CLASSROOM Y2 V1 : CHAPITRE 3


Des seconde à problème

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Traduction : Nova
Correction : Raitei, Ayanokôji is the best
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Des dizaines d’élèves, de 2nde et de 1ère, s’étaient réunis dans le gymnase. Surtout des 2nde, qui avaient sûrement pensé que c’était une bonne occasion de rencontrer du monde. Ne connaissant aucun des 2nde ici présents, je me concentrai tout d’abord sur les 1ère.

Sakayanagi, leader de la classe A, n’était pas présente. Au lieu de ça, je pus apercevoir Hashimoto Masayoshi. Est-ce qu’il était là pour la représenter ? Sakayanagi étant plutôt faible, c’était une possibilité. D’ailleurs, Hashimoto était le seul élève présent de la classe A. Il semblait toutefois plus être là en mission de reconnaissance que par pure envie de papoter.

En tant que classe organisatrice de l’événement, environ la moitié des élèves de la classe B étaient présents, y compris Ichinose. Je pouvais voir Kanzaki se tenir à ses côtés pour la soutenir. La classe B semblait avoir envoyé ses meilleurs éléments pour renvoyer une bonne image. Enfin, il ne semblait pas y avoir d’élèves de la classe C. C’était comme s’ils avaient complètement ignoré l’idée de la rencontre depuis le début. À partir de ce seul rassemblement d’élèves, on pouvait à peu près saisir les intentions de chacune des différentes classes de 1ère.

Mais, pour Horikita, les élèves de notre année n’étaient pas les plus importants aujourd’hui. En effet, son attention était portée sur les 2nde, les nouvelles têtes. Le fait qu’on demande à ces derniers, à peine arrivés, de se mettre en binôme avec des élèves de 1ère devait être assez perturbant pour eux. Le premier réflexe dans cette situation, et c’est ce que beaucoup faisaient, étaient de rester avec les gens qu’ils connaissaient déjà.

Voyant cela, Ichinose décida d’éviter de parler de l’examen spécial dès le départ. Au lieu de ça, elle essaya de se faire des amis parmi les 2nde en se présentant et en engageant des conversations informelles avec eux. Bien sûr, cela ne signifiait pas que tout le monde s’ouvrait à elle immédiatement. C’était bien pour cela qu’elle prenait son temps, affichant un doux sourire et faisant lentement fondre les murs de glace qui entouraient leurs cœurs. Il ne fallut que quelques minutes d’observation attentive pour avoir une idée approximative de ce qui allait se passer ensuite.

Horikita — Elle ne se focalise pas sur l’examen mais installe de façon globale la confiance. Quelle façon éblouissante de faire, Ichinose-san ! Peu en seraient capables.

Horikita donna sa première impression sur cette rencontre. Stratégiquement, on ne savait pas dans quelle mesure la Classe B allait tirer profit de cette approche, mais il nous fallait rester attentifs. Après tout, les actions d’Ichinose offraient des avantages aussi bien aux 1ère qu’aux 2nde. Horikita avait décrit Ichinose comme « éblouissante » pour être passée à l’action si rapidement.

En regardant Horikita de profil, je pus deviner qu’elle aussi avait quelque chose en tête.

Moi — Est-ce que tu penses toi-même à une stratégie similaire ?

Horikita — En effet. Une stratégie basée sur des points privés serait trop difficile à gérer pour notre classe. C’est pourquoi j’ai pensé qu’il serait important pour nous d’établir une relation de confiance avec les élèves de 2nde. Mais nous ne sommes pas à la hauteur d’Ichinose-san quand il s’agit de faire ça. Ou plutôt, elle a gagné le monopole de cette stratégie.

Un certain « quelque chose » est souvent nécessaire pour que l’autre partie nous accepte comme partenaire. En l’espèce, ce « quelque chose » pouvait être toutes sortes de choses comme des points privés, la confiance, l’amitié ou encore une dette.

Horikita — Le visage et le nom d’Ichinose Honami de la classe 1ère B sont déjà bien connus de nombreux nouveaux élèves. Les plus anxieux vont affluer vers elle, et je suis certaine qu’elle sera à la hauteur de leurs attentes.

Moi — Oui.

J’étais d’accord. Pourquoi approcher une classe comme la nôtre dont ils ne savaient rien ?

Horikita — Mais, même si nous ne pouvons pas reproduire son approche

éblouissante, nous avons d’autres cartes en main.

Donc Horikita avait bien déjà quelques idées. Cela avait dû lui venir alors qu’elle consultait activement les profils des 2nde via l’application OAA. Elle ne semblait pas avoir l’intention de partir tout de suite, car elle continuait à observer les élèves de 2nde. Je n’étais pas le seul à la regarder faire car une grande silhouette apparut à côté d’elle.

Sudou — Mais tu sais ce que je pense ? Ils m’ont l’air grave faiblards !

À côté de Horikita, Sudou partagea sans réfléchir sa petite impression sur les 2nde qu’il avait observés. Il avait initialement prévu de se rendre directement à ses activités de club après les cours aujourd’hui, mais l’école avait accepté la demande d’Ichinose d’organiser une rencontre et avait décidé à la hâte qu’elle se tiendrait dans le gymnase jusqu’à 17 h, alors il avait demandé à accompagner Horikita à l’événement à la place.

Horikita avait refusé catégoriquement, disant qu’il n’avait pas besoin de venir, mais il pensait probablement que c’était une bonne idée puisqu’il allait de toute façon se rendre au gymnase ensuite.

Horikita — Ne les regarde pas inutilement. Nous ne gagnons rien à les effrayer.

Sudou — Je ne les fixe pas. C’est juste le visage avec lequel je suis né. Dis ce que tu veux, mais c’est vraiment bien de se la couler douce comme ça ? Les gars intelligents ne vont pas tous se tourner vers Ichinose ? On ne devrait pas aller leur dire quelque chose ?

Sudou parla avec impatience à Horikita, en disant qu’il était préférable d’aller vers les élèves de 2nde dès que possible. Mais même en agissant, pas sûr que cela suffise à gêner Ichinose. La connaissant, elle en serait même plutôt très contente.

Moi — Que vas-tu faire, Horikita ?

J’étais curieux moi aussi, alors je lui posai également la question.

Horikita — Tu crois vraiment qu’on peut dépasser la classe B en jouant à ce petit jeu ?

Pour l’instant, Ichinose semblait accorder plus d’importance à aider les élèves de 2nde qu’à gagner l’examen pour sa propre classe. En effet, personne de la classe B n’avait encore quitté la salle et tous socialisaient avec les nouveaux. L’enthousiasme de la classe B avait probablement déteint sur eux !

Moi — Eh bien, je ne pense pas.

Je le lui accordai. Yôsuke ou Kushida auraient peut-être pu rivaliser avec la classe B sur le terrain de la sociabilité, mais nous trois en  étions bien incapables. Elle avait dû venir ici en le sachant très bien.

Lorsque la rencontre avança, Horikita se décida enfin à agir.

Horikita — Allons-y.

C’est-à-dire qu’au lieu de participer à la rencontre, nous allions plutôt partir. Donc Horikita n’avait pas l’intention de jouer un coup à cette rencontre, dès le départ.

Sudou — C’est vraiment bien, Suzune ?

Horikita — Plus de la moitié des élèves invités à cet événement ne sont même pas venus. Ce sont les élèves avec lesquels je vais négocier.

En d’autres termes, elle cherchait à cibler les élèves de 2nde qui n’étaient pas intéressés par Ichinose. Mais c’était plus facile à dire qu’à faire. En effet, on allait sûrement avoir à faire à des personnes ayant suffisamment confiance en elles pour choisir leur partenaire par eux-mêmes, sans aide, ou qui n’avaient tout simplement pas eu le courage de venir. Bref, on allait certainement devoir traiter avec des personnalités assez excentriques.

Moi — Dis-nous sur quoi tu te bases pour décider ça.

Horikita — Il y a deux raisons. D’après mes observations aujourd’hui, beaucoup d’élèves venus participer à l’évènement sont des élèves peu sûrs d’eux. À l’heure actuelle, nous devons rechercher des élèves ayant une note globale de B- comme strict minimum. En d’autres termes, nous devons trouver des élèves suffisamment solides qui ont la niaque de se battre sans avoir eu à éprouver le besoin de venir.

Je vois. Dans ce cas, il était logique que nous renoncions à la rencontre.

Horikita — Je ne dis pas que nous n’allons viser que des gens ayant des A en cours. Mais nous allons faire attention aux capacités et aux talents afin qu’ils pallient les élèves plus faibles et que personne ne soit expulsé.

Cependant, même si la 1ère  B avait choisi de sauver la majorité des 2nde qui étaient venus à la rencontre, il y allait naturellement en avoir quelques-uns laissés de côté. De plus, Ichinose allait probablement donner la priorité au sauvetage des élèves les plus mal lotis plutôt qu’aux élèves les plus doués sur le plan scolaire. Nous aurions donc pu rester dans le coin et choisir parmi les élèves relativement compétents restants que la classe B n’allait pas aider. Mais Horikita allait y venir, sa deuxième raison semblait avoir un rapport avec cela.

Horikita — De plus, il y avait une légère incohérence dans les personnes qui se sont présentées aujourd’hui à la rencontre et qui n’avaient rien à voir avec les compétences académiques.

Moi — Incohérence ?

Horikita — Aucun élève de 2nde D.

Ils n’avaient en effet pas du tout assisté à l’événement ? C’était en effet assez curieux.

Horikita — On dirait que tu as compris, Ayanokôji-kun.

Horikita semblait avoir compris ce que je pensais, mais…

Sudou — Hein ? Y a une sorte de signification derrière le fait que la 2nde D ne soit pas présente ?

Sudou pencha la tête, incapable de comprendre tout cela.

Horikita — Il y a 40 personnes en 2nde D. Beaucoup ont des problèmes d’ordre scolaire ou social, mais pas un seul n’est venu ?  On dirait donc que leur absence est plutôt due à un choix de leur chef de classe.

De toute évidence, quelqu’un avait pris le contrôle de la classe et les avait convaincus de ne pas participer à la rencontre. C’était assez étrange étant donné que peu de temps s’était écoulé depuis leur arrivée.

Sudou — Donc, tu dis que la classe 2nde D a déjà un leader et que c’est lui qui a refusé de participer à la rencontre…?

Horikita — S’il y a quelqu’un avec qui nous pouvons négocier au niveau de la classe, il n’est pas nécessaire d’essayer de négocier avec les gens au niveau individuel.

En d’autres termes, sa stratégie consistait à établir des relations entre les classe D de 2nde et de 1ère.

Sudou — Je pense que c’est possible, mais ce serait pas un peu chaud pour l’examen spécial du coup ?

Ce n’était pas une mauvaise idée dans la mesure où cela permettait d’éviter les expulsions. Mais cela allait également réduire nos chances de battre les autres classes.

Horikita — Tu as raison. Dans ce sens, je ne prévois pas de participer à la compétition interclasses cette fois-ci.

Sudou — Je comprends que je ne suis pas en mesure de dire quoi que ce soit et tout, mais est-ce que ça te convient vraiment ?

Horikita — Oui. Il n’y a pas de problème du tout.

Horikita parla de façon définitive. Il y avait quelques différences fondamentales dans la façon dont chacune s’y prenait, mais la stratégie d’Horikita était à peu près la même que celle d’Ichinose : au bout du compte, l’objectif était d’axer l’évènement sur le gain de points de classe.

Hashimoto, de la classe A, avait déjà quitté le gymnase, probablement parce qu’il avait terminé son enquête sur la rencontre d’Ichinose. Horikita suivit les traces de Hashimoto en se dirigeant vers la sortie, Sudou et moi la suivant à la trace. Cependant, juste avant que nous ne franchissions la porte, je me retournai et regardai Ichinose une dernière fois.

Elle parlait aux élèves de 2nde avec un sourire aux lèvres, complètement inconsciente de notre présence. Ichinose tendait volontiers la main à n’importe quel élève, quelles que soient ses notes. Elle avait abandonné l’idée de décro- cher la première place à l’examen spécial et se battait plutôt pour éviter que ses propres camarades de classe ne soient expulsés. Donc, encore une fois, c’était quasi ce que Horikita avait prévu.

Cependant, au fond, s’agissait-il vraiment de la même chose ?

Hashimoto — Yo.

Après avoir quitté le gymnase, Hashimoto nous appela comme s’il nous avait attendu.

Hashimoto — Ichinose est vraiment égale à elle-même, hein ?

Horikita — On dirait qu’elle a à cœur de sauver ses camarades de classe ainsi que les 2nde.

Hashimoto — C’est sûr. Dans l’état actuel des choses, elle ne sera pas une menace. Ne se rend-elle pas compte qu’amener des idiots de son côté ne fera que la tirer vers le bas ? C’est comme si elle jetait à la poubelle ses chances de gagner.

Hashimoto parlait comme s’il n’arrivait pas à se faire une idée. Il n’aurait jamais

pu se rendre compte que Horikita allait exécuter à peu près la même stratégie. Après tout, le fait qu’elle ait également prévu d’abandonner la compétition était une idée qu’il n’avait même pas envisagée.

Horikita — Peut-être a-t-elle organisé l’événement précisément parce qu’elle savait que les 2nde allaient la tirer vers le bas ?

Hashimoto — Aaah, je vois. Tu marques un point-là.

Horikita — La classe A… non, Sakayanagi-san a tout compris sans même avoir à venir à la rencontre. Elle avait déjà prévu quels  élèves se présenteraient. C’est pourquoi elle n’a pas participé, n’est-ce pas ?

Hashimoto — Eh bien, peut-être.

Malgré tout, elle avait probablement envoyé Hashimoto seul en tant qu’éclaireur.

Horikita — Alors, comment la classe A compte-t-elle attirer les élèves d’honneur de son côté ?

Hashimoto — C’est à notre princesse de le découvrir comme une grande. Je suis juste ici pour suivre les ordres, tu vois ?

Sur ce, Hashimoto partit, apparemment satisfait.

Sudou — Ne crois pas un mot de ce que dit ce salaud d’Hashimoto, Suzune.

Sudou prit la parole après qu’Hashimoto se soit suffisamment éloigné.

Horikita — Je n’ai pas besoin qu’on me le dise. Cependant, tu dis que tu connais bien Hashimoto-kun ?

Sudou — Même pas !

Sa réponse était un mélange de confiance et d’impudence.

Horikita —…Je vois. Eh bien, la classe A a un énorme avantage rien qu’en étant la classe A. Dans une certaine mesure, je suppose que c’est tout naturel que les gens affluent vers eux.

Après leur arrivée, ce n’était qu’une question de temps avant que les 2nde ne réalisent que la Classe A était la meilleure des meilleures. Même s’ils n’étaient pas conscients de ce fait pour le moment, ils allaient bien l’être tôt ou tard.

Horikita — Quoi qu’il en soit, allons-y. Il n’est pas trop tard, donc il devrait encore y avoir des élèves de 2nde D quelque part.

Nous nous dirigeâmes vers les classes de 2nde pour essayer de découvrir un peu ce qui se passait au sein de la classe D.

Alors que les yeux de tous étaient rivés sur la rencontre, Horikita semblait suivre sa propre route.

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Nous avancions vers l’étage où se trouvaient les classes de 2nde, un endroit où nous passions encore jusqu’à peu toutes nos journées. Il n’y avait pas beaucoup d’élèves dans les parages, la plupart s’étant rendus au gymnase.

Nous observions en silence des élèves de 2nde A à C, mais leur comportement changea brusquement lorsqu’ils comprirent qu’ils étaient regardés. Au fait, le fait que notre petite visite ne les enchante pas n’était guère surprenant. Une atmosphère pesante s’était installée, et ce phénomène n’allait faire que s’accroître dans les jours à venir, avec de plus en plus de 1ère qui allaient sûrement virer au harcèlement à force de désespérer de trouver un partenaire. Ce genre d’approche pouvait facilement se révéler contre-productive, d’ailleurs.

Mais malgré tout, dans chacune des salles de classe que nous avions vérifiées, nous avions pu trouver des élèves de 2nde papotant très normalement, comme des lycéens normaux quoi. Peut-être des gens qui pensaient ne pas avoir à s’inquiéter de l’examen spécial, ou peut-être ne mesuraient-ils pas pleinement les enjeux de celui-ci.

Horikita — On dirait que la plupart des élèves restés en retrait n’ont pas l’air très inquiets. Comme prévu.

Sudou — Ouais. Je trouve ça flippant, même moi j’y pense !

Disons que dans le cas où un binôme obtenait moins de 500 points pendant l’examen, l’élève de 2nde risquait simplement d’être privé de points privés pendant les trois prochains mois. Bien que ce soit sans aucun doute une grande perte, cela n’allait pas tout de suite avoir de grosses conséquences sur leur vie dans la mesure où ils bénéficiaient de leurs « points d’arrivée ». Un bon montant si usé avec parcimonie.

Ryuuen — Kuku. Tu es terriblement en retard, hein Suzune ?

Horikita était sur le point de terminer son inspection de la 2nde C lorsqu’elle fut accueillie par une voix familière. Ce n’était nul autre que Ryuuen Kakeru de la classe 1ère C, qui avait les yeux fixés sur nous avec audace. La porte menant à la classe 2nde D était derrière lui, et on aurait dit qu’il venait d’en sortir.

Horikita — Ryuuen-kun, tu es aussi ici pour observer les 2nde  ? Je ne pense pas t’avoir aperçu lors de l’évènement.

Ryuuen — Ah, parce qu’il y avait lieu d’aller voir une bande de loosers se regroupant dans le gymnase ? Quelle perte de temps !

Ryuuen avait adopté la même stratégie que Horikita, à savoir approcher les élèves n’ayant pas participé à la rencontre. D’après son ton, il semblait raisonnable de supposer qu’il visait les meilleurs élèves de 2nde. Il n’était arrivé que 20-30 minutes avant nous, et pourtant… Ce temps avait pu lui suffire à déjà repérer plusieurs personnes. Peut-être était-il plus sage d’attendre le lendemain matin, à 8h, pour voir quels appariements il avait pu réaliser.

Ryuuen — Détends-toi. Je n’ai encore trouvé personne.

Horikita et Sudou n’allaient pas le croire comme ça. Du moins, jusqu’à ce que l’application soit mise à jour avec les appariements qui avaient été finalisés pour la classe 1ère C.

Ryuuen — On dirait que tu ne me crois pas.

Horikita — Et bien, disons que je ne prends jamais trop de précautions avec toi.

Ryuuen — Je suis donc devenu indigne de confiance !

Horikita — Oh ? Encore faudrait-il que la confiance ait déjà régné entre nous, ce dont je n’ai pas le souvenir !

Horikita — Kukuku, ce n’est pas vrai.

Sudou lança un regard noir à Ryuuen, apparemment mécontent du ton pris.

Une personne lambda reculerait probablement de peur devant le regard acéré que Sudou dégageait, mais cela n’avait aucun effet sur Ryuuen.

Ryuuen — Je vois que tu t’es trouvé un garde du corps, mais mon dieu que tu en as choisi un stupide.

Sudou — Répète un peu !

Horikita tendit la main pour arrêter Sudou, qui était sur le point de perdre son sang-froid.

Ryuuen — Oh là là, je te charrie. Pas besoin d’être Einstein pour savoir ça !

Avec sa main retenant toujours Sudou, Horikita fixa Ryuuen droit dans les yeux, son regard inébranlable.

Horikita — Tu cherches à faire peur aux 2nde ? Tu sais que ton attitude va finir par se retourner contre toi, n’est-ce pas ?

Les élèves de 2nde allaient probablement avoir un peu peur en voyant Ryuuen se promener comme si l’endroit lui appartenait.

Ryuuen — Je m’étais dit que quelques petites menaces, par-ci par-là, allaient peut-être porter leurs fruits…

S’il avait dans un premier temps enchaîné les provocations, cette fois, Ryuuen avait confirmé ce que Horikita lui demandait.

Horikita — …Tu plaisantes. Tu penses vraiment que c’est une façon acceptable de faire les choses ?

Ryuuen — Qui se soucie de savoir si c’est acceptable ? Qu’y a-t-il de mal à proférer quelques menaces ? On nous a dit que nous ne pouvions pas menacer quelqu’un pour obtenir une note plus basse aux examens lorsque les règles ont été expliquées, mais je ne me souviens pas qu’on

nous ait dit que nous ne pouvions pas utiliser quelques menaces pour

nous aider à faire nos équipes.

Horikita — C’est parce que ça devrait être évident sans même que les règles aient besoin de le dire ! C’est toi qui vas être sanctionné si quelque chose se passe mal.

Ryuuen — Alors t’as qu’à faire en sorte que ça tourne mal pour moi ! Je ne suis pas assez bête pour me faire prendre de toute façon.

Ses mots étaient plus confiants que jamais.

Non seulement il était extrêmement probable qu’il menace les 2nde, mais il avait même osé déclarer que la vérité n’allait jamais éclater à ce sujet. Qu’il dise la vérité ou non, Horikita avait dû se rendre compte une fois de plus que Ryuuen était resté égal à lui-même.

Horikita — Eh bien, alors fais ce que tu veux. Sache juste que si jamais je trouve des preuves, je n’hésiterai pas à te dénoncer.

Elle disait probablement ça pour le dissuader un peu, mais cela n’allait très probablement n’avoir aucun effet sur Ryuuen.

Ryuuen — Alors quoi ? Qui vas-tu persuader ?

Pensant qu’il n’était pas nécessaire de répondre, Horikita ne parla pas.

Ryuuen — Tu as compris quelque chose pendant que tu étais à la rencontre, n’est-ce pas ? Puis tu es venue en courant jusqu’ici pour vérifier si tu avais vu juste.

Horikita — La même chose que toi alors, peut-être ? Ryuuen — Kuku. Peut-être.

Sur ce, Ryuuen continua à s’adresser à Horikita, presque comme s’il essayait de pimenter les choses.

Ryuuen — Si c’est le cas, je vais te mettre au courant de quelque chose puisque nous sommes sur la même longueur d’onde. Les 2nde viennent tout juste de s’inscrire ici, et pourtant ils sont terriblement calmes, tu ne trouves pas ? Comme s’ils savaient déjà tout, que l’école leur avait déjà dit à quelle sauce ils allaient être mangés.

S’il disait vrai, c’était tout à fait inattendu. À notre arrivée en Avril dernier, nous n’avions aucune idée de comment les choses fonctionnaient et avions enchaîné les gaffes. Bien sûr, les classes A et B étaient bien plus posées que nous, sûrement parce qu’ils avaient moins d’élèves à problèmes. Ryuuen ne parlait pas d’une classe spécifique, mais de toutes les 2nde  dans leur en-

semble.

L’école avait-t-elle fait cela pour que les élèves de 2nde et de 1ère s’associent dès le début ? Ou peut-être l’école avait-elle un tout autre motif ?

Ryuuen — Se pourrait-il que ces 2nde aient déjà tout compris et que nous ayons été de petits joueurs à côté ?

Horikita — On dirait que certains d’entre eux ont déjà commencé à réunir leurs classes. C’est trop tôt.

Même s’ils avaient commencé à prendre des mesures dès l’annonce de l’examen spécial, il n’y avait aucune chance qu’ils puissent se réunir aussi rapidement. Ryuuen disait donc qu’il y avait eu quelque chose d’autre avant, c’est-à-dire juste après leur entrée dans l’école.

Horikita — Quel mauvais tour tu prépares en me disant tout ça ?

Ryuuen — Ce n’est pas ça ! Juste que simplement gagner n’est pas suffisant pour atteindre mon objectif. Un petit peu d’organisation sera nécessaire.

Ce n’était pas un examen spécial facile pour faire expulser les élèves des autres classes. Tout d’abord, savoir avec qui quelqu’un était associé allait être plus facile à dire qu’à faire, à moins que les binômes ne le disent ouvertement.

Ensuite,  même  en  obligeant  un  élève  ayant  un  faible  score  d’aptitude

académique à s’associer avec un concurrent d’une autre classe, rien n’allait obliger le binôme à concourir pour l’examen et à se mettre en danger sous peine de risquer l’expulsion.

Au final, la seule chose qui pouvait influencer le résultat de cet examen était le niveau général d’une classe et le niveau des 2nde. Il fallait persuader un maximum de 2nde de rejoindre sa classe, or la 1ère C allait avoir des difficultés à attirer des élèves dans la mesure où leur niveau scolaire n’était pas très bon globalement. Scolairement ou logistiquement, la 1ère C n’avait aucune chance contre la 1ère A par exemple. Viser la première place était illusoire, même en appâtant des 2nde avec des points privés. Dans ces conditions, la meilleure stratégie était probablement d’abandonner la lutte des classes et plutôt se concentrer sur les récompenses remises aux binômes qui obtiennent les meilleurs résultats (30%) dans la compétition individuelle.

Bien sûr, il était hors de question que Horikita mentionne tout cela à Ryuuen. Après tout, cela ne nous arrangeait pas que la 1ère C n’affronte pas directement la 1ère A pour prendre la première place au classement général. En effet, au lieu de laisser la classe 1ère A s’emparer de la victoire sans effort, je voulais voir les deux classes s’affronter dans un bras de fer intense et les voir s’épuiser mutuellement, même juste un peu.

Ryuuen — Fais juste de ton mieux pour ne pas mordre la poussière.

Horikita — Je pourrais te dire la même chose. Ton inquiétude est complètement injustifiée.

Ryuuen — Kuku. Désolé, désolé !

Sur ce, Ryuuen se mit en route, laissant les salles de classe de 2nde derrière lui. Le temps qu’il avait passé ici avait été bien trop court pour faire avancer les choses.

Horikita — Les élèves de 2nde pourraient être plus opposés à négocier avec nous que je ne le pensais.

Il était logique qu’ils soient hésitants s’ils étaient déjà au courant de tout.

Sudou — Alors on devrait pas négocier avec eux dès que possible ? Horikita — Oui… Bien sûr que nous devrions, c’est juste que…

Horikita se retourna et regarda plus loin dans le couloir. Ses yeux étaient fixés sur la salle de classe de la Classe 2nde D.

Sudou —. Allez, on y va !

Sudou nous exhorta à continuer d’avancer vers la classe devant nous.

Horikita — J’ai bien peur que ce ne soit pas aussi simple.

Il semblait que Horikita l’avait également remarqué pendant la conversation de tout à l’heure. Depuis que Ryuuen avait quitté leur salle, aucun élève n’était sorti. Nous n’entendions pas un bruit en passant à côté de leur classe. Nos soupçons furent confirmés à la seconde où nous avions décidé d’ouvrir la porte.

Sudou — Qu’est-ce qui se passe ici ?

Paniqué, Sudou balaya la pièce du regard d’un bout à l’autre.

Horikita  — Négocier  avec la  classe  2nde  D  risque  d’être beaucoup, beaucoup plus difficile que je ne le pensais.

La salle de classe était complètement vide, pas une seule âme dans le coin. On aurait dit que les quarante élèves qui n’avaient pas assisté à la rencontre s’étaient volatilisés.

Horikita  —   Cette    classe    dans   son   ensemble    est   peut-être    plus problématique que je ne le pensais.

Cependant, nous ne pouvions pas rester éternellement anxieux à ce sujet.

Après tout, nous devions prendre les devants avant que les autres classes ne commencent à agir sérieusement.

La bataille de Horikita allait commencer le lendemain, à partir du moment où elle allait enfin entrer en contact avec les élèves de 2nde D. De mon côté, je devais mémoriser les noms et les apparences de tous les élèves de 2nde sur l’application OAA.

Horikita avait son combat à mener, de mon côté j’avais le mien.

Et ainsi, le jour même de l’annonce de l’examen, déjà 22 binômes avaient été formés.

2

Le lendemain, à la fin de la pause déjeuner, la situation avait pris un tournant brutal. Tout le monde attendait patiemment dans la salle de classe le début des cours de l’après-midi après avoir fini de manger.

Miyamoto — H-hey, des 2nde semblent se diriger par ici !

L’examen requérant la coopération des élèves de 2nde et de 1ère, je ne pensais pas que c’était si surprenant. Mais apparemment le reste de la classe ne pensait pas la même chose.

Miyamoto — Ils doivent avoir beaucoup de courage pour venir dans la classe de leurs aînés.

Alors que je semblai perplexe, Yôsuke prit la parole pour me l’expliquer.

Hirata — Imagine que nous allions rendre visite aux élèves de terminale. Nous serions probablement un peu anxieux, pas vrai ?

Moi — C’est vrai…

D’autant plus qu’il s’agissait de 2nde, des gens venant d’arriver et n’ayant pas leurs marques. Ainsi, vu sous cet angle, je comprenais pourquoi tout le monde était surpris.

Yôsuke sortit dans le couloir pour jeter un coup d’œil. Je le suivis. Horikita et Sudou ne tardèrent pas à en faire de même.

La première personne que je remarquai était un jeune homme à la carrure imposante. Il y avait plusieurs raisons pour lesquelles il se distinguait. La première étant bien sûr qu’il avait à peu près la même taille que Sudou. Mais le pire était certainement la confiance, presque la suffisance, avec laquelle il se pavanait au milieu de notre couloir. C’était impressionnant.

C’était les 1ère qui avaient peur. Le monde à l’envers. Une élève l’accompagnait.

Ayant remarqué que ce n’était pas un simple acte fait dans le but de chercher un partenaire, Horikita sortit et se plaça devant lui. Sudou lui emboîta le pas peu de temps après.

Pour une raison quelconque, c’était sur moi que ces deux 2nde avaient d’abord posé le regard, avant de se concentrer sur Horikita. Je repensai aux informations que j’avais mémorisées sur l’application OAA hier.

D’après ce que je voyais, Horikita allait entrer en contact avec cette classe plus tôt que prévu.

  • C’est qui celle-là ?
  • Un instant, je te prie… Ah, je l’ai trouvée !

La fille tripota son téléphone pendant un moment avant de montrer son écran au garçon.

  • 1ère D, Horikita Suzune. Aptitude académique : [A-]. Hein ?

La fille parlait beaucoup plus poliment que le garçon. Les deux faisaient une drôle de paire. Le garçon se tourna ensuite vers Sudou, qui se tenait à côté de Horikita. Une fois de plus, la fille consulta son téléphone et lui montra l’écran, comme elle l’avait fait avec Horikita.

  • Sudou Ken ? …Hah !

Après avoir vu les évaluations de Sudou, le jeune homme éclata odieusement de rire.

  • Je me nomme Nanase, présentement en 2nde D. Et voici mon camarade

de classe H─.

  • Hôsen.

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Le duo donna uniquement son nom de famille en guise de présentation. Le

nom complet de ce gars imposant était Hôsen Kazuomi, tandis que celui de la fille était Nanase Tsubasa. Dignes héritiers de la 2nde D, des élèves de la classe que nous n’avions pas pu rencontrer hier. Bien que leur apparition soudaine ici était définitivement inattendue, pour Horikita, c’était à la fois une bénédiction et une malédiction. Ce n’était pas vraiment une bonne idée de commencer les négociations tout de suite étant donné la présence d’élèves des autres classes.

Horikita — Pour des nouveaux élèves, vous prenez pas mal d’initiatives. J’admire votre courage !

Hôsen — Hah ? T’admires quoi ? T’as l’air de bien te la péter, salope ! Sudou — D’où tu parles comme ça enfoiré ?

Hôsen s’enflamma sur Horikita, ce qui incita Sudou à s’enflammer également et à mettre fin à la conversation.

Même s’ils avaient à peu près la même carrure, Hôsen était un tantinet plus imposant.

Hôsen — Un E+ en capacité académique ? On dirait que t’es aussi attardé que tu en as l’air.

Sudou — Tu veux répéter ça !

Sudou était enragé, mais Hôsen l’ignora simplement et continua à parler.

Hôsen — Eh bien, c’est foutu. On dirait qu’il n’y a qu’une bande de crétins de classe D ici de toute façon. Enfin, ça me va !

Horikita — Qu’est-ce que tu sous-entends ?

Hôsen — Vous êtes le fond du fond des chiottes. Vous ne pourriez pas trouver de partenaires sans supplier notre classe. Alors je vais vous donner un coup de main, bande d’attardés incompétents, pigé ?

Hôsen répondit à la question de Horikita tout en posant une autre question.

Horikita — Donc tu en train de dire que tu veux t’associer à nous. Pourtant, tu le demandes avec une attitude aussi arrogante ?

Hôsen — Et alors ? C’est vous qui devriez nous supplier, pas l’inverse. Je vous ai fait une faveur à vous les débiles en me traînant jusqu’ici.

Hôsen la défia, balayant son point de vue et affirmant le sien.

Hôsen — Alors dépêchez-vous, mettez votre tête sur le sol et suppliez.

Alors qu’elle retenait Sudou de se laisser emporter par son tempérament, Horikita prit la parole une fois de plus.

Horikita — Il semblerait que tu comprennes mal quelque chose. Nos positions sont égales.

Elle  parla  avec  encore  plus  de  conviction  qu’auparavant,  ne  faisant  pas attention à la disparité physique entre Hôsen et elle.

Hôsen — Du coup y’a pas que ton pote qui dit de la merde. Toi aussi. Horikita — Tu es en classe D. Tu n’es pas différent de nous.

Hôsen — Tu ne comprends pas. On a tous les droits sur des déchets comme vous, on pourrait vous faire tout un tas de choses. Tu veux pas que ça parte en couille non ? Si c’est le cas, alors reste à ta place et écrase-toi devant moi !

Apparemment, ce Hôsen avait déjà remarqué l’avantage particulier que les 2nde avaient contre nous.

Horikita — Et quelles sont au juste ces « choses » que tu pourrais nous faire ?

Horikita devait sûrement bien s’en douter, mais elle voulait sûrement que

Hôsen l’admette de lui-même.

Hôsen — Tu comprends, n’est-ce pas ? Nous avons les moyens de saboter intentionnellement nos notes aux examens.

En entendant ses mots, Horikita se mordilla la lèvre.

Sudou — Hein ? Mais qu’est-ce que tu racontes putain ?! C’est interdit dans les règles de l’examen !

Horikita — Arrête, Sudou-kun. Perdre ton sang-froid tout d’un coup comme ça est une mauvaise habitude.

Sudou — Mais…

Je pouvais comprendre pourquoi la façon excessivement agressive de parler de Hôsen donnait envie à Sudou de perdre son sang-froid.

Cependant, hélas, Hôsen avait raison.

Hôsen — Bien sûr, le règlement dit que tu seras expulsé si tu es pris en flagrant délit en train de saboter l’examen. Mais la sanction qui vient du fait de ne pas trouver de partenaire avant le jour de l’examen est différente. Ce n’est un problème que pour vous, les 1ère.

Un partenaire aléatoire serait désigné pour chaque personne ne trouvant pas de partenaire, ceci accompagné d’une pénalité de 5% sur la note globale. Comme les 1ère devaient faire face au danger d’expulsion, ils étaient bien plus préoccupés par ces mesures que les élèves de 2nde.

Sudou — C’est quoi ce bordel !?

Incapable d’y croire, Sudou envoya à Horikita un regard qui exigeait une confirmation. Mais la seule chose que Horikita put répondre, c’est un hochement de tête.

Horikita — Mais ce serait dommage pour vous, non ? Ça t’irait vraiment

de subir des pertes immédiatement après votre arrivée ?

S’ils subissaient une pénalité, leurs chances d’obtenir un score supérieur à 500 points diminuaient naturellement.

Hôsen — Pas aussi dommage que pour vous, les 1ère, nan ?

Hôsen demanda confirmation à Nanase, qui se tenait juste derrière lui.

Nanase — Oui. Il est dit que nous ne recevrions pas de points privés pendant 3 mois, donc au total 240 000 points de perdus. Il ne me semble pas que ce soit une perte insurmontable.

Hôsen — T’as pigé maintenant, Horikita-senpai ?

Hôsen se tenait devant Horikita, un élève de la classe supérieure, comme si c’était lui qui avait un rang plus élevé. Sudou ne pouvait plus se retenir à la vue de ce  spectacle. Cependant, il avait encore assez de volonté pour s’em- pêcher de donner un coup de poing, choisissant plutôt de prendre une po- sition imposante et agressive devant Horikita.

Hôsen — Tu cherches à te battre ?

Hôsen défia Sudou sans même une trace d’hésitation dans sa voix.

Sudou — T’as vraiment intérêt à redescendre hein !

Horikita — Ne perds pas ton sang-froid, Sudou-kun. Tu sais très bien comment ça se passe dans cette école, n’est-ce pas ?

Il n’était pas surprenant que les 2nde ne le sachent pas, mais les couloirs ici étaient constamment sous la surveillance de l’école. Comme les caméras de surveillance étaient toujours en marche, l’établissement n’aurait aucun mal à obtenir des preuves en cas d’incident.

Sudou — Je sais…

Après avoir été réprimandé à plusieurs reprises par Horikita, Sudou se retint encore malgré son irritation. Sa patience limitée était certes un gros défaut, mais au moins il écoutait Horikita.

Sudou se tourna et détourna son regard de Hôsen. Mais, à ce moment-là, Hôsen le poussa au niveau de la poitrine.

Sudou — Woah !?

Sudou perdit l’équilibre et tomba en arrière, se rattrapant avec les mains.

Hôsen — Quelle merde au gros cul ! Je t’ai à peine touché !

Les autres 1ère assistant à la scène étaient choqués du comportement excessivement téméraire de Hôsen. C’était de la violence ni plus ni moins, s’il était au fait des règles de l’école il n’aurait pas fait ça.

Enfin, toujours est-il qu’ils avaient l’air d’en savoir déjà beaucoup pour des nouveaux arrivants. Si Ryuuen avait vu juste, alors la conduite de Hôsen était tout simplement imprudente. Alors ils ne sont pas aussi rôdés sur l’école qu’on le pensait ? Non, ça n’avait pas l’air d’être ça…

Sudou — Fils de pute !

Alors qu’il avait presque retrouvé son calme, Sudou avait réalisé ce que Hôsen lui avait fait et était à quelques secondes d’exploser avec toute la fureur qu’il avait gardée en lui. Cependant, avant que cela ne se produise, un jeune homme qui observait la situation de loin intervint.

Ishizaki — Mais c’est quoi ton problème ?

Il s’agissait d’Ishizaki Daichi de la 1ère C. Bien qu’il soit normalement catégorisé comme un délinquant prompt à perdre son sang-froid, c’était aussi un gars avec beaucoup de cœur. Il semblait ne pas pouvoir se retenir plus longtemps en voyant avec quelle cruauté Sudou, l’un de ses pairs, était traité.

Hôsen — Ces gars de 1ère continuent de surgir comme des cafards.

Hôsen laissa transparaître une expression amusée, tandis que la fille s’étant présentée comme Nanase le calma légèrement.

Nanase — N’es-tu pas venu ici pour discuter, Hôsen-kun ? Si ton seul objectif était d’user de violence, je vais prendre congé.

Hôsen — Violent ? Je l’ai à peine caressé, comme un chat. Désolé Sudou !

Il s’adressa à l’élève de 1ère en face de lui sans utiliser d’honorifique, presque comme s’il lui crachait dessus.

Ishizaki — Hé ! Être un connard a ses limites !

Ishizaki tendit le bras, cherchant à attraper Hôsen par le col de sa chemise. Au moment où il a vit le bras se diriger vers lui, les coins de la bouche de Hôsen laissèrent apparaître un léger sourire.

Ryuuen — Laisse tomber, à moins que tu ne veuilles mourir, Ishizaki.

Le bras d’Ishizaki s’arrêta en plein vol, à quelques instants seulement de s’emparer de la chemise de Hôsen. L’avertissement venait de nul autre que Ryuuen, qui avait apparemment lui-aussi observé la situation depuis un petit moment.

ishizaki — P-pourquoi est-ce que tu m’arrêtes ?

Ishizaki était visiblement confus par le fait que Ryuuen l’avait arrêté. Ibuki — Je pensais que t’allais intervenir. Qu’est-ce que tu fais ?

Ibuki, de la même classe, prit également la parole, surprise par l’implica- tion soudaine de Ryuuen. Ryuuen ne détestait pas ce genre de confrontations, loin de là. Au contraire il en était généralement friand. Si la situation l’exigeait, il n’hésitait pas à se salir les mains, caméras de surveillances ou non.

Voilà pourquoi le fait qu’il ait empêché le combat de se produire était si

inattendu.

Ryuuen fit reculer Ishizaki, puis s’approcha de Hôsen lui-même.

Hôsen — Alors c’est toi mon adversaire maintenant ? Tu as l’air bien faible comparé à l’autre attardé de Sudou là-bas.

Étant donné que le physique de Ryuuen ne semblait pas si impressionnant de prime abord, Hôsen dit ce qu’il pensait.

Ryuuen — J’ai beaucoup entendu parler de toi. Là d’où je viens, un certain « Hôsen » est une petite célébrité locale. Je ne pensais pas que tu avais l’air si attardé toi aussi.

Ryuuen reprit exactement le mot que Hôsen avait utilisé pour insulter Sudou. Un grand classique de sa part. Normalement, Ryuuen était l’ennemi de notre classe, mais le voir prendre position dans une confrontation comme celle-ci était plutôt rassurant. En fait, Sudou avait même réussi à se ressaisir grâce au changement d’atmosphère.

Sudou — T-tu connais ce type, Ryuuen-san ? Hôsen — Tu viens de dire Ryuuen ?

L’expression de Hôsen changea en entendant le nom de Ryuuen, son léger sourire se transformant en un large sourire en dents.

Hôsen — Oi oi, sérieusement ? Ça doit être le destin ou quelque chose comme ça. J’ai entendu tellement de rumeurs sur toi, ça m’en a presque foutu les nerfs Ryuuen !

Ryuuen — On dirait que tu as assez de neurones pour au moins te souvenir du nom de quelqu’un, c’est bien !

Les deux se connaissaient apparemment depuis un certain temps déjà. Ils devaient venir de la même ville ou quelque chose du genre.

En tout cas, à en juger par les interactions entre Ryuuen et ses camarades de classe, Ishizaki et Ibuki, on pouvait déduire une chose : Ryuuen avait repris le commandement total de sa classe.

Hôsen — Que le grand Ryuuen ait un corps aussi maigre… Quelle déception.

Ryuuen — Et je suppose que tu es aussi musclé que je l’imaginais.

Hôsen — J’ai cherché à te rendre visite plusieurs fois pour te casser la gueule, mais on ne s’est jamais rencontrés. Tu étais une petite salope et tu te cachais de moi à l’époque, pas vrai ? Tu t’es enfui en laissant tout le taff à tes subordonnés.

Ryuuen — Kuku, le destin était de ton côté, Hôsen. Si tu avais croisé mon chemin à l’époque, tu ne serais pas aussi imbu de ta personne. Il semble que tu aies eu de la chance puisque tu ne sais pas encore ce que c’est que de vivre une défaite.

Hôsen — Ha oui ? J’étais persuadé que tu t’étais enfuis la queue entre les jambes. Mais si tu dis que ce n’est pas le cas, que dirais-tu de mettre les choses au clair ici et maintenant ?

Hôsen serra sa grande main en un poing, affichant sa confiance.

Si Hôsen connaissait vraiment Ryuuen du temps de son collège, son impression ne devrait pas être si différente de nos propres impressions sur lui. Pourtant, il ne semblait pas avoir peur le moins du monde de Ryuuen.

Ryuuen — Détends-toi. Je ne vais pas échanger des coups avec un gorille quand je n’ai rien à y gagner.

Bien qu’on lui ait proposé un combat, Ryuuen ignora la provocation et refusa. Bien sûr, c’était parce qu’il n’y avait pas moyen pour lui de se battre dans un endroit comme celui-ci, mais…. Ishizaki et les autres pensaient probablement que Ryuuen aurait accepté, quitte à changer de lieu.

Hishizaki — Ce type est vraiment si effrayant que ça ? Ibuki — Il est plus grand que Sudou et tout, mais…

Ryuuen — Qui sait ?

Ryuuen ne semblait pas avoir l’intention de donner une réponse pour le moment. Il laissa juste apparaître un léger sourire avant de donner ses prochaines indications à ses camarades de classe.

Ryuuen — On se tire, pour l’instant.

Ibuki — Tu vas vraiment laisser un 2nde te prendre de haut comme ça ?

Ibuki savait très bien que Ryuuen était le genre de personne à échanger des coups avec n’importe qui, peu importe qui c’était, alors elle n’avait certainement pas pu s’empêcher de lui demander cela.

Ryuuen — Hah ! On pourra s’occuper de lui quand on veut. Pas besoin que ce soit maintenant !

Ryuuen répondit à Ibuki très sereinement.

Mais bien qu’il aurait été préférable que cela se termine ainsi, Hôsen ne sembla pas vouloir en rester là.

Hôsen — Cette nana est aussi un de tes sous-fifres ?

Il posa cette question à Ryuuen, ayant observé comment ils parlaient entre eux quelques instants plus tôt.

Ryuuen — Eh bien, quelque chose comme ça. Ibuki — Hein ? Quoi ? Depuis quand bordel ?

Hôsen —Quoi, tu as même des filles qui font ton sale boulot ?

Ryuuen — Je pourrais dire la même chose de toi. C’est toi qui as amené cette jolie poupée, n’est-ce pas ?

De la même façon, Hôsen avait la fille nommée Nanase juste à côté de lui.

Hôsen — Elle n’est pas ma sous-fifre. Je n’en ai pas grand-chose à faire de toute façon. Allons régler ça dehors, Ryuuen.

Ryuuen — Pas aujourd’hui je t’ai dit.

Peu importe le nombre de fois que Hôsen le provoquait, Ryuuen ne se laissait toujours pas prendre au jeu. Et, comme pour symboliser cet état de fait, il tourna le dos à Hôsen, illustrant son intention de se retirer.

Hôsen — C’est comme ça ? Ok.

Ryuuen ne mordait pas, et Hôsen ne semblait pas trouver cela très drôle. Tout à coup, il tendit le bras en direction d’Ibuki. Elle tenta de le repousser mais… Juste avant, les mouvements d’Hôsen se firent plus rapides et lui permirent de l’attraper par le cou, la soulevant dans les airs.

Ibuki — !?

Ibuki essaya frénétiquement de se défaire. Cependant, Hôsen souriait sans crainte, son bras inflexible semblant avoir été coulé dans de l’acier. Ryuuen se retourna, remarquant ce qui était en train de se passer pour Ibuki. Elle faisait tout ce qu’elle pouvait avec ses mains et ses jambes pour essayer de se délivrer, en vain.

Hôsen — Haha ! Essaie juste de t’échapper, ma belle ! Ça, ou alors ça ne me dérange pas que toutes les autres tapettes me tombent dessus !

Son regard téméraire laissait exprimer une totale confiance en lui. Ceci dit, c’était délicat d’agir de la sorte. Il n’était pas possible de provoquer de l’agitation dans un endroit pareil sans que l’école n’en ait vent. Et c’est bien pour cette raison que personne ne réagit.

Personne, à l’exception de Ryuuen, qui s’avança malgré la surprise. Il se jeta

sur Hôsen, pas tant pour lui porter que pour sauver Ibuki. Ryuuen donna plusieurs coups de pied à Hôsen, mais ce dernier se contenta de hausser les épaules avec désinvolture, alors même qu’il avait une main prise qui était autour du cou d’Ibuki.

Ishizaki — Espèce de salaud !

À ce moment-là, Ishizaki, à qui Ryuuen avait précédemment dit d’arrêter, se joignit aux hostilités. La situation était telle qu’il devenait difficile d’imaginer que nous étions dans le couloir d’une école.

Hôsen — OUI !! Ça valait la peine de venir dans cette école après tout !

Une véritable bagarre pouvait commencer à tout moment. Cependant, Nanase, qui avait observé en silence pendant tout ce temps, intervint enfin.

Hôsen — S’il te plaît, j’aimerais que tu cesses, Hôsen-kun.

Hôsen se donnait en spectacle en affrontant deux adversaires malgré son handicap dû à son emprise sur Ibuki, mais lorsque sa camarade de classe Nanase l’interpella, le spectacle s’arrêta.

Hôsen — Qu’est-ce que tu viens de dire ?

Plutôt que de se contenter de suivre docilement sa demande, il fit étalage de son irritation quant au fait qu’elle se soit interposée.

Nanase — Nos aînés sont préoccupés, à raison, par la présence de caméras de surveillance. Au vu des circonstances, j’en ai conclu que nous n’avions rien à gagner à nous déchainer en ce lieu.

Hôsen — Sans blague ! C’est pour ça que je m’amuse avec eux !

Il admit être conscient que nos actions étaient limitées à cause des caméras de surveillance. Cela ne rendait pas les actions de Hôsen plus cohérentes.

Hôsen  ignora  Nanase  et se recentra sur  sa petite  bagarre. Nanase  n’en

démordit toutefois pas.

Nanase — Si tu sais ce que tu fais, alors c’est une raison de plus pour y mettre un terme. Si tu continues à perdre du temps avec ces querelles inutiles, je me verrai obligée de prendre les choses en main. Veux-tu que je parle de « ça » devant tout le monde, ici et maintenant ?

En l’entendant mentionner le terme abstrait « ça », Hôsen arrêta immédiate- ment. D’un air morne et ennuyeux il lâcha prise, faisant tomber Ibuki sur le sol, toussant violemment en même temps qu’elle.

Hôsen — Très bien, Nanase. Mais sache que je n’aurai aucune pitié si tu me déçois, même pour une meuf comme toi !

Nanase — Je te prendrai volontiers au mot quand le moment sera venu.

Peu importe à quel point Hôsen l’intimidait, Nanase parlait toujours avec assurance. Elle semblait si calme et posée que le fait qu’elle soit devant le couloir des 1ère ne semblait pas l’affecter.

En tout cas, ce Hôsen non plus n’était pas une personne ordinaire. Parmi tous les élèves de 1ère, il y en avait un bon nombre qui étaient fiers de leurs capacités de combat. Il y avait des gars comme Ryuuen, Sudou et Albert. Cependant, malgré le fait que j’aie un an de plus, je pouvais dire d’un simple coup d’œil que Hôsen était un gros morceau. Je n’étais pas sûr d’être moi-même ca- pable de le maîtriser. Comme je n’avais eu qu’un aperçu de ce dont il était capable, je ne pouvais même pas imaginer s’il y allait à fond. La raison pour laquelle Ryuuen avait essayé d’empêcher Ishizaki d’agir de manière imprudente était probablement parce qu’il jugeait qu’engager un simple com- bat de poing ne serait probablement pas à leur avantage. Un 2nde bien tumultueux que nous rencontrions là !

Hôsen — Bon, j’ai fait ce que j’avais à faire. On se casse, Nanase. Nanase — Oui. C’est un choix judicieux.

Apparemment satisfait de tout, sauf du combat, Hôsen se retourna et regarda

Ryuuen une dernière fois.

Hôsen — Si tu te prosternes devant moi, je suppose que je pourrais te laisser faire équipe avec moi, mon cher Ryuuen !

Ryuuen — Désolé, mais je ne collabore qu’avec des humains doués d’intelligence, pas des primates.

Hôsen — Quel dommage !

La situation était déjà tellement étrange, mais nous n’étions pas au bout de nos surprises. Parce qu’en plus de Hôsen et Nanase, il y avait un autre élève de 2nde qui avait silencieusement observé le déroulement de la situation pendant tout ce temps. Cet élève avait probablement tapé sur les nerfs de Hôsen, car il tourna son attention vers eux à la fin.

Hôsen — Tu vas juste te faufiler et regarder, fils de pute ?

  • Un homme sage se tient à l’écart du danger. Peut-être n’as-tu jamais entendu ce proverbe ?

Sur ce, le garçon de 2nde répondit élégamment au Hôsen renfrogné.

  • Une conversation amicale est une chose, mais ce n’est pas une très bonne idée que tu causes plus de problèmes ici, Hôsen-kun. Je pense que tu devrais y aller.

Alors que le garçon prononçait ces mots de conseil, un adulte arriva enfin dans le couloir.

  • Que fais-tu ici, Hôsen ?

Un homme vêtu d’un costume était venu afin de briser l’agitation des élèves. Et, lorsque l’homme parla, de nombreux élèves de 1ère qui observaient la scène regagnèrent leurs salles de classe.

  • Hôsen, je comprends que tu te sentes agité, mais je suis sûr que tu

connais bien les règles et qu’on te les a répétées. Hôsen — Oui oui, j’ai compris.

  • Si tu as vraiment compris, alors vas-y. Tu ne devrais pas te battre dans les couloirs.

Hôsen — Ça ? Une bagarre ? Un apéro oui !

Avec un rire méprisant, Hôsen se mit les mains dans les poches et s’en alla. Il recula enfin docilement, donnant l’ordre à Nanase de battre en retraite à son tour.

Hôsen — À toute, Horikita.

Hôsen prononça expressément le nom de Horikita avant de partir… Non, c’était plutôt comme s’il s’adressait à la 1ère D dans son ensemble.

Nanase — Encore mille excuses pour le dérangement.

Avec cela Nanase inclina la tête, réussissant à mettre fin à la situation. Puis, lorsqu’elle la releva, elle me regarda une fois de plus avant de partir. C’était le même regard que celui qu’elle m’avait lancé en arrivant ici. C’est-à-dire un regard inquisiteur qui donnait l’impression qu’elle cherchait à savoir quelque chose. Toutefois, à la seconde où je la remarquais, elle détourna immédiatement le regard et rejoignit Hôsen.

  • Je dois m’excuser auprès de vous tous. Les élèves de ma classe vous ont causé des problèmes.

L’enseignant s’excusa auprès de Horikita, qui avait été au cœur des festivités.

Horikita — Ne vous en faites pas…

M. Shiba — Pendant que j’y suis, permettez-moi de me présenter. Je suis

l’enseignant chargé de la 2ndeD, Shiba Katsunori. Bien que je vienne d’arriver dans cette école, j’espère en apprendre davantage sur toi.

Après une brève présentation, Shiba-sensei se retourna pour suivre Hôsen et Nanase. Puis, l’éloquent élève de 2nde qui avait répondu à Hôsen vint s’incliner devant les élèves de 1ère.

  • On dirait bien que Hôsen-kun vous a causé pas mal de désagrément. Je vais donc vous présenter une nouvelle fois des excuses au nom de toute la 2nde D.

Contrairement à Hôsen, il semblait être doué de diplomatie.

  • Nous autres les 2nde n’avons pas forcément tout compris à cette histoire d’examen spécial. Je m’excuse pour le dérangement, mais nous apprécierions que vous puissiez tous prendre soin de nous.

Après avoir terminé ses excuses en cascade, l’élève commença à tourner la tête, laissant entendre qu’il était sur le point de partir lui aussi. Mais soudain, il remarqua quelque chose, ou plutôt quelqu’un. Un petit groupe de filles de la 1ère D venait de rentrer après avoir mangé ensemble. Il était composé de quatre personnes : Matsushita, Kushida, Satô et Mii-chan. Il fixa l’une d’entre elles, Kushida, avec une expression de surprise sur le visage.

Kushida — Tout le monde semble un peu secoué. Que s’est-il passé, Horikita-san ?

Bien qu’elle ait remarqué la présence de l’élève, Kushida tendit une perche à Horikita, curieuse de savoir ce qui s’était passé ici.

Horikita — Rien dont tu n’as à t’inquiéter. Kushida — C’est vrai ?

Au renvoi de Horikita, Kushida haussa les épaules, prête à retourner en classe avec ses amies.

— Euh… Tu ne serais pas Kushida-senpai, par hasard ? Kushida — Eh ?

Ayant entendu quelqu’un s’adresser à elle, Kushida se retourna. Se pouvait-il qu’ils se connaissaient d’avant ?

Kushida — Erm ?

Kushida le regarda avec une confusion visible dans les yeux. L’atmosphère entre eux semblait ne laisser aucune place à la familiarité.

Yagami — Tu ne me reconnais pas ? Je suppose que c’est normal. Je suis Takuya Yagami.

Après avoir entendu son nom, Kushida réfléchit un peu avant de comprendre.

Kushida — Yamagi… Ah ! Ce Yagami-kun !?

Yagami — En effet, « ce Yagami » comme tu dis ! Cela fait un moment, n’est-ce pas ?

Kushida — Alors tu es aussi venu dans cette école, Yagami-kun ! Quelle incroyable coïncidence !

Yagami — Je ne pensais certainement pas revoir Kushida-senpai ici ! Satô — Vous vous connaissez tous les deux ?

Satô demanda avec curiosité, ce que Kushida confirma.

Kushida — Oui. En fait, en dehors des salutations et autres formalités, on ne s’est jamais vraiment trop parlé. Nous n’étions pas de la même année après tout. Mais Yakami Takuya-kun m’a toujours donné l’impression d’être incroyablement intelligent.

Moi — Ce gars te dit quelque chose ?

Je chuchotai à Horikita pour vérifier ce qu’elle savait et elle répondit immédiatement.

Horikita — Eh bien, pas vraiment.

Moi — Tu ne sembles pas te souvenir de grand-chose à propos de tes anciens camarades de classe, n’est-ce pas ?

Horikita — Tu n’as pas tort. À l’époque, je n’avais pas le temps de prêter attention aux personnes qui ne m’intéressaient pas.

C’est sûr, comment se souvenir de quelqu’un ou d’une chose auquel on ne prête même pas attention ? C’était à peine si elle calculait ses propres camarades de classe, alors il était impossible qu’elle se souvienne d’un élève d’une année en dessous. D’un côté, même Kushida ne s’était pas souvenue de lui tout de suite. Mais peu de garçons oublieraient une fille comme Kushida ! Rien que physiquement, elle était vraiment pas mal.

Yagami — Quelle chance d’être à nouveau dans la même école que Kushida-senpai que j’admirais !

Kushida — C’est trop…

Kushida répondit avec humilité. Cependant, si elle était vraiment dans le même collège que Yagami, certaines inquiétudes lui vinrent naturellement à l’esprit.

Moi — Est-ce que tu crois que ce Yagami sait pour « tu sais quoi » ?

Je chuchotai une fois de plus à Horikita. Mon utilisation du terme « tu-sais- quoi » faisait bien sûr référence au passé de Kushida.

À l’époque où elle était au collège, Kushida avait provoqué la destruction de sa propre classe. De plus, elle considérait  comme ennemie Horikita,  qui avait fréquenté le même collège et qui savait la vérité sur ce qui s’était passé.

En effet, Kushida pensait qu’il était dangereux que quelqu’un connaisse sa

vraie nature et voulait donc se débarrasser de Horikita.

Comme il était aussi allé dans le même collège, il n’aurait pas été étrange que Yagami connaisse aussi l’histoire, mais…

Horikita — C’est assez probable. Après, pas forcément.

Dans ce cas, la présence de Yagami ici n’était pas très rassurante pour Kushida. Une coïncidence mais pas tant que ça. Après tout, si des gens venant du même collège ont pu tomber dans la même classe comme Horikita et Kushida, il n’était pas surprenant que quelqu’un d’une autre année vienne d’une même ville donc d’un même établissement.

Yagami — Je sais que c’est soudain, mais si c’est toi, Kushida-senpai, alors je n’aurais pas à me plaindre. Voudrais-tu faire équipe avec moi ?

Bien qu’il vienne à peine de la rencontrer à nouveau, Yagami fit son offre en tendant la main avec un sourire sur le visage.

Essayait-il de souligner qu’il ne savait rien de son passé ? Ou était-ce que cela

n’avait pas d’importance même s’il le savait ?

Kushida — Est-ce que tu serais vraiment bien avec quelqu’un comme moi ? Tu devrais t’associer à quelqu’un de plus brillant, Yagami-kun.

La note d’aptitude académique de Yagami Takuya était un A. On ne pouvait mieux faire, donc la modestie de Kushida était compréhensible. Horikita, qui était en train de tripoter son téléphone portable juste à côté de moi, cherchait à confirmer sa note de son côté.

Yagami — Je n’ai pas trop mes marques ici, alors je trouverais ça plus rassurant de collaborer avec quelqu’un qui n’est pas totalement inconnu.

Même si l’application renseignait sur les aptitudes scolaires d’une per- sonne, elle ne disait rien de sa personnalité. Cela étant, Yagami avait pro- bablement décidé qu’il valait mieux choisir quelqu’un au minimum fiable.

Kushida — Erm, Eh bien, laisse-moi y réfléchir un peu, je suppose…?

On ne savait pas trop si elle se méfiait de lui ou bien s’il y avait autre chose, mais elle demanda un petit délai avant de répondre à son offre.

Yagami  — Bien entendu ! Je ne m’associerai avec personne d’autre avant que tu aies donné ta réponse, Kushida-senpai.

Avec une note de A en capacité académique, il n’avait pas besoin de se pré- cipiter. Par conséquent, Yagami ne voyait aucun inconvénient à attendre.

Sudou — Bon sang, quelle chance. Je n’aurais pas hésité si j’avais été toi !

Étant donné son classement E+, Sudou semblait jaloux de la capacité de Kushida à choisir avec qui elle allait former une paire.

Horikita — Alors tu devrais faire plus d’efforts pour aller de l’avant.

Sudou — Je vais certainement obtenir de bien meilleures notes !

Il avait envie de s’améliorer, insatisfait de rester là où il était maintenant.

Je m’éloignai de Horikita et des autres pendant un moment car je vis Haruka me faire signe de venir à l’endroit où elle se tenait. Elle était accompagnée des autres des membres du groupe Ayanokôji : Akito, Keisei et Sakura.

Sakura — Il était super effrayant, hein ?

La toute première chose que j’ai entendue après m’être joint à eux était l’impression d’Airi sur Hôsen.

Hasebe — J’ai comme l’impression qu’il y a un tas de fauteurs de trouble comme Sudou-kun et Ryuuen-kun dans cette nouvelle fournée de 2nde, hein ?

Ayant observé toute la scène de loin, Haruka prit la parole, ses mots étant remplis d’exaspération. Juste à côté d’elle se trouvait Akito, qui fixait immobile l’extrémité du couloir où Hôsen avait disparu.

Hasebe — Miyachi ? Qu’est-ce qui ne va pas ?

Miyake — Un sacré bonhomme vient de s’inscrire ici. Cette école pourrait devenir assez agitée à l’avenir. Ce type… Hôsen… Il est si fort qu’il a même donné du fil à retordre à Sudou et Ryuuen.

Hasebe — Quoi ? Tu le connais aussi, Miyachi ?

Miyake — Je ne l’ai jamais vu en personne ou autre, mais Ryuuen et Hôsen sont tous deux assez célèbres là d’où je viens.

Akito venait vraisemblablement du même secteur géographique que Ryuuen et Hôsen.

Miyake — Pour faire simple, le chef de gang de mon école était plutôt confiant dans ses compétences de combat. Mais un jour, quelque chose

s’est produit et le gars a disparu d’un seul coup. Des rumeurs avaient

commencé à circuler peu de temps après, comme quoi un gars à peine débarqué au collège nommé Hôsen l’avait battu à plate couture lors d’un face-à-face et l’avait envoyé à l’hôpital alors qu’il avait deux ans de moins que lui.

Hasebe — Chef de G-gang ? On se croirait dans un de ces mangas de délinquants ! C’est flippant.

Miyake — L’endroit d’où je viens est célèbre pour être mal fréquenté. Hasebe — Huh…

Akito  avait  utilisé  beaucoup  de  mots  que  Haruka  n’avait  pas  l’habitude d’entendre, alors elle avait l’air un peu déconcertée.

Miyake — Du coup Hôsen avait réussi à resserrer son emprise sur chacun des collèges de la zone, l’un après l’autre.

Hasebe — Ryuuen-kun n’est-il pas célèbre lui aussi ? J’avais pourtant l’impression que c’était la première fois qu’ils se voyaient.

Miyake — J’ai l’impression que c’est le hasard qui a fait qu’ils ne se sont jamais vus en personne avant.

Hasebe — Dis, tu étais aussi un délinquant, Miyachi ?

Miyake — Je… j’ai arrêté de faire ce genre de choses. Je suis un vrai lycéen maintenant !

Hasebe — Alors tu étais un délinquant après tout.

Miyake  —…J’avais  mauvais  caractère  jusqu’en  première  année  de collège. Depuis, j’ai tout canalisé dans le tir à l’arc.

Hasebe — Donc, en d’autres termes, tu dis que tu étais un délinquant, n’est-ce pas ?

Akito se gratta la tête de façon inconfortable alors que Haruka le harcelait constamment de questions étranges.

Miyake — Est-ce que c’est une mauvaise chose ?

Hasebe — Pas vraiment. Au contraire, c’est plutôt super cool, n’est-ce pas ?

Miyake — Alors pas du tout !

Alors la raison pour laquelle Akito semblait si bien informé en matière de combat était qu’il avait déjà été des deux côtés de la question. Il est vrai que nous avions vu des choses de lui qui le suggéraient auparavant, de ses nerfs d’acier à l’agilité de ses mouvements.

Hasebe — Puisque tu es un ancien délinquant, et si tu allais montrer à Hôsen ce qu’il en est ?

Miyake — Arrête de plaisanter. Je suis du genre à bien choisir mon adversaire avant de me battre avec quelqu’un, et il est hors de question que je choisisse de me battre contre Hôsen.

Akito déclara forfait avant même qu’un combat n’ait eu lieu. Ses paroles et sa conduite étaient telles que, plutôt que d’admettre sa propre faiblesse, il soulignait et reconnaissait la force de Hôsen.

Il fallait dire qu’Ibuki, qui se débrouillait plutôt bien, n’avait pas pu faire la moindre chose contre lui. La différence entre leurs deux corpulences faisait que le verdict était sans appel. De plus, même en vitesse, elle s’était révélée être inférieure à lui.

3

Comme la veille, Horikita m’aborda après les cours.

Alors que nous étions sur le point de quitter la salle de classe ensemble, Sudou arriva en force pour nous accompagner. Bien que Horikita ait essayé de le repousser comme la dernière fois, elle fut apparemment fascinée par son désir de lui donner un coup de main. Elle accepta à la condition que cela n’entrave pas ses études ou sa participation aux activités de son club. Que Horikita soit aussi douce, ou peut-être devais-je dire qu’elle accepte, était certainement inattendu.

Cependant, il y avait probablement une très bonne raison à cela.

Il ne restait qu’environ dix jours avant l’examen spécial. Étant donné la grande difficulté des épreuves écrites, il aurait été idéal pour Sudou de sécuriser un moment et un lieu pour qu’il se concentre sur ses études, même si ce n’est qu’un peu. Ce qui promettait d’être difficile s’il ne lâchait pas Horikita d’une semelle. Pour cette raison, il était clair que Horikita voulait trouver un partenaire à Sudou le plus rapidement possible.

Bien que Horikita ait une solide compréhension de lui, il y avait un aspect crucial qu’elle n’avait pas encore compris. À savoir, les sentiments de Sudou à son égard. Elle n’avait pas réalisé qu’il y avait une raison pour laquelle il voulait toujours être à ses côtés. Bien sûr, il était hors de question de le lui faire remarquer. Après tout, c’était l’une des motivations les plus importantes de Sudou.

Au lieu de se diriger vers les salles de classe de 2nde, Horikita nous conduisit en direction du centre commercial Keyaki. Peut-être parce que les élèves de 2nde avaient causé des problèmes dans notre propre couloir à peine plus tôt qu’à l’heure du déjeuner ? Ou peut-être avait-elle décidé de ne pas le faire à cause de Hôsen, l’enfant à problèmes de la 2nde D ?

J’allais le découvrir assez vite de toute façon.

Sudou — Je dois dire qu’il y a beaucoup de choses qui se passent ici. Ces 2nde font vraiment beaucoup de bruit.

Une fois entrés dans le centre commercial, Sudou enfonça son petit doigt gauche dans son oreille, apparemment irrité. Il parla sans détour, partageant son impression sur les élèves de 2nde étalés devant lui.

Horikita — Il y a certainement beaucoup de gens qui traînent dans le coin, n’est-ce pas ?

Ils étaient partout, discutant joyeusement entre eux de ce qu’ils aimeraient acheter ou manger.

Horikita — Et pourtant, je suis ici en train de chercher sérieusement un partenaire.

Consacrer plusieurs jours à la recherche d’un partenaire n’était pas seulement une bonne idée pour les élèves de 1ère, mais aussi pour les élèves de 2nde. Cependant, il y avait une énorme différence entre les élèves des deux niveaux scolaires. Celle-ci résidait dans notre compréhension des examens spéciaux. En effet, très peu d’élèves de 2nde semblaient ressentir un sentiment d’urgence, tout comme les élèves que nous avons vus hier après l’école.

Ce sentiment s’était amplifié en dehors de l’enceinte de l’établissement.

Horikita — C’est compréhensible, n’est-ce pas ? Nous sommes passés par là après tout.

Moi — Je suppose que c’est vrai…

Les élèves avaient reçu une grande somme de points privés juste après leur arrivée à l’école. Naturellement, cela les a fait vivre dans une certaine oisiveté. Même s’ils étaient de la classe A, cela ne faisait pas une grande différence.

La partie la plus gênante de tout cela était la différence de sanction entre les

élèves de 2nde et de 1ère. Seulement trois mois sans points privés pour les 2nde quand, nous autres, risquions l’exclusion pure et simple.

Sudou — Regarde-les un peu, en train de s’amuser sans se soucier du monde.

Horikita — Tu es bien placé pour parler, Sudou-kun. As-tu déjà oublié comment tu étais en 2nde ?

Sudou — Je n’ai pas oublié… J’y ai beaucoup réfléchi, d’accord ?

Après tout, il avait été le premier élève à être menacé d’expulsion. Cependant, les mesures de secours que nous avions utilisées pour le sauver à l’époque n’étaient plus à notre disposition. Comme si les privilèges liés au fait d’être nouveau étaient épuisés depuis longtemps.

Horikita — Pour l’instant, que diriez-vous d’essayer d’entrer en contact avec certains d’entre eux ?

Dit-elle en repérant un groupe de trois étudiants masculins de 2nde assis ensemble sur l’un des bancs du centre commercial, en train de plaisanter entre eux. Leurs noms étaient Kaga, Mikami et Shiratori. Tous les trois étaient en 2nde D avec des notes d’aptitudes académiques de B- ou plus. Avant de leur tendre la main, Horikita s’était bien sûr renseignée un tout petit peu via l’application. Elle cherchait toujours à s’attaquer aux élèves de la classe 2nde D après tout.

Horikita — Hé ! Je peux vous déranger une seconde ?

—…Qu’est-ce qu’il y a ?

Ils pouvaient probablement savoir qu’ils étaient approchés par des élèves de la classe supérieure rien qu’en nous regardant. Leurs expressions joyeuses s’étaient effacées, laissant place à de la vigilance et de la prudence.

Horikita — Nous recherchons des partenaires pour le prochain examen

spécial. Vous n’en avez pas encore, je suppose ?

  • Eh, ah, oui. Nous ne nous sommes encore associés à personne.

Moi — Si cela ne vous dérange pas, pourrions-nous en discuter en partant du principe que vous êtes d’accord ?

  • Ça ne nous dérange pas du tout. Pas vrai les gars ?

Après avoir entendu notre proposition, les trois hochèrent la tête comme s’ils s’étaient concertés à l’avance. C’était une réponse étonnamment bonne, et on avait l’impression qu’ils avaient un peu baissé leur garde. Sudou sembla également choqué par leur attitude ouverte, laissant apparaître une expression légèrement surprise.

Horikita — Cependant, je suis vraiment désolée de le dire, mais notre priorité absolue pour l’instant est de trouver…

— Des partenaires qui peuvent empêcher ceux d’entre vous qui ont une faible note d’aptitude académique d’être expulsés, n’est-ce pas ?

Il semblait que tous les 2nde étaient plus ou moins au courant.

Horikita — Oui. Bon, si vous le savez déjà, je suppose que ce sera plus simple !

  • Voyons… alors tu voudrais que l’un d’entre nous fasse équipe avec… Sudou-senpai ?

Ils parlèrent avec assurance puisqu’ils avaient également vérifié nos profils OAA sur leurs téléphones portables.

Horikita — C’est vrai. Entre autres.

  • Ah, je vois. Donc, sa note d’Aptitude Académique est E+… ? Ça va être délicat.

Les mots choisis étaient pleins de tact, mais il était clair qu’il soulignait les faibles résultats scolaires de Sudou. Même si c’était une vérité, Sudou semblait quand même quelque peu exaspéré, bien qu’il ait réussi à faire en sorte que ça ne se voit pas trop.

  • Si c’est toi, Shiratori, ça devrait aller, non ?

Kaga et Mikami se tournèrent vers Shiratori, assis tout à droite. Shiratori — Perso, ma note d’Aptitude Académique est A. Horikita — En effet. Et donc tu serais prêt à t’associer à lui ? Shiratori — Très bien alors… que dis-tu de ça ?

Shiratori fit un geste vers Horikita, lui montrant sa main avec les cinq doigts levés. Horikita ne comprit pas tout de suite et nous regarda, circonspecte.

Shiratori — Rholala. Tu veux qu’on s’associe, non ? Si c’est le cas, une certaine chose est absolument nécessaire, tu ne crois pas ?

En entendant ces mots, Horikita saisit là où il voulait en venir.

Horikita —…Je suppose que tu fais référence aux points privés ?

Shiratori — Bien sûr. Si je m’associais à quelqu’un d’intelligent, je pourrais viser la première place. Pour renoncer aux récompenses po- tentielles liées au fait d’arriver en tête en m’associant à quelqu’un qui a un faible indice d’Aptitude Académique, il est tout à fait naturel qu’il y ait une compensation, n’est-ce pas ?

Sudou — Quoi !? Tu veux nous prendre des points ? Et 50 000 points en plus… ? C’est beaucoup trop !

Pour Sudou, qui menait une vie où il était constamment à court d’argent, c’était une quantité scandaleuse de points.

Shiratori — Senpai, s’il te plaît, arrête de plaisanter. Comment pourrais- je accepter 50 000 ?

Sudou — Ah ?

Shiratori — 500 000 pardi ! Si tu me donnes 500 000 points, je serai d’accord pour m’associer avec toi ici et maintenant.

Sudou — 500 000… Bordel !

Shiratori — Il y aura des conséquences si quelqu’un est expulsé de ta classe, n’est-ce pas ? Nous avons fait notre part de recherches à ce sujet également.

Il était évident qu’il y avait une grande différence entre les 2nde de cette année et nous à leur place, l’an dernier. Non seulement ils avaient une meilleure connaissance que  nous des rouages de l’école, mais en plus ils étaient conscients de leur propre valeur pour négocier. Entre nous, il était difficile de dire qui était un élève de terminale et qui était un élève de 2nde.

Horikita — Tu n’as pas tort de penser que le fait de se mettre en binôme avec quelqu’un qui a un indice d’Aptitude Académique inférieur demanderait un certain degré de compensation.

Sudou — H-Hé Suzune, j’ai pas du tout 500 000 points pourtant ? Horikita — Je le sais, alors tais-toi un instant.

Les trois 2nde eurent des sourires crispés sur le visage après que Sudou eut né- gligemment divulgué sa mauvaise situation financière.

Horikita — Il est naturel de désirer des points, mais courir après un gain temporaire vaut-il vraiment la peine ?

Shiratori — Qu’est-ce que tu dis ?

Shiratori,  en  tant  que  représentant  des  trois,  demanda  à  Horikita  de

développer.

Horikita — Ce que je veux dire, c’est que si tu nous faisais une faveur ici, nous pourrions peut-être t’aider dans une situation similaire plus tard.

Horikita essayait de les persuader que ne pas recevoir de points privés pouvait se retourner en avantage en nature plus tard, pour l’avenir.

Shiratori — À part toi Horikita-senpai, qui as A en capacité académique, je ne peux pas imaginer que Sudou-senpai ou Ayanokôji- senpai nous soient très utiles. Ou je me trompe ?

Horikita — Ce n’est pas forcément vrai. Il n’y a pas que les études dans cette école. Il y aura aussi des moments où les capacités physiques entreront en ligne de compte.

Cela s’appliquait particulièrement à Sudou, car il était le seul élève de 1ère à avoir un A+ en indice de capacité physique. Horikita cherchait à utiliser ça comme argument mais…

Shiratori — Je le sais, mais au final vous êtes toujours de classe D, n’est- ce pas ? Si je cherchais à développer des relations et partenariats de confiance, je viserais plutôt des gens en classe A ou B.

Shiratori répondit, étant parvenu à un jugement calme et objectif. À ce stade, Horikita l’avait probablement compris aussi.

Horikita —…Je vois. Alors c’est comme ça, hein ?

Après avoir pris en compte le nombre de points privés impliqués et la façon dont ils avaient géré notre offre en douceur, il n’était pas nécessaire d’y consacrer plus de temps.

Horikita — Qu’est-ce que vous avez derrière la tête concrètement ?

Shiratori — Avant votre arrivée, nous avons été approchés par une

autre classe d’élèves de 1ère.

Horikita — Et ils t’ont dit de ne pas vendre tes capacités académiques à vil prix, pas vrai ?

Shiratori — Oui. Sache que nous ne nous associerons pas avec toi si tu ne peux pas présenter un nombre de points convenable.

Malgré un rejet aussi clair de la part de Shiratori et de ses amis, Horikita n’en démordit pas.

Horikita — Il y a du vrai. Soyez conscients de votre valeur, c’est bien. Mais au final je me demande s’ils vous ont vraiment approché ?

Shiratori — Qu’est-ce que tu veux dire ?

À ce moment-là, l’expression de Shiratori semblait quelque peu mécontente, comme si sa fierté liée à ses aptitudes académiques notées A avait été blessée.

Horikita — Vous êtes en classe D, tout comme nous. Je ne pense pas que les classes de rang supérieur se battent vraiment pour vous.

C’était  le  bluff  de  Horikita.  Si  une  personne  avait  un  indice  d’Aptitude Académique élevé, elle était utile dans cet examen, qu’elle soit en classe A ou

D. Elle avait surtout dit cela pour confirmer qui était celui qui leur avait tendu la main, et les détails de ce qui avait été dit.

Shiratori objecta immédiatement.

Shiratori — C’est pourtant vrai. Nous avons été invités par Hashimoto- senpai de la 1èreA. Et, nous avons également été approchés par la Classe 1ère C, qui nous offre une bonne somme de points pour nous associer à eux. Pas vrai les gars ?

Les deux autres hochèrent la tête en signe d’accord.

Shiratori — Et pas seulement nous. Pratiquement toutes les personnes

intelligentes ont été approchées à l’heure actuelle.

Ceux qui cherchaient à les convaincre étaient de la 1ère A et de la 1ère C, comme Horikita l’avait prédit.

Horikita — Je vois… Dans ce cas, il n’y a aucun moyen pour nous de répondre à tes attentes pour le moment.

Shiratori — Ah, mais nous ne te refuserons pas si tu as les points pour le faire. Nous allons observer la situation pendant la semaine qui vient, à peu près. Si tu peux offrir 500 000 points d’ici là, nous donnerons notre accord pour nous associer, même avec Sudou-senpai.

500 000 points privés. C’était un budget, c’est vrai. Mais, sous un autre angle, c’était le prix à payer pour la sécurité. Cependant, une décision définitive ne pouvait pas être prise maintenant, et ne devait pas l’être.

Horikita — Au fait… Combien de points Hashimoto-kun et les autres vous ont-ils proposé ?

Elle voulait savoir exactement combien de points étaient sur la table ici, mais Shiratori et les autres n’étaient pas si naïfs.

Shiratori — Nous avons promis de ne pas partager cette information. La seule chose que je dirai est que, si tu as 500 000 points, nous t’aiderons volontiers.

Horikita — Je comprends. Je vais en tenir compte. Dans tous les cas, je peux vous demander une faveur à tous les trois ? Pourriez-vous nous présenter à certains de vos autres camarades de classe ?

Shiratori — « Présenter » ?

Horikita — Nous avons déjà prévu de coopérer avec ta classe, du moins dans une certaine mesure. Mais cela demandera beaucoup de temps et d’efforts pour vous approcher un par un et vous expliquer les mêmes

choses  depuis  le  début.  Si  possible,  j’espérais  que  vous  pourriez

rassembler quelques personnes et que nous pourrions avoir une discussion concrète à partir de là.

Elle effleura brièvement l’idée de travailler ensemble, sans trop rentrer dans les détails toutefois. Les trois échangèrent des regards légèrement gênés.

Shiratori — C’est… nous confier quelque chose comme ça… ça va être assez difficile, pas vrai les gars ?

— Oui. Si nous allions de l’avant et faisions ça sans le consulter, Hôsen- kun se mettrait probablement en colère contre nous.

Le nom de « Hôsen » avait été évoqué alors qu’ils discutaient tous les trois du sujet. Leurs paroles et leur comportement donnaient une idée de la peur qu’ils avaient pour lui.

Shiratori — Je suis désolé Senpai, mais pourrais-tu demander cela à quelqu’un d’autre… ?

C’était donc Hôsen qui détenait la clé de la 2ndeD. Ayant remarqué le chan- gement évident d’atmosphère, Horikita décida de ne pas insister davantage.

Horikita — Merci. Je te contacterai si j’ai besoin d’autre chose. Shiratori — O-ok. On reste open !

Nous nous éloignâmes du banc et commencions à nous diriger vers le café situé au deuxième étage du centre commercial. Je regardai discrètement derrière nous pendant que nous partions, et je vis Shiratori passer précipitamment un appel.

Horikita — Bien que nous ayons obtenu quelques informations, il est difficile de dire que nous avons fait de réels progrès. La seule chose dont je suis sûre, c’est qu’ils coopéreront si nous alignons la somme exor- bitante de 500 000 points.

Sudou — Ils nous prennent vraiment pour des cons en faisant les princesses comme ça.

Horikita — C’est une somme dingue, c’est sûr. Mais, de leur côté, ils auraient tort de ne pas en profiter.

Ne pas se vendre au rabais était encore plus important pour ceux qui avaient une note A en Aptitudes académiques. D’autant qu’avec 500 000 points ils faisaient d’une pierre deux coups : en dépannant une classe, ils dépassaient les 100 000 points promis au duo décrochant la première place.

Sudou — Donc, la seule façon de me sauver est de payer quelqu’un avec des points privés ?

Horikita — C’est difficile de penser qu’il y aura quelqu’un prêt à t’aider gratuitement.

La notion selon laquelle tout se monnayait avec des points s’était déjà répandue dans l’esprit des nouveaux. Il était préférable de supposer que non seulement Shiratori et ses amis, mais aussi l’ensemble des élèves de 2nde étaient au fait du système d’échange  de points privés.  Tout cela faisait probablement partie de la stratégie de Sakayanagi et Ryuuen. Normalement, l’échange de points pour des faveurs était mal vu et le faire devait, en théorie, être fait discrètement. Cependant, maintenant que ce genre de tactiques avaient été mises au goût du jour, les 2nde avaient bien évidemment déjà compris que fournir des services sans compensation équivaudrait à subir une perte.

Néanmoins, quelque chose dans notre conversation avec Shiratori et ses amis avait attiré mon attention. Alors qu’ils disaient avoir été approchés par d’autres classes, Shiratori avait quand affirmé vouloir attendre une semaine. Qu’ils se laissaient du temps pour faire monter les enchères ne me choquait pas. Mais ce qui m’avait paru étrange était à quel points ils semblaient d’accord à l’unanimité pour procéder ainsi. Était-ce parce que ces trois-là se trouvaient être confiants, ou… ?

Horikita — Si nous continuons à demander au hasard comme ça, nous

allons obtiendrons probablement les mêmes réponses, n’est-ce pas ?

Le fait que nous ayons les yeux sur la 2ndeD n’était pas bête. Mais ils avaient aussi évoqué le fait que Hôsen allait leur faire la misère s’ils faisaient quelque chose de leur côté. Il n’y avait donc pas de doute : c’était Hôsen Kazuomi qui contrôlait la 2ndeD.

Horikita — Hôsen a probablement donné des instructions à ses camarades de classe. En leur disant quelque chose comme : « Je me fiche de savoir avec qui vous vous mettez en binôme, mais n’acceptez que s’ils déballent au moins 500 000 points. Sinon, mettez-les en attente et attendez, même s’ils sont de la classe A.

Sudou — Mais, avec quelque chose comme ça, ils ne risquent pas d’être laissés sur le carreau ?

Horikita — Cela signifie qu’il s’est déjà préparé à cette éventualité. Sudou — Quoi ? Je pige rien.

Horikita — Les 1ère sont ceux qui risquent le plus s’ils se retrouvent sans partenaire. Il cherche à utiliser cette épée de Damoclès sur notre tête pour nous arracher autant de points privés que possible.

Si tous les meilleurs éléments en dehors de la classe 2ndeD avaient déjà été rachetés, nous n’aurions d’autre choix que de dépenser beaucoup pour obtenir l’aide de la classe 2ndeD. Peut-être même 1 ou 2 millions, qui sait.

Horikita — C’est une stratégie imprudente, qui ne tient absolument pas compte de ce qui se passera plus tard.

Moi — Alors peux-tu expliquer officiellement ton plan pour savoir comment tu vas gérer ça ?

Nous avions déjà compris la stratégie de la 2ndeD. Ayant pris cela en compte, j’étais très curieux de savoir ce que Horikita en avait conclu. Allait-elle faire comme les classes A et C et marchander ? Ou alors une tactique à la Ichinose visant à établir une relation de confiance en acceptant les élèves les plus inférieurs sur le plan scolaire, mais en gagnant par la même occasion la confiance de plus grosses pointures en cours de route ?

Horikita  —  J’avais,  pour  nous,  énuméré  trois  objectifs  lorsque  j’ai entendu parler de cet examen spécial pour la première fois.

Sudou — Trois objectifs ?

Sudou semblait porter un intérêt à ce sujet dans la mesure où il se pencha plus près, pour exprimer sa curiosité.

Horikita — Le plus important est de ne laisser personne se faire expulser, cela va sans dire.

À cela, Sudou hocha la tête.

Horikita — Ensuite, arriver minimum à la troisième place.

Sudou — « Troisième » ? Donc tu as renoncé à la première et à la deuxième place dès le départ ?

Horikita — « Minimum » j’ai dit.

S’il est vrai que la formulation exacte de ses mots incluait la première et la deuxième place, d’une certaine manière, elle ne semblait elle-même pas trop y croire. Cela avait probablement quelque chose à voir avec son troisième objectif.

Horikita — Le troisième est d’éviter toute transaction. J’ai l’intention d’agir en gardant ces trois principes à l’esprit.

Sudou — Eh… ? M-mais…

Horikita — Je comprends ce que tu veux dire. Nous ne gagnerons pas du

tout si nous ne nous battons pas avec des points privés. Mais, même si nous nous battons en utilisant tous les points que notre classe possède, les pertes ne valent pas les bénéfices. Disons que nous réussissions à obtenir la première place au classement général. Dans ce cas, nous n’aurions que 50 points de classe. Sur une année, à l’échelle des gens, ça ne fait que 2 millions de points.

Avec 5000 points par mois multipliés par un total de 39 personnes, en soustrayant les points qui ont déjà été distribués en Avril, nous recevrions un total de 2 145 000 points au cours des onze mois restants.

Horikita — En supposant en plus que nous dépensions 500 000 par personne, nous serions dans le rouge après 5 duos. Tu n’es pas optimiste au point de penser que nous pouvons arriver en tête avec seulement quatre 2nde ayant des capacités académiques de niveau A, n’est-ce pas ?

Même si nous maintenions cette situation pendant les deux prochaines années, c’est-à-dire jusqu’à l’obtention du diplôme, cela ne ferait que 4 485

000 points privés. Nous ne pourrions attirer qu’un maximum de onze personnes. De plus, cela était basé sur la condition préalable que nous les recrutions non seulement pour 500 000 points au maximum, mais que nous prenions également la première place du classement général de la classe. Étant donné les risques, il était très probablement plus sage d’attendre un futur examen spécial et d’utiliser nos points privés à ce moment-là.

Horikita — Les points privés ne valent pas les points de classe, quoiqu’on dise. Je suis bien consciente que ça paraît fou. Cependant, je pense que même si nous mettons tous nos points en commun, nos chances de gagner seraient minces, voire nulles, alors nous ne devrions pas essayer de forcer les choses. Est-ce que je me trompe, Ayanokôji-kun ?

Moi — Non. Ta déduction est correcte.

À l’origine, la différence de compétences scolaires entre la 1èreD et la 1èreA était douloureusement évidente.

Je  ne  pensais  pas  que  nous  avions  de  grandes  chances  de  gagner,

globalement, même en mettant la main sur 11 personnes pour les duos.

Bien sûr, malgré ce qu’elle dit, Horikita allait sûrement s’adapter. Je pouvais imaginer qu’elle était prête à débourser un petit peu, disons 50 000-100 000, pour un petit coup de pouce. Elle ne voulait simplement pas que la classe s’enlise dans des négociations de points astronomiques.

Horikita — Afin d’atteindre ces trois objectifs, je pense toujours que nous devrions chercher à négocier avec la 2ndeD.

Sudou — M-mais pourquoi ? Avec Hôsen qui mène la barque, ils voudront même pas nous écouter si on leur file pas un demi-million par personne.

Horikita — Pour les bons élèves, oui. Cependant, il y a des élèves de la 2ndeD qui ont des notes de l’ordre de C, et beaucoup d’autres en des- sous encore. Que crois-tu qu’il se passerait si on les laissait comme ça ?

Sudou — Ce qui se passerait… ?

Moi — Les élèves qui auraient dû pouvoir recevoir de l’aide recevraient plutôt une pénalité, et la situation deviendrait instable.

Je répondis à la place de Sudou, ce à quoi Horikita acquiesça. Elle poursuivit.

Horikita — Il n’y a aucune raison qu’ils renoncent intentionnellement aux points privés qu’ils reçoivent chaque mois. En d’autres termes, à un moment donné, Hôsen-kun n’aura d’autre choix que de changer de position.

Seuls les meilleurs éléments de la classe D pouvaient espérer négocier de la sorte. Hôsen, en dehors de l’expulsion de quelques première, ne gagnerait absolument rien à ce petit jeu et risquait de prendre du retard.

Horikita — S’il a les yeux sur la victoire, il devrait certainement y avoir

une opportunité à saisir.

Il semblait que Horikita avait l’intention de s’opposer à la classe 2ndeD, la classe que tout le monde voulait éviter.

Horikita — Bien que le fait que nous soyons 39 à essayer d’affronter la classe de Hôsen-kun serait dangereux. Nous devons faire de notre mieux pour réduire les risques autant que possible.

Si nos négociations devaient échouer, ce sont les élèves ayant de faibles résultats scolaires qui allaient en pâtir.

Horikita — L’examen venant de commencer, il est tout à fait normal que les gens fassent la fine bouche.

Horikita — Eh bien, j’espère que t’as raison… Pour quelqu’un comme moi, je ne suis pas sûr qu’un partenaire existe maintenant ou plus tard d’ailleurs.

Horikita — De toute façon, pour trouver un bon partenaire, nous n’avons pas d’autre choix que de commencer à tendre la main à tout un tas de gens.

— Heyo~ Si tu cherches un bon partenaire, il y en a un juste là.

Alors que nous montions les escaliers, nous dirigeant vers le café du deuxième étage, nous entendîmes une voix nous interpeller par derrière. En nous retournant, nous pouvions apercevoir une fille qui nous observait depuis le premier étage avec un large sourire sur le visage. Dès que nos regards se croisèrent, elle commença à monter les escaliers avec désinvolture.

Horikita fut la première à laisser transparaître la méfiance sur son visage.

Horikita — Est-ce que tu écoutais aux portes ?

  • Ne sois pas comme ça, Senpai. J’ai juste appelé parce que je vous ai

entendus par hasard, c’est tout ! Uhm…

Elle parla en nous regardant à peine Sudou et moi, les yeux étant fixés sur Horikita pendant tout ce temps.

  • Senpai, quel est ton nom et ta note d’aptitude académique ?

Horikita —…Je m’appelle Horikita et je viens de la classe 1èreD. Mon évaluation des capacités académiques est un A-. Pourquoi demandes- tu cela ?

  • Vraiment ? Tu es plutôt intelligente. Horikita — Et tu es… ?

Amasawa — Je suis Amasawa Ichika de la classe 2nde  A. J’ai A en ca- pacité académique, un peu comme toi, Horikita-senpai.

C’était une élève intelligente, contrairement à ce que son apparence de petite fille pouvait laisser croire. Horikita vérifia deux fois l’application, juste pour être sûre.

Amasawa — Si tu veux viser la première place, que dirais-tu de faire équipe avec moi ?

Amasawa demanda sans même prendre la peine de vérifier si Horikita disait vrai. Si deux personnes avec une note de A et une note de A- faisaient équipe ensemble, prendre la première place ne serait pas en dehors du domaine du possible. D’autant que Horikita avait intentionnellement baissé ses propres notes pour le bien de Sudou dans le passé, sa note réelle était sûrement plus proche de A. Bien que ce soit un développement inattendu, Horikita pouvait finir par avoir un partenaire avant tout le monde. Après tout, une élève notée A lui avait tendu la main, même si c’était arrivé par hasard. Si Horikita lui demandait de se mettre en binôme avec un élève moins bien noté maintenant, Amasawa fuirait certainement.

Horikita — J’apprécie ton offre, mais ce n’est pas pour moi que je cherche

un partenaire pour le moment. Au lieu de moi, je pourrais peut-être te demander si tu serais prête à t’associer avec lui… ?

Horikita tenta quand même, prenant le risque de présenter Sudou. Ce der- nier, bien qu’un peu perplexe, inclina légèrement la tête en guise de salutation.

Amasawa — Laisse-moi voir, et quelle est la capacité académique de ce Sudou-senpai ?

Horikita — E+. Pas super, certes.

« Pas super » était un sacré euphémisme. Il était en lice pour le prix de la note la plus basse de toute l’année scolaire. Amasawa avait déjà probablement compris ça via l’application.

Amasawa — Je vois~ Donc en gros, tu essaies de lui trouver un partenaire pour éviter qu’il ne se fasse virer d’ici.

Ayant saisi la situation, Amasawa jeta un coup d’œil à Sudou.

Amasawa — E+ ? Oublie la première place. Si nous sommes ensemble, nous finirons probablement par nous classer un peu en dessous de la moyenne.

Sudou — C’est vrai. T’as rien à y gagner.

À ce moment-là, je pensais qu’Amasawa allait aborder le sujet des points privés, mais cela ne fut pas le cas.

Amasawa — Eh bien, puisque tu le demandes, je suppose que ça ne me dérangerait pas d’aider.

Par rapport aux trois gars de tout à l’heure, c’était sans aucun doute une meilleure réponse. Elle bougea ensuite son regard dans ma direction.

Amasawa — Et ce senpai ? A-t-il aussi besoin d’un partenaire ?

Horikita — Sa note est de C, donc il n’est pas aussi prioritaire. Cependant, si Sudou-kun n’est pas assez bien pour toi, je te serais reconnaissante si tu pouvais au moins t’associer avec lui.

Moi — Non, c’est…

Même si Horikita se montrait généreuse, je n’avais pas d’autre choix que de refuser l’idée. Après tout, je ne pouvais pas me permettre de m’associer à une partenaire sans avoir bien étudié la question.

Horikita — Quoi ? Elle ne te convient pas ? Moi — Pas exactement, c’est juste que…

Amasawa — Hé hé. Une petite minute. Je n’ai pas encore dis que j’ac- ceptais de faire équipe avec un de ces deux-là, d’accord ?

Ayant remarqué que la conversation avançait sans elle, Amasawa recadra un peu le débat.

Horikita — As-tu des conditions particulières à ce sujet ?

Amasawa — Conditions, conditions… Oui, je suppose que j’ai le droit d’en poser quelques-unes aussi, hein ?

Horikita aborda le sujet pour faire cracher le morceau à Amasawa le plus tôt possible. Son objectif fondamental de ne pas s’engager dans une bataille financière avec les autres classes n’avait probablement pas changé, mais je suppose qu’il pouvait y avoir matière à réflexion Amasawa proposait un prix relativement bon marché. Il n’y avait plus qu’à prier pour que son prix soit moins excessif que celui de Shiratori et ses amis. Cependant…

Amasawa — Je dirais que j’aime les personnes fortes et puissantes, tu saisis ?

Amasawa sourit de façon diabolique  en évoquant quelque  chose qui  ne

semblait pas avoir de rapport avec l’examen spécial.

Horikita — Mais de quoi tu parles au juste ?

Horikita fronça les sourcils par méfiance, s’attendant à ce que la conversation passe à la négociation de points privés.

Amasawa — Bah, si tu veux, je suis tiraillée pour cet examen… Devrais- je viser la première place et étudier aussi dur que possible, en m’associant à quelqu’un d’intelligent comme  toi,  Horikita-senpai…? Ou devrais-je essayer de la jouer cool et de simplement choisir quel- qu’un que je trouve sympa et intéressant ?

C’était certainement une meilleure décision que de travailler avec quelqu’un qu’on ne pouvait pas voir.

Amasawa — Et je suis particulièrement intéressée par les gars forts et puissants.

À ce moment-là, elle répéta une deuxième fois ce qu’elle avait dit quelques instants plus tôt. La tête d’Horikita tournait, faisant de son mieux pour comprendre ce qu’Amasawa disait.

Horikita — Donc en d’autres termes… tu veux savoir si Sudou-kun est fort ou pas ?

Amasawa — C’est exact. Et je ne parle pas d’être fort mentalement, mais d’être fort physiquement. D’après son physique, on dirait qu’il fait beaucoup de sport et d’autres choses, donc ça me donne une bonne idée de son niveau.

Amasawa se retourna et pointa du doigt Sudou, un élève que ceux ayant un indice académique de A ne regardaient même pas. Bien qu’il était un peu timide, Sudou avait confiance en son corps, alors il hocha la tête et a commencé à poser un peu pour elle.

Sudou — Tu veux t’associer avec moi ?

En disant cela, Amasawa tendit la main pour caresser la joue de Sudou.

Amasawa — B-bon, tu serais mieux avec un A en capacité académique et tout. Enfin… Serais-tu vraiment d’accord pour le faire avec moi ?

Sudou — Si tu es vraiment aussi forte que tu le dis.

Sur ce, elle balada son doigt fin sur la poitrine de Sudou, l’hypnotisant avec son apparence envoûtante.

Sudou — Je-je suis fort.

Amasawa — Tu as confiance en toi, hein ? Je ne déteste pas ça. Horikita — Que veux-tu dire exactement par « fort et puissant » ?

En tant que responsable de la supervision de Sudou, Horikita exprima son incertitude quant à ce à quoi Amasawa faisait référence.

Amasawa — Ça dit ce que ça veut dire. J’aime les gars qui savent se battre. C’est pour ça que je veux m’associer à  quelqu’un  qui  est, genre, gentil et puissant.

Horikita — Si c’est le cas, alors je pense que Sudou-kun sera à la hauteur de tes attentes. Je peux attester de sa force physique.

Amasawa — Je ne serai pas convaincue par de simples mots~ je dois m’en assurer de mes propres yeux.

Horikita —…De tes propres yeux ?

Amasawa — Je veux dire, rassemble tous les gars forts de 1ère et demande-leur de se battre entre eux ou quelque chose comme ça. Ensuite, je viendrai et je m’associerai avec le gagnant.

Horikita — Tu plaisantes ? Il n’y a aucune chance que nous puissions

faire quelque chose comme ça.

Amasawa — Pourquoi pas ? Je suis très sérieuse moi. Sudou — Allons-y, Suzune. On perd notre temps ici.

À présent, Sudou ne pensait pas non plus qu’Amasawa était sérieuse, alors il coupa également court à cette discussion. C’était comme s’il s’en voulait d’être tombé sous le charme séducteur d’Amasawa, même si ce n’était que pour un instant.

Amasawa — Bof. Comme vous voulez !

Elle sous-entendait donc que tout ça lui était bien égal. Elle n’avait certaine- ment pas besoin d’insister pour s’associer à un élève E+ après tout. Étant donné la perfection de son classement et de sa classe, elle aurait probable- ment toujours quelqu’un prêt à payer.

En vrai, on était les grands gagnants dans cette affaire. Si cela se faisait, Sudou obtenait la possibilité de s’associer à une élève classée A. Mais si cela finis- sait par ne pas arriver, tant pis, ça n’aurait été que du bonus.

Horikita — Tu n’es vraiment pas en train de payer notre tête ? Tu es vraiment sérieuse ?

Horikita demanda ça avec un regard qui était la définition-même du sérieux.

Amasawa — Bien sûr que je le suis.

Horikita   —   Je   vois.    Dans    ce   cas,    nous    allons    devoir    t’écouter sérieusement aussi.

Sudou — H-hé… Suzune ?

Amasawa — Bien~ Bien~. Je veux bosser avec quelqu’un de fort.

Horikita — Très bien alors, Sudou-kun, tu devrais accepter son offre !

Sudou — A-attends, Suzune. Il n’y a aucune chance qu’on puisse déclencher une baston comme ça, dans ce lycée. Tu te souviens de ce qui s’est passé l’année dernière ? Ou même plus tôt aujourd’hui au déjeuner, quand ce Hôsen est venu chercher la merde ?

L’année dernière, Sudou s’était battu avec les gars de la classe de Ryuuen, ce qui avait fini par se transformer en véritable drama. Et plus tôt dans la journée, l’agitation était au rendez-vous quand Hôsen était venu nous rendre une petite visite.

Horikita — Il est vrai que les combats ne sont pas quelque chose d’admirable. Cependant, c’est différent quand c’est consenti et fait dans les règles de l’art… N’est-ce pas, Ayanokôji-kun ?

Je pris un moment pour réfléchir aux intentions de Horikita derrière cette question.

Est-ce que ça allait nous causer des problèmes ? Il était évident que oui. Que ce soit pour le gagnant ou le perdant, consentement mutuel ou pas, il n’y avait aucune chance que l’école tolère quelque chose qui se résume à un combat de coq. Cependant, Horikita laissait sous-entendre qu’elle était pour, elle.

Moi — Tu as raison. Il est impossible que le personnel de l’école approuve la bagarre s’il en a vent. Mais si les élèves sont d’accord, alors ça devrait aller.

Je répondis comme si cela ne me posait pas de problème.

Sudou — A-Ayanokôji !

Horikita — De plus, parmi tous les élèves de 1ère, personne ne peut espérer égaler Sudou-kun en combat.

Moi — Ouaip.

Alors  que  Sudou  ne  comprenait  pas  bien,  Horikita  et  moi  animions  la

conversation. L’important ici n’était pas d’accepter le combat, mais de faire en sorte d’avoir l’air convaincus que Sudou était le plus fort sans même avoir à le faire combattre.

Horikita — Pour être honnête, Sudou-kun, c’est une opportunité unique. Normalement, il serait extrêmement difficile pour toi de faire équipe avec un élève de rang A. Cependant, Amasawa-san dit qu’elle serait d’accord pour être ta partenaire. De plus, elle le fait en se basant sur ta force dans un tournoi de combat, une chose pour laquelle tu es meilleur que quiconque. Tu devrais accepter les yeux fermés.

En fait, il fallait avoir à l’esprit qu’il était très peu probable qu’un élève de 1ère, en connaissance des règles, accepte de participer à un combat imprudent comme celui-ci. Encore moins avec Sudou pour adversaire. Autrement dit, même en acceptant cette offre, il y avait de fortes chances qu’aucun combat n’ait lieu. Et, au cas où quelqu’un relèverait le défi, Sudou n’aurait qu’à faire ce qu’il fait de mieux.

Amasawa — Super ! C’est génial ! Je deviens tout excitée là !

Amasawa, qui venait de s’inscrire ici, n’avait naturellement rien compris à tout cela. Elle ne pouvait pas encore comprendre que cet établissement était différent d’un collège ou d’un lycée ordinaire.

Horikita — Cependant, peux-tu d’abord nous promettre une chose ? Si personne ne se présente au combat à part Sudou-kun, tu devras te mettre avec lui.

Avec cela, Horikita cherchait à mettre en avant une stipulation importante. Après tout, si Amasawa n’était pas d’accord avec ça, la discussion ne pouvait plus avancer.

Amasawa — Bien sûr, je te le promets. Si personne ne se présente pour le défier, je considérerai que c’est sa victoire par défaut.

Avec la promesse verbale d’Amasawa en place, Horikita était satisfaite.

Horikita — Tu es d’accord avec tout ça, Sudou-kun ?

Sudou — Ah, oui. Si tu es d’accord avec ça, Suzune, alors je le suis aussi.

Sudou serra les poings et les frappa l’un contre l’autre devant lui.

Pour Horikita, la proposition d’Amasawa devait être le fruit du hasard, et un hasard inestimable.

Amasawa — Bon, je vais diffuser la nouvelle sur le chat général de l’application. Je demanderai à tous ceux qui pensent avoir confiance en leur force de me contacter avant la fin de la journée d’aujourd’hui pour participer.

Sudou — Heh. Tous ceux qui se montreront vont se faire botter le cul.

Bonne réponse, bien que Sudou ne semblait pas comprendre les intentions de Horikita. Il s’excitait à l’idée de se jeter véritablement sur quelqu’un.

Horikita — Pourrions-nous convenir du lieu ? J’aimerais éviter que l’école nous surprenne.

Amasawa — Mhm. Vous, les senpai, savez probablement mieux que moi, alors je vous laisse décider~.

Il semblait qu’Amasawa avait fini de taper son message. Elle se tourna donc vers nous pour une dernière confirmation avant de l’envoyer.

Amasawa — Très bien, avec ça, l’évènement est prêt. Ça vous va ?

Alors que Horikita hochait la tête en guise de réponse, Amasawa nous regarda lentement. Puis, elle éteint l’écran de son téléphone et le remit dans sa poche.

Amasawa — En fait, ce n’est pas grave.

J’avais d’abord pensé qu’elle avait soudainement changé d’avis, mais cela ne

semblait pas être le cas. À en juger par l’expression de son visage, je pouvais voir qu’elle essayait aussi de nous sonder, de nous tester. Horikita et Sudou semblaient d’ailleurs tous deux déconcertés par le changement de rythme soudain d’Amasawa.

Horikita — Qu’est-ce qui ne va pas ?

Amasawa — Même si je publiais l’annonce, je doute que quelqu’un se présente. En regardant le physique de Sudou-senpai et l’attitude de Horikita-senpai et Ayanokôji-senpai, je peux déjà comprendre que la force de Sudou-senpai est de premier ordre parmi les 1ère.

Elle avait réussi à arriver à la conclusion qu’il n’était pas du tout nécessaire de comparer les 1ère par le biais d’un combat.

Il semblait donc que notre petit numéro à Horikita et moi, combiné à la réaction naturelle de Sudou, avait été encore plus efficace que nous l’avions prévu. Mais il ne fallait pas trop baisser notre garde, acquiescer bêtement nous aurait rendus suspects. Horikita simula donc un mécontentement.

Horikita — Ho ! C’est une blague ?

Amasawa — Pas du tout. C’est tellement évident que personne ne va se montrer que ce n’est pas très amusant, non ? Je veux juste profiter de confirmer qu’il est le plus fort de mes propres yeux, c’est tout. Alors s’il te plaît, ne sois pas en colère contre moi, Senpai.

Amasawa appuya son index sur ses lèvres pendant qu’elle réfléchissait un moment.

Amasawa — Je vais quand même vous donner une chance, alors pardonnez-moi.

Bien que Horikita veuille garder le contrôle, elle s’était laissée prendre par la façon unique de faire d’Amasawa. Elle ne semblait pas être très douée pour gérer ce type de personne.

Amasawa — À part les gars forts, je crois que j’aime les gars qui savent cuisiner, qu’en dis-tu ?

Horikita — Cuisiner ?

Sa nouvelle suggestion n’avait, une fois de plus, aucun rapport.

Amasawa — Sudou-senpai, c’est ça ? Tu penses pouvoir me préparer un repas fait maison ? Un repas suuuper savoureux ?

Sudou — Un-un repas fait maison !?

Sudou,    qui   débordait   de   confiance     quelques    instants    plus    tôt,    était pratiquement terrassé par sa demande inattendue.

Amasawa — Bien sûr, non seulement il doit être succulent, mais tu dois aussi faire ce que je te demande.

Sudou — B-bah je n’ai jamais cuisiné un repas de ma vie et─.

Amasawa — Et alors ? Eh bien je suppose que je dois retirer mon offre, hein ?

Horikita préféra intervenir, ne voulant pas laisser cela se produire.

Horikita — Serait-il peut-être possible que je remplace Sudou-kun ?

Amasawa — Bah non. Je rappelle que j’aime les gars qui savent cuisiner. À quoi bon faire équipe si mon binôme ne fait pas de la bonne bouffe ?

En d’autres termes, la capacité à cuisiner n’avait pas d’importance. Si c’était une fille, elle n’allait pas en tenir compte.

Amasawa — Si Sudou-senpai ne peut pas le faire, alors pourquoi ne pas, par exemple, abandonner et aller trouver un de tes camarades de classe ?

Ah ! C’est parce que, même si tu réussissais à trouver quelqu’un assez

rapidement, je ne ferais toujours pas équipe avec Sudou-senpai ?

Amasawa fit un sourire diabolique.

Amasawa — Et si tu essayais de faire de Sudou-senpai un pro de la cuisine maintenant ? Je me demande si tu auras le temps pour ça cependant. Après tout je suis populaire moi, si t’es trop lente, j’aurai sûrement déjà trouvé quelqu’un entre temps !

Ce n’était pas un simple avertissement. Elle disait que, bientôt, elle allait se trouver un partenaire. Il y avait beaucoup d’excellents élèves de 1ère autres que Horikita, après tout. Pourquoi aurait-elle fait une fixette sur Sudou ? En d’autres termes, ce n’était qu’un caprice, une simple impulsion ludique manifestée par la fille nommée Amasawa.

Si elle changeait d’avis, même légèrement, alors tout était fini.

Et puis, penser à un camarade de classe avec de faibles compétences académiques était une chose, mais s’il devait en plus être un homme alpha et doué en cuisine… Personne ne lui venait à l’esprit. Ainsi donc, cette demande d’Amasawa constituait une impasse. Abandonner et tendre la main à d’autres élèves était probablement plus sage.

Voyant que nous étions incapables de lui donner une réponse, Amasawa reprit la parole.

Amasawa — J’ai compris, j’ai compris. Alors, je vais vous rendre un service spécial les gars. Normalement, je voudrais me mettre avec un gars qui est vraiment bon en cuisine, mais… Si tu peux satisfaire mon palais, je suppose que je pourrais envisager de coopérer avec Sudou- senpai pour vous puisqu’il est si fort et tout.

Avec cela, Amasawa nuança un peu sa proposition. Amasawa voulait donc soit un fort combattant, soit un cuisinier compétent. C’était un peu plus simple avec un compromis comme celui-ci.

Amasawa — En faisant comme ça, ce serait un peu comme se mettre en

couple avec un bon cuisinier et un gars fort en combat en même temps !

Donc elle était prête à se mettre avec Sudou tant que ses papilles étaient satisfaites, même si c’était préparé par quelqu’un d’autre. Je me surpris à me demander comment Horikita allait s’y prendre pour répondre à sa requête… Mais le problème était qu’aucun élève de ce genre ne me venait à l’esprit. D’autant que le temps nous était compté, nous n’avions pas le temps de prendre des cours de cuisine.

Horikita — Ayanokôji-kun. Si je ne me trompe pas, tu t’es déjà vanté devant moi d’être bon en cuisine, non ?

À quoi pensait Horikita en me demandant quelque chose comme ça, si ouvertement ? Je ne lui avais jamais dit une chose pareille, et encore moins sur le temps de la vantardise.

Il aurait été facile de le nier, mais il semblait que nous devions être sur la même longueur d’onde ici. Après tout nous avions là une occasion en or.

Moi — Oui, peut-être que la cuisine est mon seul point fort…

Horikita — Et oui. Donc si jamais Amasawa-san est d’accord, est-ce qu’Ayanokôji-kun pourrait faire l’affaire ?

Amasawa — Tant que c’est un garçon, ça n’a pas d’importance pour moi. Mais es-tu vraiment un bon cuisinier ? Tu peux dire ce que tu veux, mais genre, je vais te juger assez sévèrement, d’accord ?

Horikita — Mais bien sûr, il gère ! Moi — Eh bien, oui.

Dès que j’affirmai, Amasawa tapa dans ses mains.

Amasawa — Très bien ! Et si tu me montrais ce dont tu es vraiment capable ? Allons-y maintenant !

La situation se développait bien trop rapidement. Amasawa posait un ultimatum. Elle ne voulait pas me donner l’occasion d’apprendre 2-3 trucs en prolongeant la situation plus longtemps que nécessaire. Elle voulait savoir si j’avais vraiment un talent culinaire ou non.

Dans l’état actuel des choses, comme Horikita avait menti pour garder l’intérêt d’Amasawa, il n’y avait aucun moyen d’accepter comme ça. Si je devais cuisiner avec mes compétences actuelles, elles ne représentaient pas grand-chose, même en étant très indulgent.

Horikita — Même si j’adorerais, pourrais-tu nous laisser un peu de temps ? Ayanokôji-kun et moi, en plus de Sudou-kun, devons encore aider pas mal de nos camarades de classe pour trouver un partenaire. D’autant plus que nos rivaux sont prêts à tous pour nous prendre de vitesse.

Horikita expliqua notre situation, en se demandant si Amasawa allait comprendre.

Horikita — Si possible, j’aimerais qu’on fasse ça vendredi après les cours.

Avec cela, Horikita rejeta en douceur le désir d’Amasawa de se voir présenter son repas maison aujourd’hui, tout en repoussant l’épreuve de plusieurs jours. D’autant que le week-end est plus pratique pour ce genre de choses, généralement.

Amasawa — Je vois. Je ne veux certainement pas prendre tout ton temps, en effet.

À ce moment-là, Amasawa ajouta autre chose.

Amasawa — Je suis d’accord pour le faire plus tard… Ce soir. Cela vous conviendrait-il à tous les deux ?

Horikita — Une élève de 2nde se rendant dans le dortoir des 1ère en pleine nuit entraînerait des problèmes. Des problèmes moraux si le lieu de rencontre se trouvait être la chambre d’un garçon.

Amasawa — Je vois~ Mais attendre le week-end, c’est un peu risqué, tu sais ? Je perdrais ma chance de faire équipe avec une autre senpai… Pas vrai ?

Comme prévu, la suggestion de Horikita d’attendre le week-end ne prenait pas. Ainsi Amasawa nous présenta ses conditions finales, de façon beaucoup plus ferme.

Amasawa — Aller, comme il s’agit d’une rencontre décisive, je vous donne un jour seulement. Si vous ne pouvez pas me servir un repas fait maison après l’école demain, alors faisons comme si cette conversation n’avait jamais eu lieu. Ça te convient ?

C’était probablement le tout dernier compromis qu’Amasawa était prête à faire. J’avais l’impression que nous n’avions pas intérêt à être plus gourmands, au risque de définitivement la perdre. J’espérais que Horikita l’avait compris et n’allait pas tenter de marchander davantage…

Horikita — D’accord. On ne peut certainement pas nier que tu prends un risque. En plus, tu ne veux pas nous donner l’occasion de nous entraîner, n’est-ce pas ?

Amasawa — Oh non, je n’avais même pas pensé à ça !

Horikita — Très bien. Alors puis-je demander que tu respectes quelques autres petites conditions ?

Nous n’avions qu’un jour pour nous préparer. Cependant, c’était ça ou Amasawa nous passait officiellement sous le nez. Cela semblait être un acte de désespoir de la part de Horikita, mais elle énuméra tout de même des conditions.

Amasawa — Oui, je t’écoute.

Amasawa accepta sans hésiter, complètement satisfaite du rendez-vous du lendemain comme elle l’avait elle-même proposé.

Horikita — Cependant, c’est à condition que tu ne changes pas d’avis sur nous comme tu l’as fait plus tôt. Nous ne jouons pas non plus dans la cour des grands.

Amasawa — Ok~ Je te le promets. Si je juge que ses compétences culinaires sont réelles, alors je me mettrai avec Sudou-senpai.

Bien que ce ne soit qu’une promesse verbale, Amasawa répondit par l’affirmative.

Sudou — Je t’en supplie, Ayanokôji ! S’il te plaît, utilise tes talents de cuistot pour m’assurer un partenaire !

J’acceptai étant donné les circonstances, mais je ne m’attendais pas à ce que la situation prenne cette tournure.

Amasawa — Eh bien, que dirais-tu de nous retrouver devant le centre commercial Keyaki à 16h30 après l’école demain, Ayanokôji-senpai ?

Moi — Au centre commercial ? Pas aux dortoirs ?

Amasawa — Le plat que je vais te demander de me préparer sera se- cret jusqu’à demain. Tu vas naturellement devoir acheter les in- grédients, non ?

Je vois. Elle voulait donc dire que tout, des courses à la préparation elle-même, compterait dans son évaluation.

Horikita — Je peux vous accompagner ?

Horikita demanda, cherchant probablement à me donner des conseils pour que notre mensonge ne soit pas exposé. Cependant, son adversaire n’allait pas laisser cela se produire très facilement.

Amasawa — Pas question~ Tu pourrais l’aider par des signaux d’yeux cachés ou d’autres trucs du genre. Je ferai en sorte que mon jugement soit strict~ !

En d’autres termes, demain, j’allais devoir me débrouiller tout seul.

Amasawa — Tu vas t’en sortir, n’est-ce pas Ayanokôji-senpai ? Moi — Oui. Pas de problème.

J’allais sincèrement faire ce que je pouvais, mais c’était devenu une affaire assez délicate.

Amasawa — Bien alors, je te dis à demain. Bye bye~ !!

Satisfaite, Amasawa partit et retourna dans l’escalier.

Moi — Horikita, je pense que tu es déjà au courant, mais…

Horikita — Tiens-toi tranquille pour le moment. Je vais trouver un plan !

Même si elle disait ça, elle n’avait qu’une journée pour le faire. Avec mes compétences minimales en cuisine, à quel point allais-je pouvoir m’en sortir ?

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