller voir, ce n’était pas comme si nous savions où elle était.

Horikita — Devrions-nous aller jeter un coup d’œil dans les classes de 2nde, pour l’instant…?

Juste au moment où nous étions sur le point d’aller la chercher, Nanase apparut à l’entrée de la bibliothèque, apparemment énervée. Une fois qu’elle remarqua où nous étions, elle s’approcha de notre table, visiblement essoufflée.

Nanase — Je m’excuse. Je vous ai fait attendre un long moment…

Horikita — Ce n’est pas grave. J’étais juste inquiète que quelque chose ait pu t’arriver en cours de route.

Nanase — J’étais occupée à négocier avec Hôsen-kun, à essayer de le convaincre de m’accompagner d’une manière ou d’une autre.

Horikita — Je me doute… Mais il semble bien que ce fut infructueux.

Étant donné qu’elle était venue seule, il ne semblait pas que quelqu’un d’autre était au programme.

Horikita — Cela dit, il ne t’a pas empêchée de venir nous parler aujourd’hui ?

Nanase — Il ne l’a pas fait, non. Il pense probablement que rien ne sera finalisé sans lui.

Peu importe à quel point Nanase pouvait essayer de son côté, c’était Hôsen qui allait avoir le dernier mot. Il avait tellement confiance en son autorité qu’il n’allait pas se préoccuper du moindre des petits mouvements de Nanase.

Horikita — Il semble que nous n’ayons pas d’autre choix que de le forcer à nous rejoindre après tout.

Nanase — C’est…

Horikita — Je comprends déjà que les choses ne seront pas résolues facilement. Mais si nous ne discutons pas de cela en personne, nous ne ferons que tourner perpétuellement autour du pot.

Cela semblait être la dernière chose que Horikita voulait.

Nanase — C’est certainement le cas… Mais…

Nanase s’arrêta alors qu’elle semblait hésiter sur quelque chose, mais elle reprit.

Nanase — Horikita-senpai veut établir une relation de collaboration mutuelle avec la 2ndeD, quoi qu’il en coûte, n’est-ce pas ? Ou est-ce que je comprends mal quelque chose ?

Horikita — Oui. C’est exactement ça.

Nanase — Alors… puis-je te demander d’écouter une de mes propositions ?

Alors Nanase était venue avec quelques idées en tête.

Nanase — Même si je proposais ça à Hôsen-kun, il est clair que je finirais par être rejetée. Je pense que ce serait la même chose même si Horikita- senpai devait le rencontrer personnellement. Cela étant, que dirais-tu si toi et moi procédions à des négociations en secret ?

Horikita — Procéder à des négociations en secret ? Mais tes camarades de classe n’obéiraient pas ainsi sans la permission d’Hôsen-kun, n’est- ce pas ?

Nanase — Oui. Cependant, c’est parce que je ne me suis pas encore imposée en tant que leader.

Sur ce, Nanase nous présenta une proposition inattendue.

Nanase — J’ai jugé que ma classe ne survivra pas longtemps si nous continuons avec la façon de faire de Hôsen-kun. J’espère donc devenir le leader de la classe D avant que ses idéaux dangereux ne s’incrustent dans l’esprit de la classe. Et, en guise de tremplin pour cela, j’aimerais nouer une relation avec la 1èreD.

Horikita et moi ne nous attendions pas à ce qu’elle en vienne à ça, à savoir un récit racontant comment Nanase Tsubasa allait défaire Hôsen et devenir le chef de la 2ndeD.

Si  cela  arrivait,  l’objectif  de  Horikita  d’établir  une  relation  égalitaire  et

collaborative n’allait peut-être pas être si fantaisiste.

Horikita — Nous n’avons pas de base pour juger lequel d’entre vous est le mieux placé pour être leader. Quoi qu’il en soit, la seule chose que je peux dire avec certitude, c’est que nous manquons de temps.

Avec l’examen spécial qui approchait à grands pas, nous ne pouvions tout simplement pas nous permettre d’être ralentis par une lutte interne.

Nanase — Beaucoup de mes camarades de classe n’approuvent pas la façon dont Hôsen-kun fait les choses. En fait, après avoir abordé le sujet ces derniers jours, j’ai réussi à convaincre sept d’entre eux d’accepter de m’aider.

Horikita — Et il ne s’agit pas seulement d’élèves ayant un faible indice d’aptitudes académiques ?

Nanase — En effet. Sur ces sept élèves qui sont prêts à négocier, trois ont des notes d’Aptitudes académiques de B- ou plus.

Horikita —…Je vois.

Horikita réfléchit à tout cela pendant un moment. Trois personnes n’étaient en aucun cas parfaites, mais si ce nombre augmentait encore un peu, former une relation de collaboration avec Nanase comme point central pouvait se révéler très intéressant.

Horikita — Ne risquerais-tu pas gros si Hôsen-kun se rendait compte de ce que nous faisions ?

Nanase — Inutile de dire que ce serait un désastre. C’est pourquoi nous devrions agir dans la plus grande confidentialité jusqu’à la date limite pour choisir nos partenaires, le jour de l’examen. En effet, il ne se doutera de rien si nous soumettons les candidatures au dernier moment.

Horikita — Mais il serait alors difficile de convaincre les meilleurs élèves,

pas vrai ?

On ne pouvait pas changer le fait que les élèves ayant des notes d’aptitudes académiques élevées voulaient recevoir des points privés en compensation.

Nanase — Notre classe t’aidera. Ceux d’entre nous qui ne sont pas très doués pour étudier pourront éviter la pénalité de trois mois grâce à toi et à tes camarades de classe. En d’autres termes, ils pourraient t’aider en payant trois mois de points. Ainsi, 200 000 points est une somme pour laquelle nous rentrerons largement dans nos frais. Bien que ce soit pour bien moins que les 500 000 points par personne recherchés par Hôsen-kun, cela devrait tout de même rester dans le cadre que mes camarades de classe trouveraient acceptable.

En bref, cela signifiait qu’ils allaient devoir un peu abaisser leurs critères. À l’origine, c’est nous qui devions séduire les élèves d’honneur avec des points pour nous servir d’eux, mais avec cette stratégie les élèves de 2ndeD les moins capables allaient aussi participer à ce système.

Nanase — De cette façon, c’est gagnant-gagnant. Bien sûr, Hôsen-kun sera en colère lorsqu’il apprendra ce que nous avons fait, mais j’en prendrai l’entière responsabilité pour qu’aucun mal ne soit fait à ceux qui ont prêté main forte. Qu’en penses-tu ?

Horikita — C’est… Peu importe à quel point tu veux devenir le chef de ta classe, cette proposition ne t’imposerait-elle pas un fardeau bien trop lourd ?

Nanase — C’est bon. Tu as pris la peine de me tendre la main, alors je ne veux pas perdre la confiance que tu m’as témoignée ou l’opportunité que tu m’as présentée.

Nanase semblait dire que c’était un prix bon marché à payer si cela signifiait que ses camarades de classe étaient en sécurité.

Nanase — De plus, même si je ne suis pas reconnue comme la leader de

ma classe, j’aurai au moins aidé la tienne lors de cet examen.

En ne considérant que les bénéfices immédiats, la proposition de Nanase n’était pas du tout inintéressante. J’étais vraiment curieux de savoir ce que Horikita allait en penser.

Horikita — Grâce à ça, je suis maintenant absolument certaine que je veux entretenir une relation étroite avec la 2ndeD.

Nanase — Alors, cela veut dire que tu es d’accord avec ma proposition ? Horikita — Non. Je ne peux néanmoins pas accepter.

Nanase — Mais il n’y a pas d’autre moyen…

Horikita — Tous les problèmes de la 2ndeD seront résolus si tu pouvais simplement mettre Hôsen-kun de ton côté. Je ne pense pas que tu veuilles réellement devenir le leader de ta classe. Tu n’aimes simplement pas la façon dont Hôsen-kun fait les choses. Cela étant, si Hôsen acceptait de négocier, il devrait y avoir beaucoup d’élèves prêts à nous suivre.

Nanase — C’est… Eh bien, oui. Je le conçois.

Horikita — De plus, si toi et Hôsen-kun êtes en conflit l’un avec l’autre, il est possible que la 2ndeD finisse divisée en deux au lieu d’être unie. Il n’y a aucune chance que je laisse cela se produire. Alors, et si tu me laissais plutôt t’aider à le faire changer d’avis ?

Apparemment, cette conversation avec Nanase avait permis à Horikita de réaliser quelque chose également. Que vaincre Hôsen était la clé de nos problèmes.

Nanase — C’est un pari risqué. Si nous échouons, il se peut que la 2ndeD et la 1èreD ne puissent plus travailler ensemble à l’avenir.

Horikita — Je suis préparée à cela… Mais je pense qu’il y a de bonnes

chances que nos classes puissent travailler ensemble. Et ce n’est pas seulement moi, je suis sûre que Hôsen-kun pense la même chose.

Nanase — Même s’il a été très impoli avec toi au téléphone, hier ?

Horikita — Je dirais simplement qu’il est du genre tsundere2. Du moins pour l’instant.

Ayant compris ce que Horikita essayait de dire, Nanase hocha la tête en signe d’accord.

Nanase — J’ai eu raison de prendre le temps de rencontrer Horikita- senpai et Ayanokôji-senpai à nouveau aujourd’hui. Il semble que mon intuition n’était pas incorrecte après tout.

Horikita — Qu’est-ce que tu veux dire par là ? J’ai rejeté ta proposition, après tout.

Nanase — Non, tu n’as rien rejeté du tout. Toi et moi sommes sur la même longueur d’onde depuis le tout début.

Horikita — Cela… Cela veut dire que tu pensais aussi essayer de le persuader pendant tout ce temps ?

Nanase — C’est exact.

Apparemment, la proposition que Nanase avait faite était une sorte de test.

Elle avait donné le choix à Horikita de négliger l’avenir de la 2ndeD pour un profit à court terme. Si Horikita avait accepté son offre, elle n’aurait pas été disposée à collaborer davantage avec nous.

Nanase — Comme Horikita-senpai l’a dit plus tôt, nous manquons de temps. Nous ne pouvons pas avancer sans vous réunir tous les deux

2 Tsundere : type de personnalité paraissant de prime abord agressive ou violente, mais cachant une nature plus douce et conciliante.

dans la même pièce, même si cela signifie que nous devons forcer les

choses. Pourrais-tu me donner un peu de temps afin de mettre en place les préparatifs pour vous faire rencontrer ? Je vais certainement amener Hôsen-kun devant toi d’ici dimanche, après-demain.

Il ne semblait pas que Nanase nous testait cette fois-ci, vu le sérieux avec lequel elle baissa la tête devant Horikita.

Mais, d’ici dimanche, le temps qu’il nous restait allait naturellement diminuer. À cause de cela, Horikita se retourna et me regarda, ses yeux hésitant à chercher une confirmation. Pensant qu’il n’y avait rien de mal à prendre un risque, je lui fis un signe de tête qui fit disparaître l’hésitation dans ses yeux.

Horikita — Je m’en remets donc à toi. J’ai hâte de rencontrer Hôsen-kun dimanche, après-demain.

Nanase — Oui… Absolument. Cependant, j’aimerais éviter autant que possible une rencontre dans un lieu public. Après tout, Hôsen-kun pourrait agir de façon assez imprudente selon les circonstances.

Horikita — Très bien. Alors pourquoi ne pas louer une salle de karaoké

? Je suis également d’accord pour qu’on se rencontre pendant la soirée si c’est plus pratique pour lui.

En effet, se rencontrer au cœur de la nuit un dimanche réduirait considérablement le risque d’être vus par les autres.

Nanase — Très bien. Je m’assurerai donc qu’il le sache.

Juste au moment où la conversation commençait à prendre forme, le téléphone portable de Horikita vibra. Après avoir regardé le message qu’elle avait reçu, elle laissa échapper un soupir.

Moi — Qu’est-ce qu’il y a ?

Horikita — La session d’étude. On dirait qu’ils sont à court de bras puisque je ne suis pas là.

Avant que je ne le réalise, il était déjà 17h30.

Horikita — Je pense que nous venons de terminer cette conversation. Puis-je te demander de t’occuper du reste, Ayanokôji-kun ?

Moi — Pas de problème !

Après une légère révérence à Nanase, Horikita rassembla rapidement ses affaires et partit pour la séance d’étude.

Horikita était chargée de soutenir toute la classe et, à ce titre, bougeait partout.

Nanase — Horikita-senpai est assez occupée. Moi — C’est ce qu’il faut pour diriger une classe.

Nanase — J’espère pouvoir être une élève extraordinaire comme elle dans un an…

Moi — Horikita n’a rien demandé à ce sujet, mais comment comptes-tu t’y prendre pour attirer Hôsen ?

Nanase — Ça… Eh bien, même si ça ne me dérange pas de te répondre, pourquoi ne pas me parler de toi d’abord, Ayanokôji-senpai ?

Moi — De moi ?

Le soleil commençait à se coucher, teintant le monde extérieur d’une brillante nuance d’orange.

Nanase — Horikita-senpai est le leader de ta classe. Mais tu es différent, n’est-ce pas ?

Je vois. Nanase ne savait pas comment interpréter ma présence. Si je disais que Horikita me forçait à venir avec elle, cela aurait probablement suffit à la faire taire.

Nanase — Senpai… Quel genre de personne es-tu ?

Comme je ne répondais pas, Nanase appuya son bras sur la table de façon à cacher une partie de son visage. Cela semblait être une sorte de posture défensive, faite pour empêcher quiconque autre que moi de voir sa bouche et ses yeux.

Nanase — Tu ne veux pas répondre ?

Moi — Ce n’est pas sur ma relation avec Horikita que tu m’interroges, n’est-ce pas ?

C’était quelque chose de différent. Elle cherchait à me demander quel genre d’être humain j’étais.

Nanase — Oui. Je soupçonne Ayanokôji-senpai d’être une personne méchante et sale. Du moins, c’est ce que je pense.

Ses mots étaient à la fois intenses et directs. Malgré cela, Nanase me regardait avec des yeux pleins d’honnêteté et de certitude. Je n’avais pas la moindre idée de ce que j’avais fait pour qu’elle pense cela de moi. Nous n’avions eu que peu d’interactions jusqu’à présent, elle n’avait pas dû pouvoir en savoir beaucoup sur moi. Même si n’étions pas des plus compatibles, je ne me souvenais pas avoir dit quoi que ce soit qui aurait justifié qu’elle me qualifie de méchant. Nanase Tsubasa était peut-être l’élève issu de la White Room.

En effet, la personne de la White Room n’allait pas se contenter de me faire expulser. Non, elle allait entrer en contact avec moi, m’analyser en tant qu’humain, me défier même afin d’avoir l’approbation pleine et entière de « cet homme ». Du moins, c’est probablement comme ça que j’aurais appréhendé les choses si j’avais été en charge de cette mission.

Cependant, pour quelqu’un censé venir de la White Room, ses mots me semblaient un peu déplacés.

Nanase — Quand je suis avec toi, ainsi, Ayanokôji-senpai me semble

être une personne d’une banalité affligeante. Moi — Et tu trouves que ça ne colle pas ?

Nanase — …Non, ce n’est pas ça.

Bien que Nanase l’ait nié, je ne savais pas trop si elle disait la vérité.

J’avais rencontré Nanase quatre fois au total maintenant, et j’avais remarqué son regard étrange à chaque fois. Il semblait que j’étais sur le point de découvrir d’où elle venait, mais je sentais que ma chance de la sonder plus profondément m’échappait.

Nanase — Je suis désolée, oublie ce que je t’ai demandé. Le plus important pour l’instant est de trouver comment nos classes peuvent coopérer entre elles.

Ensemble, nous nous levâmes de nos sièges puis fîmes demi-tour pour quitter la bibliothèque.

Alors que nous nous dispersions, je me m’étais souvenu de quelque chose que je voulais lui demander.

Moi — En y repensant, lors de notre première rencontre, tu as dit que tu ne perdrais que 240 000 points privés si tu perdais trois mois de points. Pourquoi cela ?

À présent, l’expression de Nanase était redevenue habituelle, sans même une trace de ce qu’elle était quelques instants plus tôt.

Nanase — Pourquoi cette question ? J’ai effectué un simple calcul en supposant que notre classe maintenait les 800 points de classe qui nous ont été donnés à l’inscription pendant trois mois, ce qui faisait 240 000 points…

Nanase répondit comme si elle était déconcertée par ma question.

Apparemment, les 2nde de cette année avaient commencé avec une somme de points de classe différente de la nôtre.

Moi — Le nombre de points de classe que nous avions reçu au début de l’année dernière était de 1000.

Nanase — Eh ? Donc tu affirmes qu’il y a une différence de 200 points. Moi — En effet. Je me demande ce qu’il en est pour les classes A et B.

Nanase — Il me semble qu’ils ont aussi 800 points. En tout cas, selon les dires de Shiba-sensei.

Mais pourquoi est-ce que l’école l’avait-il fait passer en secret ? Était-ce parce que l’école considérait que 80 000 points par mois était encore beaucoup, donc que ça n’avait pas d’importance ? Non, même dans ce cas, l’école les en aurait informés dès le début. Il aurait été plus logique qu’elle donne directement une information de ce genre aux élèves plutôt que d’essayer de le leur cacher et de leur donner une raison d’être mécontents plus tard. Il y avait probablement plusieurs autres choses différentes de l’année dernière dont je n’étais pas au courant.

Moi — Tu es au courant que votre comportement au quotidien a une influence sur les points de classe, n’est-ce pas ?

Au moment où Shiba-sensei, le prof principal de la 2ndeD, avait mis fin au conflit devant les classes de 1ère, il avait mentionné quelque chose en rapport avec cela, sous-entendant que les élèves avaient été bien briefés sur les règles.

Nanase — Oui. On nous a dit que les retards, les absences et le fait de parler pendant les cours pouvait affecter nos points de classe.

Était-il possible que l’école ait baissé le montant initial des points de classe en guise de compensation pour leur avoir expliqué les règles au début de l’année

? Sans leur expliquer, les élèves auraient sûrement fini par le comprendre grâce à la catégorie Contribution Sociale de l’application OAA.

Pendant que je réfléchissais, Nanase semblait complètement perdue dans ses pensées. Puis, elle laissa transparaître une expression, le visage de quelqu’un qui semblait avoir pensé à quelque chose, mais qui disparut presque immédiatement. C’était très subtil. Quelque chose que je n’avais remarqué que parce que je l’avais rencontrée à plusieurs reprises ces derniers jours. Cependant, comme Nanase ne semblait pas vouloir dire quoi que ce soit, je n’avais aucun intérêt à lui poser la question. Ensemble, nous quittâmes la bibliothèque et, après un moment, nous arrivâmes à l’entrée de l’école.

Nanase — Eh bien, Senpai, je vais prendre congé maintenant.

Moi — Nanase. Ce n’est pas pour te remercier de m’avoir parlé de tes points de classe tout à l’heure, mais as-tu déjà entendu parler de quelque chose appelé point de protection ?

Alors que nous étions sur le point de nous séparer, je l’appelai et lui posai une dernière question.

Nanase — Des points de protection ? Non, c’est la première fois que j’en entends parler.

Moi — C’est un type de points qu’un élève peut utiliser pour se protéger d’une expulsion. Enfin, même parmi toutes les 1ère, seuls quelques élèves en possèdent un, il n’est donc pas surprenant que tu n’en saches rien.

Nanase — Je vois. C’est bon à savoir… Mais pourquoi me dis-tu cela ?

Moi — Tu m’as donné des informations. J’ai juste pensé que je devais te rendre la pareille.

Sans en dire plus, elle et moi nous séparâmes. J’avais décidé de tester Nanase. Pour voir si elle avait les compétences nécessaires pour utiliser au mieux les informations que je lui avais données.

4

Bien que cela ait pris un certain temps, grâce à la magistrale coopération de Nanase, il avait été décidé que nous tenterions d’avoir une discussion avec Hôsen, de gré ou de force. Il n’y avait aucun moyen de dire où les choses iraient à partir de là, mais c’était définitivement un pas dans la bonne direction.

Peu avant 18h00, on sonna à ma porte. C’était Kei, vêtue de son uniforme scolaire au lieu de vêtements décontractés, peut-être parce qu’elle venait juste de quitter l’enceinte du lycée.

Karuizawa — Tu sais, il y a beaucoup de monde à cette heure-ci, alors j’ai dû faire super attention. J’ai même utilisé les escaliers.

Il n’y avait probablement pas beaucoup de filles qui se rendaient toutes seules dans la chambre d’un garçon, et encore moins qui y restaient pendant une longue période. Sauf si le garçon et la fille avaient une relation.

Moi — Eh bien, si on commençait ?

Karuizawa — Hein ? On ne peut pas faire autre chose d’abord ?

Au lieu de sortir de quoi travailler, Kei exprima son désir de discuter avec moi. Cependant, nous n’avions pas beaucoup de temps.

Moi — Une fois que tu auras un peu avancé, je serais ravi de papoter avec toi.

Karuizawa — Hmph…

Moi  —  Pour  commencer,  nous  devons  découvrir  tes  forces  et  tes faiblesses.

Karuizawa — Comment ?

Moi — Avec ça.

Je sortis cinq feuilles de test. Keisei les avait faites pour le groupe Ayanokôji afin de nous évaluer. Elles étaient extrêmement pratiques, ça m’a fait gagner beaucoup de temps. Horikita et Yôsuke s’en servaient souvent pendant leurs séances d’étude également.

Moi — La plupart de nos camarades de classe ont déjà été testés avec ça.

Karuizawa — Vraiment…

Moi — Il y a une limite de temps de 10 minutes par feuille. Vas-y ! Karuizawa — D’accord !

Bien que réticente, Kei entama la première feuille. Et puis, 50 minutes plus tard, elle s’effondra sur la table, apathique.

Karuizawa — J’en ai marre… !

Moi — Bon travail. Bien que je sois surpris, normalement tu arrives à te concentrer en examen !

Karuizawa — C’est parce que j’ai déjà eu une journée complète de cours là !

Je terminai rapidement de noter la dernière feuille en l’écoutant se plaindre.

Moi — Je vois. Je crois que j’ai compris un peu où tu te situes. Karuizawa — C-comment je m’en suis tirée alors ?

Elle ne semblait pas elle-même savoir de quoi elle était capable, car elle me regardait avec des yeux remplis à la fois d’anticipation et d’anxiété.

Moi — Tu assisteras aux séances d’étude de Yôsuke à partir de demain.

Karuizawa — Eeeh !?

Moi — Ce n’est pas la peine de paniquer pour ça. Enfin, c’est toi qui vois si tu veux être expulsée.

Karuizawa — M-mais mon partenaire, Shimazaki-san, a B-. Normale- ment ça va passer crème non ?

Moi — Tu dois obtenir 501 points pour réussir cet examen spécial. Tu n’as pas assez étudié, mais là comme ça tu devrais pouvoir obtenir environ 200 points. Shimazaki environ 350. Un total de 550 est à peine suffisant pour te faire entrer dans la zone de sécurité. De plus, si Shimazaki déteste étudier autant que toi, il y a de fortes chances qu’il obtienne moins de 300 points.

Si cela devait arriver, ces deux-là passeraient probablement sous la ligne de sécurité de 501 points.

Karuizawa — Je crois que j’ai un peu peur tout d’un coup…

Moi — C’est pourquoi il est important que tu mettes toutes les chances de ton côté.

Cet examen a été conçu pour que même les élèves D+ puissent obtenir un tel score. C’est-à-dire, tant qu’ils apprenaient leurs leçons correctement.

Karuizawa — Euh, eh bien, j’ai une question pour toi. Moi — Oui ?

Karuizawa — Tu essaies de me donner des cours particuliers et tout, mais Kiyotaka, tu as une note C en ce moment, non ? Ça a l’air ordinaire, mais tu peux en fait, genre… avoir une note bien meilleure, non ?

Moi — En effet.

Karuizawa — Tu es aussi comme ça avec tes compétences de combat. Pourquoi vas-tu si loin pour tout cacher ?

Moi — Je ne veux pas me faire remarquer, alors je ne fais pas d’efforts avec mes notes.

Karuizawa — Eh bien alors, combien de points pourrais-tu obtenir si tu étais sérieux ?

Moi — Qui sait ?

Karuizawa — Arrête d’éviter la question et dis-le-moi ~ !

Elle m’agita l’épaule et me le demanda avec un sourire sur le visage.

Moi — Je répondrai volontiers à ta question à condition que tu assistes aux séances d’étude qui commencent demain.

Karuizawa — J’irai, j’irai. D’un coup tu m’as stressée, franchement…

Moi — Au lieu de te dire combien de points je pourrais obtenir, je vais te dire combien de points j’ai décidé d’obtenir.

Karuizawa — Hein ? Pourquoi tu dis des trucs chelous comme ça ?

L’examen comportait cinq sujets au total. Comme un sujet devait être gardé pour ma compétition avec Horikita, je n’avais pas du tout l’intention de faire des économies d’effort. Cependant, si je me donnais à fond dans les cinq sujets, ma réputation auprès des autres allait totalement changer.

Moi — 400 points.

Karuizawa —…Sérieusement ? Attends une seconde, 400 points c’est… Moi — L’équivalent d’une note A en capacité académique.

Parmi nos camarades de classe, c’était une note que seuls quelques élèves

d’honneur comme Keisei et Horikita pouvaient espérer atteindre. Pour être précis, il aurait été plus exact de dire près de 400 points, mais j’avais été pris d’une flemme de corriger.

Karuizawa — Et tu dis que tu penses être capable d’obtenir d’aussi bonnes notes ?

Moi — Bien sûr. Il n’y a pas eu un seul problème que je n’ai pas pu résoudre depuis que je suis ici.

Je ne savais pas combien de questions de haute difficulté cet examen contiendrait, mais comparé à ce que j’avais étudié dans la White Room, il semblait juste de supposer que l’examen n’allait pas être si difficile. Après avoir remarqué qu’elle semblait physiquement incapable de comprendre ce dont je parlais, je décidai de recentrer un peu Kei.

Moi — Maintenant que j’ai vu un peu ton niveau, je veux que tu restes sur tes gardes et que tu te concentres sur tes études.

Karuizawa — Eh bien… Je suppose que je vais étudier un peu avec toi et ensuite rentrer chez moi…

Il n’était que 7 heures passées, alors je ne pensais pas qu’il y avait un problème à travailler dur pendant encore une heure ou deux. Il était probablement utile d’en voir plus pour que je puisse parler à Yôsuke du niveau de Kei le lendemain.

Moi — Très bien. Prête à reprendre alors ? Karuizawa — Par ici, par ici.

Moi — Hm ?

J’avais l’intention de m’y mettre tout de suite, mais Kei commença à tapoter le sol juste à côté d’elle avec sa main.

Karuizawa — Viens t’asseoir ici pour me donner le cours.

5

Pendant un peu plus d’une heure, nous avions étudié tous les deux dans ma chambre pendant que je lui donnais de petits conseils à Kei.

Dans  l’ensemble,  j’avais  l’impression  qu’elle  n’était  pas si  bête,  mais sa

négligence l’empêchait d’atteindre son plein potentiel. Cependant, j’avais décidé de ne pas lui faire de remarque.

Je l’aurais fait si ça avait été sa faute. Mais, dans son cas, c’était probablement le harcèlement qu’elle avait subi qui l’avait perturbée dans ses études, au collège. Ce faisant, elle avait donc cumulé les mauvaises habitudes et avait du mal à suivre au lycée. En contextualisant un peu, je me disais donc qu’elle ne s’en sortait pas si mal.

La guider doucement, en lui permettant de chercher les réponses par elle- même, était probablement la bonne façon d’aborder le tutorat. Si elle pouvait arriver au point où elle commence à sentir que les études ne sont plus une torture, elle allait probablement énormément grandir et mûrir comme Sudou.

Karuizawa — Hé…

Moi — Qu’est-ce qui ne va pas ?

Kei se mit soudainement à fixer le sol. Après un court instant, elle ramassa quelque chose. Un papier ? Une poussière ? Ou alors…

Karuizawa — C’est quoi ça ?

En parlant, elle tendit son bras devant moi, me montrant ce qu’elle avait trouvé entre son index et son pouce. C’était une longue mèche de cheveux rouges.

Moi — C’est un cheveu, nan ?

Lorsque j’ai dit ce que je pensais que c’était, l’expression de Kei se transforma instantanément en colère.

Karuizawa — Un cheveu rouge ! Un foutu cheveu long en plus ! C’est celui d’une nana, y’a pas de doute là-dessus !

Elle avait raison. Vu la longueur, il était physiquement impossible que ce soit les miens. La nature de cheveux était également différente.

Sa propriétaire me vint immédiatement à l’esprit : Amasawa Ichika, qui était

venue pour manger l’autre jour.

Karuizawa — T’es parti voir qui ?

Elle demanda, probablement parce que personne ne lui venait à l’esprit avec ce type de cheveux parmi tous nos camarades de classe.

Moi — Est-ce que c’est cette chose-là ? La « jalousie »…?

Karuizawa — C’est une mauvaise chose !? Je suis ta petite amie Kiyotaka

! J’ai le droit de mettre mon nez dans ce que je veux !

C’était la première fois que j’entendais parler d’un tel droit. Quoi qu’il en soit, cela devait me servir de leçon : la prochaine fois, j’allais m’assurer de correctement nettoyer après le passage d’une fille ici !

Au moment où je réfléchissais à comment tout expliquer à Kei, le son de la sonnette résonna de façon inattendue dans la pièce. Après quoi, la vidéo s’alluma près de l’interphone. Non seulement j’étais curieux de savoir qui c’était, mais Kei l’était encore plus. Nous partîmes tous les deux jeter un coup d’œil à l’écran.

Quand on parle du loup… Ce n’était ni plus ni moins qu’Amasawa, agitant sa main vers la caméra avec un large sourire aux lèvres. La première personne à réagir n’avait pas été moi, mais Kei, la mèche de cheveux rouges toujours bien serrée dans sa main.

Karuizawa — Une fille que je n’ai jamais vue avant avec des cheveux rouges…

Elle avait l’air d’essayer de résoudre l’énigme d’une émission télévisée de mystère pour enfants. Kei tendit le bras et a appuya sur le bouton de l’interphone avant que je ne puisse avoir la chance de le faire moi-même.

Karuizawa — Qui est-ce ?

Kei parla à travers le haut-parleur, sa voix remplie d’une colère non dissimulée

face à laquelle Amasawa sursauta naturellement de surprise.

Amasawa  — Hein ? Chambre  401…  C’est la chambre d’Ayanokôji- senpai… non ?

Je retirai avec force le bras de Kei et je pris le relais.

Moi — Désolé, c’est moi. Que veux-tu ?

Même s’il s’agissait d’un visiteur non annoncé, il était hors de question que je laisse Kei s’en occuper comme ça. Amasawa mise à part, le hall était bondé au point qu’il aurait été un problème si quelqu’un entendait que Kei et moi étions ensemble.

Amasawa — Ah, tu as de la compagnie ? Est-ce que je dois revenir plus tard ? J’aimerais monter et parler un peu avec toi, mais…

Je regardai Kei. Même si elle me lançait un regard furieux, elle fit un geste pour qu’Amasawa vienne au lieu de m’ordonner de la renvoyer. Apparemment, elle voulait s’assurer que les cheveux étaient bien ceux d’Amasawa.

Moi — Non, c’est bon. Monte.

J’appuyai sur le bouton de déverrouillage automatique et, quelques instants plus tard, Amasawa entra dans l’ascenseur.

Moi — Tu es sûre que ça ne te dérange pas ? Laisser une autre élève découvrir que tu es ici ?

Karuizawa —…Peu importe.

Il semblait que Kei était si incroyablement furieuse qu’elle avait oublié tous ses principes. Après tout, c’était elle qui avait dit vouloir garder notre relation secrète pour l’instant.

Si nous rencontrions quelqu’un dans cette situation, il était possible que des

rumeurs à ce sujet commencent à se répandre.

Moi — Eh bien, c’est trop tard maintenant, non ? Nous n’avons pas d’autre choix que d’essayer de la tromper d’une manière ou d’une autre.

De toute façon, Amasawa avait déjà entendu la voix de Kei, donc chasser Kei avant qu’elle n’arrive aurait été contreproductif. La minute suivante, Amasawa sonnait déjà à ma porte de toute façon.

Moi — Je vais la laisser entrer, alors reste assise ici et attends pour le moment.

Karuizawa — Je… Je comprends.

Je partis donc ouvrir à Amasawa.

Amasawa — Désolée pour cette visite soudaine~ Ayanokôji-senpai.

Elle analysa mon expression pendant un moment avant d’envoyer un regard calculateur sur les chaussures dans l’entrée. Comment dire… Est-ce cela qu’on appelle « l’intuition féminine » ?

Amasawa — Petite amie ?

Elle posa une question directe avec un large sourire sur le visage.

Moi — Que puis-je faire pour toi ?

Amasawa — Aaaahhhn ~ Eh bien, pour te dire la vérité, je pense que j’ai peut-être laissé quelque chose dans ta chambre la dernière fois que je suis venue.

Moi — Qu’est-ce que c’est ?

Amasawa — Ma broche à cheveux préférée. Je ne la trouve nulle part…

Donc, après avoir réalisé qu’elle avait disparu, elle était venue ici pour essayer

de la chercher ?

Moi — Eh bien, entre.

Je ne pouvais pas la faire rester debout et attendre dans le couloir, alors je la fis entrer comme prévu. Au lieu de faire des excuses mesquines au sujet des cheveux que Kei avait trouvés, il était probablement plus rapide de demander à Amasawa de l’expliquer elle-même.

Amasawa — Désolée pour l’incruste !!! ~

Amasawa entra directement, complètement indifférente à la présence de mon autre invitée. Il semblait qu’elle venait tout juste de revenir de l’enceinte du lycée car elle avait encore son cartable à la main.

Et puis, elle se retrouva nez à nez avec Kei, qui attendait plus loin à l’intérieur.

Amasawa — Oh, bonjour~ Je suis Amasawa Ichika~ ! Karuizawa — Salut.

Kei avait l’air visiblement malheureuse, mais elle semblait faire de son mieux pour le supporter à sa façon.

Amasawa — Tu es une senpai, n’est-ce pas ? J’aimerais beaucoup connaître ton nom.

Karuizawa —…Karuizawa Kei.

Amasawa — Karuizawa-senpai, c’est ça~ ? Ah, on dirait que vous avez étudié ensemble, hein ? Es-tu sa petite amie par hasard ? Ayanokôji- senpai a esquivé la question il y a un petit moment, mais j’aimerais quand même le savoir.

La capacité d’Amasawa à demander ce qu’elle voulait sans la moindre hésitation était un véritable talent en soi.

Karuizawa — Ça ne te regarde pas ! Et toi ? Quelle est ta relation avec Kiyotaka ?

Bien qu’elle ait sans doute remarqué que quelque chose se tramait étant donné la façon dont Kei m’appelait par mon prénom, Amasawa jeta un coup d’œil dans la pièce.

Amasawa — Attends, je vais répondre à cette question dans un instant. Hmm, je ne la vois pas au premier coup d’œil… Je suis sûre de l’avoir enlevée la dernière fois que je suis venue. Peut-être qu’elle est tom- bée sous un meuble ou quelque chose comme ça.

À ce moment-là, Amasawa s’agenouilla et commença à jeter un coup d’œil sous mon lit, ignorant complètement la grimace sur le visage de Kei. Ce faisant, l’ourlet de sa jupe se releva, attirant naturellement l’attention sur la taille de son derrière.

Amasawa — Ah… Senpai, je crois que j’ai dû mal à l’attraper !

Toujours agenouillée à côté du lit, Amasawa tourna la tête et me regarda. Elle parla d’une voix qui semblait souligner qu’elle en rajoutait.

Kei se retourna soudainement vers moi, le regard fixe.

Moi — Je vais la chercher.

Échangeant ma place avec Amasawa, je commençais par vérifier que la broche n’avait pas atterri sous mon lit d’une manière ou d’une autre.

Amasawa — Hé, tu peux, genre, ne pas simplement ignorer ce que j’ai dit ? Réponds à ma question !

Karuizawa — Hmm, Ayanokôji-senpai est mon… Comment dire… Mon coach personnel exclusif ?

Amasawa — Hein ? C’est quoi ce bordel ?

Ayant entendu une réponse à laquelle elle ne s’attendait pas, Kei se retourna à nouveau vers moi, le regard dans ses yeux encore plus dur qu’avant.

Moi — C’est la partenaire de Sudou pour l’examen. Nous nous sommes rencontrés par hasard et j’ai fini par lui cuisiner un repas.

Karuizawa — Désolée, mais je ne comprends pas où tu veux en venir. Pourquoi t’as cuisiné pour la partenaire de Sudou-kun ?

Étant donné que je ne lui avais donné qu’un résumé de ce qui s’était passé, il était normal qu’elle soit un peu confuse. J’entrepris de lui réexpliquer plus en détail tout en continuant à chercher.

Peu après que je finis de l’expliquer pour la deuxième fois, Amasawa reprit la parole.

Amasawa — Je peux aller vérifier dans la cuisine, juste au cas où ? Je l’ai peut-être enlevé quand je faisais la vaisselle. Ah, Senpai, continue de chercher à l’intérieur de la chambre. Peut-être que c’est sous la commode ?

Moi — Très bien.

Je ne trouvai rien sous le lit, alors je commençai à fouiller la zone autour de la commode à la place. Insatisfaite de ma deuxième explication, Kei vint s’accroupir à côté de moi, me chuchotant d’une voix basse et feutrée.

Karuizawa — Attends… Pourquoi sa broche serait ici au fait ?

Moi — Je te l’ai dit. J’ai invité Amasawa chez moi et je lui ai préparé un repas. C’est tout.

Karuizawa — Vraiment ? Moi — Bien sûr que oui.

Karuizawa — Sûr ?

Il ne semblait pas que je puisse la convaincre de me croire avec une simple explication verbale.

Karuizawa — Je vais lui demander directement tiens !

Sur ce, Kei essaya de se lever, mais j’attrapai son bras avec force et l’arrêtai. Puis, je portai rapidement mon index à ses lèvres, lui ordonnant subtilement de se taire. Une qualité qu’elle avait était sa perspicacité, donc elle se tint tranquille.

Moi — Tu cherches ici avec moi aussi. Karuizawa — Je-Je comprends.

Même si elle ne comprenait pas mes intentions, elle réussit à comprendre que c’était important et commença à m’aider.

Amasawa — Ah ! Ayanokôji-senpai, je l’ai trouvée~ !

La voix d’Amasawa résonna de l’intérieur de la cuisine. Ensemble, Kei et moi avions regardé vers la cuisine pour voir Amasawa nous confirmer qu’elle avait bien l’objet en main.

Amasawa — On dirait qu’elle est tombée dans l’espace entre le comptoir et le réfrigérateur !

Amasawa sourit joyeusement en la mettant dans sa poche.

Amasawa — J’ai l’impression d’interrompre quelque chose, alors je vais m’en aller.

Moi — Désolé de t’avoir fait te déplacer.

Amasawa — Non, c’est bon. Je n’aurais pas dû l’oublier en premier lieu. Eh bien, désolée de vous avoir dérangé tous les deux~.

Amasawa partit immédiatement chercher son sac et avant de se diriger en direction de l’entrée pour enfiler ses chaussures, elle ouvrit la bouche.

Amasawa — Mais maintenant que j’y pense, cette senpai est plutôt cool~ Je ne m’attendais pas à ce que tu aies une petite amie aussi mignonne !

Après avoir dit cela, Amasawa mit son doigt contre sa joue, faisant mine de penser à quelque chose.

Amasawa — En parlant de ça, tu sais quoi ? Ce n’est probablement pas une bonne idée qu’il n’y ait que nous deux la prochaine fois que tu cuisines pour moi, hein ?

Moi — Peut-être bien.

Amasawa — Dans ce cas… Demandons à Karuizawa-senpai de manger avec nous la prochaine fois~. Quoi qu’il en soit, sayonara~ !

Amasawa vint et repartit comme une tempête qui passe.

Karuizawa — Je vois que tu profites déjà bien des nouvelles arrivantes, hein Kiyotaka ?

Moi — Tu ne vas probablement pas m’écouter, quoi que je dise, hein ?

Les révisions étaient déjà bien oubliées… Enfin, je me devais de lui expliquer jusqu’à ce qu’elle comprenne les tenants et aboutissants de l’histoire.

6

Le vendredi passa et le samedi, le premier jour du week-end, était enfin arrivé.

Il y avait eu de nombreuses interactions avec les élèves de 2nde ces cinq derniers jours, en partie grâce à l’influence de l’examen spécial. Il y avait eu notre rencontre avec Amasawa, une élève de la 2ndeA qui m’avait amené à cuisiner un repas maison afin d’assurer à Sudou un partenaire. Et puis, peu de temps après, il y avait eu une discussion avec Nanase pour mettre au point un accord entre notre classe et la 2ndeD.

Dans un même temps, Kushida avait réussi à établir des liens avec Yagami, un élève de la 2ndeB. Et grâce à l’aide de Yagami, plusieurs élèves, comme Kei, avaient également réussi à se trouver des partenaires. Tout le monde ne vivait pas cet examen avec la même difficulté, ça c’était clair. Mais une chose était sûre, c’était qu’il était particulièrement important en termes d’interactions entre les années scolaires : de nombreux élèves avaient déjà appris les noms et les visages des élèves de la classe supérieure et de la classe inférieure, et certains connaissaient même leur classement. D’autant que ça avait pu nous donner des indices sur les orientations des différentes classes.

Tout d’abord, la 2ndeA n’avait pas de leader clair pour le moment, donnant l’impression que chaque élève était libre d’agir de son côté. L’une des raisons pour lesquelles cela avait été autorisé était «la grande capacité académique de la classe dans son ensemble». Comme son nom l’indique, la 2ndeA comptait le plus grand nombre d’élèves ayant une note d’aptitude académique de B- ou plus. Plusieurs des élèves les plus doués sur le plan scolaire avaient pris l’initiative de négocier des contrats avec les classes de 1èreA et 1èreC pour obtenir des points. Bien que cette dernière ait naturellement plusieurs élèves avec des notes d’Aptitude Académique de niveau D, ces élèves ex- cellaient quand même dans d’autres domaines, donc la 1èreA avait fait des ef- forts pour les récupérer également. Sur les 40 élèves de la classe, 34 avaient déjà choisi leur partenaire.

La 2ndeB était similaire à la 2ndeA dans le sens où aucun leader clair n’avait encore émergé. De plus, les élèves capables sur le plan scolaire se vendaient également à bon prix. La principale différence étant que beaucoup d’entre eux s’étaient associés avec des élèves de la 1èreC au lieu de la 1èreA. Cela était probablement dû au fait que Ryuuen avait offert plus de points que Sakayanagi, mais les détails de la situation n’étaient toujours pas clairs pour l’instant. Actuellement, 33 des 40 élèves avaient décidé de leurs partenaires.

La 2ndeD était actuellement dirigée par Hôsen, qui avait pris le contrôle de la classe d’une main de fer. Ce n’était pas différent de ce que Ryuuen avait fait avec sa propre classe l’année dernière. La chose notable était que c’était la classe qui avait finalisé le moins de paires. Enfin, nous allions sûrement en savoir davantage dimanche.

Et enfin, il y avait la 2ndeC, la seule classe avec laquelle je ne m’étais pas du tout impliquée au cours de la semaine dernière. J’avais déjà mémorisé le nom de chacun des élèves, mais je n’avais pas entendu parler de la classe, même par Horikita. La raison principale était que la plupart des élèves de la 2ndeC avaient signé des contrats de partenariat avec la 1èreB après avoir assisté à la rencontre organisée par Ichinose en début de semaine. Sur leurs 40 élèves, 10 n’avaient pas encore choisi leur partenaire, mais aucun de ces 10 n’avait une note d’aptitude scolaire inférieure à D-. En d’autres termes, en tant que classe, tout le monde avait été mis relativement en sécurité. Il fallait noter que la 2ndeC avait une sorte de médiateur de classe qui avait utilisé la rencontre pour réussir à sauver ses camarades.

Plus tard dans l’après-midi, je lançai l’application OAA pour jeter un coup d’œil à tous les duos qui avaient été finalisés à ce jour.

Moi — 105 paires. Environ 70 %, hein ?

Vu le nombre d’élèves qui étaient à la bibliothèque hier, il semblait que la majorité des élèves voulaient en finir avant le week-end. Il semblait également y avoir plus de mouvement dans la 2ndeD car 8 paires avaient été décidées. Je ne savais pas si l’approche du week-end avait rendu Hôsen impatient, ou….

Quoi qu’il en soit, le nombre d’élèves qui n’avaient pas encore décidé de leur

partenaire était de 55 pour les 2nde et de 52 pour les 1ère. Si l’envoyé de la White Room faisait partie de ces 55 élèves, les chances de s’associer à lui augmentaient dangereusement.

Enfin, même pour moi, il était impossible de garantir à 100% que j’allais l’éviter. Ce n’avait pas été faute d’observation, de réflexion. J’avais considéré chaque paramètre pour en dégager des indices, mais cela s’était avéré in- fructueux. Je devais probablement prendre ma décision rapidement, avant que mes options ne se  réduisent encore  plus. Même si  les négociations avec la 2ndeD allaient bientôt avoir lieu, j’avais l’impression que je devais me préparer à d’autres options.

Je décidai alors de me rendre au centre commercial Keyaki plus tard dans l’après-midi pour essayer d’ouvrir mes possibilités.

7

Naturellement, le centre commercial Keyaki un samedi soir était pratiquement débordant d’élèves. D’élèves qui avaient déjà décidé de leurs partenaires pour l’examen spécial, en particulier.

Comme ils n’avaient besoin de s’inquiéter de rien à ce niveau, ils étaient libres de consacrer leur attention à réviser ou simplement traîner et se détendre.

Je n’avais pas encore personnellement pris contact avec tous les élèves de 2nde. Mais, malgré tout, j’avais l’impression que si quelqu’un de la White Room m’avait croisé, je l’aurais remarqué. Cependant, je n’avais pas eu ce genre d’impression particulière de la part des personnes que j’avais vues jusqu’à présent. La fois où j’avais été en tête à tête avec Nanase aurait pu s’en rapprocher, néanmoins.

Je soupçonnais que Tsukishiro ou quelqu’un ayant des liens étroits avec lui avait appris à l’exécuteur de la White Room à se comporter comme un « élève », indépendamment de leur personnalité. Ainsi donc, le problème était que cet élève cachait soigneusement toute trace de sa véritable identité. Un peu comme moi, en fait, quand j’avais débarqué dans cette école.

Il y a certains inconvénients à grandir sans rien connaître du monde réel. L’un de ces inconvénients était que je ne savais pas ce que signifiait être un

« élève ». Une telle chose ne nous avait jamais été enseignée car les instructeurs de la White Room n’avaient jamais prévu que nous allions à l’école en premier lieu.

C’est pourquoi, au début, je m’étais créé un personnage. J’avais essayé toute sortes de choses, comme changer le ton de ma voix ou être plus bavard que je ne l’étais normalement. J’avais finalement endossé le rôle d’un élève un peu solitaire un peu déconnecté du monde. Bien que… à la fin, le jeu d’acteur ait commencé à être fastidieux et insoutenable alors j’ai fini par me relâcher un

petit peu. Et je m’étais rendu compte que, même sans cacher mon vrai moi, je

pouvais continuer ma vie d’élève.

Cependant, la personne qui avait été envoyée pour infiltrer l’école était différente. En effet, pour lui, garder son identité secrète était capital. Je n’avais donc aucun moyen de savoir si ceux que j’avais rencontrés n’étaient que des élèves ordinaires ou s’ils agissaient comme tels. Dans tous les cas, rien n’était fait pour me faciliter la tâche.

Toute personne devait être soupçonnée, quel que soit son sexe. Même si je savais que je pouvais sortir vainqueur en termes de compétences individuelles, j’étais toujours dans une position extrêmement désavantageuse puisque j’étais obligé de rester sur la défensive. Mon adversaire pouvait utiliser tous les moyens à sa disposition pour obtenir mon expulsion, tandis que la seule chose que je pouvais  faire pour  me  protéger était d’anticiper ses straté- gies.

En revenant d’un arrêt rapide à Hamming, je tombai par hasard sur Sakayanagi.

Sakayanagi — Il semble que tu aies été assez proactif pour interagir avec les élèves de 2nde récemment, Ayanokôji-kun !

Moi — C’est parce que les élèves ayant une faible note n’ont pas d’autre choix que de se battre pour leur vie. J’ai juste aidé Horikita à trouver des partenaires pour Sudou et Ike.

Sakayanagi — Je vois. En effet, si l’un de ces deux-là faisait une mauvaise pioche, ce serait la porte de sortie illico.

Bien que Sakayanagi semblait au moins un peu convaincue par mon excuse, elle ne s’arrêta pas là.

Sakayanagi — Cependant, est-ce vraiment tout, Ayanokôji-kun ? Moi — Qu’est-ce que tu veux dire ?

Sakayanagi — Pour te faire expulser, j’imagine que la White Room

pourrait envoyer quelqu’un… une sorte de taupe pour infiltrer les élèves de 2nde. Même si tu obtiens une note parfaite, si ton partenaire obtient un zéro, vous seriez tous les deux expulsés de l’école. C’est pourquoi j’ai pensé que cet examen pourrait être particulièrement gênant pour toi.

Feindre l’ignorance aurait été inutile puisque si elle disait tout cela, c’était qu’elle savait déjà tout.

Sakayanagi — Il n’y a aucun moyen de maintenir une vie scolaire paisible indéfiniment, tu sais ? Si ton adversaire en a envie, il pourrait même être prêt à exposer tes véritables capacités à tout le monde. Néanmoins, si tu es capable de maintenir une vie scolaire agréable malgré cela, alors je suppose que mes craintes ne sont pas fondées.

Moi — Eh bien, tu n’as pas besoin de t’inquiéter à ce sujet. Sakayanagi — Et pourrais-tu me dire comment tu es si serein ?

Moi — J’ai décidé d’abandonner mon ancienne façon de penser. Je n’ai plus l’intention de cacher quoi que ce soit à partir de maintenant.

Pour moi, en ce moment, continuer ma vie scolaire était ma priorité absolue. Si je continuais à faire une fixation sur les mauvaises choses, je risquais de tout perdre.

Sakayanagi — Alors c’est comme ça. Tu as déjà révélé certaines de tes capacités à certaines personnes comme M.Mashima, alors il serait pro- bablement plus pratique de tout dévoiler, hein ?

Sakayanagi répondit, ayant volontiers prêté l’oreille à mon explication.

Sakayanagi — Revenons à notre sujet. Si tu n’as toujours pas trou- vé de partenaire, que dirais-tu si je t’aidais et te faisais gagner du temps ? Il n’y en a plus beaucoup, mais je connais quelques 2nde qui n’ont pas encore de partenaire. Et pas le genre à causer des problèmes.

Grâce  à  ses  propres  efforts  d’investigation,  il  semblait  que  Sakayanagi

s’était arrangée pour réserver quelques élèves considérés sûrs pour moi.

Moi — C’est sympa de ta part, mais j’ai bien peur de devoir refuser.

Sakayanagi — Est-ce que c’est parce que tu ne fais pas confiance à mon jugement ?

Elle avait déjà vu clair en moi depuis longtemps, sachant très bien que je devais prendre ma décision rapidement.

Moi — Je reconnais tes capacités, mais je préfère décider moi-même de mon propre sort.

Si je rencontrais une fin tragique après avoir confié mon destin à quelqu’un d’autre, je risquais de le regretter toute ma vie.

Moi — De plus, je pense que j’ai déjà compris ce que je dois faire.

Sakayanagi — C’est vrai ? Dans ce cas, je ne dirai plus rien. Je regarderai ce que tu fais de loin, Ayanokôji-kun. J’attends avec impatience le jour où nous pourrons avoir notre revanche.

Sur ce, Sakayanagi inclina la tête et s’éloigna. Elle n’avait même pas envisagé l’idée que je puisse être expulsé. Dans un sens, on pouvait dire qu’elle avait une haute opinion de mes capacités.

8

Sur le chemin du retour du centre commercial Keyaki…

— Hé. T’aurais une minute ?

La voix monocorde d’un garçon m’appela plus loin derrière. Je me retournai pour trouver un garçon et une fille qui me fixaient droit dans les yeux. La fille, qui baladait son regard entre son téléphone portable et moi, était Tsubaki Sakurako de la 2ndeC. Le garçon à côté d’elle était son camarade de classe, Utomiya Riku.

Utomiya — Tu es de la 1èreD… Ayanokôji-senpai, c’est ça ?

Je ne pouvais pas voir ce qui s’affichait sur l’écran de son téléphone d’où j’étais, mais il y avait tout sur l’application OAA.

Utomiya — Je suis Utomiya, et elle s’appelle Tsubaki. Pourrions-nous parler un peu avec toi du fait de devenir partenaires pour cet examen spécial ?

Moi — Partenaires ?

Utomiya — Oui. Nous sommes actuellement à la recherche d’élèves de première ayant une note d’aptitude académique de C ou plus et qui sont prêts à coopérer avec nous.

Puisque j’étais sorti aujourd’hui à la recherche d’un partenaire, ce développement semblait bien trop beau pour être vrai. J’avais presque l’impression qu’ils m’attendaient. Je ne savais pas si je devais faire confiance ou non à une tentative aussi directe de me contacter. Eh bien, prendre une décision hâtive en me basant uniquement sur le timing était probablement une erreur.

Moi — J’ai moi-même eu quelques difficultés à trouver un partenaire. Pourrais-tu me donner plus de détails ?

Avec l’application, on pouvait tout savoir sur le visage, le nom et les notes d’un élève. Cependant, la personnalité n’était pas renseignée. C’est pourquoi il était nécessaire de se rencontrer en personne afin d’être sûr de pouvoir faire confiance à l’autre.

Utomiya semblait avait déjà choisi son partenaire. C’était Tsubaki qui n’en avait pas encore. Comme sa note d’aptitude académique de C- n’était pas du tout élevée, elle voulait probablement s’associer à quelqu’un qui avait une note de C ou plus. Cela dit, il n’était pas clair s’ils étaient là pour Tsubaki ou pour leur classe en général.

Utomiya — Au lieu de rester ici, pourquoi ne pas discuter au café ?

Dirigeant la conversation, Utomiya me proposa respectueusement un changement de lieu. Ce n’était certainement pas un sujet qui pouvait être décidé en seulement une minute ou deux, alors j’acceptai sa proposition. Bien qu’il y ait beaucoup de monde, nous avons tous les trois pris quelques sièges vides dans une partie inoccupée du café.

Utomiya — Je sais que tout ça semble soudain, mais je voudrais que tu nous écoutes.

Utomiya se tourna vers Tsubaki, lui faisant signe de commencer à parler.

Tsubaki — Le truc, c’est que j’aime pas devoir des faveurs ou être redevable envers quelqu’un tu vois. Je veux une sorte d’accord ponctuel sans conditions.

Tsubaki semblait un peu distante, baissant les yeux sur ses ongles pendant qu’elle parlait. Entre un C et un C-, les notes étaient presque identiques, plus ou moins. Donc personne n’y perdait ou n’y gagnait vraiment.

Moi — Je peux te demander quelque chose qui me tracasse ? Utomiya — Je t’en prie.

Moi — La plupart des élèves ont une note d’aptitude académique égale ou proche de C. Pourquoi n’a-t-elle pas trouvé de partenaire plus tôt ?

Parmi tout le monde en 1ère, il aurait dû y avoir plusieurs élèves qui auraient été plus qu’heureux de faire équipe avec Tsubaki. Sans exceller, cela aurait amplement suffi à éviter l’expulsion. Le fait qu’elle n’ait toujours pas trouvé de partenaire près d’une semaine complète après le début de l’examen me laissait assez circonspect.

Utomiya — C’est…

Utomiya  cherchait  ses  mots.     En  remarquant  cela,  Tsubaki  établit  un

contact visuel correct avec moi pour la première fois.

Tsubaki — C’est ma faute. Je n’ai rien dit à ce sujet.

En utilisant les mots de Tsubaki comme point de départ, Utomiya parti dans une explication.

Utomiya — Au départ, Tsubaki n’a demandé aucune aide pour trouver un partenaire. Mais hier, vendredi, je suppose qu’elle a commencé à paniquer… puisqu’elle est venue me parler.

Alors, dans une course contre la montre, Utomiya avait commencé à faire tout ce qu’il pouvait pour aider sa camarade de classe. Après tout, la plupart de leurs autres camarades avaient déjà choisi leur partenaire. Même s’il leur restait encore une semaine pour trouver quelqu’un, une certaine dose d’anxiété à l’approche de cette limite psychologique de la fin de la première semaine était assez normale.

Utomiya — Avec les capacités scolaires de Tsubaki, la pénalité de 5% pourrait être un problème.

Cela semblait être la raison pour laquelle ils m’avaient approché moi, un élève avec une note C. S’il n’y avait pas eu de circonstances particulières, j’aurais probablement accepté leur proposition sans même un instant d’hésitation.

Cependant, il y avait une raison pour laquelle je ne pouvais pas prendre une décision aussi hâtive. Ce scénario était extrêmement similaire à celui que j’avais imaginé au moment où les règles de cet examen spécial nous avaient été expliquées pour la première fois. En effet, dès le début je m’étais dit que les élèves avec lesquels j’avais le plus de chances d’être mis étaient ceux qui avaient un indice d’Aptitude Académique similaire au mien. Et maintenant, Tsubaki, une élève avec une note de C-, débarquait comme ça à la recherche d’un partenaire.

C’était la première fois que je rencontrais Tsubaki et Utomiya, j’avais donc besoin de les sonder avant de prendre ma décision.

Moi — Tu dis être à la recherche d’élèves… Combien de personnes as- tu contactées avant moi ?

Je décidai de commencer par demander quelque chose de simple, mais la réponse d’Utomiya fut plutôt inattendue.

Utomiya  — Je  suis désolé,  les mots que  j’ai choisis  étaient un  peu trompeurs. Tu es en fait la première personne que nous avons approchée.

Utomiya me présenta ses excuses avant que je n’aie la possibilité de l’interroger davantage.

Utomiya — Donc, si tu n’es pas prêt à t’associer avec elle, nous devrons chercher quelqu’un qui le fera.

Moi — Alors je suis le premier, hein.

Utomiya — En fait, il y a une raison pour laquelle nous avons choisi de te rencontrer en premier. Nous avons pensé qu’il pourrait y avoir une exigence de points privés si nous demandions à quelqu’un de la 1èreA ou de la 1èreC.

Je vois. Il était vrai que le scénario s’était inversé et que, désormais, c’était les 1ère qui se vendaient aux 2nde, littéralement.

Étant donné les circonstances, il n’était pas surprenant que quelqu’un exige que des points soient fournis en échange d’un partenariat avec Tsubaki. Mais, en pratique, elle allait viser plutôt des élèves ayant des capacités similaires. Il y avait encore beaucoup d’élèves sans partenaire, elle pouvait donc clairement trouver quelqu’un sans débourser un seul point.

Cela dit, il aurait été un peu étrange que je leur dise de plutôt se tourner vers quelqu’un de la 1èreA ou de la 1èreC alors que je n’avais pas encore choisi de partenaire moi-même.

Objectivement, il n’y avait même pas une seule raison pour moi de rejeter leur

offre. J’étais dans une belle impasse.

Moi — Je n’ai pas officiellement choisi de partenaire. Mais j’ai déjà un candidat en tête. En fait,  nous  nous  sommes déjà  parlé plusieurs fois maintenant à propos de travailler ensemble.

C’était un demi-mensonge, mais aucun des deux n’avait le moyen de le confirmer.

Si cela les dissuadait rapidement, il y avait de grandes chances qu’ils soient innocents.

Utomiya — Alors c’est comme ça… Je vois.

Utomiya jeta un coup d’œil à Tsubaki avec une expression troublée.

Tsubaki — Alors je suppose que ça ne sert à rien, n’est-ce pas ? Ce sera plus rapide de chercher quelqu’un d’autre.

Tsubaki essaya de faire marche arrière à la seconde où elle apprit que j’avais déjà quelqu’un.

Utomiya — J’aimerais demander, juste pour savoir… avec quel élève de 2nde tu prévois de faire équipe ?

Mais Utomiya, lui, ne semblait pas prêt à abandonner.

Moi — Tout ce que je peux te dire, c’est que ce n’est pas quelqu’un de la 2ndeC.

Je n’avais pas donné d’explication sur le pourquoi je ne pouvais pas lui dire, mais il avait dû très rapidement comprendre là où je voulais en venir : je n’allais pas donner d’infos à un rival de l’élève avec qui je cherchais à travailler.

Tsubaki — Partons Utomiya-kun. Ne faisons pas perdre plus de temps à Ayanokôji-senpai.

Utomiya — …Tu as raison.

J’étais reconnaissant qu’ils m’aient tendu la main, mais je ne pouvais pas prendre une décision aussi hâtive. Il y avait beaucoup trop peu de données sur Tsubaki Sakurako.

Utomiya — Juste au cas où, voici mes coordonnées.

Utomiya me tendit un bout de papier avec ses coordonnées écrites dessus, papier qu’il avait préparé à l’avance.

Moi — C’est un peu égoïste de ma part de dire ça, mais je pourrai te contacter si finalement ça ne se fait pas avec la personne avec laquelle je pense travailler. Si l’offre tient toujours, n’hésitez pas à me le faire savoir !

Utomiya — Compris. Allons-y Tsubaki.

À l’invitation d’Utomiya, Tsubaki décroisa les bras et se leva. Puis, elle s’incli- na légèrement avant de partir avec Utomiya, à la recherche de quelqu’un d’autre avec qui s’associer.

Moi — Tsubaki Sakurako et Utomiya Riku, hein ? Je vais devoir les garder à l’esprit.

Maintenant que j’avais gâché une chance de sécuriser mon partenaire, mes actions pour l’avenir allaient être de la plus haute importance.

Après tout, cela promettait d’être embêtant si jamais je tirais la mauvaise carte.

9

(Karuizawa)

Ce même jour, deux filles de la 1èreD marchaient côte à côte.

Il y avait moi, Karuizawa Kei, et mon amie, Satô Maya-san. On traînait tout le temps ensemble normalement. Jusqu’à il y a quelques mois, où nous avions commencé à nous voir beaucoup moins souvent. Ce n’était pas comme si nous nous étions disputées ou quoi que ce soit. C’est juste qu’inconsciemment, j’avais commencé à me sentir coupable, et il devenait difficile pour moi de lui faire face.

Satô — Désolée de t’avoir appelé tout à coup, Karuizawa-san.

Moi — Non, c’est tout à fait normal. J’avais aussi envie de passer du temps avec toi, Satô-san. Bref, ça fait vraiment longtemps qu’on s’est pas fait un petite sortie comme ça, pas vrai ?

Satô — Oui. On était inséparables à notre arrivée ici ! ~

Moi — Alors, qu’est-ce que tu veux faire ? C’est un peu tôt pour déjeuner, non ?

Marchant légèrement devant elle, je la questionnais sur le programme. Il n’était qu’un peu plus de 11 heures du matin, et elle m’avait appelée le matin-même pour me proposer de me promener avec elle dans le centre commercial Keyaki. Et elle ne tarda pas à répondre une fois que nous approchâmes de celui-ci…

Satô — Uhm. Moi — Hmm ?

Satô — Et si… nous allions plutôt par-là ?

Satô-san désigna le chemin qui menait au bâtiment de l’école, une direction

complètement différente de celle du centre commercial.

Moi — Vers l’école ? Tu as quelque chose à faire là-bas ? Mais c’est le week-end, et je suis presque sûre que tu ne peux pas y aller sans ton uniforme, non ?

Satô — Ce n’est pas que je veuille aller à l’école ou quoi que ce soit, c’est juste que… je voudrais aller quelque part où il n’y a pas beaucoup de monde en ce moment.

Je fronçai les sourcils, incapable de comprendre où elle voulait en venir. Enfin si, j’avais ma petite idée… Je tentais juste de faire un déni jusqu’au bout. Ainsi je continuai simplement à faire comme si de rien n’était.

Moi — Qu’est-ce qui se passe, Satô-san ? Ça te ressemble pas de dire quelque chose comme ça. Y a un truc qui va pas ?

Satô —…Je veux juste parler un peu avec toi, d’accord ?

J’avais un mauvais pressentiment sur la tournure que prenaient les choses, mais je n’avais pas le luxe de refuser. J’acquiesçai donc joyeusement, ce qui nous faisait nous éloigner du centre commercial.

Nous arrivâmes à un endroit où nous étions seules. Un endroit où personne ne devait pouvoir entendre notre conversation.

Moi — Vas-y et parle. Ne mâche pas tes mots non plus. Nous sommes amies, non ?

Mes mots n’étaient en aucun cas doux. Au contraire, ils étaient extrêmement cruels. Et même si je le savais, il fallait que je les dise. Après tout, j’étais Karuizawa Kei, la meneuse des filles de la 1èreD. Une personne égoïste et égocentrique qui ne tenait pas compte des sentiments des autres. Il fallait que je joue le jeu jusqu’au bout afin de garder cette réputation durement bâtie.

Satô-san avait probablement la même impression de moi aussi. C’est pourquoi

elle ne se sentirait pas dépitée ou en colère à cause de la façon dont je lui ai parlé.

Au contraire, peut-être même qu’elle allait se dire que je n’étais pas du genre à écouter et donc qu’elle allait s’arrêter là. Mais en fait non. Elle alla droit au but.

Satô — Karuizawa-san… Pourquoi as-tu rompu avec Hirata-kun ?

Moi — Eh ? Je ne te l’ai pas déjà dit ?

Bien que sa  question  ne soit pas  directement liée à  Kiyotaka, elle était suffisante pour que mon cœur s’emballe. Malgré cela, je réussis à faire en sorte que ça ne se voit pas. J’étais une pro de la comédie après tout.

Satô — Je veux dire, oui tu me l’as dit et tout, c’est juste que… ça ne colle pas trop.

Moi — Vraiment ? Eh bien, je suppose que c’est un peu regrettable oui. Attends, est-ce que tu essaies de devenir la nouvelle petite amie de Hirata-kun ou un truc du genre meuf ?

J’espérais qu’elle indiquerait qu’elle avait déjà perdu tout intérêt pour Kiyotaka. C’était une façon détournée de lui demander. Cependant, elle ignora ma question et répondit avec des mots totalement inattendus.

Satô — Par exemple, peut-être as-tu rompu avec Hirata-kun parce que tu avais en fait un autre objectif en tête ?

Ah, elle était donc au courant après tout. Du fait que j’étais tombée amoureuse de Kiyotaka, et que ma relation avec lui avait changé…

Moi — Qu’est-ce que─ ? Je ne comprends pas du tout ce que tu dis ?

Jusqu’à ce jour, j’avais délibérément maintenu l’apparence de mon moi normal et habituel. Même si, tôt ou tard, le jour allait venir où ma relation avec Kiyotaka allait être révélée, je n’avais pas d’autre choix que de me retourner et de fuir son accusation puisque j’avais décidé de garder le secret pour l’instant.

Peu importe ce qu’elle mettait sur la table, j’étais tout à fait prête à aplanir les choses avant que tout ne dégénère. Ou, du moins, je le croyais.

Satô —… Karuizawa-san… Tu sors avec Ayanokôji-kun ou quoi ?

Moi — Eh… ?

Je reçus un coup inattendu. Comment répondre à ça ? Ça aurait pu être différent si j’avais eu affaire à quelqu’un d’autre, mais face à Satô-san, ce moment d’hésitation s’apparentait à un aveu. Elle avait, comme si c’était complètement naturel, vu à travers mon cœur.

Si elle avait seulement demandé si je l’appréciais ou non, j’aurais certainement pu le dissimuler. Mais sa question était si directe.

Satô —…Donc j’avais raison après tout ?

Moi — Eh !? Non non, attends ! Qu’est-ce qui te fait penser ça ?

Bien sûr, je niai. Peu importe que ça ressemblait à quelque chose ou non, j’avais décidé de nier. Après tout, il n’y avait tout simplement aucun moyen de l’admettre ici et maintenant.

Moi — Avec moi…ça…pourquoi…

Mes mots de déni s’arrêtèrent lorsque je vis le regard dans ses yeux. Des yeux qui semblaient sur le point de pleurer, et qui contenaient pourtant des traces de colère en même temps. Et c’était logique. Après tout, elle m’avait fait suffisamment confiance pour se confier à moi et me demander de l’aider. Chose que j’ai faite tout en cachant le fait que je commençais moi-même à être attirée par Kiyotaka. Si j’étais à sa place, j’aurais probablement envie de me gifler pour être sortie avec Kiyotaka après tout ce qui s’était passé.

À ce stade, ce que je  disais  n’avait  pas  d’importance. Son opinion était déjà faite.

Satô — Étais-tu déjà intéressée par lui lorsque je t’ai demandé de m’aider à me rapprocher de lui ? Est-ce qu’il te plaisait déjà avant ça ?

Moi — A-attends, attends. J…

Je n’avais pas d’autre choix que d’affronter le poids des questions de Satô-san.

Satô — Je… J’ai dit la même chose à Matsushita-san et aux autres aussi. Je leur ai dit que je me demandais si la raison pour laquelle tu avais rompu avec Hirata-kun était parce que tu aimais Ayanokôji-kun. Mais je ne fais pas que supposer. J’en suis plutôt sûre, c’est pour ça que je t’en parle en fait.

J’avais déjà entendu dire que Matsushita-san suspectait ma relation avec Kiyotaka. Je n’avais plus aucun moyen de fuir maintenant.

Satô — S’il te plaît, dis-moi simplement la vérité. Sinon… je ne pense plus pouvoir te considérer comme une amie désormais.

Ses mots étaient chargés d’une forte émotion. Au contraire, elle faisait tout ce qu’elle pouvait pour sauver notre amitié.

Moi — Eh bien…

Je ne pouvais tout simplement pas fermer les yeux sur son regard empli de sérieux et de sincérité. Je ne savais pas par où commencer. Déjà, il ne servait plus à rien de cacher quoi que ce soit. Je devais tout lui dire, c’était le moins que je puisse faire pour m’excuser.

Moi — Je… C’est comme tu l’as dit. Je sors avec Ayano… Non, je sors avec Kiyotaka.

Satô-san eut naturellement une réaction très forte en entendant ça. Même si elle s’était confessée à Kiyotaka et avait été rejetée auparavant, elle avait toujours des sentiments pour lui. C’est seulement parce qu’elle et moi avions fini par aimer la même personne que j’avais pu comprendre ce qu’elle ressentait.

Satô — Tu l’appelles Kiyotaka, hein ?

Je voulais courir et me cacher de son regard froid, mais je ne pouvais pas.

Moi — Nous nous sommes mis ensemble à la fin des vacances de

printemps. Cela ne fait vraiment pas si longtemps.

Satô — Je veux surtout savoir quand tu as commencé à l’aimer.

Moi — …Je ne sais pas exactement quand. Mais, à l’époque où tu m’as contactée pour la première fois, j’avais déjà commencé à penser à Kiyotaka de « cette façon ».

Satô — Je vois…

Elle n’avait pas l’air très satisfaite de ma réponse.

Moi — Tu es en colère, n’est-ce pas ?

Jusqu’à il y a un instant, son regard ne lâchait pas le mien, mais maintenant elle n’arrivait plus à y faire face.

Satô — À quoi tu t’attendais ? Tu étais au courant de mes sentiments et pourtant tu es allée te rapprochée de lui dans mon dos.

Il n’y avait rien que je puisse dire pour le réfuter.

Satô — Il m’a foutu un râteau… Je n’ai pas le droit d’être en colère ou quoi que ce soit. C’est juste que…

Une brise chaude de printemps souffla doucement sur mon visage. Ce n’était qu’un court instant après, juste après qu’un son distinct et clair ait retenti, que je réalisai qu’elle m’avait giflé sur la joue gauche.

Satô — Avec ça, nous sommes quittes… d’accord, Karuizawa-san ?

Je ne m’attendais pas à ça, il était vrai. Donc c’était à ce point-là qu’elle m’en voulait.

Moi — Et si tu me frappais encore une fois ?

J’avais décidé que je pouvais aussi bien lui offrir ma joue droite. Après tout,

même maintenant, la douleur qu’elle avait subie était encore bien plus grande que la mienne.

Satô — Non, ça… Je ne pense pas être assez courageuse pour ça… Je suis désolée de t’avoir frappée…

Moi — Non. C’est moi qui suis désolée. Tomber amoureuse de la même personne que toi et tout…

Satô — On ne peut rien y faire. Ayanokôji-kun est vraiment cool, et il est bien plus beau que Hirata-kun.

Avant de m’en rendre compte, je m’étais retrouvée à écarter les bras et à enlacer Satô-san.

Satô — Que… attends, qu’est-ce que tu fais… Karuizawa-san ! Moi — …Je suis vraiment désolée !

Satô — C’est bon, vraiment…

Bien que je me sente accablée de remords, je n’avais tout simplement pas pu retenir le bonheur qui se construisait en moi et qui m’avait poussée à l’embrasser. Il était difficile pour deux êtres de tomber amoureux de la même personne. Cependant, cela signifiait aussi que nous avions toutes les deux compris son charme et ça nous avait rapprochées.

Puis j’avais comme l’impression que plus le temps allait passer, et moins nous allions être les seules à remarquer les qualités de Kiyotaka. Et j’allais devoir me battre, plus que jamais. Après tout, si tout ça se savait, je risquais d’avoir de nombreuses rivales. Satô-san la première.

Moi — Et si on allait se prendre un thé ?

Toujours enfermée dans mon étreinte, Satô-san hocha la tête, acceptant ma demande malgré tout.

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