CLASSROOM V11 : CHAPITRE 6


Les larmes d’un homme

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Traduction : Nova
Correction : Raitei
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Katsuragi nous avait donnés des informations cruciales, mais cela ne signifiait pas que la classe C avait pris le dessus. Horikita en était bien consciente, car elle essayait de soulager l’anxiété de chacun, une étape à la fois.

Horikita — Attends un instant, Hirata-kun.

Après la fin des cours, Horikita appela Hirata, alors qu’il s’apprêtait à rentrer chez lui pour la journée. C’était la première fois qu’elle lui parlait depuis la fin de l’examen du vote de classe.

Hirata s’arrêta simplement sur ses traces sans se retourner pour lui faire face.

Horikita — Je sais que tu ne veux  probablement pas me parler, mais permets-moi de confirmer quelque chose. Tu n’as pas besoin de t’entraîner pour les événements choisis par notre classe, et je ne prévois pas non plus de te faire faire quoi que ce soit le jour de l’examen. Toutefois, cela pourrait changer en fonction de la situation. Sakayanagi-san est consciente de ton état, il est donc possible qu’elle organise plusieurs événements qui nécessitent un grand nombre de personnes.

Peu importe ce que la classe C pouvait essayer de faire pour Hirata, il est possible que chaque élève doive participer un moment ou un autre.

Horikita — Si cela se produit, que ferais-tu ? Continuer comme ça ? Ou simplement faire le strict minimum et participer à l’effort collectif ? Peux-tu au moins me répondre ?

Cependant, Hirata ne répondit pas. Un lourd silence remplit la classe ; un silence qui ne fut rompu que par le bruit des pas de Hirata s’éloignant.

Horikita — Alors il ne me donne même pas de réponse ?

Lassé d‘Hirata, Horikita détourne simplement son regard comme si elle avait abandonné.

—..Hé, peut-être… Peut-être que nous ne gagnerons pas après tout… Avec Hirata-kun qui agit comme ça et tout.

Je pouvais entendre des chuchotements anxieux venant de certaines des filles. Et les garçons étaient probablement tout aussi inquiets. Après tout, l’homme qui dirigeait la classe était maintenant parti. À maintes reprises, son absence s’était révélée fatale pour la classe.

Horikita me parla.

Horikita — Tu m’as dit qu’il avait juste besoin d’un peu de temps. Mais en fin de compte, il n’a toujours pas changé du tout.

Moi — Je me pose des questions à ce sujet.

Horikita — Quoi… ?

Horikita me regarda avec une expression confuse, mais mon attention était entièrement tournée vers autre chose.

Wang — Hirata-kun ! Attends !

À ce moment-là, je ne savais pas combien de fois j’avais entendu Mii-chan crier comme ça. Elle s’empressa de prendre son sac et le suivit hors de la classe.

Moi — Mii-chan n’a toujours pas abandonné.

Horikita — Pourquoi elle ne l’a pas fait, ça me dépasse complètement.

Moi — Concentre-toi sur ce que tu dois faire, Horikita. Rassembler la classe C et augmenter nos chances de gagner.

Horikita était actuellement la seule personne de la classe capable de le faire. Je quittai la classe moi-même, en suivant Mii-chan. Je les trouvai face à face sur le chemin des dortoirs. Cependant, la scène à laquelle j’ai pu assister était plus une confrontation qu’une scène de soutien. Elle tentait à sa façon de remettre Hirata sur pied.

Wang — S’il te plaît, Hirata-kun. Tout le monde a besoin de ton aide… Al…

Hirata — Mii-chan, arrête-toi. Tu ne peux pas me laisser seul ?!

Hirata lui coupa la parole en grommelant, presque comme s’il se demandait combien de fois il devait lui dire cela pour qu’elle comprenne. Sans aucun doute, ces mots aiguisés lui étaient venus comme un couteau lui transperçant le cœur. Cependant, elle ne semblait pas se décourager. Peu importe le nombre de fois où il l’a repoussée, Mii-chan ne voulait pas abandonner.

Wang — Je ne te laisserai pas tranquille… Pas tant que tu es comme ça, Hirata-kun, je ne peux pas !

Hirata — Alors, que faudra-t-il pour que tu le fasses ? Dis-moi.

Wang — Que, uhm, si tu redeviens comme…

Hirata — Revenir en arrière ? Impossible.

Une fois de plus, la réponse froide d’Hirata entama impitoyablement Mii- chan.

Wang — Non, ce n’est pas vrai ! Je… j’ai confiance, je sais que tu peux revenir à la raison !

Hirata — Et je t’ai dit que c’était impossible, alors arrête !

Wang — Malgré tout, je crois toujours en toi !

Hirata serra le poing. Cela donna l’impression que, selon la situation, il pouvait commencer à devenir violent.

Hirata — Dans ce cas, ramène Yamauchi-kun.

Wang — Eh… ?

Hirata — C’est comme ça qu’on peut faire revenir les choses comme elles étaient avant.

Maintenant que Yamauchi a été expulsé, il ne reviendra probablement jamais. Et, de la même manière, Hirata ne reviendra jamais à ce qu’il était avant. C’était la réalité que Hirata cherchait à transmettre à Mii-chan.

Wang — C’est…

Hirata — J’espère que tu t’en souviendras avant d’essayer de me parler à nouveau.

Hirata lui tourna le dos et commença à s’éloigner, mais Mii-chan ne put s’empêcher de lui tendre la main alors qu’il partait. Elle s’agrippa à son bras droit, désespérant de l’empêcher de partir. Après tout, si elle le laissait se retirer dans son dortoir, elle ne pourrait rien faire de plus pour le convaincre aujourd’hui.

Hirata — Lâche-moi.

Wang — Non !

Malgré le rejet de Hirata, Mii-chan continua à tenir bon. Elle pensait que ses sentiments allaient le toucher un moment où un autre. J’observai la scène de loin, je ne voulais pas me mettre en travers du chemin de Mii-chan en m’approchant trop près d’eux.

Cependant, Hirata soupira ouvertement. Puis, il leva son bras en l’air et le balancé avec force pour se libérer de sa prise.

Wang — Kya !

Pour Hirata, c’était une façon grossière et inhabituelle de gérer la situation. Ce mouvement puissant et soudain provoqua l’effondrement de Mii-chan sur place.

Hirata —…Arrête de m’embêter déjà. Si tu ne le fais pas, je… je vais…

Mii-chan regarda Hirata depuis le sol. La colère qu’Hirata avait dans le regard blessa de nouveau Mii-chan.

Hirata —Je n’ai plus rien à perdre. Si vous continuez à me suivre comme ça…

Rien de ce qu’Hirata avait dit jusqu’à présent ne pouvait être comparé au coup de massue que venait recevoir Mii-chan. Cependant, à ce moment précis, un homme seul passa devant moi. Un homme dont les cheveux blonds et souples flottaient au vent, saupoudré d’un parfum d’eau de Cologne.

Hirata — Hohoho. Alors, on dirait qu’aujourd’hui aussi ça ne va pas fort.  Quel regard disgracieux sur ton visage.

Kôenji provoqua Hirata avec des mots légers et frivoles.

En tant que personne qui rentrait chez lui le plus vite possible, l’apparition de Kôenji ici n’était pas très surprenante.

Kôenji — Oh, ne faites pas attention à moi. Continuez simplement ce que vous faisiez il y a une seconde. Je ne suis là que pour regarder.

Hirata n’était pas du tout assez stupide pour continuer après s’être fait dire quelque chose comme ça. Au lieu de cela, il commença à diriger son hostilité vers l’homme qui l’avait interrompu.

Hirata — Q… Qu’est-ce que tu veux ?

Kôenji — Quelque chose que je veux ? Je ne « veux » rien. Après tout, j’ai déjà tout.

Avec cela, Kôenji commença à passer devant Hirata et Mii-chan, cependant…

Kôenji — Bien que, s’il y a quelque chose que tu pourrais faire pour moi.

Pour Kôenji, c’était juste une formalité sur son passage. Rien de plus, rien de moins.  Les sentiments d’Hirata lui étaient complètement indifférents.

Kôenji — Tu es immonde. Alors pourrais-tu faire en sorte de rester hors de ma vue ?  Si ce n’est plus ton école idéale, pourquoi ne pas partir ?

Du Kôenji tout craché. Il suggérait que Hirata quitte simplement l’école au lieu de continuer à tâtonner comme ça.

Hirata —…Tais-toi. Tu ne sais même pas ce que je ressens.

Kôenji — Je ne sais pas, et je m’en fiche. Cependant, je peux faire une supposition. Tu ne restes pas simplement parce que ton départ nous causerait des soucis non ? Que c’est ridicule.  

Wang — Arrête, s’il te plaît, Kôenji-kun ! Hirata-kun n’a rien fait de mal !

De retour sur pieds, Mii-chan prit la parole, impatiente de mettre fin aux propos impitoyables de Kôenji à propos d’Hirata.

Kôenji — Oops. On dirait que ça ne t’ai pas plu. Mille excuses.

Malgré le sourire sur son visage, Kôenji traita quand même Mii-chan avec un certain respect.

Wang — Cependant, plus vite tu oublieras le petit Hirata, mieux ce sera. Il fait pitié.

Ayant été poussé dans ses derniers retranchements, Hirata ferma les

yeux sur Kôenji et commença à se rapprocher.

Wang — Ne fais pas ça, Hirata-kun !

Mii-chan sentit le changement évident d’état d’esprit d’Hirata et s’interposa entre les deux pour l’arrêter, mais il agit avec  encore plus de force qu’auparavant. Puis, sans même jeter un coup d’œil à Mii-chan, Hirata tendit son bras vers Kôenji. Il essayé de saisir ce dernier par le col de sa chemise, mais Kôenji le saisait rapidement  par le poignet de sa main gauche et le bloqua.

Hirata —Kuh…

Kôenji — Je ne fais pas preuve de pitié envers ceux qui s’en prennent à moi, d’accord ? Je ne veux pas que mon beau visage soit marqué.

Une expression mêlée à la fois de douleur et de rage se dessina sur le visage d’Hirata, peut-être en raison de la force de l’emprise de Kôenji sur son poignet.

Hirata — Tu es… Tu es si irritant Kôenji… !

Kôenji — Je n’ai rien à entendre de quelqu’un qui a fait pleurer une dame.

Kôenji lâcha le poignet d’Hirata et jeta un coup d’œil à Mii-chan, qui était à nouveau à terre.

Kôenji —C’est toi qui l’as renversée, alors ne devrais-tu pas être celui qui l’aide à se relever ?

Hirata —…Ce n’est plus mon problème.

Kôenji — Ce n’est pas ton problème, hm ? Eh bien, tu es plutôt impitoyable.

Mii-chan détourna son regard de Hirata, incapable de le regarder directement.

Kôenji — Ok, c’est comme ça, Hirata boy.

Hirata — Eh, quoi, quoi !?

Kôenji aida élégamment Mii-chan à se relever.

Kôenji — Puisque tu ne vas pas le faire, je suppose que je vais lui en faire l’honneur moi-même.

C’était un homme qui, par nature, était difficile à comprendre, mais cette action soudaine et inattendue a laissé Mii-chan et Hirata sans voix.

Kôenji — Ton cœur a été brisé, et en plus, tu as même été blessée. Et si je t’aidais à te soigner ?

Wang — W-w-w-wha !? Je, uhm, je !? Je ne suis blessé nulle part !!!

Kôenji — Eh bien, il n’y a pas lieu de s’inquiéter. Malgré mon apparence, je suis extrêmement doux.

Ce n’était qu’une supposition, mais quand Kôenji a dit qu’il aiderait à la soigner, il faisait probablement référence à quelque chose de nature plus spirituelle que physique.

Quelque chose comme son cœur brisé. Probablement.

Kôenji s’éloigna d’Hirat, comme s’il essayait de séparer Mii-chan de lui.

Wang — Uhm, euh, s’il te plaît, pose-moi !

Kôenji — Hahaha ! Cela ne suffit pas. Tu es déjà à moi après tout !

Wang — Eeeeeh !?

Hirata jeta un coup d’œil au dos de Kôenji. Kôenji marqua un temps d’arrêt, comme s’il avait senti le regard sévère d’Hirata.

Kôenji — Quelque chose à ajouter ?

En toute honnêteté, j’aurais aimé que Kôenji ignore Hirata à ce stade.

Hirata — Tu n’arrêteras jamais de me tourmenter, hein ?

Kôenji — Non. C’est toi qui tourmentes les gens autour de toi. Moi, au moins, je n’ignorerais pas une fille qui me montre de la gentillesse.

Kôenji recommença à s’éloigner, avec un mépris flagrant pour les protestations de Mii-chan.

Lorsqu’Hirata remarqua que Kôenji se dirigeait vers le dortoir, il partit dans une autre direction. C’était comme s’il ne voulait plus être près d’eux deux.

Pendant un moment, je n’étais pas sûr de qui je voulais suivre, mais j’ai finalement décidé de suivre d’abord Kôenji. De plus, le sac de Mii-chan avait été laissé au sol, alors je le ramassai et suis parti à leur recherche.

Une fois qu’ils se sont approchèrent de l’entrée du dortoir, Kôenji reposa délicatement Mii-chan.

Wang — K-Kôenji-kun, pourquoi… ?

Kôenji — Fufu… Pourquoi en effet, hmm ?

Au lieu de répondre à la question de Mii-chan, Kôenji laissa apparaître un

sourire.

Kôenji — De toute façon, tu devrais renoncer à poursuivre Hirata pour aujourd’hui.

Pendant ce temps, je reposai tranquillement son sac.

Wang — Merci, Ayanokôji-kun… Attends, d’où viens-tu ?

J’aurais pu lui dire qu’elle ne m’avait pas remarqué parce que je suis doué pour effacer ma présence, mais je choisis de ne rien dire.

Kôenji — Je serai là à te surveiller jusqu’à ce que tu montes dans l’ascenseur, ok ?

Wang —…D-d’accord.

De toute façon, ce n’était pas comme si elle savait où Hirata allait aller ensuite. Mii-chan abandonna donc pour l’instant et monta dans l’ascenseur afin de s’éloigner de Kôenji.

Je restai là et regardai Kôenji prendre place sur le canapé du hall.

Kôenji — Maintenant… Que puis-je faire pour toi… Petit Ayanokôji ?

Moi — Pourquoi as-tu commencé à parler à Hirata, là-bas ? Tu n’as fait qu’ajouter de l’huile sur le feu ? Où as-tu agi dans l’intérêt de la classe ?

Kôenji — Il semble que tu ne me comprennes toujours pas, hmmm ? Tsk tsk tsk tsk.

En parlant, il leva la main et me serra légèrement le doigt.

Kôenji — Je ne ferais jamais quelque chose pour le bien de la classe ou quelque chose de ce genre. Après tout, je ne fais que ce que je veux faire. Même si mes actions ont un impact négatif ou positif sur la classe… Ce ne serait rien de plus qu’un effet secondaire.

Un effet secondaire, hein ? En règle générale, Kôenji ne fait que ce qu’il veut faire. La seule exception à cette règle était lorsqu’il risque d’être expulsé.

Kôenji — Son existence est comme une mouche, c’est-à-dire absolument irritante.

Il semblait que ce soit la raison pour laquelle il avait interpelé Hirata de manière inattendue.

Moi — Tu es libre de faire ce que tu veux, mais que feras-tu si un autre examen similaire au vote de classe devait avoir lieu ? Pour être honnête, dans l’état actuel des choses, personne d’autre que toi ne serait plus en danger.

Kôenji — Fufufu. Avec un potentiel comme le mien, ça n’a pas d’importance.

Après avoir vérifié l’écran de l’ascenseur pour s’assurer que Mii-chan était bien descendue, Kôenji se leva.

Kôenji — D’ailleurs, si je ne me trompe pas, tu as été choisi comme chef pour l’examen, hein ?

Moi — Ouais.

Kôenji — Je ne suis pas très motivé, alors évite de me faire participer, s’il te plaît.

Moi — Désolé, mais c’est à Horikita d’en décider. Je n’ai pas mon mot à dire.

Kôenji — C’est l’inverse. En tant que commandant, tu as le droit de prendre cette décision, pas elle.

Il avait certainement raison en ce qui concerne les règles, mais… Il ne semblait pas que j’allais être capable de convaincre Kôenji.

Kôenji — Quoi qu’il en soit, j’espère que tu prendras la bonne décision.

Me laissant avec ça, il monta dans l’ascenseur et retourna dans sa chambre.

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Je décidai de quitter le dortoir et de partir à la recherche d’Hirata.

Il n’était probablement pas retourné dans l’enceinte de l’école, donc il était probablement au centre commercial de Keyaki ou du moins dans les environs. En supposant qu’il ne voulait rencontrer personne, il y avait une forte probabilité qu’il soit dehors quelque part.

Après environ une heure de recherche, je tombai sur sa silhouette caractéristique et solitaire, assise sur un banc extérieur.

Moi — Hirata.

Je m’avançai derrière le banc et, une fois assez proche, je criai son nom.

Hirata — …Ayanokōji-kun.

Sa réponse se fit entendre lentement alors qu’il levait la tête pour me faire face, les yeux encore baissés. Il y avait longtemps que je n’avais pas vu son visage comme ça. Il ne semblait pas dormir suffisamment, car il y avait des cernes sous ses yeux que je n’avais jamais remarquées sur lui.

Moi — Peux-tu nous consacrer un peu de temps ?

En entendant ma demande, les yeux d’Hirata s’ouvrirent légèrement.

Hirata — J’en ai marre de tout ça. De tous ces gens qui me harcèlent encore et encore. Je pensais que tu me comprenais, Ayanokōji-kun. Je pensais que tu saurais me laisser tranquille. Je suis déçu.

Moi — Désolé. Si tu n’aimes pas ça, pourquoi ne me repousses-tu pas comme tu l’as fait avec Mii-chan et ne t’enfuis-tu pas ?

Malgré le risque qu’il prit et la provocation qu’il subit, Hirata ne se leva pas.

Hirata — Pourquoi faire ? On me retrouvera. Je n’ai nulle part où me cacher dans cette école de toute façon. Je suis si fatigué aujourd’hui que je n’ai même pas l’énergie de m’enfuir. Mais… je ne pense pas pouvoir répondre à tes attentes non plus.

Dans ce court laps de temps, plusieurs autres étudiants avaient dû essayer de l’aborder. Qu’ils lui expriment leur inquiétude ou qu’ils l’encouragent, cela avait dû être insupportable pour lui. Bien que je ne sache pas exactement « qui » lui avait tendu la main, je pouvais imaginer ce qu’ils lui auraient dit. J’étais sûr qu’ils avaient tous essayé de le réconforter gentiment et de guérir son cœur brisé.

Là, sur un banc à la périphérie du campus, nous étions tous les deux assis ensemble.

Hirata — Alors… tu avais quelque chose à dire, n’est-ce pas ?

Je savais déjà comment Hirata allait gérer cette conversation. Il allait s’asseoir et écouter, laissant mes mots entrer dans une oreille et sortir de l’autre.

Moi — Je veux que tu me racontes ton histoire.

Hirata — Eh ?

Hirata répondit avec douceur. Il s’attendait probablement à ce que je lui offre des mots de sympathie.

Moi — Comment tu étais enfant, quelles était ta mentalité. J’aimerais en savoir plus.

Hirata —…Pourquoi ?

Ishizaki — Qui sait. Je suppose que je veux juste savoir pour une raison quelconque. J’ai du mal à te donner une raison.

Hirata poussa un profond soupir avant de secouer lentement la tête.

Hirata — Je n’ai pas l’énergie nécessaire pour recasser le passé en ce moment. Il n’y a rien à dire.

Moi — Tu n’as pas l’énergie ? Pourquoi ?

Hirata — Pourquoi… ? C’est…

Il se retourna et me regarda comme pour se demander pourquoi je ne connaissais pas déjà la réponse à cette question.

Moi — Pourquoi ?

Je répétai la question, en ignorant le regard qu’il m’a lancé.

Hirata —…C’est parce que Yamauchi-kun a été expulsé.

Il était forcé de dire des choses qu’il ne voulait pas dire. Hirata parla comme s’il avait été très offensé, car il connaissait bien mes intentions.

Hirata — Tu me fais dire des ces choses.

Moi — J’étais juste curieux. Je m’excuse si tu as été offensé.

Hirata — …C’est bon.

Hirata soupira une fois de plus, manquant de motivation pour poursuivre la conversation. Il était assis, le dos courbé, et secouait la tête d’un côté à l’autre. Me suppliant de le laisser tranquille. Me priant de cesser de m’en soucier.

Moi — Quel est le rapport entre l’expulsion de Yamauchi et le fait de ne pas parler de ton passé ?

Confrontée à ma demande obstinée de réponse, Hirata laissa transparaître pour la deuxième fois une expression abasourdie.

Hirata — Mon passé n’a pas d’importance en ce moment, non ?

Moi — Pas nécessairement.

Je continuai immédiatement, en refusant à Hirata toute échappatoire.

Moi — Avoir un de ses camarades de classe expulsé est certainement désagréable. Presque tout le monde serait d’accord avec cela. Mais nous n’avons pas le luxe de le regretter éternellement. L’examen arrive à grands pas. Non seulement Horikita et Kushida, mais aussi Ike et Sudou, essaient de se mettre au boulot et de se battre. Et toi, Hirata ? Tu es tellement accroché à l’expulsion de Yamauchi, et même si tu essayais de coopérer…

J’arrêtai volontairement de parler pendant un moment. Et puis, je changeai de sujet pour lui montrer que je n’avais plus vraiment envie de parler de ce qui s’était passé.

Moi — Ce que je veux savoir, c’est ce qui s’est passé dans ton passé qui tu as inculqué ce sens des valeurs.

Hirata — À quoi bon demander cela ? Penses-tu vraiment que je vais te le dire ? »

Moi — Oui. Parce que, tel que tu es maintenant, tu veux désespérément que les autres sachent tout sur toi.

En vérité, il voulait certainement se confier et tout évacuer. Il avait fini comme ça parce qu’il n’avait pas trouvé le moyen de le faire.

Je lui parlais en appuyant sur le regard. Je le regardais avec force, presque comme si je le menaçais de parler. En voyant ça, un sentiment de peur s’installa dans son cœur.

Hirata — Je comprends enfin la raison, la vraie raison pour laquelle Karuizawa-san avait décidé de tout te révéler, Ayanokôji-kun. Elle a vu tes yeux… non, tu les lui as montrés. Ces yeux, et cette profonde et sinistre obscurité qui s’est répandue à l’intérieur…

J’ai lentement rongé l’obscurité qui habitait Hirata. Cet homme n’attendait pas simplement de mourir. Jour après jour, il priait pour que quelqu’un vienne le sauver. Tout ce qu’il pouvait faire était d’atteindre la soie de l’araignée noire qui pendait devant lui afin de revenir des profondeurs de l’enfer.

Hirata — Je t’en ai déjà parlé une fois, je crois… De mon ami dont j’étais proche depuis l’enfance ? Celui qui a commencé à se faire intimider dès le collège ?

Moi — Oui. Il s’appelait Sugimura, c’est ça ?

Hirata — Et en plus tu t’en souviens.

C’était précisément parce que je connaissais cette histoire que j’avais pu prédire l’état mental d’Hirata. À l’époque, il avait voulu aider son ami, mais il avait eu peur de devenir à son tour cible des moqueries. Il s’était  donc contenté de regarder ce qui se passait sur la touche. Et…

Hirata — Mon ami… a fini par faire une tentative de suicide en sautant du haut d’un immeuble.

Il commençait probablement à se souvenir de ce qui s’était passé à l’époque. Peu à peu, il commença à se confier.

Hirata — Actuellement, il est entre la vie est la mort.

Hirata serra ses mains, l’une contre l’autre.

Hirata — Mes décisions l’ont amené à se suicider. Le poids de mes péchés ne disparaîtra jamais.

Moi — Ce n’est pas entièrement de ta faute. En fait, la faute incombe principalement aux brutes.

Hirata — Bien sûr, mais je pense qu’être spectateur me rend tout aussi coupable.

Hirata avait dit quelque chose de similaire lorsque nous étions sur le bateau de croisière. C’était la raison pour laquelle il s’efforçait toujours de sauver ceux qui l’entouraient. En fait, à chaque fois que la classe rencontrait des problèmes, Hirata était toujours la première à intervenir. Il était le genre d’homme qui ne ménageait pas ses efforts pour trouver une solution. Par exemple, à l’époque où Sudô s’était battu contre ces types de la classe D, ou quand Kei et lui ont fait semblant d’être en couple.

Cependant, il y a encore des choses que je ne m’expliquais pas.

Hirata — Je comprends que ça te paraisse fou.

Sans se retourner pour me regarder, Hirata continua.

Hirata — À l’époque où mon ami a tenté de se suicider. En fait, il y avait plus que ça…

Il n’en avait pas parlé pendant la croisière.

Hirata — Lorsqu’il a tenté de se suicider en sautant d’un immeuble, je pensais que  tout était enfin terminé. Qu’après avoir servi si lourdement d’exemple, il n’y aurait plus de brimades dans notre école. Mais j’étais naïf. À partir de ce jour, j’ai vu par moi-même l’insondable obscurité de la nature humaine.

Son corps trembla et je pus voir une sorte d’impulsion meurtrière traverser ses yeux.

Hirata — Les brutes avaient choisi une nouvelle cible, et cette fois, c’était un de mes propres camarades de classe.

Alors qu’il prenait une profonde inspiration pour réprimer ses émotions, Hirata commença à se parler à lui-même sur un ton feutré.

Hirata — Je ne pouvais pas le croire. Quelque chose d’aussi horrible venait de se produire, et pourtant l’intimidation avait déjà recommencé. Un de mes camarades de classe, qui n’avait été rien d’autre qu’un spectateur innocent, avait commencé à subir le même traitement que mon ami. Et en plus, certains de nos camarades de classe qui n’avaient pas été impliqués dans les brimades commencèrent à les rejoindre.

L’ampleur de l’intimidation s’était encore étendue.

Moi — Si la personne au bas de l’échelle sociale est partie, il est tout à fait naturel que quelqu’un doive prendre sa place. D’une certaine manière, cela fait partie de l’ordre naturel des choses.

Hirata — Je savais que je ne pouvais pas laisser l’histoire se répéter. Je savais que je devais absolument l’arrêter.

Hirata — Alors… tu as pris des mesures ?

Hirata hocha la tête plusieurs fois.

Hirata — Je l’ai fait d’une certaine manière afin d’éviter de répéter les mêmes erreurs.

Hirata leva lentement la tête et regarda au loin devant lui.

Hirata — Eh bien, pour dire les choses simplement, j’ai essayé de contrôler la classe par la peur.

Moi — Toi, vraiment ?

Hirata — Oui. Je ne suis pas particulièrement doué pour les combats comme Sudô-kun et Ryûen-kun. Cependant, il n’y a pas beaucoup de gens qui peuvent sérieusement frapper quelqu’un. Même si j’étais assez sérieux pour donner un coup de poing, personne n’était prêt à me frapper en retour. Je me tenais seul au sommet tandis que le reste de la classe s’asseyait en bas. En faisant cela, je cherchais à me débarrasser de l’intimidation. Chaque fois que les choses commençaient à déraper, j’intervenais. J’ai donné aux deux parties une punition égale, une douleur égale. Mes actions n’étaient pas différentes de l’intimidation. Mais ça nous avait permis d’atteindre temporairement d’atteindre la paix sociale.

Hirata était probablement bien conscient que ses actions n’étaient en aucun cas de la justice. Que ce qu’il avait fait était mal. Mais même ainsi, il ne voulait pas reconnaître un monde où les gens autour de lui étaient maltraités.

Hirata — Au vu de ce qui s’est passé… je me demande si j’ai fini par gâcher l’année de tout le monde. Ils se sont juste transformés en robots sans vie qui ne sourient plus. À l’époque, on en parlait dans toute la ville… C’était le scandale local.

Moi — Comment l’école a-t-elle fini par y faire face ?

Hirata — Leur réaction a été assez inédite. Ils ont défait et refait toutes les classes en mélangeant tout le monde, moi y compris. Nous avons également été placés sous stricte surveillance jusqu’au jour où nous avons obtenu notre diplôme.

Avec un scandale aussi célèbre, ilétait normal qu’il finisse par attirer beaucoup d’attention Dans ce cas, il était impossible que ce lycée n’en ait pas eu vent, n’est-ce pas ? Non, c’est justement pourquoi Hirata était là où il était.  Quoi qu’il en soit, je pouvais enfin comprendre pourquoi Hirata avait été placée en classe D.

Moi — Tu ne poux pas tu pardonner d’avoir laissé Yamauchi se faire prendre pour cible, n’est-ce pas ?

Hirata — Oui… Je pensais que tant que je n’en avais pas connaissance, je pouvais faire semblant de ne pas savoir. J’avais voulu garder le silence sur ce sujet jusqu’au jour du vote.

En fin de compte, les actions d’Horikita à l’époque ont fait qu’il avait été marqué comme inutile.

Hirata — Je suis juste inutile. Je n’aurais jamais d’unir la classe dès le départ. Malgré tout ce que j’ai fait, je n’ai pas pu protéger Yamauchi-kun… Tu le sais probablement déjà, Ayanokôji-kun, je ne peux tout simplement plus le faire. Afin de protéger quelqu’un, j’ai même pensé à utiliser à nouveau des tactiques de peur. Je n’ai visiblement pas appris de mes erreurs…

La voix d’Hirata tremblait. Son cœur était sur le point d’exploser en mille morceaux. Il estimait que la classe entière devait partager la charge, dans les bons comme dans les mauvais moments. Il ne pouvait pas supporter l’idée que quelqu’un souffre, que quelqu’un disparaisse. Oui, il s’était probablement toujours remis en question à chaque fois que quelque chose se produisait. Et il le fera probablement toujours.Il n’était pas clair s’il s’était confié à Mii-chan et aux autres étudiants et s’il l’avait fait, dans quelle mesure. Cependant, je pouvais facilement imaginer le genre de choses qu’il aurait pu entendre.

— Tu n’y pouvais rien.

— Ce n’est pas de ta faute, Hirata-kun.

— Yamauchi ne peut s’en prendre qu’à lui-même.

N’importe qui avait dû lui dire ce genre de banalités, et ça ne l’aidait pas. Il était inutile de dire à Hirata de blâmer la personne qu’il voulait protéger. Au contraire, c’était contreproductif.

Moi — Il y a quelque chose que je veux te faire comprendre. Ce n’est pas la faute d’Horikita si Yamauchi a été expulsé de l’école, et, bien sûr, ce n’est pas non plus la mienne. Tu le sais, n’est-ce pas ?

Hirata — …Oui. C’était inévitable. Nous n’aurions rien pu faire. …Et je ne t’en blâme pas non plus.

Il ajouta tranquillement cette dernière partie. Pour Hirata, on aurait probablement dit que je me justifiais.

Moi — Selon tu, qui est responsable du départ de Yamauchi de la classe C ? De cette école ?

Hirata — Je pense… Qu’il n’a personne à blâmer à part lui-même.

C’était la conclusion à laquelle Hirata était parvenu, bien qu’il ne veuille pas l’admettre. Yamauchi avait subi les conséquences de ses propres actions. L’expulsion était la conséquence naturelle de son manque de capacités et de sa paresse.

Moi — Ce n’est pas vrai.

Je nia. Je mis carrément de côté l’idée naïve d’Hirata.

Moi — C’est ta faute si Yamauchi a été expulsé, Hirata.

Hirata — …!

Il leva la tête et me regarda L’expression de son visage me disait qu’il ne pouvait pas comprendre ce que je disais.

Moi — Si tu voulais vraiment sauver Yamauchi, tu aurais dû faire tout ce qui était en ton pouvoir pour y arriver.

Hirata — Mais j’ai fait de mon mieux ! Je n’aurais rien pu faire de plus !

Moi — La classe B d’Ichinose n’a pas perdu une seule personne.

Hirata — Mais c’est parce qu’elle était un cas particulier. Nous n’avions pas beaucoup de points privés comme elle.

Moi — Dans ce cas, le problème est que tu n’as pas réussi à mener la classe comme il faut. Tu aurais dû accumuler des points l’année dernière comme Ichinose pour pouvoir sauver quelqu’un qui est sur le point d’être expulsé.

Ainsi, Yamauchi n’aurait pas été expulsé et il y aurait encore quarante personnes dans notre classe.

Hirata — Impossible. Nous avons perdu tous nos points de classe juste après nous être inscrits ici. Et, même si nous ne l’avions pas fait, il n’y aurait eu aucune chance que nos camarades de classe acceptent de nous remettre leurs points. Tu le sais, non ?

Moi — Entre finir avec zéro point de classe et ne pas mener la classe, dans un sens ou dans l’autre, c’est toujours ta responsabilité.

Peu importe les tentatives d’évasion d’Hirata, le fait que ce soit sa faute n’allait pas changer.

Hirata — Ça n’a vraiment aucun sens.

Moi — Oui, ça n’a pas de sens. Mais on ne peut rien y faire, tu avais choisi cette voie. Tu aurais dû garder pour toi ce fantasme de chevalier blanc si tu n’étais pas capable de faire que ça fonctionne. On ne projette pas ses sentiments sur son entourage sans en assumer les conséquences.

Hirata — Je… Je…

Moi — Je me suis fait une fausse idée de toi. Je pensais que tu étais un étudiant d’honneur, un homme de caractère qui était très respecté par beaucoup de nos camarades de classe. Mais, je suppose que tu ne l’es pas. Tu n’es qu’un étudiant superficiel et incompétent qui fait des promesses en l’air. Voilà, Hirata Yôsuke, le type de personne que tu es.

J’avais volontairement grossi le trait. Bien entendu qu’il n’était en aucun cas une personne incompétente. Au contraire, Hirata était une personne si exceptionnellement talentueuse que ses capacités allaient bien au-delà de ce que l’on attendait d’un lycéen de 2nde. Il n’y avait rien de mal à ce qu’il dise qu’il voulait protéger tout le monde, et ce n’était pas parce qu’il n’y était pas parvenu qu’il était responsable. Mais, malgré cela, je choisis quand même de le blâmer.

Je le mis sous forte pression, le poussant sans cesse dans ses derniers retranchements jusqu’à ce qu’il craque.  Est-ce que je faisais cela pour Hirata ? Non. Est-ce que je cherchais à lui donner les moyens de mieux protéger tout le monde ? Non.Il n’y avait aucun moyen de protéger tout le monde. Et il était certain qu’il y allait encore y avoir d’autres expulsions à un moment donné, plus tard. Je faisais cela parce que, quand ces moments allaient arriver,, Hirata allait être nécessaire pour que la classe fonctionne bien.

Moi — Combien de temps vas-tu continuer à rêver ?

Hirata n’avait tout simplement pas changé depuis le collège. Il n’avait pas cessé de faire ce qu’on attendait de lui.

Moi — C’est toi qui a choisi d’être ici, c’est à toi de choisir si tu veux continuer ou pas.

Hirata — C’est… C’est ta vraie nature, n’est-ce pas ? Tes mots sont si terribles, impitoyables, froids…

Je pouvais voir des larmes jaillir de l’œil droit d’Hirata. Et peu de temps après, il était assis là, pleurant devant moi.

Moi — Tu es libre de souhaiter ce que tu veux. Mais si tu veux  vraiment que tes souhaits se réalisent, bas-toi pour eux jusqu’au bout. Donne-toi les moyens de faire que ça marche. S’il y a des expulsions en cours de route, tu n’as pas d’autre choix que de les accepter. Malgré tout, tu dois continuer à aller  de l’avant.

Hirata — Comme c’est cruel…

Moi — Si tu continues comme ça, les gens de la classe vont prendre du retard et disparaître les uns après les autres. C’est pourquoi, si tu vas de l’avant et que tu gardes un œil sur ton objectif, tu pourras au moins limiter les pots cassés.

Il faut beaucoup de courage pour diriger les autres. On ne sait jamais à quel genre d’obstacles on peut être confronté, et on peut toujours tomber à tout moment.

Hirata — Mais… Alors… Comment évacuer ses frustrations… ? Dois-je continuer à avancer tout seul ? Balancer de la poudre aux yeux aux autres ?

Moi — Pas du tout. Lorsque tu es en difficulté, tu peux compter sur tes camarades de classe. Horikita, Kushida, Sudô et Ike, Mii-chan et Shinohara… Peu importe qui. Tu peux exprimer tes frustrations à qui tu veux, nous sommes tous sur le même bateau.

Il n’y a pas de règle qui stipule que les dirigeants ne sont pas autorisés à faire part de leurs difficultés. Les personnes qui se tiennent derrière eux peuvent toujours être là pour donner un coup de main au cas où ils seraient sur le point de tomber. Nos camarades de classe devaient être plus que disposés à écouter Hirata exprimer ses frustrations.

Hirata — Je… je… je me demande… si c’est bien pour quelqu’un comme moi de diriger tout le monde… ?

Moi — C’est bon. Comme tu es maintenant, tu es plus que disposé à le faire.

Je plaçai ma main sur son épaule. Avec ce petit geste, d’autres larmes commencèrent à couler. Pour enterrer le passé. Pour se débarrasser une fois pour toutes de l’énorme et encombrante charge que portait Hirata. Lui, qui était resté coincé et incapable de bouger, pouvait à nouveau se tenir debout sur ses deux pieds.

Hirata — Merci… Merci, Ayanokôji-kun…

Il s’inclina tellement de fois à en perdre la tête, d’innombrables larmes coulant de son visage. Les hommes sont des créatures complexes qui ne peuvent pas pleurer très facilement devant les autres. C’est pourquoi je désirais ce genre d’amitiés où personne n’était obligé de cacher ses larmes à l’autre.

Quant à cette histoire,  il n’y avait plus rien à ajouter.  Tout ce dont il avait besoin était d’un ami à ses côtés, quelqu’un à qui se confier. Tant qu’il le faisait, il pouvait se relever.

2

A l’aube, le jour suivant arrivait.

L’examen spécial final de l’année scolaire approchait à grands pas.

Lorsque j’arrivai en classe, Hirata était introuvable. L’expression de Mii-chan était également encore un peu troublée. Malgré le fait que tout le monde essayait de ne pas penser à lui, personne ne pouvait s’empêcher de s’inquiéter. Et puis lui, le personnage indispensable pour toute la classe C, se présenta enfin.

À ce stade, tout le monde hésitait à le regarder.

Wang — S-salut… Hirata-kun.

Mais, bien sûr, Mii-chan leva la main et le salua en premier. Elle retenait sa tristesse, se donnant à fond pour se forcer à sourire. Ayant remarqué cela lui-même, Hirata s’approcha d’elle.

Wang — …!

Mii-chan se figea un instant, se rappelant les événements de la veille. En voyant sa réaction, Hirata baissa la tête de tout son cœur pour s’excuser.

Hirata — Bonjour, Mii-chan. Je suis désolé pour ce qui s’est passé hier. Je t’ai fait quelque chose de terrible.

Wang — …Eh ?

Les mots d’excuse d’Hirata étaient empreints d’émotion.

Hirata — Et je t’ai ignoré tout ce temps, alors que tu remuais ciel et terre pour me réconforter… Je suis tellement désolé.

Wang — C’est, euh… Je suis complètement…

Il n’y avait pas que Mii-chan, toute la classe était sans voix devant le changement de comportement soudain d’Hirata.

Hirata — Tous les autres aussi… Bonjour !

Hirata était venu à l’école avec un sourire si brillant et plein d’énergie que ses actions passées ne ressemblaient à rien d’autre qu’à une hallucination collective.

— H-Hirata-kun ?

Hirata — Je vais bien maintenant. Vraiment, tout va bien.

Tout en parlant, il rassura Mii-chan avec un doux sourire sur son visage. Puis, il se tourna et s’inclina devant toute la classe.

Hirata — Il est peut-être trop tard pour s’excuser à ce stade, mais… Si tout le monde est d’accord, j’aimerais faire ce que je peux pour aider la classe à nouveau, à partir d’aujourd’hui.

Hirata parla sans relever la tête.

Pendant plusieurs secondes, tous, garçons et filles, échangèrent des regards, incapables de comprendre ce qui venait de se passer. Mais…

  1. Hirata-kun !!

Au début, quelques filles se précipitèrent aux côtés d’Hirata. Mais, peu après, il était entouré de la plupart de ses camarades de classe. Avec le retour tant attendu d’Hirata, tous les élèves de la classe étaient aux anges.

Horikita — Que s’est-il passé ?

Horikita se retourna et me demanda. Elle était restée à sa place, incapable de comprendre la scène qui se déroulait devant elle.

Moi — C’est toi qui avais parlé d’effort collectif, non ?

Horikita — Certes, mais se forcer est contre-productif aussi…

Moi — C’est l’impression qu’il donne selon toi ?

Horikita — Non, il m’a l’air sincère.

Moi — Certaines personnes ont besoin d’un peu plus de temps pour digérer certaines choses. Certains se reparlent dès le lendemain d’une grosse dispute comme s’il ne s’était rien passé.

Les relations humaines étaient comme ça. Après avoir accepté un accueil chaleureux du reste de la classe, Hirata se retourna et approcha de son dernier adversaire, Horikita.

Hirata — Salut, Horikita-san.

Il regardait Horikita avec des yeux clairs et honnêtes.

Hirata — O-oui. Bonjour.

Peut-être Horikita était-elle vraiment surprise d’à quel point Hirata rayonnait.

Hirata — Je pense que ce que je disais était vrai lors de notre confrontation. En ce sens je ne regrette rien.

Horikita — …Je vois.

Hirata — Mais… Je pense que tu étais dans le vrai aussi. Ou, non, c’était toi qui avais raison même.

C’était une chose qu’il ne pouvait tout simplement pas accepter à l’époque. Mais maintenant, il s’était fait à l’idée.

Hirata — Mais je ne pouvais pas l’admettre, sur le coup.

Horikita — Tu t’es cogné la tête ou quoi ? Tu es complètement différent d’hier. Et je n’ai pas l’impression que tu payes ma tête non plus.

Malgré les soupçons d’Horikita, Hirata laissa tout simplement apparaître un sourire insouciant.

Hirata — Je vais faire de mon mieux pour regagner la confiance que j’ai perdue. J’aimerais que tu me briefes plus tard sur l’examen, si ça ne te dérange pas.

Horikita — Je comprends. Je vais te mettre à la page et testerai pour voir si tu es réellement à la hauteur. Est-ce que ça te convient ?

Hirata — Oui, bien sûr.

Hirata lui tendit la main comme pour un ultime symbole de réconciliation, symbole qu’Horikita accepta.

Par la suite, Hirata fut une fois de plus submergé par ses pairs, les uns après les autres. La classe était devenue si lumineuse et joyeuse qu’il était difficile d’imaginer qu’elle était encore en proie aux ténèbres et au désespoir il y a quelques minutes à peine.

Horikita — Quoi qu’il en soit, je suppose que nous sommes enfin prêts à faire face à l’examen spécial.

Moi — Je suppose que oui.

On peut dire que le retour d’Hirata était le Wanglleur soutien que la classe C pouvait espérer.

Kôenji, en revanche, était le seul à ne pas sembler être affecté par ce phénomène.

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